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RCJT/CJTG, Université Laurentienne/Laurentian University, Géographie/Geography, Sudbury, Ontario, P3E 2C6, Canada. ISSN : 2292-
4108. Vol. 2(1) : 15-27. Copyright @ 2014 RCGT-CJTG Tous droits réservés/All rights reserved.
cordon littoral d’Assinie à l’exception des vastes plantations de cocotiers; celui-ci ne présente que peu de
potentiels agricoles et industriels. Son enclavement, sa faible population et la beauté de son paysage et
de son site en ont donc fait le terrain d’application de ce concept afin d’espérer résoudre ses problèmes
de développement. En principe, dans ces conditions, cela pourrait entraîner un effet proportionnel plus
grand sur la prospérité de la population, car le coût d’opportunité des ressources est d’ordinaire plus
faible dans ces régions que dans les autres parties plus développées du pays.
Pourtant, la monoculture touristique à laquelle la région est destinée depuis l’avènement du tourisme
balnéaire en 1971, a favorisé une fossilisation progressive des genres de vie antérieurs, notamment
ruraux. Le tourisme tend à étouffer sinon à accélérer la disparition des anciennes activités agricoles : la
culture du manioc, des légumes et du palmier à huile, dont les champs sont situés dans le pays, au Nord
de la lagune d’Assinie. La situation est d’autant plus critique qu’un plan d’expansion du tourisme doit, en
principe, s’appuyer d’abord sur les possibilités naturelles de la région, mais un tel plan n’aurait que la
moitié de sa valeur s’il ne proposait pas de valoriser l’activité humaine s’exerçant dans le cadre régional,
à lui redonner une plus-value plutôt qu’à l’affaiblir ou la détruire. Le travail saisonnier et peu rémunéré
qu’offre le tourisme balnéaire ne semble pas endiguer l’exode rural auquel est confronté le cordon littoral.
Dans un tel contexte, on peut penser que la création d’un ensemble scolaire pour les jeunes des villages
du cordon favorisera et entretiendra ce mouvement vers les villes voisines que sont Aboisso, Adiaké et
Abidjan, entre autres. L’impuissance dont le tourisme fait preuve devant ce fléau qu’est l’exode rural ne
surprend guère. Comment pourrait-il en être autrement dès le moment où il vit en autarcie par rapport
au milieu qui lui sert de support et est résolument tourné vers l’Europe? Des initiatives pour relancer les
activités culturelles disparues ou en voie de disparition ont été arrêtées par les autorités ivoiriennes en
vue de faire profiter les domaines non économiques de l’apport bénéfique du tourisme. Les formules
emphatiques, tels sauvetage ou renaissance, évoquées pour souligner la nécessité du tourisme, ne
semblent pas toucher le complexe touristique d’Assinie sur lequel s’imposent et prévalent les idées
ségrégationnistes du Président-Fondateur du Club Méditerranée, G. Trigano. En érigeant cette
ségrégation en principe, des observateurs font remarquer que Trigano rencontre d’ailleurs le désir de la
plupart de ses clients, lesquels ne retiennent de leurs voyages que le souvenir d’une mer bleue, d’une
plage au sable fin et d’une cuisine raffinée. Les traditions se meurent à Assouindé et les quelques jeunes
des villages environnants parlent avec regret des années 1970 où des danses traditionnelles de la région
se produisaient dans les villages touristiques, plus particulièrement dans celui des « palétuviers » puisque
géré alors par la SIETHO, et où ils étaient associés aux activités qui y étaient organisées: course à
pirogues sur lagune, volley-ball et football etc.
L’EXTRAVERSION DE L’INDUSTRIE TOURISTIQUE
Le tourisme international n’est pas le fait du XXème ou du XXIème siècle, car, bien que sa croissance fût un
phénomène généralisé après la deuxième guerre mondiale, les fondements en étaient déjà établis dans
les années 1840 quand Thomas Cook lança son premier voyage. Toutefois, l’essor de cette activité
économique ne s’est considérablement accru que depuis les années 1960. Le tourisme international,
malgré d’immenses potentiels répartis dans le monde, est inégalement ventilé et le flux touristique se
concentre sur un nombre relativement restreint de destinations. La plupart de ces destinations sont
localisées dans les pays industrialisés. Selon OMT (1981), la principale destination est le continent
européen qui draina en 1979, 68% du trafic touristique mondial, l’Amérique du Nord occupant le 2ème
avec 17% et le reste du monde se répartissant les autres 15%. Un des domaines privilégiés de cette
action devrait être celui de l’agriculture, de la pêche et des industries agro-alimentaires. Mais la volonté
politique d’intégrer le tourisme au secteur primaire afin de procéder au développement économique et
social de la région rentre en contradiction totale avec la pratique que vivent les populations du cordon
littoral. En effet, les produits agricoles ne sont pas vendus dans les villages touristiques, parce que leur
qualité ne correspond pas toujours aux exigences et au calibre fixés, dit-on, par les hôtels. Mais ceci
n’est-il pas un subterfuge pour justifier le manque de volonté des promoteurs à s’impliquer davantage
dans le milieu? Quant aux produits de la pêche, tous affirment que par le passé, les hôtels étaient
disposés à acheter aux pécheurs les meilleurs produits de leurs prises : poissons et langoustes. Cette
situation, aussi déplorable qu’elle soit, n’est pas propre à la région d’Assinie et à la Côte d’Ivoire. Le
caractère extraverti du tourisme balnéaire est si apparent qu’il choque : c’est aussi valable pour tous les
éléments qui interviennent dans l’activité touristique, que ce soit au niveau de la restauration, du
transport ou du loisir. Les habitants de la région d’Assinie, tout comme du reste de la Côte d’Ivoire, sont
imbus d’idées pacifiques et foncièrement hospitalières. Aussi, souhaitent-ils l’exécution intégrale du
projet touristique du cordon littoral d’Assinie. Mais cette attitude propice à un tourisme international n’est
pas immuable. Elle risque de changer devant la marge toujours grandissante entre les promesses et leur
réalisation effective. En dépit d’une animation saisonnière particulière, car la population du village
d’Assouindé triple presque au cours de la saison touristique, nous sommes en fait devant un état