Atelier La taille des fruitiers

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Apprendre à tailler
Dire que la taille de formation est superflue ne signifie pas pour autant qu'on ne doive faire aucune taille. Il y a certes des
arbres comme le noyer ou le cerisier qui fructifient très bien sans le moindre coup de sécateur. Mais il y en bien d'autres,
comme le pommier ou le poirier (ou la vigne ...) dont la production est très nettement améliorée quand on les taille
judicieusement.
Alors, comment faire ? Aller chercher l'information à sa source, c'est à dire auprès des arbres eux-mêmes. La taille, ce
n’est pas l’homme qui l'a inventée, mais les arbres eux mêmes !
Sur un arbre adulte, même en parfaite santé, il y a toujours une certaine proportion de bois mort. Ce bois mort (quand il
n'est pas le signe d'une maladie ou d'une attaque parasitaire), c'est tout bonnement de "l'auto élagage". C'est
l'équivalent naturel de cette taille d'entretien dont nous voulons comprendre ici les principes.
Premières observations
- Le bois mort se trouve dans les parties mal éclairées de la charpente. C'est à l'intérieur de la couronne, dans les
parties enfermées, qui ne reçoivent plus un éclairement suffisant que se trouvent les rameaux desséchés. Ils sont trop
mal placés pour participer efficacement à la photosynthèse, leurs feuilles ne captent plus assez de lumière. Ils sont
progressivement éliminés sous la forme de bois mort. Leur élimination contribue à aérer la couronne de l'arbre, ce qui
est un des objectifs de la taille d'entretien.
- Autre observation, très importante également : ce sont les rameaux les plus âgés, ceux qui ont déjà porté de
nombreuses générations de fruits, qui sont éliminés au profit des productions plus jeunes. Ce mécanisme permet le
renouvellement régulier des branches fruitières.
- La coupe et la cicatrisation : Avant de se lancer dans la taille, et de chercher à savoir "quoi couper", il est important de
savoir "comment couper". En premier lieu, gardez présent à l'esprit que l'arbre fonctionne comme un réseau, un circuit
parcouru par la sève depuis les racines et le tronc jusqu'à l'extrémité des plus fines brindilles. N'interrompez pas le
circuit n'importe où. Taillez toujours un rameau au niveau de son insertion sur le reste du réseau. Sans laisser de chicot,
qui ferait une excellente porte d'entrée pour les micro organismes en tout genre. Il faut couper juste à la frontière, tailler
les rameaux comme pour les "débrancher" (comme cela se produit naturellement pour le bois mort). Coupez en biseau
pour éviter l’infiltration de l’eau de pluie. Protégez la plaie par un badigeon (chaux et bouillis bordelaise par exemple).
- Pensez à conserver un tire sève, un petit rameau exutoire destiné à remplacer le prolongement naturel d'une branche
raccourcie et à favoriser la cicatrisation. Ceci se fait d'ailleurs tout naturellement si on respecte bien le réseau.
Les principes de base de la taille des arbres libres découlent directement de ces observations. Exercez-vous sans
chercher particulièrement à faire de la taille fruitière. Une des meilleures façons d'apprendre à tailler est de commencer
par enlever dans un arbre tout son bois mort, en regardant bien où il se place.
Et ensuite ? C'est une question de bon sens. C'est accompagner l'arbre dans son processus d'auto élagage, c'est l'aider
à se rajeunir en respectant l’équilibre entre les racines et la partie aérienne.
Quand opérer ?
Vous avez tout l’hiver pour tailler vos arbres fruitiers. Pour autant, n’opérez jamais pendant une période de gel ou un
épisode pluvieux. De plus, la coupe doit être effectuée avant le débourrement des bourgeons à fruit. Effectuée après, la
taille affaiblit l’arbre. Enfin, plus on approche de la floraison, moins l’arbre supporte la taille. N’agissez pas sur les arbres
en fleurs !
Les règles de base
Eliminer tout le bois mort, les pousses tordues, les parties
qui semblent malades.
Dégager le centre de l’arbre pour y faire pénétrer la
lumière.
Supprimez les fourches afin d’alléger l’ensemble de
l’arbre et d’éviter les enchevêtrements nuisibles à une
bonne mise à fruits.
Eliminez les gourmands -3- Ces branches de l’année, qui
s’élèvent à la verticale, ne donneront pas de fruits.
Bouvigny Côté Jardins - Compte-rendu de l’atelier «Taille d’entretien des arbres fruitiers » 2010
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Arquez les branches à fruits avec une ficelle pour
favoriser la mise à fruits. Dans ce cas, coupez les
branches qui naissent au sommet de l’arcure -5-
La lutte contre les parasites
- Hiver / printemps
En arboriculture bio, on met plutôt l'accent sur les interventions préventives et sur le bon équilibre du sol.
Février : huile minérale
Mars : bouillie bordelaise
Mai : ne rien faire (floraison)
Juin : cuivre ou soufre
- Eté
Il est souvent nécessaire de soigner les arbres en été, avec des produits qui soient les moins nocifs possibles pour
l'environnement.
Les pucerons
Contre les pucerons, il y a bien sûr les coccinelles, les larves de chrysope, les perce-oreilles, tout un tas d'auxiliaires qui
ne demandent qu'à nous aider à monter la garde. Chaque fois que c'est possible, laissez les faire le travail, car les
insecticides les plus "bio" sont aussi fatals à ces précieux amis du jardinier ! Mais si le besoin s'en fait sentir ne laissez
pas vos arbres à la merci des suceurs de sève. Souvenez vous également que les fourmis protègent "leurs" pucerons
avec beaucoup de zèle. Il faut les empêcher de monter dans les arbres enduisant les troncs d'une bande de glu à mihauteur.
Que faire :
- Eviter les trop fortes fumures azotées.
- A ne pas négliger, les remèdes dits "de bonne femme" souvent très efficaces : arroser les pousses atteintes avec la
lance d'arrosage, pulvériser une solution de savon noir, ou du thé d'absinthe.
- Pulvériser un insecticide à base de roténone, biodégradable et utilisable jusqu'à la récolte. Sans danger pour les
abeilles, mais malheureusement fatal à la plupart des insectes auxiliaires.
- Poudrer avec une poudre de roche micronisée
- Mettre des anneaux de glu autour des troncs (anti-fourmis). Sur les arbres jeunes, ne pas mettre la glu directement sur
l'écorce, mais interposer une bande protectrice en carton.
Le carpocapse
Ce "ver" des fruits, qui est en réalité une chenille, sévit principalement dans les pommes, mais on peut trouver ses
semblables également dans les poires, les prunes, les noix, les châtaignes. La lutte est assez délicate, car la période
pendant laquelle le parasite se trouve à l'extérieur du fruit (stade baladeur) est très courte, et difficilement repérable pour
l'amateur.
La solution la plus sage est de supporter quelques fruits véreux, tout en mettant en oeuvre tout les moyens possibles
pour limiter les pullulations et tenir en respect l'envahisseur sans chercher à l'anéantir totalement.
Que faire :
- Ramasser les fruits tombés avant maturité, ils sont souvent véreux.
- Placer dés la mi-juin des bandes de carton ondulé autour des troncs pour piéger les larves, et surveiller régulièrement
jusque fin octobre pour détruire les larves qu'ils abritent.
- Disposer à partir de Mai des pièges à phéromone sexuelle qui attirent les papillons mâles et diminuent ainsi les
fécondations.
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- Traiter deux fois, dés le début de Mai, avec de la bactospéine, un produit sélectif spécifique des chenilles.
- Disposer des nichoirs pour les mésanges, et des abris pour l'hiver ("trous à mésange").
La mouche de la cerise
Les cerises véreuses sont le résultat de l'action d'une petite mouche qui pond sur les fruits en train de mûrir, entre la fin
mai et le début juin. Chaque mouche dépose un oeuf par fruit, en tout une cinquantaine, et sait parfaitement reconnaître
les fruits qui ont déjà été visités. Les variétés tardives sont les plus atteintes car elles mûrissent au moment de l'activité
maximale de la mouche.
Que faire :
- Planter de préférence des variétés précoces
- Disposer des pièges englués de couleur jaune pourvus d'une capsule attractive à base de sulfate d'ammonium.
- Si nécessaire, traiter avec un insecticide naturel (roténone) entre le 7 et le 15 Juin.
- Eliminer les fruits véreux tombés à terre.
La cloque du pêcher
La cloque se traite préventivement avant le débourrement. Après, c'est un peu tard, il n'existe pas de traitement curatif
efficace, et si l'attaque se renouvelle plusieurs années de suite les arbres finissent par mourir.
Que faire :
- Supprimer les feuilles cloquées, couper les parties de feuilles atteintes. L'arbre refera de nouvelles feuilles qui souvent
échappent à la maladie.
- Pulvériser du purin d'orties dilué.
- Apporter du bore, dont la carence favoriserait l'apparition de la cloque.
- Evitez les tailles trop agressives qui affaiblissent les arbres.
La tavelure
La tavelure se reconnaît facilement aux tâches brunes qu'elle provoque sur les feuilles, puis sur les fruits qui peuvent
aller jusqu'à se craqueler, se crevasser et devenir complètement inconsommables. C'est une maladie endémique du
pommier et du poirier qu'il vaut mieux contrôler avant le débourrement, par des traitements à base de bouillie bordelaise.
Les années pluvieuses, et/ou sur les variétés sensibles, on utilisera en cours de végétation le soufre additionné d'une
"pointe" de cuivre.
Que faire :
- Traiter avec des pulvérisations de soufre mouillable : 6 g/l + O,5 g/l de bouillie bordelaise.
- Planter des variétés résistantes.
L'oïdium
L'oïdium, ou blanc, peut causer des dégâts très graves et détruire totalement une récolte. Il se manifeste par un feutrage
blanc caractéristique qui recouvre parfois complètement les feuilles, et endommage les jeunes rameaux. Ce champignon
microscopique s'attaque à un grand nombre de plantes, et n'a pas besoin d'un temps particulièrement humide pour
proliférer.
Que faire :
- Traiter préventivement en hiver avec du permanganate de potassium à 1g/l, pour décaper les formes hivernantes.
- Planter des variétés résistantes (demandez conseil à votre pépiniériste)
- Eviter les zones mal aérées, propices au développement de la maladie.
- Ramasser les feuilles mortes et les brûler.
- Traitez avec du soufre, en pulvérisation ou en poudrage. Le soufre est efficace entre 18 et 30°, au delà de 30° il y a
risque de toxicité pour les plantes.
La chlorose
La chlorose ferrique, ou jaunisse est cette maladie de carence qui se manifeste par un jaunissement des feuilles
terminales, les nervures restant vertes. Ce signe marque une incapacité de la plante à assimiler le fer, à cause d'un
excès de calcaire dans le sol, un terrain mal drainé, ou les deux à la fois.
Que faire :
- Drainer le sol, l'aérer, faire des binages et des apports de compost bien décomposé.
- Apporter du fer assimilable, sous forme de chélate de fer ("Séquestrène") plutôt que l'habituel sulfate de fer.
- Choisir un porte greffe adapté au terrain calcaire.
L'armoire à pharmacie de base
Le cuivre
Le cuivre est essentiellement un traitement d'hiver et de pré floraison. Son action anti-cryptogamique a été découverte
tout à fait par hasard par des vignerons du bordelais qui aspergeaient les bordures de leur parcelle avec un mélange de
chaux et de sulfate de cuivre pour ... rendre les raisins immangeables et dissuader les voleurs ! Depuis cette époque les
propriétés fongicides de la célèbre bouillie bordelaise ont été bien étudiées et son emploi étendu à d'autres domaines
que celui de la vigne. Son utilisation en traitement d'été est malheureusement limitée du fait que le sulfate de cuivre est
Bouvigny Côté Jardins - Compte-rendu de l’atelier «Taille d’entretien des arbres fruitiers » 2010
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toxique pour un grand nombre de plantes, et peut causer de graves brûlures du feuillage. En arboriculture, on utilise
également un autre sel de cuivre aux propriétés sensiblement identiques, mais un peu moins phytotoxique :
l'oxychlorure de cuivre. Ce composé, qui ne nécessite pas de neutralisation par de la chaux, est très bien solubilisé et
passe mieux que la bouillie dans les petits pulvérisateurs.
Le soufre
C'est le second produit de base de notre armoire à pharmacie anticryptogamique. Cette substance naturelle, utilisée
principalement contre l'oïdium, a également une action efficace contre les acariens (araignée rouge) et contre la
tavelure. Contrairement au cuivre, il n'est pas phytotoxique, à condition de l'utiliser quand la température est inférieure à
30°, mais on lui reproche de causer des dommages à la faune auxiliaire, entre autres acariens prédateurs et larves de
coccinelles.
La roténone et le pyrèthre
Pour lutter contre les insectes prédateurs, on dispose principalement de deux insecticides naturels dont l'utilisation est
aujourd'hui largement répandue. Ils agissent par ingestion, par inhalation et par contact, et sont rapidement dégradés
par les ultra violets. Pour cette raison, on doit traiter de préférence en fin de journée pour une efficacité maximum. On
peut les utiliser quasiment jusqu'à la récolte, mais si ils sont sans danger pour les animaux à sang chaud et pour les
abeilles, ils peuvent faire d'importants ravages parmi les insectes auxiliaires. A n'utiliser donc qu'avec discernement, ce
n'est pas parce que c'est "bio" ou "naturel" que c'est sans inconvénient pour l'environnement.
Crédits
Dessins et textes
Association des Jardiniers de France, Club local Bouvigny Côté Jardins
Sources documentaires
Le guide de la taille : la taille douce des arbres libres (Rustica, janvier 2009),
Animation de l’atelier
M. Chapron (Club local Bouvigny Côté Jardins)
Bouvigny Côté Jardins - Compte-rendu de l’atelier «Taille d’entretien des arbres fruitiers » 2010
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