À la déclaration de guerre, son escadrille, « les Aigles bleus », basée à Vissenaken,
reçoit pour mission de défendre l’espace aérien au-dessus du Limbourg en interceptant
tous les avions ennemis franchissant la frontière. Nous sommes le vendredi 10 mai, il
est 7h30, les pilotes s’installent dans leur avion pour les derniers réglages avant de
décoller. 8 h37, les trois pelotons de la 5/III/2Aé gagnent la piste et décollent. Le
sergent Charles Detal est ailier du Lieutenant Dufossez, chef du 1
er
peloton, et du sous-
lieutenant d’Haes. Une importante formation de bombardiers allemands vient de violer
l’espace aérien belge. Ordre d’interception et de destruction. Les Aigles bleus grimpent
à 3000 mètres
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et « scrutent le ciel à la recherche des intrus qui ne se font pas attendre.
De face, 10 Me 109 de la 3./JG.27 qui attaquent les 1
er
et 2
ème
pelotons. L’accrochage a
lieu, c’est la mêlée. Nos six Fox et les 11 monoplans (Me 109) forment à présent un
bloc, une boule mouvante…»
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. C’est dans le récit du major Boussa que l’on prend
conscience de la différence qui existe entre les machines qui s’affrontent. « Vitesse
prodigieuse… les Me passent dans tous les sens à des vitesses auxquelles nous ne
sommes pas habitués, nos Fox semblent rester sur place. ». Combat très inégal au point
de vue du nombre mais également au point de vue matériel. Le Fairy Fox VIC ne peut,
en aucune façon, rivaliser avec un Me.109. Les Belges engagent néanmoins le combat et
lors de l’engagement, Ch. Detal encaisse une rafale dans son réservoir d’essence,
l’avion prend feu. Malgré ses brûlures, il parvient à s’extraire de son cockpit et saute en
parachute. Grièvement brûlé et aveugle, il échappe de peu à la mort
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. « Au cours de
cette mission (interception de bombardiers allemands) son escadrille fut attaquée par
des chasseurs ennemis très supérieurs en nombre. Au cours de l’engagement, le 1
er
sergent Detal, après avoir tiré toutes ses munitions a été abattu en flammes ».
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Ce
rapport signale également que le pilote avait reçu une balle explosive dans le bras. Les
premiers rapports le signalent comme disparu à Vissenhaken, le 10 mai. Heureusement
pour lui, il a été immédiatement secouru et transporté dans l’hôpital de campagne de
Looz où il reçoit rapidement les premiers soins. Hélas, trois jours après, les Allemands
investissent les lieux et transfèrent les blessés à Maastricht, dans un de leurs lazarets
aménagé dans le couvent des jésuites. Il y est soigné correctement et lorsque, le 28 août,
son état le permet, il est envoyé à l’hôpital Bruggman pour y terminer sa convalescence,
jusqu’en fin septembre. L’inaction lui pèse. Il veut rejoindre l’Angleterre et reprendre sa
place dans l’aviation de combat. Une trentaine de pilotes belges ont déjà rejoint la RAF
et se battent dans le ciel anglais. Le 25 novembre 1940, il prend contact avec une filière
d’évasion dont s’occupent les pères franciscains à Bruxelles. Le père Benoît le prend
donc en charge et l’intègre dans « ABC lignes ». Le départ est immédiat. Tout quitter et
risquer sa liberté, sa vie, pour assouvir son désir de combat. Sait-il ce qui l’attend sur la
route de l’exil ? Son épouse l’accompagne.
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Il est envoyé sur Dinant, où les pères oblats l’accueillent avant de le diriger vers
Charleville-Mézière qu’il atteint le 26 novembre. Puis c’est la direction Laon où le
vicaire Cordier le cache à Gignancourt. Il y reste trois jours puis revient à Charleville,
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Archives militaires Notariat op.cit, CH. Detal précise qu’il volait à 5500 m d’altitude lors de l’approche.
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Peter Taghon, L’aéronautique militaire belge en mai-juin 40, dans la revue Avions, Hors série n°18
pages 70-75. Comme le souligne l’auteur, il s’est basé sur les notes du Major Boussa , notes extraites de
son carnet de campagne. Après un premier engagement contre les Me 109, les derniers Fox se lancent à la
recherche des bombardiers et engagent de nouveau le combat contre ces avions.
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Peter Taghon, op.cit
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Archives militaires, Notariat, dossier Charles Detal. Rapport du Commandant Boussa.
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Certaines sources signalent que Charles Detal était accompagné de son épouse pour rejoindre la Grande-
Bretagne.