La lettre de la tribune
La lettre de la tribuneLa lettre de la tribune
La lettre de la tribune
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Afin de faire mieux connaître notre instrument, le répertoire qu’il a suscité, les artistes qui l’ont créé et
qui le jouent, les lieux où la musique résonne avec passion, les visages connus ou inattendus que
l’orgue peut revêtir, l’association vous proposera, une ou deux fois par an, cette « Lettre de la tribune
de Saint-Barnard » que vous avez en main.
Nous espérons vous voir nombreux tout au long de la saison : n’hésitez pas à colporter autour de vous
qu’à Saint-Barnard, on entend de la belle musique !
2008 : Olivier Messiaen aurait eu 100 ans
L’année 2008 a vu se dérouler de nombreuses manifestations
destinées à marquer le centenaire de la naissance d’Olivier Messiaen
(1908/1992).
Le nom d’Olivier Messiaen est tellement célèbre, qu’à l’exception de
Pierre Boulez, il n’en est pas d’autre qui vienne à l’esprit quand on
demande le nom d’un compositeur contemporain. Son œuvre, d’une
soixantaine d’opus, est prisée de par le monde, au Japon comme aux
Etats-Unis, pays qu’il a lui-même parcourus (il y a un mont Messiaen dans l’Utah), tant pour les
exécutions de ses œuvres que pour y noter le chant de ses chers oiseaux. Mais c’est comme organiste
que Messiaen commença sa carrière publique, nommé à 23 ans à la tribune de la Trinité à Paris, où il
disposait d’un instrument d’Aristide Cavaillé-Coll de tout premier ordre. Pendant plus de 60 ans,
assurant les offices du dimanche comme les messes de première communion du lycée voisin la même
semaine que la création d’une œuvre majeure à l’autre bout de la planète, cet homme célèbre de par
le monde fut aussi l’humble serviteur de la liturgie de sa paroisse !
Dès le début, le langage musical de Messiaen est hautement personnel. Au fur et à mesure de
l’éclosion des œuvres, de nouvelles préoccupations se sont agglomérées jusqu’à cette association qui
caractérise la maturité de l’auteur : la rythmique grecque et indoue, les couleurs harmoniques, les
chants d’oiseaux et – surtout - la foi catholique. C’est à l’orgue que Messiaen destine ses premières
œuvres : le « Banquet céleste » issu d’une pièce d’orchestre, l’ « Apparition de l’Eglise éternelle », vaste
arche aux résonances granitiques et puissantes, et l’ « Ascension », elle aussi transcrite de l’orchestre.
En 1935, Messiaen livre sa « Nativité », suite de 9 pièces dont l’argument fonde les constantes de son
langage : « l’émotion, la sincérité d’abord, mais transmises à l’auditeur avec des moyens sûrs et
clairs ». Décrivant les personnages de la crèche (« la Vierge et l’Enfant », « les Bergers », « les Mages »),
mais aussi ses aspects théologiques (la prédestination réalisée par l’incarnation du Verbe, les trois
naissances du Verbe, du Christ et des chrétiens…), le cycle veut honorer la maternité de la Vierge.
D’un point de vue purement instrumental, Messiaen livre un nombre considérable d’innovations qui
touchent autant l’expression (broderies, accroissement d’intervalles, modes à transpositions limitées),
que la recherche de timbres (registrations inouïes, guirlandes de notes et carillons…). Peu après, créés
au Palais du Trocadéro sur un autre orgue d’Aristide Cavaillé-Coll, vinrent les « Corps glorieux », autre
cycle d’envergure marqué notamment par l’immense « Combat de la mort et de la vie » qui fait
succéder à une toccata échevelée les lentes et suaves arabesques d’une flûte qui déploie les
splendeurs d’un de ces mouvements lents, suspendus hors du temps, qu’on retrouve dans le
« Quatuor pour la fin du temps » écrit en captivité pendant la guerre, la « Turangalîla Symphonie » créée
par le jeune Léonard Bernstein ou les tardifs « Eclairs sur l’au-delà… ».
Il faut attendre presque 10 ans pour que Messiaen revienne à l’orgue après avoir poussé très loin la
spéculation : la « Messe de la Pentecôte » récapitulera des années d’improvisations dominicales,
tandis que le « Livre d’orgue » portera à des sommets de complexité la recherche sur le rythme et les
timbres. La rénovation de l’orgue de la Trinité, à la fin des années 1960, sera inaugurée par un concert
d’improvisations qui donnera naissance aux « Neuf méditations sur le mystère de la Sainte-Trinité »,