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ARNARD
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Rom ans / D r ôme
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Association loi 1901 subventionnée par la ville de Romans
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Photo de Yann Montéro
VENEZ ! ECOUTEZ !
Ce sera un samedi vers 18 heures, vous pousserez la porte de la collégiale Saint-Barnard. La nef sera
baignée par le soleil couchant. Choisirez-vous de vous asseoir sous le regard protecteur d’un saint, ou
plus près du chœur, afin de mieux admirer les peintures gothiques ? Et puis, votre regard sera attiré
vers l’arrière : sous les trompettes du vitrail de l’Apocalypse, tapi dans l’ombre, surveillé par la statue
tutélaire de Barnard, l’orgue attend son heure…
Il suffira alors de rester assis, de savourer l’ineffable spectacle de cette fin de journée célébrée en
musique. L’organiste du jour fera le reste. Une heure en musique, telle est la proposition des Amis de
l’Orgue de Saint-Barnard… Du haut de la tribune, l’organiste tire les jeux, joue des pieds et des mains,
et des siècles de musique défilent.
Certains ne se lasseront pas de la « Tierce en taille » de François Couperin… Mais sur l’orgue de la
collégiale, les « Chorals » de César Franck trouvent aussi leur place… A moins qu’un organiste ne
s’aventure vers un compositeur contemporain ou propose une improvisation. Mais beaucoup ne jurent
que par les préludes et fugues de Bach. Sans lui, « la théologie serait dépourvue d’objet, la Création
fictive, le néant péremptoire » (Cioran)…
Écouter de l’orgue serait-il un exercice spirituel ? Pourquoi pas ! Ou simplement un temps pour soi, et
si la musique fait son œuvre, à la sortie, vous ne serez plus tout à fait comme avant… Le monde vous
semblera agité : vous aurez éprouvé le bonheur d’un temps en musique…
Eric Valla, président de l’association
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2009 : une saison qui sort de l’ordinaire !
Au cours de l’assemblée générale du 23 janvier, le programme de la saison 2009 a été présenté. Il
renouvelle la formule traditionnelle des « Heures d’orgue », baptisées depuis deux ans « Jeux d’orgue ».
Les moments forts de ce programme, les musiciens hors pair et les occasions nouvelles qui sont
proposés ouvrent de belles perspectives et s’inscrivent clairement dans la volonté d’amener à l’orgue
un public plus large, notamment par le biais d’une collaboration active avec Saint-Antoine-l’Abbaye et
la ville de Romans. Voici le détail de ce programme riche et ambitieux :
Le mois de juin
Le mois de juinLe mois de juin
Le mois de juin
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: les organistes locaux
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Quatre «
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Jeux d’orgue
Jeux d’orgueJeux d’orgue
Jeux d’orgue
»
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» traditionnels consacrés aux organistes locaux :
- Samedi 6 Juin : Liliane Tauleigne (Temple de Valence) ;
- Samedi 13 Juin : Frédéric Brun (Bourg-de-Péage) ;
- Samedi 20 Juin : Jean-Michel Petit (Saint-Barnard) & Jacques Lecointre, à la trompette ;
- Samedi 27 Juin : Maxime Heintz (Grignan).
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La Fête de la musique
ête de la musiqueête de la musique
ête de la musique
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Marathon d’orgue
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» de 6 heures
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!
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Les amis de l’orgue s’associent à la ville de Romans pour cette manifestation très prisée du public et
proposent un «
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Marathon d’or
Marathon d’orMarathon d’or
Marathon d’orgue
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» de 6 heures. Le dimanche 21 juin, entre 15 heures et 21 heures,
pas moins d’une dizaine d’organistes amateurs se succèderont aux claviers de notre instrument,
musiciens passionnés qui feront entendre le répertoire et sa richesse à un public que nous espérons
varié et nombreux, tout au long de ce gigantesque concert !
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Septembre
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ptembre et octobre
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Jeux d’orgue
Jeux d’orgueJeux d’orgue
Jeux d’orgue
» hors série
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Nos camarades de Saint-Antoine-l’Abbaye, avec qui avons établi des liens fructueux depuis plusieurs
années, organisent, eux aussi, des auditions d’orgue très courues, le dimanche en fin d’après-midi. En
étroit partenariat avec eux, l’association organise cette année des concerts «
««
«
Double Jeu
Double JeuDouble Jeu
Double Jeu
»
»»
». Ainsi,
chaque samedi de septembre, un jeune organiste virtuose jouera à 18 heures à Saint-Barnard et
donnera un second concert le lendemain à 17 heures, dans l’abbatiale de Saint-Antoine. Les artistes
invités nous promettent de grandes heures musicales tant leur talent est confondant, leur dynamisme
irrépressible et leur sensibilité musicale à fleur de doigts ! Ainsi, nous recevrons :
- samedi 6 septembre : Chris Bragg (Pays -Bas) ;
- samedi 13 septembre : Vincent Crosnier (Enghien)
- samedi 20 septembre : Jean-Baptiste Monnot (Bordeaux) ;
- samedi 27 septembre : Mark Swinton (Angleterre).
Ces concerts, outre qu’ils permettront d’entendre des artistes pleins d’avenir, sont aussi des défis qui
leur sont lancés tant les différences entre les deux instruments obligent à adapter les programmes, le
répertoire, la technique instrumentale !
Pour conclure la saison, nous proposons des Jeux d’orgue «
««
«
Hors série
Hors sérieHors série
Hors série »
»»
», le samedi 3 octobre à 18
heures, à la collégiale : nous recevrons Jean-Marc Leblanc, l’excellent organiste de Saint-Merry et de
Saint-Thomas-d’Aquin à Paris.
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Journées du patrimoine
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ournées du patrimoine
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Les amis de l’orgue participeront, cette année encore, à ces deux jours de découverte du patrimoine
artistique de la ville. Pour mémoire, on mentionnera qu’en 2008, près d’une centaine de personnes
avait gravi l’escalier de la tribune. La virtuosité juvénile de Jean-Baptiste Monnot, brillant disciple de
Jean Guillou (comme Vincent Crosnier), ponctuera de façon magistrale l’après-midi du samedi.
La carte postale
La carte postaleLa carte postale
La carte postale
:
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L’association a édité une carte poste de notre orgue. Elle est disponible à la vente à la librairie « La
Manufacture », en face de la collégiale, ainsi qu’à l’accueil de la collégiale, lors des visites estivales.
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La lettre de la tribune
La lettre de la tribuneLa lettre de la tribune
La lettre de la tribune
:
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:
Afin de faire mieux connaître notre instrument, le répertoire qu’il a suscité, les artistes qui l’ont créé et
qui le jouent, les lieux la musique résonne avec passion, les visages connus ou inattendus que
l’orgue peut revêtir, l’association vous proposera, une ou deux fois par an, cette « Lettre de la tribune
de Saint-Barnard » que vous avez en main.
Nous espérons vous voir nombreux tout au long de la saison : n’hésitez pas à colporter autour de vous
qu’à Saint-Barnard, on entend de la belle musique !
2008 : Olivier Messiaen aurait eu 100 ans
L’année 2008 a vu se dérouler de nombreuses manifestations
destinées à marquer le centenaire de la naissance d’Olivier Messiaen
(1908/1992).
Le nom d’Olivier Messiaen est tellement célèbre, qu’à l’exception de
Pierre Boulez, il n’en est pas d’autre qui vienne à l’esprit quand on
demande le nom d’un compositeur contemporain. Son œuvre, d’une
soixantaine d’opus, est prisée de par le monde, au Japon comme aux
Etats-Unis, pays qu’il a lui-même parcourus (il y a un mont Messiaen dans l’Utah), tant pour les
exécutions de ses œuvres que pour y noter le chant de ses chers oiseaux. Mais c’est comme organiste
que Messiaen commença sa carrière publique, nommé à 23 ans à la tribune de la Trinité à Paris, où il
disposait d’un instrument d’Aristide Cavaillé-Coll de tout premier ordre. Pendant plus de 60 ans,
assurant les offices du dimanche comme les messes de première communion du lycée voisin la même
semaine que la création d’une œuvre majeure à l’autre bout de la planète, cet homme célèbre de par
le monde fut aussi l’humble serviteur de la liturgie de sa paroisse !
Dès le début, le langage musical de Messiaen est hautement personnel. Au fur et à mesure de
l’éclosion des œuvres, de nouvelles préoccupations se sont agglomérées jusqu’à cette association qui
caractérise la maturité de l’auteur : la rythmique grecque et indoue, les couleurs harmoniques, les
chants d’oiseaux et surtout - la foi catholique. C’est à l’orgue que Messiaen destine ses premières
œuvres : le « Banquet céleste » issu d’une pièce d’orchestre, l’ « Apparition de l’Eglise éternelle », vaste
arche aux résonances granitiques et puissantes, et l’ « Ascension », elle aussi transcrite de l’orchestre.
En 1935, Messiaen livre sa « Nativité », suite de 9 pièces dont l’argument fonde les constantes de son
langage : « l’émotion, la sincérité d’abord, mais transmises à l’auditeur avec des moyens sûrs et
clairs ». Décrivant les personnages de la crèche la Vierge et l’Enfant », « les Bergers », « les Mages »),
mais aussi ses aspects théologiques (la prédestination réalisée par l’incarnation du Verbe, les trois
naissances du Verbe, du Christ et des chrétiens…), le cycle veut honorer la maternité de la Vierge.
D’un point de vue purement instrumental, Messiaen livre un nombre considérable d’innovations qui
touchent autant l’expression (broderies, accroissement d’intervalles, modes à transpositions limitées),
que la recherche de timbres (registrations inouïes, guirlandes de notes et carillons…). Peu après, créés
au Palais du Trocadéro sur un autre orgue d’Aristide Cavaillé-Coll, vinrent les « Corps glorieux », autre
cycle d’envergure marqué notamment par l’immense « Combat de la mort et de la vie » qui fait
succéder à une toccata échevelée les lentes et suaves arabesques d’une flûte qui déploie les
splendeurs d’un de ces mouvements lents, suspendus hors du temps, qu’on retrouve dans le
« Quatuor pour la fin du temps » écrit en captivité pendant la guerre, la « Turangalîla Symphonie » créée
par le jeune Léonard Bernstein ou les tardifs « Eclairs sur l’au-delà ».
Il faut attendre presque 10 ans pour que Messiaen revienne à l’orgue après avoir poussé très loin la
spéculation : la « Messe de la Pentecôte » récapitulera des années d’improvisations dominicales,
tandis que le « Livre d’orgue » portera à des sommets de complexité la recherche sur le rythme et les
timbres. La rénovation de l’orgue de la Trinité, à la fin des années 1960, sera inaugurée par un concert
d’improvisations qui donnera naissance aux « Neuf méditations sur le mystère de la Sainte-Trinité »,
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créées à Washington, et pour lesquelles Messiaen imagine un langage musical communicable ! Déjà
aperçus dans les cycles précédents, les chants d’oiseaux envahissent l’œuvre, comme ils l’ont fait à
l’orchestre ou au piano, jusqu’à devenir le seul matériau musical Oiseaux exotiques » pour piano et
orchestre, « Catalogue d’oiseaux » pour piano). Bien plus tard, après les huit années de labeur que lui
demandera son opéra « Saint-François d’Assise » (lui-même long de plus de cinq heures !), Messiaen
cherchera une sorte d’ascèse dans un autre cycle gigantesque - le « Livre du Saint-Sacrement » - qui
se présente comme une immense synthèse décantée du langage musical de l’auteur.
La cohérence musicale et l’assurance de la pensée de Messiaen ont quelque chose de presque
dérangeant dans notre époque vouée à l’incertitude, à la vitesse et au changement perpétuel. Son
œuvre construit un vaste monde enchanté et coloré, chaleureux, plein d’une joie profonde et franche,
d’une foi inébranlable. Elle mérite qu’on franchisse l’étonnement qu’elle suscite toujours pour qu’on
en goûte les subtiles merveilles.
Frédéric BRUN
A lire : « Olivier Messiaen, une poétique du merveilleux » de Brigitte Massin éditions Alinéa ; « Olivier Messiaen » de Nigel
Simeone & Peter Hill – éditions Fayard.
L’orgue et les écrivains
Ogre dévoreur de sons, mais aussi créateur de fantasmes, de visions oniriques, l’orgue est l’objet de
passions et de recherches qui tentent de donner à notre instrument favori des visages bien éloignés
du masque léthargique et passéiste qu’on lui accole souvent ou du rôle d’accessoire du cérémonial
liturgique. Au travers de ces deux extraits, c’est un monde presque fantastique que visite l’orgue,
extravagant ou hallucinatoire, sur les pas des héros de Julien Gracq et de George Sand. On pourrait
ajouter à ces lignes celles de Paul Claudel, de Jacques Roubaud ou l’étonnant roman de Sophie Buyse,
écrivain et psychanalyste, qui fréquenta les surréalistes belges : « L’organiste », aux Editions
Maëlström Images d’Yvoire.
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Au château d’Argol
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La chapelle des abîmes
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aux Editions José Corti
Editions José CortiEditions José Corti
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Bientôt, au travers des troncs recouverts d’une mousse brillante et élastique, au travers des branches
tordues en fantastiques arabesques, apparurent les murs gris d’une chapelle suspendue au-dessus
des abîmes.
Alors, du fond de son inquiétude un sol s’éleva, qui parut emplir en un instant la chapelle et ruisseler
le long des murs luisants d’eau, et Albert, sans oser se retourner, tellement cet accord le confondait
par son ampleur inouïe, devina qu’Herminien, pendant son exploration silencieuse, avait gravi les
degrés de pierre d’un orgue qui s’élevait dans l’obscurité à gauche de la porte et occupait une partie
considérable de la chapelle, mais de l’examen duquel avaient du le distraire aussitôt les effets
séduisant de l’éclairage. Le jeu d’Herminien était empreint d’une force singulière, et elle était sa
puissance d’expression qu’Albert put deviner comme s’il avait lu au plus profond de son âme les
thèmes qui se succédèrent dans cette sauvage improvisation. Il lui sembla d’abord qu’Herminien, par
des touches dissonantes et incertaines, coupées de retours et de replis le motif principal était
repris dans un mode plus timide et comme interrogatif, ne fit autre chose que de prendre la mesure du
volume même et de la capacité sonore de ce troublant édifice. Alors se déchaînèrent des ondes
violentes comme la forêt et libres comme les vents de l’altitude, et l’orage qu’Albert avait contemplé
avec un sentiment d’horreur du haut des terrasses du château éclata du fond de ces mystiques
abîmes, au-dessus desquels des sons d’une pureté cristalline, égrenés en un surprenant et hésitant
descescendo, flottèrent comme une buée sonore traversée des éclats jaunes du soleil et rejoignirent
curieusement le rythme des gouttes d’eau qui tombaient de la voûte.
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Cependant, quoique l’artiste donnât déjà la pleine mesure d’une
passion frémissante et incoercible, il paraissait dès lors à Albert
sensible qu’il recherchât dans la plénitude même de son jeu, dont
les arabesques bizarres conservèrent le caractère encore indécis
d’une tentative, la clé d’une élévation encore supérieure, l’appui
nécessaire à un dernier bond dont les conséquences entièrement
décisives fussent à la fois et singulièrement pressenties et
imprévisibles, et qu’il hésitât sur les bords même de cet abîme dont
il décrivait les approches glorieuses, avec des grâces enveloppantes
et insensées.
Une vibration sonore de plus en plus concentrée paraissait le signe
extérieur de la sombre ardeur de cette recherche, et se posait sur
toute chose en foisonnant à profusion comme un essaim soudain
disloqué. Enfin, une note tenue avec une constance merveilleuse
éclata dans une inouïe splendeur et, prenant appui sur elle comme sur une plage sonore, s’éleva une
phrase d’une indicible beauté. Et, plus haut que tout, dans une lumière jaune et douce qui parut
accompagner dans la chapelle la descente d’une grâce sublime accordée à la prière, résonna sous les
doigts d’Herminien, comme parcourus d’une chaleur légère et dévorante, le chant de la fraterni
virile. Et la fin du souffle qui se retirait de la poitrine à mesure qu’il s’élevait vers des hauteurs
incroyables laissa derrière lui monter dans le corps entièrement vacant le flux salubre d’une mer libre
et légère comme la nuit.
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L’orgue du Titan
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L’orgue du Titan
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Contes d’une grand
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-mère
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Un soir, l’improvisation du vieux et illustre maître Angelin nous passionnait comme de coutume,
lorsqu’une corde de piano vint à se briser avec une vibration insignifiante pour nous, mais qui produisit
sur les nerfs surexcités de l’artiste l’effet du coup de foudre. Il recula sa chaise, frotta ses mains,
comme si, chose impossible, la corde les t cinglées, et laissa échapper ces étranges paroles :
« Diable de titan, va ! ».
Sa modestie bien connue ne nous permettait pas de penser qu’il se comparât à un titan. Son émotion
nous parut extraordinaire. Il nous dit que ce serait trop long à expliquer. « Cela m’arrive quelques fois,
nous dit-il, quand je joue le motif sur lequel je viens d’improviser. Un bruit imprévu me trouble et il me
semble que mes mains s’allongent. C’est une sensation douloureuse et qui me reporte à un moment
tragique et pourtant heureux de mon existence. » Pressé de s’expliquer, il céda et nous raconta ce qui
suit : « Vous savez que je suis de l’Auvergne, dans une très pauvre condition et que je n’ai pas
connu mes parents. Je fus élevé par la charité publique et recueilli par M. Jansiré, que l’on appelait par
l’abréviation de maître Jean, professeur de musique et organiste de la cathédrale de Clermont. J’étais
son élève en qualité d’enfant de chœur. En outre, il prétendait m’enseigner le solfège et le clavecin ».
Il n’était pas sans talent, bien que ce talent fût très au-dessous de l’importance qu’il lui attribuait. Il
était bon musicien, avait des leçons en ville et m’en donnait à moi-même à ses moments perdus, car
j’étais plutôt son domestique que son élève et je faisais mugir les soufflets de l’orgue plus souvent que
je n’en essayais les touches.
Un jour, maître Jean me dit : « Petit, vous vous verez demain avec le jour. Vous ferez manger l’avoine
à Bibi, vous lui mettrez la selle et le portemanteau et vous viendrez avec moi. Emportez vos souliers
neufs et votre habit vert billard. Nous allons passer deux jours de vacances chez mon frère le curé de
Chanturgue ».
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