autrement dit les définitions sociales associées au sexes dits biologiques et censées le
représenter. Dans les études genre (multiples à l’Université du Mirail), le genre est de plus en
plus défini comme un « système » politique qui permet de classer et hiérarchiser les sexes.
En 2011, j’ai ainsi défini le genre :
« Le genre est défini comme le système socio-politique qui construit, organise et hiérarchise
la pseudo naturalité des catégories sociales de sexe (le sexe dit biologique) en légitimant la
domination masculine hétéronormative. En ce sens les rapports sociaux de sexe analysent la
domination masculine et ses évolutions, les positions sociales respectives des hommes et des
femmes. Les rapports sociaux de genre s’intéressent à l’hétéronormalisation des positions des
personnes définies comme hommes ou femmes, la domination des sexualités définies comme
minoritaires ».6
En sociologie aujourd'hui, nous étudions ce que vivent les hommes et les femmes, mais surtout
les rapports qui les lient entre eux et elles et les construisent comme des êtres sexués ou
genrés, ce que l'on nomme les « rapports sociaux de sexe ». Nous considérons alors les
hommes et les femmes comme des catégories de sexe, des groupes (voire des classes) et les
problématiques sociologiques mettent en évidence les rapports sociaux de sexe qui, au niveau
interindividuel comme au niveau collectif, créent, produisent et reproduisent les inégalités
entre les hommes et les femmes. Ces rapports sont caractérisés comme des formes
d'oppression, de subordination, ou plus généralement de domination. C'est une véritable
rupture qu'induit une telle approche, issue du féminisme, qui affirme que "les catégories de
sexe ne sont plus des en-soi séparés, mais qu'elles se définissent dans et par leur relation."7.
Bien sûr, les recherches nous montrent que la domination masculine varie, qu’elle ne reproduit
douce et sensible. Pour les Mundugumor, c'est celui d'un homme violent et agressif marié à une femme
tout aussi violente et agressive. Les Chambuli, en revanche, nous ont donné une image renversée de ce
qui se passe dans notre société. La femme y est le partenaire dominant ; elle a la tête froide et c'est
elle qui mène la barque ; l'homme est, des deux, le moins capable et le plus émotif. D'une telle
confrontation se dégagent des conclusions très précises. Si certaines attitudes, que nous considérons
comme traditionnellement associées au féminin - telle que la passivité, la sensibilité, l'amour des
enfants - peuvent si aisément être typiques des hommes d'une tribu, et dans une autre, au contraire,
être rejetées par la majorité des hommes comme des femmes, nous n'avons plus aucune raison de
croire qu'elles soient irrévocablement déterminées par le sexe de l'individu » (Mead, 1963). D'une
façon générale, les données de l'ethnologie nous apprennent que le contenu des qualités physiques ou
psychologiques attribuées respectivement à chacun des sexes varie considérablement (et souvent
s'oppose absolument) d'une société à l'autre, de même que les rôles masculins et féminins et les tâches
économiques que remplissent les hommes et les femmes. Bref, les qualités ou défauts des hommes et
des femmes ne sont en rien naturels ou déterminés par le biologique.
5 Et dans les cours de licence, ou après, nous verrons plus exactement comment le « système de
genre », le genre, est le paradigme qui, justifiant la domination masculine, crée deux catégories (les
hommes et les femmes) à partir d'indicateurs physiologiques construits comme différents naturels ET
hiérarchisés.
6 Voir les réflexions récentes dans : Welzer-Lang Daniel, 2011, « Débattre des hommes, étudier
les hommes, et intervenir auprès des hommes dans une perspective de genre » in
Masculinités :
état des lieux
, Toulouse, Eres, pp 41-54.
7 La première à questionner cette relation, ce rapport, est Nicole Claude Mathieu (1971, 1991).