BEING PHILIPPE GOLD
ASSOIFFÉS
L’ENFANCE DE LART - DOIGTS D’AUTEUR DE MARC FAVREAU
LAVARE
LE LAC AUX DEUX FALAISES
ANTIGONE AU PRINTEMPS
LES ZURBAINS 2017
Cahier d’hiver
Théâtre Denise-Pelletier 1716 DIRECTION ARTISTIQUE CLAUDE POISSANT
LES CAhIERS / NUMéRO 98
LAVARE
SALLE DENISE-PELLETIER
15 MARS AU 8 AVRIL 2017
TEXTE - MOLIÈRE
MISE EN SCÈNE - CLAUDE POISSANT
AVEC SIMON BEAULÉ-BULMAN,
JEAN-FRANÇOIS CASABONNE, SAMUEL CÔTÉ,
SYLVIE DRAPEAU, LAETITIA ISAMBERT,
JEAN-PHILIPPE PERRAS, BRUNO PICCOLO,
FRANÇOIS RUEL-CÔTÉ, GABRIEL SZABO
ET CYNTHIA WU-MAHEUX
ASSISTANCE À LA MISE EN SCÈNE ET RÉGIE -
ALAIN ROY
SCÉNOGRAPHIE - SIMON GUILBAULT
MUSIQUE - LAURIER RAJOTTE
COSTUMES - LINDA BRUNELLE
LUMIÈRES - ALEXANDRE PILON-GUAY
PRODUCTION DU THÉÂTRE DENISE-PELLETIER
en savoir
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Abécédaire
par Louis-Karl Tremblay
POURQUOI ?
LAbécédaire est en train de devenir une tradition
des Cahiers, et j’aurais été bien mal avisée de ne
pas la continuer ! De toute façon, il s’agit d’une
joyeuse façon de creuser, dans notre cas, l’univers
d’un auteur qui est souvent monté, mais sur qui
on découvre toujours de nouvelles choses.
- J. Bond
Avarice
« La peste soit de l’avarice et des avaricieux. »
(LAvare, Acte I, Scène 3)
Le mot avare vient du latin avares qui signifie désirer
vivement. L’avarice est un vice très répandu en 1668.
L’économie stagne et le roi Louis XIV ne cesse d’augmen-
ter les impôts. La classe bourgeoise s’enrichit sur le dos
des moins nantis. Pour faire l’apologie de la générosité,
Molière, peintre des moeurs de son temps, imagine un
bourgeois qui est rongé jusqu’à la moelle par son désir
de l’argent.
Harpagon n’est pas le seul avare célèbre. On peut éga-
lement penser à Shylock dans Le Marchand de Venise de
Shakespeare ; à Séraphin, personnage emblématique de
Claude-Henri Grignon dans ses Belles histoires des pays d’en
haut ; à Ebenezer Scrooge, personnage de Un Conte de Noël
(A Christmas Carol) de Charles Dickens et même à Picsou,
personnage inventé par Barks et popularisé par Disney.
L’AVARE
Béjart, Madeleine
Madeleine Béjart est aux côtés de Molière tout au long de
sa carrière. Ils se rencontrent quelque part vers 1639 et
fondent en 1643 l’Illustre-Théâtre. Molière y apprend le mé-
tier de comédien et y joue les héros. La troupe ne connaît
pas un énorme succès et met fin à ses activités deux ans
après sa constitution. Leur dernière pièce les laisse dans
une impasse financière qui mènera à l’emprisonnement de
Molière. Se joignant à d’autres troupes, Madeleine et Mo-
lière font ensuite une tournée de treize ans en province
française et reviennent à Paris en 1658. De retour dans la
capitale, Madeleine, dont le talent d’actrice est salué par les
critiques de l’époque, jouera de grands rôles pour la troupe
de Molière. Elle interprète d’ailleurs Frosine à la création
de L’Avare.
Y a-t-il eu une idylle amoureuse entre Béjart et Molière ?
Nul ne confirme, mais beaucoup le supposent. Certains
historiens les disent amants, d’autres supposent que ce
sont des rumeurs inventées par les détracteurs de Molière.
Ces derniers sont allés jusqu’à dire qu’ils auraient eu une
enfant, Armande, que Molière épouse en 1662.
Madeleine et Molière décèdent tous deux le 17 février, à un
an d’intervalle, respectivement en 1672 et 1673.
Armande Béjart
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Colère, critique et censure du clergé
Les comédiens, auteurs et metteurs en scène de l’époque
sont très mal vus par les représentants de la classe
ecclésiastique. Ils sont accusés de libertinages, d’irréligion
et sont même excommuniés par certains évêques. Selon
les bien-pensants de la cour, ce sont des bohèmes sans
morale.
En plus d’être considéré comme libertin, Molière s’attire
l’ire du clergé et des dévots quand il écrit Le Tartuffe
ou l’Imposteur (1644), pièce qui dénonce l’hypocrisie
religieuse et fait réagir vivement le parti dévot. Même la
reine mère, Anne d’Autriche, contribue à faire interdire la
pièce. Tartuffe ne peut finalement être représenté qu’en
1669. Pourtant, à sa création, la pièce obtient un vif
succès.
Dot
La dot est le bien qu’une femme apporte au ménage en
se mariant. Traditionnellement, c’est le père de la mariée
qui fournit la dot à sa fille. Bien que cette coutume perd
en popularité au XIXe siècle, elle est encore pratiquée
à l’époque de Molière. Il existait même une « grille »
appelée Tarif ou Évaluation des partis sortables, pour
faire facilement les mariages. La dot était ainsi calculée
selon la fortune et la situation des pères. Pour les plus
nantis, le montant pouvait varier entre 150 000 et 300
000 livres (entre 750 000 et 1 500 000 $ aujourd’hui). On
comprendra pourquoi Harpagon, riche bourgeois rongé
par l’avarice, insiste pour marier sa fille Élise à Anselme
sans dot.
Envie
« Les envieux mourront, mais n’ont jamais l’envie. »
(Tartuffe, v.1666, Acte V, scène 3)
Autre figure importante dans le royaume de Louis XIV :
Jean-Baptiste Lully. Compositeur et violoncelliste, il est
surintendant de la musique du royaume. En collaboration
avec Lully, Molière écrit plusieurs comédies-ballets, parmi
lesquelles Le Mariage forcé, LAmour médecin, George
Dandin, Le Bourgeois gentilhomme. Même s’il jouit d’une
excellente réputation, la situation de Lully demeure
précaire et il n’a pas de salle où se produire. Il enviait
Molière, qui jouissait d’une situation financière aisée
et disposait de la salle du Palais Royal pour présenter
ses pièces. Pour améliorer son sort, Lully, plus rapide
que Molière, achète le « Privilège de l’opéra », privilège
vendu sous ordonnance royale, qui empêche quiconque
de produire un spectacle avec plus de deux airs et deux
instruments. Par conséquent, Molière ne peut donc plus
présenter une grande partie de son répertoire, comprenant
bon nombre de comédies-ballets. Comme l’ensemble de
la musique dans l’oeuvre de Molière est écrite par Lully,
les deux collaborateurs se livrent une guerre de droits
d’auteur et demeurent en conflit. Toutefois, Molière
obtiendra une dérogation à l’ordonnance royale pour
présenter son répertoire.
Fauteuil
Ce qu’on appelle « fauteuil de Molière » est maintenant un
objet mythique qui est passé à l’Histoire. Il s’agit en fait
d’un fauteuil Louis XIII ayant d’abord servi à la création
du Malade imaginaire, dernière pièce de l’auteur. En
1673, Molière, gravement malade, monte sur la scène du
Théâtre du Palais-Royal pour jouer Argan, sympathique
hypocondriaque, faisant un pied de nez à la maladie
qui l’afflige. À la quatrième représentation, lors de la
dernière scène, Molière aurait été pris d’un crachement
de sang, aurait été conduit chez lui et n’aurait survécu
que quelques heures. Après son décès, à la reprise de
la pièce, un autre Argan s’est assis dans ce fauteuil et
chaque fois qu’on jouait Le Malade imaginaire, il trônait
au centre du décor. Quand il n’était pas sur scène, on le
retrouvait dans la salle des comédiens et était réservé au
plus éminent comédien de la troupe. Plusieurs acteurs
se sont enorgueillis d’avoir eu l’honneur de s’y asseoir. Le
fauteuil est maintenant sous une cage de verre dans le
foyer de la Comédie-Française.
L’AVARE
Fauteuil de Molière
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Harpagon
Harpagon veut dire « rapace » en grec et « grappin » en
latin. Comme c’est Molière lui-même qui crée le rôle, ce
serait parce qu’il était pris du poumon qu’Harpagon est
affligé d’une vilaine toux. Plusieurs ont succédé à Molière
et ont pris les traits du désormais célèbre Avare. Parmi les
acteurs célèbres qui ont joué Harpagon, on compte Louis
de Funès qui adapta et réalisa le film en 1980.
Quelques-uns de nos Harpagon québécois :
Jean Gascon
(m.e.s. Jean Gascon TNM, inauguration 1951).
Gaston Lepage
(m.e.s Gaetan Labrèche, Théâtre Denise-Pelletier, 1981),
Luc Durand
(m.e.s. Olivier Reichenbach, TNM 1984-85)
Roland Lepage
(m.e.s. Jean-Pierre Ronfard, Théâtre du Trident, 1989-90),
Luc Durand
(m.e.s Luc Durand, Théâtre Denise-Pelletier, 1995),
Luc Guérin
(m.e.s. Serge Postigo, Juste pour Rire, 2010)
Influences et inspirations
L’auteur est influencé par le théâtre italien et notamment
par la commedia dell’arte, d’où il tire son sens du rythme,
quelques personnages (Mascarille, Scapin) et plusieurs
lazzis (numéros comiques). La comédie de Molière est
étudiée, calculée et ne repose pas sur des canevas ou des
improvisations comme chez les Italiens. Toutefois, les
historiens nous apprennent que plusieurs lazzis se trou-
vaient dans les mises en scène du poète, mais qu’ils n’ont
pas survécu à l’impression de ses pièces. Molière les a en-
levés ; soit pour alléger la lecture, soit pour laisser libre
cours à l’improvisation des interprètes.
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La Grange
De son vrai nom Charles Varlet, le sieur de La Grange est
un comédien de la troupe de Molière. À partir de 1659,
La Grange participe à tous les spectacles de la troupe de
Molière. Il interpréta, entre autres, Cléante dans LAvare et
Dom Juan. Grâce à la tenue de son registre, appelé Registre
de La Grange, les historiens ont pu en apprendre un peu
plus sur les activités de la troupe de Molière. Ce cahier
manuscrit, en plus d’être un registre comptable, indique
les décès, mariages et visites de la troupe chez le roi ou
dans des demeures privées. On peut y lire que L’Avare est
créé le 9 septembre 1668, que la pièce engrange ce jour-
là des recettes de 1069 livres et 10 sols et que la part de
chacun des acteurs est de 67 livres et 15 sols.
La Grange succède à Molière à la tête de la Troupe du Roy
après le décès du dramaturge.
Jean-Baptiste Poquelin
Fils de Jean Poquelin et de Marie Cressé, Jean-Baptiste
Poquelin naît en janvier 1622 à Paris. Issu d’une famille
bourgeoise, il est fils de tapissier ordinaire du roi et tout
le destine à suivre les traces de son père. Il fait des
études dans le meilleur collège de Paris, chez les Jésuites
de Clermont, et fréquente l’École de droit. Mais, après
ses études en droit, le théâtre l’appelle. Même s’il est
étrange de quitter la bourgeoisie pour la vie de bohème,
la vocation artistique s’impose à Poquelin. Il rencontre
les Béjart, auxquels il va s’associer. C’est en 1644, dit-
on, que Poquelin prend le nom de plume de Molière
qu’il s’attribua lui-même. On peut voir la signature JBP
Molière à la fin de ses manuscrits. Molière signe plus
d’une trentaine de pièces comprenant farces, comédies
et comédies-ballets.
Kyrielle de personnages
On recense près de cinq cents différents personnages
dans l’ensemble de l’oeuvre du dramaturge. Dans son
essai sur Molière1 , René Bray compte « six Sganarelle,
cinq Valère, quatre Clitandre, trois Cléante et autant de
Climène, de Dorante, d’Éraste, d’Élise, de Léandre, de
Mascarille et d’Oronte ; vingt-deux noms sont utilisés
deux fois. »
L’AVARE
1. BRAY, René, Molière, homme de théâtre, Mercure de
France, Mayenne,1992, 317 p.
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