P6_TA(2008)0581 Rapport spécial n° 8/2007 de la Cour des comptes européenne relatif à la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée Résolution du Parlement européen du 4 décembre 2008 sur le rapport spécial de la Cour des comptes n° 8/2007 relatif à la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée (2008/2151(INI)) Le Parlement européen, – vu le rapport spécial de la Cour des comptes n° 8/2007 relatif à la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée, accompagné des réponses de la Commission1, – vu la décision 2007/436/CE, Euratom du Conseil du 7 juin 2007 relative au système des ressources propres des Communautés européennes2, – vu l'article 45 de son règlement, – vu le rapport de la commission du contrôle budgétaire et l'avis de la commission des affaires économiques et monétaires (A6-0427/2008), A. considérant que la fraude et l'évasion en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ont non seulement une incidence sur le financement des budgets des États membres mais aussi sur le système de ressources propres de l'Union dans la mesure où toute réduction de la ressource propre qu'est la TVA doit être compensée par une augmentation de la ressource propre fondée sur le revenu national brut (RNB), aussi les distorsions causées par la fraude à la TVA affectent-elles l'équilibre général du système des ressources propres, B. considérant que, dans sa communication du 31 mai 2006 sur la nécessité de développer une stratégie coordonnée en vue d'améliorer la lutte contre la fraude fiscale (COM(2006)0254), la Commission relevait que les États membres ne tiraient pas assez parti des possibilités de coopération administrative ouvertes par le renforcement du cadre juridique en vertu du règlement (CE) n° 1798/20033 et estimait que le niveau d'utilisation de la coopération administrative n'était pas en rapport avec le volume du commerce intracommunautaire, C. considérant que l'analyse faite par la Cour des comptes dans son rapport spécial n° 8/2007 de la question de savoir si les échanges d'informations entre les États membres sont réalisés en temps opportun et de manière efficace et si des structures et des procédures administratives appropriées sont en place pour soutenir la coopération administrative confirme que l'objectif principal du règlement (CE) n° 1798/2003, à savoir une coopération administrative efficace pour lutter contre la fraude à la TVA, n'a pas été atteint, 1. se félicite du rapport spécial n° 8/2007 de la Cour des comptes qui constitue une évaluation 1 2 3 JO C 20 du 25.1.2008, p. 1. JO L 163 du 23.6.2007, p. 17. Règlement (CE) n° 1798/2003 du Conseil du 7 octobre 2003 concernant la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée (JO L 264 du 15.10.2003, p. 1). . indépendante de la coopération administrative dans la lutte contre la fraude et l'évasion en matière de TVA et qui analyse les performances des États membres et le rôle de la Commission de manière très détaillée; conclut, à la lumière des constatations de la Cour des comptes, que le règlement (CE) n° 1798/2003 ne constitue pas un outil de coopération administrative efficace étant donné que plusieurs États membres entravent sa mise en œuvre et que le rôle de la Commission est limité; Quantifier la fraude à la TVA 2. est conscient du fait que le volume réel de la fraude et de l'évasion en matière de TVA est difficile à évaluer car de nombreux États membres ne recueillent pas ces données ou ne les publient pas; relève que, selon les estimations citées par la Cour des comptes, les moinsvalues de TVA se sont élevées à 17 000 000 000 EUR en Allemagne en 2005 et à 18 200 000 000 EUR au Royaume-Uni pour l'année fiscale 2005-2006; observe que le volume de la fraude à la TVA pourrait dépasser le montant du budget annuel total de la Communauté; 3. se félicite que la Commission ait pris l'initiative de lancer une étude visant à obtenir des estimations fiables du montant de la fraude fiscale, y compris la fraude à la TVA, dans les différents États membres; invite la Commission à informer les commissions parlementaires compétentes des conclusions de l'étude dès qu'elles seront disponibles; 4. invite instamment le Conseil et la Commission à élaborer en première priorité une démarche commune afin de quantifier et d'analyser la fraude à la TVA, ce qui doit permettre d'évaluer si les mesures prises par les États membres pour lutter contre la fraude et l'évasion en matière de TVA sont efficaces ou si elles n'ont pour effet que d'entraîner un transfert de la fraude à la TVA vers d'autres secteurs économiques ou d'autres États membres; 5. demande au Conseil, à la Commission et aux États membres de tenir pleinement compte des recommandations faites en décembre 2007 par la commission de contact des institutions supérieures de contrôle de l'Union européenne, au nombre desquelles figurent des propositions pour que les États membres améliorent leurs estimations et pour qu'un modèle unique pour l'estimation de la fraude à la TVA soit élaboré; Les autorités des États membres peuvent mieux faire 6. est préoccupé par les déficiences relevées par la Cour des comptes en matière de coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la TVA; 7. est préoccupé par le fait que la Cour des comptes a relevé que, dans certains États membres, les conditions minimales indispensables pour une coopération efficace n'étaient par réunies; relève en particulier les lacunes suivantes: - près de la moitié des demandes d'informations d'un État membre à un autre sont restées sans réponse dans le délai de trois mois actuellement en vigueur, - la structure organisationnelle des bureaux centraux de liaison, c'est-à-dire les principaux canaux d'échange d'informations, a contribué aux retards; l'Italie et les Pays-Bas ont éclaté leur bureau central de liaison en plusieurs départements qui ne sont pas coordonnés de manière efficace et l'Allemagne a scindé son bureau central de liaison en plusieurs unités sans en informer les autres États membres, - il y a des écarts importants entre le nombre de demandes d'informations qu'un État membre prétend avoir reçues et le nombre de demandes que d'autres États membres affirment lui avoir envoyé; l'Italie déclare avoir reçu 54% de demandes de moins, et l'Allemagne 32% de demandes de plus, que ce que d'autres États membres affirment leur avoir adressé en 2005; 8. demande instamment aux États membres de garantir le respect des délais dans les échanges d'informations sur demande; est convaincu que les modifications proposées à la directive sur la TVA1 et au règlement (CE) n° 1798/2003 visant à raccourcir les délais de collecte et de transmission d'informations ne produiront pleinement leurs effets que si les États membres qui ne l'ont pas encore fait mettent en place des mécanismes de contrôle afin de garantir que les réponses aux demandes sont données dans les délais; demande à la Commission de l'informer des progrès réalisés par chaque État membre dans la mise en place des mécanismes de contrôle et d'en évaluer l'efficacité; 9. invite le Conseil à se pencher sur les écarts entre le nombre de demandes d'informations qu'un État membre prétend avoir reçues et le nombre de demandes que d'autres États membres affirment lui avoir envoyées, et à résoudre d'urgence ce problème; 10. recommande à la Commission que, dans leurs programmes nationaux de réforme relevant de la stratégie de Lisbonne, les États membres rendent compte de la mise en œuvre des obligations d'information aux autres États membres, et estime que si la transmission d'informations d'un État membre à un autre fait systématiquement l'objet de retards, il faut que la Commission engage une procédure en manquement à l'encontre de l'État membre qui retarde la transmission des informations; 11. invite la Commission à faciliter davantage l'échange de meilleures pratiques et la coordination entre les États membres dans le domaine de l'organisation de la coopération administrative; 12. invite les États membres à exploiter pleinement la possibilité de déléguer des pouvoirs en matière d'échange d'informations aux services fiscaux locaux afin d'accélérer et d'améliorer la qualité de la coopération; note que la Commission a mis à disposition en 2007 un canal de communication électronique sécurisé entre les services locaux dans les différents États membres; 13. reconnaît que la coopération administrative au niveau de l'Union constitue un moyen indispensable de lutte contre la fraude fiscale; incite les États membres à tirer pleinement parti de la possibilité de mettre en place une coopération administrative efficace entre les bureaux fiscaux locaux, y compris au moyen des communications électroniques; 14. relève que la Belgique a fondé le réseau Eurocanet (European Carousel Network) afin d'améliorer l'échange spontané d'informations; note que, depuis lors, vingt-quatre États membres participent à cet échange d'informations sur les entreprises soupçonnées d'être impliquées dans des cas de fraude de type carrousel; 15. observe que, selon les experts, Eurocanet permet aux administrations fiscales de détecter les fraudes à la TVA plus rapidement car il assure un échange complet d'informations, utilise 1 Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347 du 11.12.2006, p. 1). les autorités belges comme point central de coordination et favorise une approche opérationnelle permettant la participation des unités antifraude nationales; 16. constate cependant que l'efficacité du réseau Eurocanet est amoindrie par le fait que trois grands États membres, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni, n'y participent pas; demande à l'Allemagne, à l'Italie et au Royaume-Uni de rejoindre le réseau Eurocanet; 17. est préoccupé par les graves lacunes que la Cour des comptes a détectées dans le système d’échange d’informations sur la TVA (VIES) en raison des retards dans la collecte et la saisie des données et des problèmes de correction des données erronées; demande aux États membres et à la Commission de remédier d'urgence à ces carences pour la fin 2008; 18. ne parvient pas à comprendre pourquoi les États membres, malgré les efforts de la Commission pour faciliter un accord, n'ont toujours pas convenu de règles communes pour l'annulation des numéros d'identification TVA, bien que la possibilité de retrait rapide d'un numéro de TVA soit un élément essentiel de la lutte contre la fraude à la TVA; 19. déplore que les États membres n'effectuent pas suffisamment de contrôles simultanés multilatéraux, alors que la Communauté en assure le financement et que la Cour des comptes estime qu'ils permettent d'obtenir de bons résultats; 20. déplore, en particulier à la lumière des carences, mentionnées ci-dessus, constatées par la Cour des comptes en ce qui concerne l'Allemagne, que l'Allemagne n'ait pas donné suite à la demande d'audit de la Cour des comptes; soutient l'avis de la Cour des comptes que ce refus de l'Allemagne constitue une violation de ses obligations en vertu du traité CE; note que la Commission a entamé une procédure d'infraction devant la Cour de justice contre l'Allemagne; invite la Cour des comptes à procéder à l'audit prévu en Allemagne dans l'hypothèse où la Cour de justice constaterait l'infraction; 21. note que le groupe de travail du Conseil sur les questions fiscales a examiné le rapport spécial de la Cour des comptes; invite le Conseil à adopter, avant décembre 2008, des conclusions formelles sur les constatations de la Cour des comptes, comme il le fait pour les autres rapports spéciaux dans le cadre de la procédure de décharge de la Commission; Suivi du rapport de la Cour des comptes en termes de législation communautaire 22. accueille favorablement les propositions de la Commission en vue de la modification de la directive TVA1 et du règlement concernant la coopération administrative sur la TVA2 afin d'accélérer la collecte et l'échange d'informations sur les transactions intracommunautaires à partir de 2010 et prie instamment le Conseil d'adopter rapidement les mesures proposées; 23. invite la Commission à présenter de nouvelles propositions visant à renforcer l'aptitude des États membres à collecter la TVA non versée en rendant un opérateur solidairement responsable des pertes fiscales au cas où le non-respect de sa part des obligations d'information aurait facilité la fraude; 24. invite la Commission à présenter de nouvelles propositions relatives à l'accès automatisé par tous les États membres à certaines données non sensibles détenues par les États membres 1 2 Directive 2006/112/CE Règlement (CE) n° 1798/2003. sur leurs propres assujettis et à l'harmonisation des procédures d'immatriculation et de cessation de l'immatriculation des personnes assujetties à la TVA, afin de garantir la détection et la radiation rapides des faux assujettis; Rôle actuel de la Commission et perspectives d'avenir 25. observe que, en vertu du règlement (CE) n° 1798/2003, la Commission évalue le fonctionnement de la coopération administrative et met en commun l'expérience des États membres; prend acte de l'intention de la Commission de mettre en place un système de surveillance sur la base d'indicateurs quantifiables, afin d'évaluer si les États membres sont en mesure de fournir, et fournissent effectivement, une assistance efficace les uns aux autres; demande à la Commission d'informer le Parlement de l'état de la situation avant le début de la prochaine procédure de décharge; 26. note que, en vertu du règlement (CE) n° 1798/2003, la Commission n'a pas accès au contenu des informations échangées mais que son rôle se limite à l'entretien et au développement du réseau de communication; convient avec la Cour des comptes que cette situation empêche la Commission de déceler les causes de problèmes et de proposer des solutions; 27. relève que les États membres refusent d'accorder à la Commission (OLAF) l'accès au contenu des informations échangées dans le cadre du règlement (CE) n° 1798/2003 et aux données échangées dans le cadre du réseau Eurocanet; prend acte de la position de la Commission (OLAF) selon laquelle si elle avait accès aux données elle procurerait une forte valeur ajoutée en fournissant une analyse sur les nouvelles tendances et les systèmes de fraude nouvellement détectés, sous une perspective communautaire globale; 28. note qu'Europol a ouvert en avril 2008 un fichier de travail à des fins d'analyse sur la fraude intracommunautaire de type carrousel, qui vise à identifier les organisateurs de fraudes, à mettre au jour leurs réseaux délictueux et à analyser les formes les plus courantes de fraude tournante intracommunautaire; 29. note les conclusions du Conseil ECOFIN du 7 octobre 2008, qui a décidé de mettre sur pied un nouveau mécanisme destiné à améliorer la coopération entre les États membres afin de lutter contre la fraude à la TVA, dispositif appelé Eurofisc; constate que ce dispositif se fonderait sur Eurocanet et que, d'après les orientations adoptées par le Conseil ECOFIN, il s'agirait d'un réseau décentralisé pour l'échange d'informations entre les États membres, réseau auquel tous les États membres pourraient participer sur une base volontaire et dont l'organisation reposerait sur un accord entre les États membres participants, avec le soutien de la Commission; 30. convient qu'une forte impulsion politique est nécessaire pour réaliser des progrès notables dans la coopération en matière de lutte contre la fraude à la TVA; se déclare toutefois convaincu que l'introduction d'Eurofisc n'apportera une plus-value que si la participation à ce dispositif est obligatoire pour tous les États membres, afin d'éviter les problèmes rencontrés avec Eurocanet et que si la Commission participe pleinement aux activités du réseau et joue un rôle de coordination; 31. demande au Conseil de poursuivre les négociations sur la proposition de règlement relatif à l'assistance administrative mutuelle dans la lutte contre la fraude affectant les intérêts financiers de la Communauté, dont la fraude à la TVA, qui donnerait un cadre précis à la coopération administrative multidisciplinaire contre la fraude; 32. invite les services compétents de la Commission, la DG Fiscalité et Union douanière et l'Office européen de lutte antifraude (OLAF), à créer un groupe de travail chargé d'examiner les questions suivantes: - comment la Commission peut-elle réaliser des synergies entre les différents services intervenant dans la lutte contre la fraude à la TVA afin d'éviter les doubles emplois et la concurrence entre services? - dans quelle mesure la Commission devrait-elle avoir accès au contenu des informations échangées entre les États membres? - la Commission pourrait-elle devenir un organe central chargé de coordonner la coopération administrative entre les États membres et, dans l'affirmative, comment? - comment les interventions de la Commission dans la lutte contre la fraude à la TVA devraient-elles s'articuler par rapport aux activités d'Europol et d'Eurojust? Renforcement de la coopération entre les autorités judiciaires 33. demande aux États membres de lever les obstacles juridiques dans le droit national qui entravent les poursuites transfrontalières, en particulier dans les cas où les moins-values de TVA se produisent dans un autre État membre; 34. note que, selon la Commission, les recettes communautaires provenant de la ressource propre TVA sont protégées par la convention de 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes1; fait observer que le Conseil a adopté en 1997 un rapport explicatif qui a explicitement exclu la TVA du champ de la convention; relève que le rapport explicatif n'a pas d'effets juridiquement contraignants; invite le Conseil à revoir son interprétation afin de lever les obstacles juridiques aux poursuites transfrontalières des fraudes à la TVA; o o o 35. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la Cour des comptes, à Europol et à Eurojust, ainsi qu'aux gouvernements et parlements des États membres. 1 JO C 316 du 27.11.1995, p. 49.