L`étonnante vitalité du marché du logement fait encore

CONSTRUIRE SA MAISONDIAGNOSTICS FINANCER
ET INVESTIR
Qu’il s’agisse des
logements de la capitale,
de l’Ile-de-France ou des
grandes villes de France,
la hausse des prix
ne connaît pas de répit
depuis 1997. Le succès
des maisons ne
se dément pas p. II et III
Ceux qui font
bâtir s’adressent
surtout aux
constructeurs.
Faire appel
à un architecte
reste le fait
d’une minorité
p.IX
 
Les crédits
bon marché encouragent
les acquéreurs à s’endetter
de plus en plus
et incitent les épargnants
à acheter un logement
destiné à la location
p.XetXI
Après l’amiante,
les termites,
le plomb, les
vendeurs vont
devoir informer
sur l’état des
conduites de gaz
et les risques
naturels p.VI

A
lors que les analystes
les plus optimistes pré-
disaient, pour 2002,
un arrêt de la hausse
des prix, débutée en
1998, et une stabilité
de l'activité, on ne peut que consta-
ter le phénomène inverse :
626 000 logements anciens se
seront vendus en 2002, ce qui consti-
tue un record, à des prix qui n'ont
toujours pas cessé de monter. On
s'attendait à atteindre un pic à la fin
du premier semestre 2002, lorsque
la situation économique donnait
ses premiers signes de dégradation,
mais il n'en a rien été puisque la
hausse s'est, au contraire, emballée
dans cette période. L'année 2002
s'achève, à Paris, avec une progres-
sion des prix de 10 % en un an, con-
tre 9,2 % en 2001, 12,9 % en 2000,
11,4 % en 1999 et 0,53 % en 1998 :
en cinq ans, les prix parisiens se
sont donc appréciés de plus de
50 %. Le fait nouveau, par rapport à
la hausse précédente des années
1988 à 1990, c'est que l’augmenta-
tion actuelle touche sérieusement la
province : entre 1997 et 2002, les
prix des appartements y ont grimpé
de 40,4 % et ceux des maisons de
50 %, selon l'indice de la Fédération
nationale des agents immobiliers
(Fnaim). La tendance semble se
poursuivre en ce début 2003 : « Nos
agences connaissent une activité sou-
tenue, malgré les menaces de guerre
en Irak qui paraissent, au contraire,
doper les achats », s'étonne Bernard
Grech, président du réseau d’agen-
ces d'Orpi.
   
La résistance et la vitalité de
l'immobilier sont d'abord dues à la
faiblesse des taux d'intérêt des prêts
bancaires, en baisse permanente
depuis trois ans et qui ont, eux aus-
si, atteint leur record historique vers
le bas : on peut, aujourd'hui,
emprunter à moins de 4 %, en taux
révisable. Cela permet aux accé-
dants à la propriété de s'endetter
plus et plus longtemps. « La durée
moyenne des prêts s'est allongée de
quatre ans, entre 1994 et 2002, et
atteint désormais 16,3 années », expli-
quait Michel Mouillart, professeur
d'économie de l'immobilier à l’uni-
versité Paris-X Nanterre, lors du
point de conjoncture présenté par
la Fnaim les 23 janvier : « Le nombre
d'emprunteurs à plus de 20 ans a dou-
blé, puisqu'ils étaient 4 % en 1997 et
8 % en 2002. »
La grave pénurie de biens à louer
pousse, en outre, les candidats au
logement à se tourner vers l'acces-
sion tandis que les investisseurs dis-
posant d'une épargne choisissent
d’acquérir un logement en vue de le
louer. Démarrée en mars 2000, la
déconfiture boursière dont on ne
prédit pas encore la fin, fait
d'ailleurs réfléchir beaucoup d'épar-
gnants qui voient dans l'immobilier
d'habitation un moyen bienvenu de
diversification et de sécurisation de
leur patrimoine.
La demande de grands loge-
ments, maisons et appartements
familiaux, est bien supérieure à ce
que le marché peut offrir et entre-
tient, elle aussi, le mouvement de
hausse. « Ce dynamisme des prix est
dû aussi à l’amélioration du revenu
disponible de plus de 2 % dont ont,
malgré tout, bénéficié les ménages, en
2002, grâce aux allègements fis-
caux », explique Geneviève Lhom-
me, spécialiste de l'immobilier au
Crédit agricole.
Le net déplacement de popula-
tions vers les villes du sud de la Fran-
ce y renforce la demande de loge-
ments et l'inflation des prix. Les
zones frontalières subissent la pres-
sion des voisins suisses ou alle-
mands, voire italiens, sur la Côte
d'Azur. Il n'y a pas que les grandes
villes qui soient touchées : dans les
campagnes et les zones touristi-
ques, l'engouement pour les résiden-
ces secondaires fait enfler les prix
des villas et des propriétés. Secon-
daires, elles le sont de moins en
moins, car, grâce au télétravail, au
TGV et aux 35 heures, elles devien-
nent des résidences principales ou
alternées pour des citadins avides
de nature et de tranquillité. Les cam-
pagnes voient aussi s'installer des
citoyens venus de toute l'Europe,
anglais en Aquitaine et en Norman-
die ou européens du Nord en Midi-
Pyrénées et sur la côte landaise.
Leur pouvoir d'achat et leurs réfé-
rences en matière de prix des loge-
ments engendrent, localement, une
surenchère.
 ’   
La hausse des prix des logements
entraîne une redistribution entre
régions et, dans les villes, entre les
quartiers. Au palmarès des villes chè-
res, l'attractivité économique fait
gagner des places à des cités comme
Dijon, passée du 13eau 10erang, en
2002, et Metz, dont les valeurs
immobilières surpassent celles de
Nancy. On assiste à un rattrapage
des prix dans des villes jusqu'ici bon
marché, comme Lyon, Bordeaux ou
Marseille.
La tendance au desserrement
urbain, qui voit des familles quitter
les centres-villes pour disposer de
plus d'espace en périphérie, se pour-
suit dans toutes les grandes agglomé-
rations. La valorisation des maisons,
dont les prix progressent jusqu'à
deux fois plus vite que ceux des
appartements, témoigne de ce
besoin d'espace et de verdure. L'éloi-
gnement peut même aller jusqu'à 20
ou 30 kilomètres de la ville-centre, là
où les terrains sont encore aborda-
bles et les règles d'urbanisme plus
légères, parce que non inclus dans
les périmètres de schémas de cohé-
rence territoriale (SCOT) : des cons-
tructeurs de maisons et des lotis-
seurs disent, ainsi, travailler de plus
en plus « hors SCOT ».
Grâce à une politique volontariste
des villes qui s'équipent de trans-
ports et requalifient leurs anciens
sites industriels délaissés, des quar-
tiers entiers sortent de terre, se valori-
sent et s'apprêtent à accueillir les clas-
ses moyennes et aisées, chassées de
leurs quartiers habituels où les prix
sont devenus inaccessibles. Des pro-
grammes neufs originaux, qui pré-
voient de généreux volumes, des ter-
rasses et des jardinets, connaissent
un étonnant succès commercial.
La hausse des prix des logements
est un phénomène européen en rai-
son, sans doute, de la convergence
des économies, notamment en
matière de taux d'intérêt des crédits.
Au Royaume-Uni, selon la banque
Halifax, l’augmentation atteint 23 %
en 2002. A Londres, le mètre carré
est trois fois plus cher qu'à Paris. En
Espagne, les logements neufs ont
renchéri de 58 % entre 1996 et 2001.
Cette progression, apparemment
inexorable, endette les ménages par-
fois au-delà du raisonnable et rend
les villes inaccessibles à une majorité
de la population. La remontée du
chômage, en particulier en France,
pourrait enrayer cette spirale en
2003.
Isabelle Rey-Lefebvre
En dépit
d’une croissance
déclinante,
l’ascension des prix
immobiliers ne
connaît pas de
répit. Au contraire,
elle s’est accélérée
au deuxième
semestre 2002
et s’étend aux
quartiers les plus
modestes. En 2003,
cette spirale devrait
s’interrompre
avec la montée
du chômage.
Indice des prix des logements
en province
FORTE HAUSSE
Source : Perval/banque de données des notaires
94 98 02
80
100
120
140
160
Appartements
Maisons
153,6
125
L’étonnante vitalité du marché du logement
fait encore monter les prix
SUPPLÉMENT AU « MONDE » DU JEUDI 20 MARS 2003, NO18087. NE PEUT ÊTRE VENDU SÉPARÉMENT
CONJONCTURE
IMMOBILIER
JEUDI 20 MARS 2003
S
ur le front de l’immobilier
parisien, l’année 2002 aura
déjoué tous les pronostics.
Dans une période d’incerti-
tude et de fort ralentisse-
ment économique, on
attendait au moins une pause dans
l’envolée des prix des logements.
Les plus optimistes pariaient sur une
parenthèse, avant un rebond qui
accompagnerait la reprise économi-
que. Les plus pessimistes pronosti-
quaient une stabilisation des prix à
un niveau plafond, prélude à un
« assainissement » du marché et le
retour à des prix plus raisonnables.
Il n’en a rien été…
Selon les chiffres provisoires de la
Chambre des notaires de Paris, la
hausse des prix intra-muros a même
renoué avec un nombre à deux chif-
fres, avec plus de 10 % de hausse…
En 2001, la progression avait été
légèrement inférieure à ce chiffre
(9,2 %). Paradoxe, la seconde moitié
de l’année a été meilleure que la pre-
mière. A la phase d’attentisme des
premiers mois (0,5 % de hausse des
prix seulement au premier trimes-
tre), a succédé une vive reprise sur la
fin de l’année (4 % au troisième tri-
mestre, un peu moins de 3 % au qua-
trième). A la fin septembre 2002, le
prix moyen par mètre carré s’établis-
sait à 3 424 euros. Pour la première
fois, ce prix moyen du troisième tri-
mestre se hisse, en euros courants,
au niveau de la « bulle immobilière »
de 1991. En euros constants, ce prix
est toutefois encore inférieur de
15 % à ce record du début des
années 1990 (1 542 euros contre
1 825 euros).
37 000   2002
Même surprise sur le front du
nombre des transactions : la haus-
se des prix n’a pas découragé les
acheteurs. Le volume des transac-
tions est resté quasiment stable en
2002 avec 37 000 ventes annuelles
(environ 1 % de baisse, mais les
chiffres définitifs seront fournis
par la Chambre des notaires de
Paris à la mi-avril). Rien à voir avec
le début des années 1990 où, au
plus haut de la période d’euphorie
immobilière, on avait assisté à une
forte baisse des transactions (qui
étaient passées de 44 000 par an en
1989 à 24 000 en 1991). De même,
le brutal décrochage de l’an-
née 2001 – où le début de l’éclate-
ment de la bulle boursière s’était
traduit sur le marché immobilier
par un recul de 7,7 % des transac-
tions – ne semble lui aussi plus
qu’un mauvais souvenir.
Tous ces indicateurs paraissent
indiquer que les fondements du mar-
ché immobilier restent solides. Plu-
sieurs phénomènes semblent expli-
quer ce contexte inédit. La pénurie
de logements locatifs s’est aggravée.
Et les dispositifs fiscaux qui inci-
taient les particuliers à investir dans
le logement locatif ont disparu : le
dispositif Besson, qui encadre les
loyers et instaure un plafond de reve-
nu pour les locataires, ne fonctionne
pas à Paris, compte tenu du prix des
appartements, contrairement au dis-
positif Périssol.
Beaucoup de particuliers à la
recherche d’un appartement à louer
se découragent face à la rareté de
l’offre et choisissent de franchir le
pas et d’accéder à la propriété. Paral-
lèlement, beaucoup de locataires
sont incités à acheter leur propre
appartement par leurs propriétaires,
des investisseurs institutionnels
comme les assureurs ou les banques
qui profitent du niveau élevé des
prix pour réaliser des plus-values sur
leur portefeuille immobilier.
Le niveau exceptionnellement bas
des taux d’intérêt invite à troquer
son statut de locataire pour celui de
propriétaire. Les taux fixes, compris
entre 4,5 et 5 % et les taux variables,
inférieurs à 4 %, augmentent consi-
dérablement le potentiel d’endette-
ment de l’acheteur. Les particuliers
découvrent – souvent avec étonne-
ment – que leurs banquiers sont
prêts à leur accorder des montants
inespérés, ce qui soutient les prix éle-
vés. L’allongement de la durée des
emprunts (jusqu’à 25 ans) amplifie
encore ce phénomène. L’investisse-
ment locatif est donc devenu une
dépense courante pour les particu-
liers qui occupent les appartements
qu’ils achètent.
En vedette à Paris, les 6e,7
e,
au-dessus de 5 000 euros, et les 5e,
16e,4
eet 8e, tous au-dessus des
4 000 euros. Depuis la crise de 1997,
les quartiers du centre de Paris (du
1er au 7e) sont ceux qui ont le plus
progressé, avec des hausses de prix
d’environ 50 %. Aux quartiers bour-
geois traditionnels sont venus s’ajou-
ter de nouveaux quartiers « bran-
chés ». L’effet « bo-bo » bour-
geois bohème ») a ainsi joué sur
l’Est parisien, où certains quartiers
considérés auparavant comme
populaires ont été pris d’assaut. Le
9earrondissement enregistre ainsi
l’une des plus fortes progressions
(+ 61 %). L’attention s’est aussi por-
tée sur certains secteurs des 10eet
11e, où le canal Saint-Martin, Bastille
et Oberkampf ont enregistré des
hausses de 40 % à 50 %. En queue de
peloton, pour la progression des
prix en cinq ans (1997-2002), on trou-
ve tous les derniers arrondissements
de Paris (du 16eau 20e), ainsi que
curieusement le 8e, mais avec de for-
tes disparités par microquartiers
dans ce dernier. Certains secteurs du
8esemblent souffrir de la désertion
des habitants au profit des bureaux.
Phénomène significatif des derniè-
res années de hausse, les quartiers
les plus recherchés ont encore plus
profité de la flambée du marché :
alors que le rapport entre les quar-
tiers les plus chers et les moins chers
s’établit aux alentours de 2 en pério-
de de crise (1985 et 1997), il monte
jusqu’à près de 2,5 en période
d’euphorie (1991 et 2002).
     
Le niveau atteint par les prix intra-
muros commence cependant à
décourager les particuliers, qui repor-
tent leurs investissements à la péri-
phérie et dans les communes de la
petite couronne. Conséquence, le
rythme de la hausse des prix se stabi-
lise à Paris, alors qui s’accélère
au-delà du périphérique. Selon les
notaires, la hausse est passée de 9 %
à 10 % à Paris, mais de 6 % à 9 %
dans la première couronne…
Autre phénomène, le marché des
biens chers et exceptionnels ralentit
beaucoup plus vite. Les notaires
sont convaincus qu’on a atteint sur
certains produits un « prix pla-
fond ». « On sent une résistance »,
explique l’un d’eux. Même senti-
ment, mais cette fois-ci sur l’ensem-
ble du marché, pour Grégoire Ber-
thou, directeur de la communication
de De particulier à particulierLes
vendeurs, gourmands, ont augmenté
les prix en 2002 dans leurs annonces,
mais le prix réel des transactions est,
en fait, resté très proche des niveaux
de l’an dernier », fait-il remarquer.
De nouveau en ce début de l’an-
née 2003, les professionnels s’inter-
rogent sur l’orientation des prix.
Pour M. Berthou, il ne fait pas de
doute que la période de hausse est
terminée. Son journal, qui affirme
qu’environ un quart des transac-
tions sur Paris transite dans ses
pages, a enregistré un net ralentisse-
ment de la hausse sur l’année 2002
(4,7 % environ) et une baisse des
prix a même été relevée sur les deux
derniers trimestres, avec un recul de
respectivement 1 % et 0,19 % du prix
moyen au mètre carré. Six arrondis-
sements (le 1er,le2
e,le12
e,le13
e,le
14eet le 19e) affichent même des évo-
lutions négatives sur l’ensemble de
l’année. M. Berthou explique ce
décalage avec les chiffres des notai-
res par le fait que le journal d’annon-
ces enregistre le montant des pro-
messes, et non celui des ventes, et
décèlerait les grandes tendances du
marché avec trois mois d’avance.
Difficile donc de faire des pronos-
tics. Officieusement, certains notai-
res estiment qu’une baisse des prix
dans les prochains mois « serait nor-
male et n’aurait rien d’exceptionnel. »
Mais au début de l’année 2003, De
particulier à particulier a constaté
que les prix étaient repartis à la haus-
se, avec une progression de 2,20 %
entre le 1er janvier et le 14 mars.
Depuis un an, la hausse est de
1,96 %, compte tenu de la faiblesse
des deux derniers trimestres 2002.
S’acheminerait-on au moins vers
une relative stabilité des prix ?
Christophe Jakubyszyn
L
es mêmes causes produi-
sent les mêmes effets. En
2002, comme en 2001, le
niveau élevé des prix de
l’immobilier à Paris intra-
muros, la pénurie d’appar-
tements ou de maisons à louer et des
conditions de crédit très avantageu-
ses ont poussé les prix des logements
à la hausse dans la petite couronne
(les trois départements limitrophes
de Paris : Hauts-de-Seine, Seine-
Saint-Denis et Val-de-Marne) et,
par extension, dans la grande
couronne (les départements limitro-
phes de la petite couronne : Yvelines,
Val-d’Oise, Seine-et-Marne et Esson-
ne). « Le phénomène d’escargot conti-
nue, explique MeCatherine Carely,
notaire à Nogent-sur-Marne.
L’immobilier dans le centre et l’ouest
de Paris devenant inabordable pour
beaucoup, l’intérêt se déplace vers
l’Est parisien, puis vers la petite couron-
ne, et va maintenant vers la grande
couronne. »
La distinction Paris-banlieue – la
barrière du périphérique – n’a pas
complètement disparu, mais en ter-
mes de prix au mètre carré, elle s’atté-
nue. Les prix à Neuilly ou Levallois-
Perret tutoient ceux des 16eet
17earrondissements de Paris. Vin-
cennes et Saint-Mandé approchent,
voire dépassent, les prix du 12earron-
dissement. Saint-Cloud, Boulogne,
Issy-les-Moulineaux, Meudon, mais
aussi La Garenne-Colombes, Cour-
bevoie, Rueil-Malmaison, sont plus
chers que les arrondissements du
nord-est de Paris. Les communes
limitrophes de Paris abordables sont
de plus en plus rares : Montrouge
n’est pas loin des prix de la capitale,
et Montreuil ou Pantin, qui restent
encore décalées, attirent une nouvel-
le clientèle parisienne. Saint-Denis
commence aussi à le faire, avec timi-
dité, l’intérêt commençant à se por-
ter sur la Plaine-Saint-Denis mais
encore assez peu sur le reste de la
commune. L’intérêt de s’éloigner de
Paris est clair. Selon les statistiques
calculées par les spécialistes de Parti-
culier à particulier, la surface moyen-
ne vendue lors des transactions
immobilières à Paris intra-muros est
de 44,49 mètres carrés pour un prix
moyen de 152 763 euros. En Ile-de-
France, hors Paris, la surface moyen-
ne des appartements vendus monte
à 62 mètres carrés pour un prix
moyen de 128 477 euros. Les ache-
teurs peuvent surtout y trouver les
maisons dont ils rêvent. Mais il faut
aller de plus en plus loin.
Résultat, le marché de la grande
couronne a été le plus actif en 2002,
avec une progression des ventes, sur
les seuls trois premiers trimestres de
l’année, de 10,2 %, contre 3,6 % pour
la petite couronne, selon les chiffres
de la Chambre interdépartementale
des notaires de Paris. « Dans le Val-
de-Marne, dans des villes comme
Saint-Maur-des-Fossés ou Nogent, on
ne trouve plus de maison pour un bud-
get de 150 000 euros. Les candidats à
l’achat vont donc vers la Seine-et-
Marne », explique MeCarely. « Tous
les départements sont au vert, sauf
l’Essonne », commente un notaire. La
Seine-Saint-Denis a aussi du mal à
confirmer son décollage. Si les trans-
actions y ont augmenté de 1,8 % sur
les trois premiers trimestres de 2002,
elles auraient reculé au quatrième tri-
mestre, alors que la plupart des au-
tres départements connaissaient une
hausse sensible. Au sein de chacun,
et souvent à l’intérieur d’une même
commune, les marchés sont très con-
trastés, en fonction de la desserte par
les transports en commun et de
l’aménagement des quartiers.
Ce dynamisme bouleverse aussi
les hiérarchies dans les hausses de
prix. Traditionnellement, quand les
tarifs de l’immobilier montent, c’est
à Paris que les progressions sont les
plus fortes, puis dans les Hauts-de-
Seine. Actuellement, constatent les
notaires, l’inflation des prix dans les
départements limitrophes est au
moins aussi forte. Les données des
notaires montrent par exemple que
les prix au mètre carré pour des
appartements anciens ont grimpé de
9,2 % à Paris entre le troisième tri-
mestre 2001 et le troisième trimestre
2002, pour une hausse de 9,4 % dans
les Hauts-de-Seine, 9,7 % dans le Val-
de-Marne et 9,5 % pour l’ensemble
de la petite couronne.
Est-ce le signe avant-coureur d’un
retournement du marché ? Les pro-
fessionnels refusent de s’y résoudre.
Pour deux raisons. La première est
que, selon eux, il n’y a pas de bulle
spéculative. Le marché est tiré par la
demande finale : « Les gens achètent
des logements pour y habiter, ce ne
sont pas les marchands de biens qui
tirent le marché », constate un profes-
sionnel. « On remarque en particulier
deux catégories d’acheteurs, confirme
MeCarely : les primo-accédants à la
propriété, qui, faute d’offre locative, se
décident à acheter leur logement, et
ceux dont la famille s’agrandit, qui
revendent leur bien pour acheter plus
grand, en empruntant pour faire le
joint. » Dans les deux cas, ils tirent les
prix à la hausse. Ce n’est pas tant lié à
l’amélioration de leurs revenus ou de
leur cagnotte qu’au niveau très faible
des taux d’intérêt. Grâce à ceux-ci et
au fait que les banques acceptent de
prêter sur des durées plus longues,
tout en se montrant parfois moins
exigeantes sur la proportion d’ap-
port personnel, ils ont davantage de
moyens. « Avant que le marché parte
à la baisse, il y a forcément un palier.
on ne l’a pas encore vu », conclut
MeCarely. Un autre notaire prévient
toutefois qu’il ne faut plus s’attendre
à des progressions fortes.
Sophie Fay
Source : Chambre interdépartementale des notaires de Paris
PEU DE COMMUNES EN BAISSE
+ 29,5
+ 19,8
+ 15,7
+ 15,3
+ 14,9
+ 13,4
+ 12,8
+ 12,8
+ 10,7
+ 10,3
+ 8,6
+ 7,2
+ 6,7
+ 5,8
- 7,3
- 4,3
-2,8
+ 22,2
3 459
2 424
2 732
1 678
3 227
2079
2604
1 942
3045
2 150
3 162
2 588
2 235
2 219
2 458
1 642
2 282
1 299
+ 12,2 1 951
+ 11,8
+ 11,5
+ 11,2
+ 10,9
+ 9,4
+ 7,1
+ 3,6
+0,7
1 432
1 750
1 523
1 539
1 152
1 545
1 468
1 169
- 3,7 794
+ 19,3 1 728
+ 13,0 2 870
+ 12,2 2 769
+ 11,2 2 259
+ 10,3 2 150
+ 7,5 1908
+ 6,6 2 385
- 4,7 1 180
Variation sur
un an
(3
e
trim. 2002/
3
e
trim. 2001)
Prix en
Euros/m
2
(Appart. anciens
vendus libres)
HAUTS-DE-SEINE
En hausse
SEINE-SAINT-DENIS
En hausse
Sceaux
Aulnay-sous-Bois
La Garenne-
Colombes
Issy-les-
Moulineaux
Colombes
Levallois-Perret
Bois-Colombes
Rueil-Malmaison
Nanterre
Saint-Cloud
Suresnes
Boulogne-
Billancourt
Meudon
Montrouge
Antony
Vaucresson
Bagneux
Bourg-la-Reine
En baisse
Variation sur
un an
(3
e
trim. 2002/
3
e
trim. 2001)
Prix en
Euros/m
2
(Appart. anciens
vendus libres)
VAL-DE-MARNE
En hausse
En baisse
Les Lilas
Le Bourget
Le Raincy
Livry Gargan
Bagnolet
Bobigny
Montreuil
Pantin
Saint-Denis
Clichy-sous-Bois
Créteil
Vincennes
Charenton-le-Pont
Saint-Maur-des-
Fossés
Le Perreux sur
Marne
Maisons-Alfort
Nogent sur Marne
Villeneuve Saint-
Georges
En baisse
Le marché de l’immobilier parisien affiche une santé insolente
En 2002, les prix ont encore progressé de plus de 10 %, même si les signes d’un prochain ralentissement apparaissent.
Après un net fléchissement en 2001, le nombre des transactions s’est stabilisé, signe que la demande de logements reste forte
2 428 €
(+ 9,1 %)
2 520 €
(+ 11,7 %)
2 594 €
(+ 11,1 %)
3 300 €
(+ 9,2 %)
3 054 €
(+ 9,6 %)
2 556 €
(+ 9,8 %)
3 154 €
(+ 8,9 %)
3 185 €
(+ 10,6 %)
3 663 €
(+ 8,6 %)
3 734 €
(+ 8,4 %)
4 413 €
(+ 7,2 %)
4 289 €
(+ 11,8 %)
3 461 €
(+ 11,8 %)
5 348 €
(+ 6,7 %) 5 473 €
(+ 8,0 %) 4 538 €
(+ 7,6 %)
L
a
S
e
i
n
e
Ier IIIe
IVe
Ve
VIe
VIIe
VIIIe
IXeXe
XIe
XIIe
XIIIe
XIVe
XVe
XVIe
XVIIeXVIIIe
XIXe
XXe
IIe
Prix au m2des appartements anciens
(en %) (valorisation indices notaires-Insee Paris, chiffres provisoires, fin 3etrimestre 2002)
inférieur à 3 000 € de 3 001 € à 4 000 €
de 4 001 à 5000 € supérieurà5001€
LA HAUSSE SE POURSUIT À UN RYTHME SOUTENU
Source : Chambre des notaires de Paris
Moyenne globale : 3 424 €/m2(+ 9,24 %)
•II
e
•I
er
• IIIe
•IV
e
3 462 € (+ 9,5 %)
4 404 € (+ 12,2 %)
3 884 € (+ 10,8 %)
4 485 € (+ 11 %)
CONJONCTURE
La frontière entre Paris intra-muros et la petite couronne s’estompe
En termes de prix, la différence entre certains arrondissements de Paris et les communes limitrophes ou les villes résidentielles bien
desservies par les transports s’atténue. Pour trouver des prix abordables, il faut s’éloigner, ce qui profite à la grande couronne
L'AUGMENTATION NE CONNAÎT PAS DE RÉPIT
Source : Chambre interdépartementale des notaires de Paris * chiffres provisoires
500
1 000
1 500
2 000
2 500
3 000
3 500 3 422 € 3424€
1 194 €
1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02*
Prix courants par m2,
en euro (chiffre du 3
e
trimestre)
Prix courants
par m2,eneuro
Nombre
de transactions
30 000
32 000
42 575
42 000
27 353
26 543
24 774
31 979
42 898
40 433
37 000
34 500
II/LE MONDE/JEUDI 20 MARS 2003
L
ors du précédent cycle
immobilier, de 1987 à
1992, le phénomène de
hausse puis de baisse des
prix s’était quasiment can-
tonné à la région parisien-
ne et n’avait pas atteint les autres
régions. La hausse, repartie avec
1997 et 1998, touche cette fois avec
vigueur les principales villes de Fran-
ce : l’indice des notaires, issu de leur
base de données Perval, a, entre 1997
et 2002, pour la province, progressé
de 30 %, pour les appartements et de
39,7 % pour les maisons. Les ventes
de maisons représentent 70 % du
nombre total de transactions, ce qui
conduit à une hausse d’ensemble,
tous biens confondus, de 36 %, pro-
che des records parisiens.
'«   »   
Dans certaines villes, la hausse est
spectaculaire : à Marseille, l'augmen-
tation annuelle, entre 2001 et 2002,
dépasse 15 % et 53 % sur la période
1998-2002 ; à Nantes, la dynamique
des prix est similaire, avec une pro-
gression annuelle de près 10 % et de
44,5 % en cinq ans ; les prix des loge-
ments d'Aix-en-Provence, Nice et
Grenoble ont augmenté de près de
40 % depuis 1998. Des villes moins
importantes connaissent aussi des
progressions étonnantes, comme
Metz, avec 7 % sur un an et 39 % sur
cinq ans, qui surpasse désormais sa
rivale Nancy ; Toulon a enregistré
15,7 % de hausse en un an, et 37,6 %
en cinq ans. Toulouse et Montpellier
paraissent presque raisonnables,
avec une hausse moyenne respective
de 24,8 % et 27,8 % en cinq ans, mais
les prix des maisons y battent toute-
fois des records d'inflation : le budget
moyen d'un pavillon à Balma ou
Cugnaux, dans la banlieue de Toulou-
se, s'est alourdi de 20 % en une seule
année, entre 2001 et 2002. Les rai-
sons de ces hausses sont multiples :
une attractivité économique trouvée
ou retrouvée pour ces villes, un
afflux de population à l'« effet
Sud » ou encore une pression des
frontaliers sur les villes d’Alsace ou
du pays genevois, comme, par exem-
ple, Annemasse et, dans le pays de
Gex, Divonne et Ferney-Voltaire.
Ces dernières voient s’envoler les
prix depuis que des accords bilaté-
raux franco-suisses permettent aux
citoyens helvètes de résider en Fran-
ce. Les communes de la rive gauche
du lac Léman, à quelques kilomètres
de l’aéroport de Cointrin, des sièges
d’organisations internationales ou
du Centre européen pour la recher-
che nucléaire (Cern) attirent ingé-
nieurs et hauts fonctionnaires à fort
pouvoir d’achat. Le mètre carré de
logement neuf atteint 3 000 euros,
contre 2 400 euros, en 2000.
La hausse des prix est aussi liée aux
investissements des municipalités
pour s’équiper de moyens de trans-
port modernes, comme le tramway,
en cours d’installation à Bordeaux,
prévu à Marseille et Rouen, et en
cours d’extension à Montpellier, Tou-
louse ou Nantes.
  
Les villes entreprennent à marche
forcée la requalification de leurs quar-
tiers délaissés, des friches industriel-
les ou des zones portuaires, qui peu-
vent séduire une nouvelle clientèle
de cadres moyens et d’investisseurs
en locatif. « Avec la poussée des prix,
nous observons un vrai changement de
la composition sociale de certains quar-
tiers, où s’installent des catégories de
populations aisées ou moyennes qui ne
peuvent plus accéder aux secteurs les
plus cotés », analyse Bernard Grech,
président du réseau d’agences immo-
bilières ORPI. Bordeaux est ainsi par-
tie à la reconquête des quartiers des
Chartrons et de la rive droite de la
Gironde, avec la zone d’aménage-
ment concerté (ZAC) Bastide. Lille a
réussi la création de son quartier d’af-
faires Euralille et requalifie les quar-
tiers autrefois ouvriers de Wazemes,
Fives et Saint-Maurice, au nord-est.
Nantes ouvre trois nouvelles ZAC
sur l’Ile de Nantes et au sud de la Loi-
re et prolonge ses lignes de tramway.
Rennes s’attaque à l’énorme chantier
d’une friche industrielle de 62 hecta-
res coincée entre la Vilaine et le che-
min de fer, à l’est de la ville, qui
devrait, à terme, accueillir 8 000 habi-
tants dans 3 500 logements. Lyon a
mis en route son projet Confluence
de centre commercial et de loisirs pré-
vu, à l’horizon 2007, sur la presqu’île,
au-delà des voûtes, derrière la gare
de Perrache, sur un terrain bien placé
mais jusque-là délaissé parce qu’il
accueillait entrepôts et prison. Le pro-
moteur MAB, la foncière hollandaise
Corio et l’architecte Jean-Paul
Viguier ont été retenus.
L’exemple le plus spectaculaire de
reconquête est sans doute Euromé-
diterranée, à Marseille. Cette opéra-
tion d’intérêt national, lancée en
1995 par l’Etat, s’étend sur 310 hecta-
res dans les quartiers centraux
autour de la gare Saint-Charles, sur
la friche de la Belle de Mai et la zone
portuaire. La ville a enrayé son
déclin démographique et attire
désormais les entreprises. Son objec-
tif est de compter 10 000 nouveaux
habitants par an, de construire 4 000
logements neufs et de réhabiliter
6 000 logements anciens. Cela passe
par la rénovation des immeubles de
la rue de la République, qui accueille-
ra un tramway. Dans le quartier de
la Joliette, derrière les docks, les
grands promoteurs se bousculent :
Kaufmann & Broad va édifier
250 logements ; George V Apollo-
nia, avec le concours des architectes
Roland Castro, Yves Lion et Sophie
Denissof, vient de livrer le premier
programme d’habitat d’Euromédi-
terranée, une opération originale de
350 lofts, maisons de ville et duplex
installés dans d’anciens hangars,
vendus en un temps record.
I. R.-L.
Source : Perval/Chambre des notaires
COÛT DU M2DANS LES MÉTROPOLES
1 770
1 420
1 370
1 320
1 320
1 320
1 320
1 270
1 260
1180
1 170
1 160
1140
1140
1 120
1 060
1110
700
1 850
13,6
8,9
8,4
3,3
9,9
11,1
15,3
5,5
6,7
7,1
3,0
11,6
13,9
5,3
15,7
4,3
0,3
2,8
12,7
39,8
32,2
27,5
12,5
44,5
38,4
53,4
15,9
26,2
38,9
11,9
31,4
27,8
24,8
37,6
13,7
6,6
14,4
41,4
Prix des
appartements,
en euros par m2
anciens 2002
au 30/06/2002
Evolution
sur un an
en
pourcentage
Evolution
sur cinq ans
en
pourcentage
villes
Aix-en-Provence
Nice
Lyon
Rennes
Strasbourg
Nantes
Grenoble
Marseille
Reims
Lille
Metz
Dijon
Bordeaux
Montpellier
Rouen
Saint-Etienne
Nancy
Toulon
Toulouse
  
La province touchée par la flambée des prix
Dans les principales villes de France, entre 1997 et 2002, les appartements ont augmenté de 30 % et les maisons de 39,7 %. A Marseille,
Nantes, Metz ou encore Toulon, la hausse est spectaculaire. La rénovation des quartiers délaissés explique en partie ce phénomène
La première tranche du programme M5 Les Docks, à Marseille, s'est vendue
en un week-end de juin 2002, au prix de lancement de 2 100 euros le mètre
carré, passé aujourd'hui à 2 250 euros.
CONJONCTURE
COMMENT CONNAÎTRE LES PRIX ?
Les notaires ont mis à la disposition du public leur banque de données de
prix, dans toutes les villes de France et leurs quartiers, qu’il s’agisse de neuf
ou d’ancien, sur le site immoprix.com.
Les magazines Challenge et Le Nouvel Observateur ont également leur
banque de données sur les prix dans 500 villes de France, avec un service
« calculette » d’évaluation du montant d’un appartement dont l’internaute
communique les caractéristiques, sur le site immobs.com.
De particulier à particulier concentre ses données sur la région parisienne
et propose également une évaluation du prix d’un appartement, à la rubri-
que Expertimmo, sur son site Pap.fr. La revue propose aussi des évaluations
personnalisées et payantes, par correspondance ou en prenant rendez-vous.
LE MONDE/JEUDI 20 MARS 2003/III
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