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LA SOCIÉTÉ PROVANCHER D’HISTOIRE NATURELLE DU CANADA
FORESTERIE
pendant plusieurs années par le personnel de la compagnie
forestière et aucune initiative similaire n’a connu autant de
succès ailleurs au Québec, à la même époque.
Par ailleurs, plusieurs projets de classi cation écolo-
gique régionale visant à soutenir l’aménagement forestier
ou du territoire ont eu lieu au Québec, depuis les années
1960 (Grandtner, 1966b; Jurdant
Gérardin, 1990). La plupart de ces travaux incluaient à la
fois des classi cations de la végétation, des cartographies à
petite échelle et, dans certains cas, des interprétations sur
la productivité des milieux. Les méthodes utilisées étaient
cependant différentes d’une étude à l’autre et les résultats
n’étaient pas nécessairement compatibles.
Pourquoi ces travaux de classi cation écologiques
n’ont-ils pas été plus utilisés par les aménagistes forestiers ?
Selon Bélanger, Bergeron et Camiré (1992), les renseigne-
ments qui découlent de la classi cation écologique étaient
peu utilisés dans l’aménagement forestier avant les années
1990 en raison 1) de l’absence de cartes écologiques à grande
échelle, sauf pour quelques petits territoires, 2) de la com-
plexité de l’information écologique publiée, et 3) de son
manque d’accessibilité. Ils soulignaient aussi l’importance
de vulgariser l’information et de la présenter sous formes de
guides facilitant son utilisation par l’ensemble de la commu-
Le manque d’accessibilité de l’information écologi-
que s’explique par le fait que plusieurs travaux ont été publiés
sous forme de mémoires ou de thèses universitaires et avaient
peu de diffusion. Leur format était souvent peu pratique, ce
qui n’aidait pas à démêler l’information utile de sa justi ca-
tion scienti que. Ajoutons à cette analyse des raisons de la
faible utilisation de l’information écologique : 1) le manque
de connaissances de certains des utilisateurs potentiels; 2) le
manque de temps pour assimiler ces nouveaux concepts et de
voir leur implication en aménagement forestier; 3) la dif -
culté de rejoindre les auteurs pour leur adresser les questions
qui surgissent à l’utilisation; et 4) l’absence de moyens pour
évaluer l’importance spatiale des unités écologiques classi-
ées. La simpli cation de l’information, sa présentation ef -
cace et le lien avec une cartographie à une échelle compatible
avec la plani cation et la mise en œuvre de l’aménagement
forestier semblent être la clé du succès.
Classi cation écologique au MRNFP
Depuis 1986, une équipe multidisciplinaire, rat-
tachée à la Direction des inventaires forestiers (DIF) du
ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs
du Québec (MRNFP), réalise la classification écologique
des écosystèmes forestiers. Sa création découle du besoin,
exprimé en 1984 lors d’audiences publiques du Bureau
d’audiences publiques en environnement, de mieux connaî-
tre les écosystèmes forestiers du Québec et leur dynamique,
a n de prévoir la réaction des forêts après les perturbations
naturelles ou les activités de récolte.
Les travaux de cette équipe ont connu plusieurs
étapes. La cartographie des districts écologiques a d’abord
permis de segmenter le territoire (760 000 km
des facteurs physiques qui structurent le paysage (Robitaille,
1988). Puis, les données topographiques, pédologiques et
phytosociologiques, nécessaires à une classi cation, ont été
récoltées en réalisant un inventaire écologique de l’ensemble
du territoire sous aménagement forestier (28 400 points
, 1994). Les données sur la végé-
tation et le milieu physique ont été classi ées pour obtenir
une typologie forestière qui décrit la végétation actuelle et
une typologie des stations apte à synthétiser la dynamique
de la végétation en fonction des caractéristiques physiques
., 1992 et 1993; Saucier et Robert,
La classification écologique a été présentée aux
aménagistes, sous forme de rapports et de cartes. Cepen-
dant, il est rapidement devenu évident que les aménagistes
ne savaient pas comment utiliser cette information, en dépit
du fait que les méthodes étaient uniformes, que l’inventaire
et la cartographie écologique à petite échelle couvraient la
totalité du territoire et que les résultats de classi cation y
étaient disponibles. Les dif cultés suivantes persistaient :
1) la complexité des résultats de classi cation; 2) l’absence
d’intégration cartographique des variables écologiques
dans les cartes forestières; 3) la dichotomie entre l’inventaire
écologique et l’inventaire forestier, qui ne permettait pas
d’identifier facilement les variables influençant la nature
des peuplements et la production forestière; 4) l’absence
d’évaluation quantitative de la productivité des stations, et
5) la nécessité de fournir des exemples d’utilisation de l’in-
formation écologique, de la vulgariser et de la présenter sous
forme de guides pratiques ainsi que d’assurer la formation
des éventuels utilisateurs. Ce sont ces lacunes, dont certaines
avaient déjà été notées par Bélanger, Bergeron et Camiré
(1992), que nous avons voulu combler.
A n de faciliter la compréhension des liens entre le
milieu physique et la nature de la végétation, un système
hiérarchique de classi cation écologique du territoire a été
développé (Robitaille et Saucier, 1996; Saucier
Ce système exprime la diversité des écosystèmes, depuis le
type forestier et le type écologique à l’échelle locale jusqu’au
domaine bioclimatique et à la zone de végétation à l’échelle
continentale. À cette n, le territoire a été divisé en unités
de paysage régional et en régions écologiques pour illustrer
la nature et la répartition des écosystèmes dans le paysage.
Pour la plani cation de l’aménagement forestier, des exem-
ples d’utilisation de cette classi cation à petite échelle ont été
réalisés (Robitaille et Grondin, 1996).
Les méthodes de classi cation, l’autécologie des espè-
ces arborescentes et de sous-bois, la formation de groupes
d’espèces indicatrices, la dynamique de la végétation et les
unités de classi cation qui en résultent ont été présentées
dans des rapports de classi cation écologique, applicables à
chacun des sous-domaine bioclimatique (Grondin, Blouin