Le songe de Gisèle

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LA PRESSE
MONTRÉAL
LUNDI
27
MARS
2006
ARTS & SPECTACLES
5
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THÉÂTRE
La Robe de mariée de Gisèle Schmidt
EN BREF
Le songe de Gisèle
SYLVIE ST-JACQUES
Encore
Encore une fois
Il n’est pas trop tard pour voir
Louison Danis, alias Maman
Bougon, entrer dans la peau de
la théâtrale Nana, personnage
calqué sur la mère de Michel
Tremblay. Des supplémentaires
de la production Encore une fois,
si vous le permettez par le Théâtre
des gens d’en bas sont prévues
pour le 26 mars à 15h ainsi que
les 29, 30, 31 mars et 1 er avril à
20h.
SYLVIE ST-JACQUES
CRITIQUE
« Les acteurs sont des passeurs
de rêves », disait Gisèle
Schmidt. Avec sa création La Robe de mariée de Gisèle Schmidt, Julie Vincent offre un songe théâtral très émouvant à son amie
disparue en 2005.
Pour cette oeuvre en six tableaux qui emprunte son rythme au recueil de nouvelles, cette
auteure, comédienne et metteuse en scène a créé des apartés
amoureux dédiés à celle qui aurait donné toute sa carrière pour
vivre une grande histoire
d’amour.
Julie Vincent aurait pu se contenter d’un simple hommage
biographique à la grande comédienne aux yeux de braise. En
choisissant la fiction, elle est allée beaucoup plus loin. La Robe
de mariée de Gisèle Schmidt est une
oeuvre originale d’une grande
sincérité qui frappe l’imaginaire.
« Qu’est-ce que le grand
amour ? » demande la pièce. En
guise de réponse, une vieille robe de mariée se promène entre
les histoires qui se déroulent en
divers temps. Elle se fait témoin
des illusions d’amour de couples improbables qui, eux aussi,
rêvent du grand amour.
Rencontres érotiques, passions
impossibles, liaisons désespérées... La robe blanche en voit
de toutes les couleurs, mais aucun mariage avec promesse de
bonheur éternel et de nombreux
enfants ne croise sa route. Seul
l’amour du théâtre subsiste,
porté par des comédiens inspirés et une auteure investie de la
mission d’immortaliser une passion entière pour le théâtre.
Ingénieuse, la scénographie
nous transporte sans peine dans
cet univers auquel Gisèle
Schmidt a consacré sa vie. Sur la
scène de l’Espace Go, une seconde scène en plan de coupe,
avec vue sur les coulisses (où se
changent les comédiens) nous
rappelle cette existence consacrée à la scène. En arrière-plan,
une tapisserie dentelée, vestige
apparent d’un passé lointain,
évoque l’histoire du théâtre
québécois.
Il suffit de rapides changements de costumes pour que les
L’histoire
d’un coeur
À partir du 28 mars, le Théâtre
Incliné occupe la scène du Monument-National avec L’Histoire
d’un coeur. Sur un texte écrit sur
mesure par Larry Tremblay et
une mise en scène de José Babin, cette pièce allie marionnettes morcelées, musique et ombres. Elle évoque le trajet
mouvementé d’un coeur
transplanté d’un corps à l’autre,
« dans un style situé quelque
part entre Hamlet et Paillasson ». Une « courte forme » (mini-pièce) présentée dans le hall
d’entrée du Monument-National, précédera chacune des 10
représentations. Du 28 mars au
8 avril.
PHOTO YANICK MACDONALD
Éric Cabana, Julie Vincent, Jacinthe Laguë et Paul Savoie, dans la pièce PLa Robe de mariée de Gisèle Schmidt.
singuliers personnages issus de
l’imagination de Julie Vincent,
se promènent entre des lieux
aussi différents qu’un wagon du
métro de Montréal en 2003, un
hôtel de passe à Nîmes ou un
soir de février, à Chicoutimi.
Forcément, leur vision de
à l’actrice disparue. Celle-ci règne sur la pièce comme un spectre omniscient. La ressemblance
entre le regard perçant de Jacinthe Lagüe et celui Mme Schmidt
est saisissante. Rayonnante, Lagüe joue avec grâce et énergie.
La « mère » du projet, Julie Vin-
Ingénieuse, la scénographie nous transporte
sans peine dans cet univers auquel Gisèle Schmidt
a consacré sa vie.
l’amour est intimement liée à
leur époque. Photographe de
guerre, marin, ouvrière portugaise employé de caisse populaire... Ils partagent tous le même rêve de grand amour que
Gisèle Schmidt.
De toute évidence, les quatre
comédiens qui se partagent la
scène vouent une belle affection
cent, se révèle quant à elle touchante dans son interprétation
de personnages qui l’habitent
depuis quatre ans.
Souvent remarquable, le solide
texte de Vincent tient le spectateur en haleine pendant toute
l’heure et demie que dure la
pièce. La qualité des dialogues
et des interprétations n’est pas
tout à fait égale d’un tableau à
l’autre, mais certains moments
de grande intensité nous font
oublier cette faiblesse. Divers
degrés d’interprétations se superposent délicatement, si bien
que cette oeuvre nous habite
longtemps après la chute du rideau.
Charmant moment de
théâtre, La Robe de mariée de
Gisèle Schmidt est une passation artistique et amoureuse entre Gisèle Schmidt
et ses successeurs. En cette
époque de téléréalité, cette
pièce démontre que la fiction est
toujours plus intéressante que
l’anecdotique.
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LA ROBE DE MARIÉE DE GISÈLE
SCHMIDT, texte et mise en scène de
Julie Vincent. Une création du PàP en
coproduction avec Singulier Pluriel. À
l’Espace Go, jusqu’au 15 avril.
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THÉÂTRE-DANSE / Demain
Danser sur la braise
JADE BÉRUBÉ
CRITIQUE
COLLABORATION SPÉCIALE
Pendant que l’univers se brise, la
jeunesse de notre monde porte
l’optimisme en flambeau. Tout
ira bien, vous verrez, nous disent-ils. Et leur candeur ressemble à la nôtre, perdue dans le détour des années.
Paula de Vasconcelos clôt ici sa
trilogie de la Terre avec un dernier opus intitulé Demain, laissant
cette fois à sept interprètes dans
la jeune vingtaine le choix du
propos. Ici, aucun personnage.
L’heure n’est plus à la fiction. Les
interprètes agissent selon une
énergie qui leur est propre, leur
corps et leur esprit étant la matière première de cette nouvelle
création.
La trilogie de la Terre fut
d’abord pensée par l’artiste comme un manifeste artistique. Inquiète du sort de notre planète,
de Vasconcelos amorçait en 2004
son bilan en trois temps avec une
première oeuvre intitulée Babylone, une création alliant le théâtre
à la danse et à la musique traditionnelle interprétée en direct.
Le berceau mythique que représente la ville de Babylone abritait
un monde naissant, voué à la fragilité, tel un jardin suspendu
dans l’espace. Poursuivant le
triptyque, de Vasconcelos présentait l’année dernière une ode au
miracle de l’éclosion du jour avec
la complicité du photographe
Serge Clément.
Pour parler du présent, la créatrice interdisciplinaire choisissait
avec une confiance bouleversante.
Cherchant dans toutes ses oeuvres à concilier les chemins de
traverses de l’individu et l’universalité, de Vasconcelos utilise
cette fois la boîte de Pandore
qu’est Internet.
Branché sur le monde en direct,
le spectateur devient témoin de
cet art épistolaire renouvelé alors
qu’une discussion s’échafaude
sur écran entre un membre de la
compagnie et un correspondant
du bout du monde pendant la représentation.
Si l’idée paraît de prime
La trilogie de la Terre fut d’abord pensée par
abord fort à propos, la mise
pratique est décevante.
l’artiste comme un manifeste artistique. Inquiète du en
On y sent le désir de provoquer un moment intime
sort de notre planète, de Vasconcelos amorçait en
sans nécessairement y parvenir. Le mondialisme in2004 son bilan en trois temps avec une première
hérent au « chat » reste
oeuvre intitulée Babylone, une création alliant
étrangement inexploité. Il
est donc à espérer que le
le théâtre à la danse et à la musique traditionnelle
projet évolue.
Il n’en demeure pas moins
interprétée en direct.
que le dernier volet de cette
trilogie offre encore une
Pod (plusieurs tableaux semblent dement des contrepoids engen- fois des moments de pur ravissement souvent générés par la force
d’ailleurs directement inspirés de drés.
S’identifiant parfois aux athlètes des corps en mouvement, proula campagne publicitaire du
géant américain). Projetant les olympiques, cherchant les ave- vant hors de tout doute que la
pensées des danseurs en herbe nues possibles où il semble y puissance de frappe des chorésur écran, la chorégraphe s’assure avoir cul-de-sac (se glissant par graphies de Paula de Vasconcelos
exemple sous un rideau fermé), demeure intacte.
de ne pas brouiller les pistes.
Nous ne sommes plus dans le les interprètes évoluent dans une
domaine de l’interprétation mais scénographie aux couleurs fluo- .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... .... . .
celui de la démonstration. Voici rescentes. La communication est DEMAIN, mise en scène, chorégraceux qui façonneront bientôt no- rapide, les interférences assimi- phies et scénographie de Paula de
tre monde. Écoutez leur enthou- lées et intégrées à la seconde. Ef- Vasconcelos avec Natalie-Zoey Gauld,
siasme. Voyez à quel point leurs ficace, la jeunesse maîtrise. Quel- François Gravel, Suzanne Laforest,
inquiétudes ne sont encore que que fois inquiète, elle n’arrête Forty Nguyen, Manuel Roque, Jeannie
de surface. Même lorsque de Vas- pas pour autant de s’activer en Vandekerkhove, Meaghan Wegg et
concelos choisit de projeter la tout sens. Les jeunes dansent sur Émile Vasconcelos-Taillefer. Jusqu’au
mort des interprètes en nous of- la braise d’un monde écroulé 8 avril à l’Usine C.
la poésie de l’aube. Des photographies prises au petit jour dans
diverses métropoles du monde
côtoyaient le drame personnel
d’une quadragénaire en perte
d’identité.
Pour mettre en image le futur,
l’artiste s’est ici entourée d’une
jeunesse fougueuse et laisse une
grande place à son énergie débordante. Les corps sont hyperactifs,
frénétiques tout en étant extrêmement organisés.
La danse reste donc le canal
principal de cette génération I-
frant l’image magnifique de leurs
corps mariés à de la terre, l’image
reste presque chimérique. La
mort ne génère aucune résonance
encore sinon celle d’une finalité
romantique.
Cette jeunesse citoyenne du
monde (le langage chorégraphique puise abondamment dans la
gestuelle indienne) s’apprête aux
sauts. Moulinets, étirements, les
chairs se préparent. Et si la recherche de l’équilibre soudain
habite ces êtres au printemps de
leur vie, ceux-ci s’amusent rapi-
Bonbons assortis
en joual
Après Hosanna et Encore une fois,
Bonbons assortis clôt cette semaine la « trilogie Tremblay » de la
saison. René Richard Cyr assure
la mise en scène d’une suite de
saynètes qui dépeignent la vie
familiale québécoise. La distribution compte Rita Lafontaine,
Gilles Renaud, Pierrette Robitaille et Germain Houde, qui se
donneront la réplique en joual
dans cette oeuvre où Tremblay
revisite ses souvenirs de jeunesse.
Le Quat’Sous,
sens dessus dessous
« C’est comme si les soeurs
Brontë avaient fait des biscuits
au pot ! » En entrevue avec La
Presse, en septembre dernier,
c’est ainsi qu’Éric Jean, directeur artistique du Quat’Sous, a
résumé la série en cinq épisodes
Les Mystères de quat’sous. S’inspirant du passé mythique de la
maison de la rue de Pins, l’auteur Pascal Brullemans a imaginé une histoire de jeune femme
sauvée des eaux par un monstre.
S’y entremêlent les genres comme les époques et s’entrechoquent des personnages étranges
et éclatés. Le quatrième épisode
du feuilleton, La Malédiction du
costumier, sera présenté au
Quat’Sous le 1er avril à 23h et le
2 avril à 19h.
Un conte vert
pour les tout-petits
L’équipe de L’Illusion, Théâtre
de marionnettes, offre un adaptation du célèbre conte Jacques et
le haricot magique. On y raconte
l’histoire de Claire qui, avec
l’arrivée du printemps, s’amuse
avec l’ombre des premiers
rayons du soleil et propose à
son voisin, Jacques, de planter
des haricots. Musique, ombres,
lumière, mouvement, objets et
marionnettes s’allient pour raconter ce classique de l’enfance,
interprété par Claire Voisard.
ENTRÉE EN SCÈNE
> Jacques et le Haricot magique,
Studio-théâtre de L’Illusion,
1er au 30 avril
> L’Histoire d’un coeur,
Monument-National, 28 mars
au 8 avril
> Bonbons assortis, Rideau Vert,
28 mars au 29 avril
> Prodigy, Théâtre SainteCatherine, 29 mars au 9 avril
> Les Mystères de quat’sous,
Théâtre de Quat’Sous, 1er et
2 avril
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