RCJT/CJTG, Université Laurentienne/Laurentian University, Géographie/Geography, Sudbury, Ontario, P3E 2C6, Canada. ISSN : 2292-
4108. Vol. 2(1) : 15-27. Copyright @ 2014 RCGT-CJTG Tous droits réservés/All rights reserved.
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Le tourisme balnéaire et le développement en Côte d’Ivoire : le cas d’Assinie et
d’Assouin
Seaside tourism and development in Ivory Coast: Assinie and Assouindé cases
GNAMBA-YAO Jean-Baptiste
@ 2014 RCGT-CJTG Tous droits réservés /All rights reserved
Résumé:
En Côte d’Ivoire, nous avons un cas d’aménagement touristique dont la réalisation a malheureusement précédé
des études écologiques et d’environnement humain. Il s’agit de l’aménagement de la zone balnéaire d’Assinie où se
trouvent aujourd’hui les deux villages de vacances : Assinie et Assouindé. On constate que du fait de la non-
participation des populations au projet, la majorité des habitants ne se sent pas concernée. Voilà une démission
collective face à un projet greffé. Ces derniers considèrent qu’il appartient au gouvernement et non à eux de
s’occuper des touristes.
Abstract:
In Côte d’Ivoire, we are confronted with a case of tourism development which came about unfortunately before any
serious ecological and human environment survey was conducted; the Assinie seaside resort where two touristic
villages have now been built, namely Assinie and Assouindé. It was noticed in the long run that due to the non-
involvement of the people in the project, many still feel unconcerned. To call a spade one can say that it is nothing
but a general indifference to, a complete lack of interest in a thing conceived as totally alien to the inhabitants. To
these people, it is entirely the government’s responsibility to take care of tourists and handle tourism activities in
the area.
Mots clés / Keywords
Aménagement touristique, études écologiques, zone balnéaire, villages de vacances, Assinie et Assouindé
Tourism development, ecological environment, seaside, touristic villages, Assinie and Assouindé
INTRODUCTION
Situées à une heure d'Abidjan, la capitale économique de la Côte d'Ivoire, Assinie et Assouindé sont des
stations balnéaires très bien équipées, aux multiples installations touristiques. Le club Méditerranée y a
élu domicile sur une plage paradisiaque. Assinie est aussi réputée pour ses fameux cocotiers ombrageant
une magnifique étendue de sable blanc, mais également pour la bonne ambiance de son village de
pêcheurs. Assinie campe sur la frontière de la Côte d'Ivoire avec le Ghana voisin. Assinie se situe à la
pointe d'une immense flèche littorale qui s’étire entre Abidjan et Grand-Bassam. D'Assinie à Mafia, ce
sont 20 km de plages avec du sable fin et propre à perte de vue. Depuis une fosse au large d'Abidjan, les
fonds remontent en pente de plus en plus douce en allant vers Assinie. Avec son sable blanc, fin et doux
au toucher, ses cocotiers qui se laissent amoureusement bercer par le vent, Assinie a tout l’air d'un
paradis sur terre. Cet endroit accueille depuis 1960, des villages de vacances, et des centres de loisirs de
renommée internationale. En cours de route, un arrêt à la ferme de crocodiles, unique en son genre,
enchantera le touriste à Assouindé. Et depuis, chaque fin de semaine, les touristes occidentaux et autres
excursionnistes ivoiriens d'une certaine classe n'hésitent pas à rallier les 80 km depuis Abidjan pour se
prélasser et découvrir ses merveilles.
PROBLÉMATIQUE
L’évolution économique et humaine du XXIème siècle est fortement marquée par le développement
extrêmement rapide du tourisme. De par sa nature, le tourisme touche à tous les secteurs de l’économie.
Revue Canadienne de Géographie Tropicale
Canadian Journal of Tropical Geography
RCGT (En ligne) / CJTG (Online)
ISSN : 2292-4108
Vol. 2 (1) : 15-27
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Son développement entraîne à coup sûr la croissance d’un groupe, d’une région ou d’un pays. Le
tourisme se présente comme un puissant instrument de promotion pour ses attributions politiques,
économiques et sociales. Et c’est fort de ce constat que la Côte d’Ivoire dès le début des années 1970 a
inscrit le tourisme parmi les priorités de son développement, car elle considère qu’il est à la fois un
important outil d’échange et de valorisation culturelle en parfaite symbiose avec la politique de paix et de
dialogue d’une part et un catalyseur de promotion économique efficace d’autre part. Son rôle dans
l’économie ou de façon plus large dans le développement semble incontestable. Enfin, le tourisme, pour
l’économiste, influence le développement régional.
LE TOURISME BALNÉAIRE EN CÔTE D’IVOIRE
Pour ce qui concerne cette activité, il est à noter qu’elle se rencontre le long de la côte lagunaire et sur
les côtes du golfe de Guinée. L’aménagement du littoral a favorisé le tourisme balnéaire. Les plans d’eau
lagunaires en Côte d’Ivoire sont parmi les plus beaux du monde avec 500 km de littoral. La côte Sud-
ouest constitue un véritable domaine balnéaire nécessaire au tourisme international. Aux grands
complexes hôteliers d’Assinie, s’ajoutent ceux d’Assouindé, Grand-Bassam, Grand Lahou, San Pedro,
Grand Béréby propices à de multiples activités de loisirs : pêche sportive en mer au large d’Abidjan, San
Pedro de marlin bleu, pêche de thons, de requins, etc. En arrière du littoral sableux qui s’étend de Fresco
à l’Ouest à la frontière ghanéenne à l’Est, se développe sur environ 300 kilomètres un seau de lagunes
au sud du pays séparées de la mer par un cordon littoral dont la largeur varie de 800 mètres à quelques
kilomètres. Ces lagunes, voie de communication économique et pratique protégée de la barre qui se
déferle continuellement sur la côte, offrent 12000 km² exploitables à des fins multiples. Jadis, pôle
d’attraction pour le commerce extérieur ivoirien, elles constituent aujourd’hui un pôle d’attraction
touristique certain dont les Autorités de la Côte d’Ivoire veulent tirer profit par des aménagements
touristiques de type balnéaire. Quoique l’on puisse dire, le tourisme prend de plus en plus d’ampleur dans
l’activité économique moderne. Considéré à tort ou à raison comme facteur de développement et de
croissance des économies nationales, le tourisme est également perçu comme un élément déterminant
dans le concept de développement régional. L’aménagement qui est un effort de développement planifié
et appliqué avec rationalité à différents secteurs de l’économie régionale, tient compte de facteurs très
divers autant positifs que négatifs. Il est sous-tendu par une attitude d’esprit et une volonté orientée vers
une grande prospérité régionale. Cette volonté a été clairement exprimée par les Pouvoirs publics dans le
cas de l’aménagement touristique du cordon littoral. Selon Hauhouot (1976), « Dans la perspective
d’intégration du tourisme au développement gional, il a été envisagé d’incorporer le village d’Assinie à
l’aménagement des voies d’accès, de transport de l’eau potable et de l’énergie. La couverture de la zone
par le léphone a été en outre inscrite au programme...». L’ensemble de cette opération devra, ajoute
l’auteur, « Concourir non seulement à désenclaver la partie méridionale de la sous-préfecture d’Adiaké,
mais aussi à vivifier l’ensemble de l’économie régionale en offrant du travail salarié et en suscitant la
demande des denrées alimentaires...».
L’explication de la théorie du le de développement du tourisme par les Autorités ivoiriennes est
d’autant plus évidente que celui-ci est conçu comme un élément générateur d’activités qui appelle
d’autres activités par complémentarité. Toutefois, cette politique de développement fondée sur les
potentiels naturels, culturels et humains ne peut être efficace que si ces pôles de développement
touristique coïncident un tant soit peu avec les centres de décision qui règlent les activités. Cette
perception semble refléter les caractéristiques du tourisme balnéaire en Côte d’Ivoire où l’on accorde une
grande place aux clubs de vacances. Les conséquences d’une telle politique n’apparaissent pas toujours
avec une nette évidence, car plus souvent elles sont masquées par une fausse prospérité touristique. En
effet, après les boires financiers de la SIETHO, le village Hôtel Les Palétuviers, dont la gestion échut à
la Valtur, a connu des performances rarement atteintes par l’ensemble des villages de cette
multinationale. Cependant, l’incapacité de ces villages de vacances à susciter le développement de
l’économie régionale ne trompe guère, pour peu qu’on s’y intéresse. Pour étayer ce point de vue, basons
notre argumentation sur trois indices développés par Défert (1960).
L’INCAPACITÉ DES PROMOTEURS IVORIENS DU TOURISME BALNÉAIRE À L’INTRÉGRER
AU DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL
La critique des indices de départ qui posent le problème de la nécessité du tourisme balnéaire et de la
justification des investissements consentis s’inscrivent dans une réflexion qui vise non pas à fustiger ou à
stigmatiser le concept du tourisme balnéaire, mais à en faire la critique afin qu’il atteigne pleinement, par
les améliorations qui pourront être apportées, les objectifs qui lui sont dévolus. Cette idée appréhende le
tourisme comme la panacée qui renflouera l’économie d’une région rurale en perte de vitesse, tel le
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cordon littoral d’Assinie à l’exception des vastes plantations de cocotiers; celui-ci ne présente que peu de
potentiels agricoles et industriels. Son enclavement, sa faible population et la beauté de son paysage et
de son site en ont donc fait le terrain d’application de ce concept afin d’espérer résoudre ses problèmes
de développement. En principe, dans ces conditions, cela pourrait entraîner un effet proportionnel plus
grand sur la prospérité de la population, car le coût d’opportunité des ressources est d’ordinaire plus
faible dans ces régions que dans les autres parties plus développées du pays.
Pourtant, la monoculture touristique à laquelle la région est destinée depuis l’avènement du tourisme
balnéaire en 1971, a favorisé une fossilisation progressive des genres de vie antérieurs, notamment
ruraux. Le tourisme tend à étouffer sinon à accélérer la disparition des anciennes activités agricoles : la
culture du manioc, des légumes et du palmier à huile, dont les champs sont situés dans le pays, au Nord
de la lagune d’Assinie. La situation est d’autant plus critique qu’un plan d’expansion du tourisme doit, en
principe, s’appuyer d’abord sur les possibilités naturelles de la gion, mais un tel plan n’aurait que la
moitié de sa valeur s’il ne proposait pas de valoriser l’activité humaine s’exerçant dans le cadre gional,
à lui redonner une plus-value plutôt qu’à l’affaiblir ou la détruire. Le travail saisonnier et peu rémunéré
qu’offre le tourisme balnéaire ne semble pas endiguer l’exode rural auquel est confronté le cordon littoral.
Dans un tel contexte, on peut penser que la création d’un ensemble scolaire pour les jeunes des villages
du cordon favorisera et entretiendra ce mouvement vers les villes voisines que sont Aboisso, Adiaké et
Abidjan, entre autres. L’impuissance dont le tourisme fait preuve devant ce fléau qu’est l’exode rural ne
surprend guère. Comment pourrait-il en être autrement dès le moment il vit en autarcie par rapport
au milieu qui lui sert de support et est résolument tourné vers l’Europe? Des initiatives pour relancer les
activités culturelles disparues ou en voie de disparition ont été arrêtées par les autorités ivoiriennes en
vue de faire profiter les domaines non économiques de l’apport bénéfique du tourisme. Les formules
emphatiques, tels sauvetage ou renaissance, évoquées pour souligner la nécessité du tourisme, ne
semblent pas toucher le complexe touristique d’Assinie sur lequel s’imposent et prévalent les idées
ségrégationnistes du Président-Fondateur du Club Méditerranée, G. Trigano. En érigeant cette
ségrégation en principe, des observateurs font remarquer que Trigano rencontre d’ailleurs le désir de la
plupart de ses clients, lesquels ne retiennent de leurs voyages que le souvenir d’une mer bleue, d’une
plage au sable fin et d’une cuisine raffinée. Les traditions se meurent à Assouindé et les quelques jeunes
des villages environnants parlent avec regret des années 1970 des danses traditionnelles de la région
se produisaient dans les villages touristiques, plus particulièrement dans celui des « palétuviers » puisque
géré alors par la SIETHO, et ils étaient associés aux activités qui y étaient organisées: course à
pirogues sur lagune, volley-ball et football etc.
L’EXTRAVERSION DE L’INDUSTRIE TOURISTIQUE
Le tourisme international n’est pas le fait du XXème ou du XXIème siècle, car, bien que sa croissance fût un
phénomène généralisé après la deuxième guerre mondiale, les fondements en étaient établis dans
les années 1840 quand Thomas Cook lança son premier voyage. Toutefois, l’essor de cette activité
économique ne s’est considérablement accru que depuis les années 1960. Le tourisme international,
malgré d’immenses potentiels répartis dans le monde, est inégalement ventilé et le flux touristique se
concentre sur un nombre relativement restreint de destinations. La plupart de ces destinations sont
localisées dans les pays industrialisés. Selon OMT (1981), la principale destination est le continent
européen qui draina en 1979, 68% du trafic touristique mondial, l’Amérique du Nord occupant le 2ème
avec 17% et le reste du monde se répartissant les autres 15%. Un des domaines privilégiés de cette
action devrait être celui de l’agriculture, de la pêche et des industries agro-alimentaires. Mais la volonté
politique d’intégrer le tourisme au secteur primaire afin de procéder au développement économique et
social de la région rentre en contradiction totale avec la pratique que vivent les populations du cordon
littoral. En effet, les produits agricoles ne sont pas vendus dans les villages touristiques, parce que leur
qualité ne correspond pas toujours aux exigences et au calibre fixés, dit-on, par les hôtels. Mais ceci
n’est-il pas un subterfuge pour justifier le manque de volonté des promoteurs à s’impliquer davantage
dans le milieu? Quant aux produits de la pêche, tous affirment que par le passé, les hôtels étaient
disposés à acheter aux pécheurs les meilleurs produits de leurs prises : poissons et langoustes. Cette
situation, aussi déplorable qu’elle soit, n’est pas propre à la région d’Assinie et à la Côte d’Ivoire. Le
caractère extraverti du tourisme balnéaire est si apparent qu’il choque : c’est aussi valable pour tous les
éléments qui interviennent dans l’activité touristique, que ce soit au niveau de la restauration, du
transport ou du loisir. Les habitants de la région d’Assinie, tout comme du reste de la Côte d’Ivoire, sont
imbus d’idées pacifiques et foncièrement hospitalières. Aussi, souhaitent-ils l’exécution intégrale du
projet touristique du cordon littoral d’Assinie. Mais cette attitude propice à un tourisme international n’est
pas immuable. Elle risque de changer devant la marge toujours grandissante entre les promesses et leur
réalisation effective. En dépit d’une animation saisonnière particulière, car la population du village
d’Assouindé triple presque au cours de la saison touristique, nous sommes en fait devant un état
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d’asphyxie caractérisé. En saison morte ou non touristique, seuls ne restent au village que les personnes
âgées et les enfants.
LE MANQUE D’INVESTISSEMENTS MALGRÉ L’AFFLUX DES VACANCIERS
Une des contraintes du tourisme en Côte d’Ivoire au cours des années 1970, était celle de la pénurie des
réceptifs d’accueil. Ce tourisme dont les débuts eurent lieu dans l’indifférence quasi générale s’est
finalement imposé à tous comme un facteur de veloppement, si bien que la Côte d’Ivoire, aidée par
l’enthousiasme des investisseurs privés, dispose aujourd’hui d’une infrastructure d’accueil de plus de
1000 chambres. Toutefois, tandis que les structures d’accueil croissaient au plan national, celles de la
région d’Assinie stagnaient, malgré les prévisions des différents plans quinquennaux et les déclarations
alarmistes des économistes. Le même bureau d’études soutenait que les mauvais résultats enregistrés
par les réceptifs balnéaires existants ne peuvent être améliorés que par une politique commerciale
agressive et l’extension des capacités. La situation actuelle du tourisme balnéaire à Assinie est assez
préoccupante. En effet, si l’on excepte le village d’Assinie et Les Palétuviers, gérés respectivement par le
Club Méditerranée et la Valtur, et qui demeurent, par conséquent, en marge des circuits commerciaux
classiques, la Côte d’Ivoire ne peut offrir que le réceptif de 100 lits de la SITOUR, ce qui est bien peu
suffisant pour un pays qui pour son propre développement économique et social, se doit d’offrir à la
population des possibilités de loisir dans un cadre comme celui du cordon littoral d’Assinie. Le tourisme
balnéaire à Assinie prend donc un recul par le manque d’investissements majeurs. Toutefois, cette
tendance, peut-être conjoncturelle de la politique ivoirienne. Elle n’est donc pas suffisante pour soutenir
le caractère timide du tourisme ivoirien. Soutenir que la politique de l’État favorise peu l’initiative dans le
tourisme en général et le tourisme balnéaire en particulier est sans doute un peu fort, car si les faits et
les données semblent confirmer le délaissement de la zone Sud-est du cordon littoral, il n’en est pas ainsi
du Sud-Ouest de plus en plus privilégié par l’administration touristique ivoirienne. Quant au manque
d’investissement national et régional dans la gion d’Assinie avant 1985, il est dû, pensons-nous, au
constat par les autorités ivoiriennes du manque à gagner qui résulte de la gestion des réceptifs par des
clubs. Le tourisme à Assinie ne profitant pas aux Ivoiriens, c’est-à-dire pas plus à l’institution étatique
qu’aux habitants, il s’avère plus sage d’arrêter d’aliéner irrémédiablement les potentiels naturels et
humains de la région. La nécessité de détermination des priorités s’impose dans le cas de la Côte d’Ivoire
comme le soutient la Banque mondiale (1977).
LE TOURISME BALNÉAIRE ET LA DÉPENDANCE
Le concept de dépendance dont il est question a été et reste l’apanage des chercheurs Latino-Américains
dont les précurseurs sont Cardoso, Dos Santos et autres. Nous étendre sur les grands débats suscités par
cette idée ne serait d’aucune utilité dans le cadre de cette réflexion. Nous nous inspirerons, cependant,
des réflexions critiques faites sur la théorie de la dépendance pour relever certains points qui nous
semblent importants. La dépendance s’impose comme une relation d’interdépendance asymétrique entre
deux unités nationales ou sociales. Cette asymétrie se laisse percevoir sous le double aspect de l’inégalité
de dimension et de puissance économique et également de la répartition des avantages sans oublier la
collusion entre métropole et centre des pays riches d’une part et les élites des pays pauvres d’autre part,
au détriment des périphériques des deux zones. Dans le Tiers-Monde, l’Afrique serait la région qui subit
plus que toute autre les contraintes inhérentes à la situation de pendance, eu égard aux conditions
historiques particulières qui ont été les siennes jusqu'à tout récemment. C’est justement cette situation
de dépendance qui sert de cadre très contraignant à l’activité touristique en Afrique et qui explique les
méfaits qui réduisent presqu’à néant les multiples avantages que pourrait susciter le tourisme.
LES QUELQUES LIENS DE DÉPENDANCE
Le tourisme, de par son caractère, constitue un des maillons par lesquels les pays développés exercent
leur impérialisme sur les pays en voie développement et ce, par le biais des capitaux dont ils ont besoin
pour aménager leurs potentiels touristiques, d’abord et par la localisation quasi exclusive de la demande
dans les pays occidentaux; ensuite le tourisme dans les pays en voie de développement est
essentiellement lié au tourisme international; il est donc intrinsèquement dépendant du développement
du voyage dans les pays industrialisés. En ce qui concerne les pays africains, leur activité touristique
repose à 90% environ sur la demande de voyages internationaux de masses sur les marchés européens
et nord-américains. Par la présence, enfin, des multinationales telières qui, dans bien des cas,
perturbent le processus de l’industrie touristique par des nationaux. Cette présence, aussi profitable
qu’elle puisse être dans certains cas, ne contribue pas moins à maintenir les pays en développement
dans le giron de la dépendance internationale et se trouve également caractérisée par un souci constant
de limiter les risques à leur strict minimum. Comme pour l’exploitation des matières agricoles et
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énergétiques et bien que dans des conditions différentes, puisque le consommateur vient dans le pays
exportateur chercher des biens et services au lieu de les recevoir chez lui, le développement du tourisme
balnéaire en Côte d’Ivoire pond fondamentalement à des besoins extérieurs. Cette activité s’inscrit
dans le cadre des échanges internationaux comme une spécialisation dans la division internationale du
travail. Ce faisant, les mêmes causes produisant les mêmes effets, on voit mal comment cette activité
pourrait dépasser les contradictions nées de l’intégration dépendante de la périphérie dans ce système,
ce à quoi vise sans doute la théorie du développement par le tourisme.
LA DÉPENDANCE DU TOURISME IVOIRIEN
Hormis les mécanismes imperceptibles, qui régissent l’économie internationale et à laquelle l’Afrique est
assujettie contre son gré, les Tour-Operators, les grossistes en voyages internationaux, imposent leurs
conditions sur le marché des voyages et accentuent la dépendance des pays du Tiers-Monde. La
dépendance de la Côte d’Ivoire par rapport aux marchés émetteurs s’apprécie par la progression rapide
et constante du tourisme international. L’éclatant succès initial de cette entreprise est assuré par trois
types de clientèle : affaires, congrès et loisirs. Mais, comme le souligne Jabe (1987), le tourisme
d’affaires-congrès a été, dès le début prépondérant et la politique touristique fut très largement orientée
vers la satisfaction de cette clientèle. Parmi ces touristes, l’on ne saurait ignorer l’apport du tourisme
intra-africain qui, peu à peu, est parvenu à occuper la première place des entrées en Côte d’Ivoire.
Toutefois, l’apport de ces touristes africains reste relativement insignifiant voire négligeable puisqu’il
n’existe presque aucune adéquation entre le comportement et les vœux de l’administration touristique.
Le tourisme intérieur existe également, mais il est limité dans la mesure le cadre aisé, lorsqu’il veut
faire du tourisme, opte pour l’Europe ou les États-Unis plutôt que l’hinterland ivoirien. L’affirmation de la
clientèle africaine, plus spécifiquement, ne peut enrayer le problème crucial auquel est confronté le
tourisme ivoirien : l’essoufflement du tourisme international en Côte d’Ivoire. Aussi convient-on avec
certaines critiques pour dire que même si les entrées des Africains en Côte d’Ivoire sont en constante
progression, cela ne suffit pas pour en faire des touristes. L’essoufflement du tourisme international en
Côte d’Ivoire et plus particulièrement dans la région d’Assinie, peut s’apprécier à partir des données
statistiques relatives aux deux pays dont les ressortissants fréquentent le plus le complexe touristiques
d’Assinie : la France et l’Italie. Pour la période 1981-1985, en raison du ralentissement général de
l’expansion touristique, un taux de croissance raisonnable de 8,5% par an a été retenu, alors qu’il
s’élevait à 16% entre 1975 et 1980
1
, ce qui conduit à l’évaluation pour 1985 d’environ 1800000 nuitées.
Une période de stagnation et de régression qui part de 1983 à 1990, ainsi en 1987, le nombre de
touristes est tombés est tombé à 175060. En ce temps, le tourisme ivoirien était surtout un tourisme
d’affaires et la crise économique qu’a connue la te d’Ivoire l’a durement affectée. Une période de
reprise des activités touristiques à partir de 1990 surtout avec la crise du Golfe et la création de l’Office
Ivoirien du Tourisme et de l’Hôtellerie au mois d’Août 1993.
Les touristes non africains qui arrivent en Côte d’Ivoire sont dans leur majorité des Français, Américains,
Italiens, Allemands, Anglais, Belges, Libanais, Espagnols, Suisses, Canadiens, Japonais, Asiatiques,
Hollandais, etc. Mais par continent, ce sont les Africains qui arrivent en tête suivis des Européens, des
Américains, des Asiatiques. La majorité de la clientèle touristique reste à Abidjan ou part à Assinie,
Assouindé, Bouaké et Yamoussoukro, la capitale politique du pays. Cette capitale surprend par la beauté
du site, la verdure et les magnifiques plans d’eau. C’est un centre éducatif et un centre privilégié pour les
golfeurs avec un parcours de 18 trous. La Fondation Félix Houphouët Boigny, centre de recherche
politique et historique, le Palais des hôtes, l’hôtel de ville, les Églises, la Mosquée, le Lac sacré des
crocodiles, la Basilique Notre Dame de la Paix, plus grande que St-Pierre de Rome, le parc
d’Abokouamékro constituent les grands points sur le plan touristiques.
Genre de touristes
Abidjan
Intérieur
du pays
Taux
Village
de vacances
Taux
Étrangers
850 000
120 000
25%
100 000
84%
Résidents
350 000
370 000
75%
20 000
16%
Total
1 200 000
490 000
100%
120 000
100%
Source : Ministère du Tourisme, 1984.
Tableau 1 : Évaluation du nombre de nuitées dans les différents établissements hôteliers
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