CABINET Forum Med Suisse No10 5 mars 2003 244
cieuse ou chéloïde, dyspigmentation (leucoder-
mie, mélanodermie). Il ne faut pas sous-évaluer
le risque de déhiscence cutanée au niveau de la
cicatrice aux localisations de grande mobilité
mécanique. Il faut expliquer le danger de réci-
dive inhérent à la technique de shave-biopsie,
surtout en cas de néoplasie mélanocytaire. On
peut en règle générale se contenter d’un
consentement tacite à la biopsie. Une anam-
nèse allergologique permettra d’être fixé sur
une éventuelle intolérance au latex, aux anes-
thésiques locaux, aux désinfectants, aux anti-
biotiques topiques ou aux pansements adhésifs;
nous profitons de préciser que la plupart du
temps, il s’agit là de réactions toxiques irrita-
tives plutôt que d’allergie de contact. L’anticoa-
gulation par voie orale, les coagulopathies, une
thrombocytopénie ou une immunosuppression
constituent des contre-indications relatives à la
biopsie cutanée. Il convient également d’être
prudent chez les diabétiques atteints d’une an-
giopathie avancée en raison du retard de cica-
trisation des plaies qui l’accompagne. Il en est
de même en face d’un patient présentant une
insuffisance veineuse chronique. La proximité
de structures anatomiques sensibles telles que
les vaisseaux d’une certaine dimension, les
nerfs ou les capsules articulaires devrait être
évitée et constitue parfois une contre-indication
relative [7]. La plus grande prudence est de
rigueur en face de grosses lésions cutanées pul-
satiles et pellucides localisées à la tête ou au
tronc. De telles lésions peuvent être en conti-
nuité avec des structures profondes (gros vais-
seaux ou liquide céphalo-rachidien) et nécessi-
tent donc une investigation clinique et radio-
logique préalables approfondies [9]. Chez les
patients à risque – valve cardiaque artificielle,
endoprothèse articulaire, vice cardiaque, im-
munosuppression – la prophylaxie antibiotique
péri-opératoire n’est pas absolument néces-
saire [7]. Dans ces situations, certains auteurs
recommandent au contraire une prophylaxie
antibiotique pré-opératoire, c’est-à-dire l’ad-
ministration d’un antibiotique adéquat deux
heures avant la biopsie [10, 11].
Désinfection
Dans la plupart des cas, une désinfection à
l’alcool est suffisante. Elle permet de réduire la
flore cutanée de 75% en moins d’une minute.
L’éthanol est surtout efficace contre les germes
Gram positifs. Les solutions de povidone iodée
ont un spectre antibactérien aussi bien gram-
positif que gram-négatif. Leur entrée en action
est cependant plus lente que celle de l’alcool et
la povidone iodée colore la peau. La chlorhexi-
dine est aussi efficace contre les gram-positifs
et les gram-négatifs. Son action est d’entrée
rapide et dure plusieurs heures. Elle est contre-
indiquée en application péri-oculaire en raison
de ses propriétés irritantes sur la cornée.
On utilise souvent des antiseptiques en combi-
naison, c’est-à-dire en solution alcoolique. On
exclut ainsi les possibles lacunes de spectre des
antiseptiques isolés.
Anesthésie
Pour l’anesthésie locale, on distingue les procé-
dés suivants: anesthésie par infiltration (lido-
caïne, mépivacaïne, bupivacaïne), cryo-anes-
thésie pour les curetages, anesthésie de sur-
face (crème Emla®). L’adjonction d’adrénaline
(1:100000) prolonge la durée de l’effet de la
lidocaïne et diminue en même temps les saigne-
ments.
Moment et endroit de la biopsie?
Les dermatoses inflammatoires passent par di-
verses phases selon une séquence typique pour
la maladie. Ainsi, le moment adéquat pour la
biopsie de peau se limite uniquement à l’efflo-
rescence présente au commencement. En prin-
cipe, on prélèvera l’efflorescence la plus jeune
(efflorescence primaire). Dans les lésions cuta-
nées anciennes, on trouve régulièrement des
modifications qui ne contribuent que peu au
diagnostic. Mais en pratique, la réalité est la
plupart du temps bien différente, car en règle
générale le patient ne consulte pas au bon mo-
ment et les efflorescences ont souvent déjà subi
des modifications en raison d’une automédica-
tion et/ou d’ordre irritatif. Lorsqu’on suspecte
une mastocytose cutanée, la friction de la lésion
afin de provoquer une réaction urticarienne
(signe de Darier) est plutôt contre-productive
pour assurer un diagnostic histologique fin. En
effet après cette manœuvre, les mastocytes dé-
granulés ne sont histochimiquement presque
plus ou plus du tout démontrables. Dans les
dermatoses bulleuses (pemphigoïde bulleux,
pemphigoïde vulgaire, dermatite herpétiforme
de Duhring, etc.), les lésions initiales corres-
pondent fréquemment à une lésion urtica-
rienne et/ou érythémateuse. Histologiquement,
cette phase urticarienne se révèle le plus sou-
vent comme une spongiose avec des éosino-
philes dans l’épiderme («spongiose éosino-
phile») et le chorion supérieur. Cette spongiose
avec éosinophiles se rencontre entre autres
aussi dans l’eczéma de contact allergique, dans
diverses formes d’exanthèmes médicamen-
teux, dans les ectoparasitoses, dans l’inconti-
nentia pigmenti ou dans l’érythème toxique
du nouveau-né (Maladie de Leiner) [12]. Dans
cette dernière maladie, aussi dénommée éry-
throdermie desquamative du nourrisson, la
biopsie cutanée est superflue du fait que l’affec-