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les États-Unis. En Europe, cette tendance reflète principalement l'essoufflement très net de la
productivité observé dans deux grands États membres de la zone euro, l'Espagne et l'Italie,
alors que les autres grandes économies étaient moins touchées. En fait, contrairement à
l'Espagne et à l'Italie, la France et l'Allemagne ont échappé à la tendance générale à la baisse
durant les années 1990. Depuis le début du siècle, l'UE n'a plus enregistré aucun déclin de la
croissance tendancielle de la productivité, et on observe même une relance de la productivité
depuis le milieu de 2005. Toutefois, on suppose que ce nouvel élan est en partie de nature
cyclique dans le contexte de l'accélération de la relance économique, dès lors que l'on ne
dispose pas à l'heure actuelle d'éléments suffisants permettant de confirmer qu'il s'agit d'une
relance de nature structurelle.
Le différentiel de croissance de productivité entre l'UE et les États-Unis depuis 1995
résulte principalement de tendances divergentes en ce qui concerne la productivité totale
des facteurs (PTF) - une mesure de l'efficience avec laquelle tous les facteurs, y compris la
main d'œuvre, l'équipement destiné à l'information et la communication (capital TIC) et le
capital traditionnel (équipement et structures) sont utilisés. Les différences entre les deux
économies en ce qui concerne la croissance du capital par travailleur jouent un rôle beaucoup
moins déterminant pour expliquer l'écart de productivité. Néanmoins, une ventilation de la
contribution des services en capitaux montre un glissement des capitaux traditionnels vers les
capitaux liés aux TIC aux États-Unis, en particulier dans le secteur des services privés, alors
que l'on n'observe pas de tendance similaire en Europe. Dans la mesure où les capitaux liés
aux TIC favorisent la productivité, ce glissement peut également contribuer à expliquer l'écart
de productivité croissant entre les deux économies.
Le différentiel de croissance de la PTF entre l'UE et les États-Unis peut être presque
totalement attribué à des résultats médiocres de quelques secteurs seulement, tandis que
les structures économiques, la taille comparative des secteurs et les aspects liés à la
réglementation jouent un rôle fondamental. Une analyse détaillée par secteur montre que
ceci concerne principalement le commerce de gros et de détail, l'immobilier et les autres
services destinés aux entreprises, l'équipement électrique et optique (qui englobe les
semi-conducteurs, le principal secteur producteur de TIC) et dans une moindre mesure les
services financiers. Le faible niveau des dépenses privées de R&D dans le domaine des TIC
en Europe par rapport aux États-Unis est principalement dû aux différences de structure
industrielle, notamment la taille réduite du secteur des hautes technologies dans l’UE. Les
questions liées à la réglementation, notamment les règles en matière d'entrée et de sortie du
marché, semblent jouer un rôle dans les services financiers et les services aux entreprises,
tandis que la faible productivité des secteurs du commerce de gros et de détail de l'UE
s'explique en partie par les limites à l'utilisation des économies d'échelle. En revanche, il est
positif de constater que l'UE a été nettement plus performante que les États-Unis en ce qui
concerne les industries de réseau, notamment grâce à des améliorations de l'efficience liées à
la déréglementation opérée durant les deux dernières décennies.
Le ralentissement de la productivité dans l'UE s'est accompagné d'une croissance sans
précédent de l'emploi. On peut légitimement se demander si les deux phénomènes sont liés.
Ceux qui évoquent un éventuel arbitrage entre la productivité et l'emploi semblent pouvoir se
fonder en partie sur l'histoire économique de l'après-guerre. Durant les années 1970 et 1980,
l'Union européenne a combiné une croissance relativement rapide de la productivité et une
croissance lente de l'emploi, tandis que les États-Unis enregistraient une croissance rapide de
l'emploi et un ralentissement de la productivité. Pendant cette période, l'augmentation rapide
des prix du pétrole et partant, l'accroissement des coûts liés aux salaires réels dans bon
nombre de pays de l'UE (puisque les travailleurs répercutaient l'augmentation des prix de
l'énergie sur les employeurs dans leurs revendications salariales) ont entraîné une substitution