Rencontrer un écrivain pour entrer en littérature. Armel Job, figure montante de la littérature belge contemporaine, a accepté de consacrer un peu de son temps précieux à nos élèves du troisième degré. Un vrai cadeau. Comment devient-on un écrivain célèbre ? Comment se construit une histoire ? Combien de temps faut-il pour écrire un roman ? Y a –t-il des romans ratés ? S’inspire-t-il de son vécu ? D’où lui vient le sujet de ses histoires ? Comment a-t-il commencé à écrire ? Armel Job adore les histoires, il en écrit et lorsqu’il répond aux questions, il en raconte : l’histoire de son enfance, de son papa, matelassier, de la publication de son premier roman, de rencontres marquantes… L’auditoire ne se lasse pas d’écouter. La littérature aide à vivre. En tout cas, elle ouvre l’esprit et suscite la tolérance. Armel Job décrit l’âme humaine, sonde ses abymes et sa noirceur et pourtant, son regard reste bienveillant, ses personnages, même criminels, échappent à la condamnation du lecteur, à la justice légale. L’auteur explique… À partir d’une réflexion, d’une situation vécue, d’un fait divers soigneusement noté, sur le vif, dans un petit carnet, il décide de raconter une histoire : un personnage nait. Il s’agit encore d’une esquisse, d’une caricature réduite à de grands traits, mais, petit à petit, l’écrivain va percer ses secrets, le faire évoluer, expliquer son comportement, ses agissements. Jour après jour, devant son ordinateur, Armel Job retrouve son personnage, l’écoute, le découvre et la créature caricaturale du début se nuance jusqu’à devenir un être de papier, attachant, humain, avec ses problèmes, ses faiblesses et ses errances. L’écrivain affirme que l’écriture lui a appris la tolérance, la prudence. Il veille à éviter les jugements hâtifs, les préjugés. Ce n’est pas pour rien qu’il a repris la forme d’un commandement pour le titre d’un roman « Tu ne jugeras point ». On ne peut être plus clair. Les élèves soulèvent alors le problème des mystères qui sont proposés, parfois élucidés, mais pas toujours ; la fin est comme suspendue, l’histoire reste inachevée. Pour l’auteur, la lecture est une collaboration, le lecteur participe au récit, c’est à lui d’imaginer, de compléter les non dits, de se représenter le physique des personnages très peu décrits, de prolonger l’histoire. Le récit est une tranche de vie avec un avant et un après confiés au lecteur qui portera, en lui, les difficultés et les égarements des personnages et les fera vivre. Armel Job insiste aussi sur le travail, les heures nombreuses consacrées à l’écriture, les deux romans avortés et tout son travail perdu, le plaisir d’avancer avec ses personnages, de poser les jalons de l’intrigue et de les résoudre... Son auditoire est suspendu à ses lèvres : magie du verbe et du récit bien mené. Bernadette Culot