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TEXTE ET IMAGE Cours de Jean pierre Morcrette documentation textuelle
On parle de langue lorsqu'on a affaire à une organisation très articulée de systèmes,
phonologique parce qu'il faut des sons, morphologique parce qu'il faut des formes, syntaxique
parce qu'il faut des phrases pour agencer les mots entre eux et, enfin, sémantique parce que
tous ces éléments combinés doivent produire du sens. »
Claude Hagège, in Le Point, 25/06/2009 N°1919
Genèse 11
Toute la terre avait une seule langue et les mêmes mots.
Partis d’orient, les hommes trouvèrent une plaine au pays de Sennaar, et s’y établirent.
Ils se dirent entre eux : Eh bien, faisons des briques, et mettons les cuire au feu. La brique leur
servit de pierre, et le bitume de ciment.
Ils dirent : Eh bien, construisons-nous une ville et une tour dont le sommet touche au ciel, et
faisons-nous un nom, de peur que nous ne soyons dispersés sur la face de la terre.
Yahweh descendit pour voir la ville et la tour que bâtissaient les fils des hommes, et Yahweh
dit : Voici, qu’ils sont un seul peuple et n’ont qu’une langue pour eux tous, et voilà le
commencement de leur œuvre ; maintenant rien ne leur sera impossible de ce qu’ils ont projeté
de faire. Eh bien, descendons et embrouillons leur langage de sorte qu’ils ne comprennent
plus le langage les uns des autres. Et de là, Yahweh les dispersa sur la face de toute la terre et
ils cessèrent de bâtir la ville. C’est pourquoi on la nomma Babel, parce que de là, Yahweh
embrouilla le langage de toute la terre, et que de que Yahweh les dispersa sur la face de
toute la terre.
La Sainte Bible, édition de 1951 sous le patronage de la Ligue Catholique de l’Evangile, tirée du
texte de l’édition de MM. Pirot et Clamer
Babel vient du mot akkadien Bāb-ili (La porte du Dieu), Bāb voulant dire « porte » et ilu voulant dire « Dieu ».
(décliné ili) Autre signification bab-'el (la cité de Dieu). Cette origine est clairement une référence à Babylone, dans
le pays de Shennaar (ou Shinear) : Sumer.
Prologue 1.1 de l’Évangile de St Jean, quelques traductions :
« Au commencement était le Verbe et le Verbe était auprès de Dieu et le verbe était
Dieu. » (traduction de 1951 par la Société Civile d'Études et de Publications regroupant des
catholiques)
« Au commencement le Verbe était et le Verbe était avec Dieu, et le verbe était Dieu. »
(traduction de L.-M. Dewailly, dominicain, années 1960)
« Entête, lui, le logos et le logos, lui, pour Elohîm, et le logos, lui Elohîm. » (traduction d’André
Chouraqui dans les années 1970) [En grec ancien logos signifie à la fois raison et discours]
On juge de l'embarras du fidèle, de son désarroi devant une expression [le Verbe] dont
on ignore les origines, déjà très obscures chez les anciens, et plus encore chez l'évangéliste qui
a compté sur l'effet produit par des mots pompeux, une phraséologie ambiguë, déguisant la
pauvreté du style et la stérilité des idées. Car le Christianisme, qui n'a rien inventé et a pillé
toutes les religions, toutes les philosophies dont il a composé le dogme qui s'est développé
postérieurement, a emprunté également cette légende du Verbe à la philosophie grecque en
l'adaptant à des fins toutes différentes.
Charles VAUDET, Le Procès du Christianisme, 1933
Ancien président de la Fédération française de la libre pensée.
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Il est donc à croire que les besoins dictèrent les premiers gestes, et que les passions
arrachèrent les premières voix. Et, suivant avec ces distinctions la trace des faits, peut-être
faudrait-il raisonner sur l’origine des langues tout autrement qu’on a fait jusqu’ici. Le génie des
langues orientales, les plus anciennes qui nous soient connues, dément absolument la marche
didactique qu’on imagine dans leur composition. Ces langues n’ont rien de méthodique et de
raisonné; elles sont vives et figurées. On nous fait du langage des premiers hommes des
langues de géomètres et nous voyons que ce furent des langues de poètes.
Cela dut être. On ne commença pas par raisonner, mais par sentir. On prétend que les
hommes inventèrent la parole pour exprimer leurs besoins ; cette opinion me paraît
insoutenable. […]
D’où peut donc venir cette origine ? Des besoins moraux des passions. Toutes les passions
rapprochent les hommes que la nécessité de chercher à vivre force à se fuir. Ce n’est ni la faim,
ni la soif mais l’amour, la haine, la pitié, la colère, qui leur ont arraché les premières voix. Les
fruits ne se dérobent point à nos mains ; on peut s’en nourrir sans parler: on poursuit en silence
la proie dont on veut se repaître : mais pour émouvoir un jeune cœur, pour repousser un
agresseur injuste, la nature dicte des accents, des cris, des plaintes. Voilà les plus anciens
mots inventés, et voilà pourquoi les premières langues furent chantantes et passionnées avant
d’être simples et méthodiques.
Rousseau. Essai sur l’origine des langues,1761
[c’est Socrate qui parle]
[…] Car, à mon avis, ce qu’il y a de terrible, Phèdre, c’est la ressemblance qu’entretient
l’écriture avec la peinture. De fait, les êtres qu’engendre la peinture se tiennent debout comme
s’ils étaient vivants ; mais qu'on les interroge, ils restent figés dans une pose solennelle et
gardent le silence. Et il en va de même pour les discours. On pourrait croire qu’ils parlent pour
exprimer quelque réflexion ; mais, si on les interroge, parce qu’on souhaite comprendre ce qu'ils
disent, c’est une seule chose qu’ils se contentent de signifier, toujours la même. […]
PLATON, Phèdre, 275e, in œuvres complètes sous la direction de Luc Brisson,
Flammarion, 2008
[…] qu’est-ce qui me fascine dans un tableau, qui fait que telle œuvre plutôt que telle
autre nous arrête et qu’on ne peut s’en détacher, […]. En ce qui me concerne, car il n’y a bien
sûr pas de règle générale, je dirais que c’est le sentiment que dans cette œuvre-là il y a
quelque chose qui pense, et qui pense sans mots. Je suis quelqu’un qui parle et qui écrit, ma
pensée se fait avec des mots, elle cherche, s’exprime, et une peinture pense de façon non
verbale ; […]
Daniel ARASSE, Histoires de peintures, Gallimard, Folio, 2004
à propos de la peinture hollandaise du XVIIe siècle
[…] La pensée s’incarne dans l’image avant de le faire dans le langage, et elle peut ne pas
affleurer à la conscience : le tableau en sait souvent plus que son créateur.
Tzvedan TODOROV, in Philosophie magazine, n°35, décembre 2009,
Quand j'ai fait un beau tableau, je n'ai pas écrit une pensée. C'est ce qu'ils disent. Qu'ils
sont simples ! Ils ôtent à la peinture tous ses avantages. L'écrivain dit presque tout pour être
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compris. Dans la peinture, il s'établit comme un pont mystérieux entre l'âme des personnages
et celle du spectateur [...]
Delacroix, Journal, 8 octobre 1822 et 4 avril 1854, cité par Hubert Damisch dans La
peinture en écharpe - Delacroix, la photographie, Bruxelles, Yves Gevaert, 2001, p. 52.
Je vois pourquoi la présence de mots dans les œuvres d’arts déplaît à de nombreux
artistes plasticiens. Ils ont le sentiment que les mots polluent l’eau claire dans laquelle le ciel se
reflète, qu’ils troublent le plaisir pris à la contemplation d’une image silencieuse, la liberté
goûtée en l’absence de narration, la beauté de la forme sans nom. Je veux nommer nos
souffrances. Garder nos mots et leur sens. Je sais que ni les images, ni les mots ne peuvent
échapper à l’ivresse et à la nostalgie qu’engendre le monde en mouvement. Les mots et les
images boivent à la même coupe. Il n’y a aucune pureté à protéger.
Marlène DUMAS, 1984, cité d’après J. Brand, N. Gast et R. J. Muller, The Words and the
Images : Text and Images in the Art of the Twentieth Century, cat. d’exposition, Centraal
Museum, Utrecht, 1991, p. 24
Comme production, la Photographie est prisonnière de deux alibis insupportables : tantôt
on la sublime sous les espèces de la « photographie d’art », qui dénie précisément la
photographie comme art ; tantôt on la virilise sous les espèces de la photo de reportage, qui tire
son prestige de l’objet qu’elle a capturé. Mais la Photographie n’est ni une peinture, ni une
photographie ; elle est un Texte, c'est-à-dire une méditation complexe, extrêmement complexe
sur le sens.
Roland BARTHES, Tels, in Photo n° 112, janvier 1977 (sur quelques portraits de Richard
Avedon) ; cité dans Roland Barthes, Le texte et l’image, catalogue Pavillon des Arts, 1986
texte [tDkst] n. m.
• 1265; « évangéliaire, missel » 1175; lat. textus « enchaînement d'un récit, texte », proprt « tissu; trame »,
de texere « tisser »
1 LE TEXTE, UN TEXTE : la suite des mots, des phrases qui constitue un écrit ou une œuvre (écrite ou orale)
lettre [lDtY] n. f.
Xe; lat. littera
1 (XIIe) Signe graphique qui, employé seul ou combiné avec d'autres, représente, dans la langue écrite (écriture alphabétique, syllabique),
un phonème ou un groupe de phonèmes.
écriture [ekYityY] n. f.
escriture v. 1050; lat. scriptura
1 Représentation de la parole et de la pensée par des signes graphiques conventionnels destinés à durer.
mot [mo] n. m.
Xe; bas lat. muttum, rad. muttire « souffler mot, parler », proprt « dire mu »
1 Cour. Chacun des sons ou groupe de sons correspondant à un sens, entre lesquels se distribue le langage
Petit Robert, 2001-2002
« Un signe est quelque chose tenant lieu de quelque autre chose pour quelqu'un, sous
quelque rapport ou à quelque titre »
Charles Pierce, Écrits sur le signe, trad. fr., Seuil, 1978, p. 215).
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Charles Sanders Peirce (1839-1914) philosophe et sémiologue ou sémioticien américain,
distinguait 3 natures du signe : l’icone, l’indice et le symbole.
L’icone : est « un signe qui se réfère à l’objet qu’il dénote simplement en vertu de ses
caractères propres », le représentant ressemble au représenté : l'onomatopée imite un bruit
naturel, le portrait ressemble à la personne représentée…
L’indice est « un signe qui se réfère à l’objet qu’il dénote en vertu du fait qu’il est réellement
affecté par cet objet », il y a un rapport de contiguïté vécue
Le symbole est « un signe qui est constitué comme signe simplement ou principalement par le
fait qu’il est utilisé ou compris de la sorte », c’est donc une relation purement conventionnelle
(arbitraire) qui ne met pas en jeu la similitude (icône) ou la contiguïté (indice)
Ces trois relations — icone, indice, symbole — peuvent se manifester à des degrés divers dans
un même signe
La philosophie de Peirce trouve son plus grand achèvement dans sa sémiotique, car
« l'homme est un signe » écrit-il à la fin de sa vie. Dans la mesure il n'y a pas de pensée
sans signe, dans la mesure « l'intelligence est une action finalisée », la théorie sémiotique
permet de répondre à la grande question kantienne, ou du moins d'indiquer une direction pour
la réponse à cette question : « qu'est-ce que l'homme ? » Pour Peirce, avant beaucoup
d'autres, l'être humain est un animal symbolique. Sa caractéristique propre est l'intelligence,
c'est-à-dire l'action réfléchie, où il fait œuvre de lui-même en signifiant. En donnant un sens à sa
vie à travers différents univers symboliques, l'être humain accomplit et dépasse sa forme de
sujet en devenant créateur et interprète de ses signes et des signes qu'il découvre dans le
monde. Il ne peut faire cela que dans la mesure il est congénitalement un être social et
historique. Car la pensée comme la signification sont des processus communautaires et non
des processus que le prétendu penseur accomplirait seul « dans sa tête ».
http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Sanders_Peirce
L’homme, en tant qu’animal humain, apparaît entre 1 million et 1million et demi d’années ; il se
sert de la parole vraisemblablement depuis 100 000 à 60 000 ans ; dessine depuis environ 30
000 ans ; écrit depuis environ 5000 ans.
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En s’installant dans le pays, les Phéniciens venus avec Cadmos [...] apportèrent aux
Grecs bien des connaissances nouvelles, entre autres l’alphabet, inconnu jusqu’alors en
Grèce à mon avis : ce fut d’abord l’alphabet dont usent encore tous les Phéniciens puis avec
le temps, les sons évoluèrent ainsi que les formes des lettres.
Hérodote (v. 484-v. 425 avant J.-C.)
« On ne trouve pas dans les sociétés utilisant l’écriture alphabétique l’équivalent des
scribes égyptiens ou des mandarins chinois, avec les pesanteurs et l’inertie que ces groupes
ont souvent perpétuées. »
Françoise Briquel-Chatonnet, docteur en histoire et directrice de recherche au CNRS au
laboratoire Orient et Méditerranée (CNRS, Paris IV, Paris I, École Pratique des Hautes Études).
En 2008, selon l’UNESCO, le nombre d'analphabètes dans le monde est passé de 871
millions au cours de la période 1985-1994 à 774 millions pour la période 2000-2006 (soit
environ 1/5 de la population adulte mondiale). Ces chiffres globaux cachent de fortes disparités,
ainsi 75 % des 774 millions d'adultes analphabètes dans le monde vivent dans seulement 15
pays comme le Bangladesh, le Brésil, la Chine, l'Inde ou le Nigeria ; et 64 % des adultes ne
sachant ni lire ni écrire étaient des femmes pour la période 2000-2006.
Le message linguistique
Le message linguistique est-il constant ? Y a-t-il toujours du texte dans, sous ou alentour
l'image ? Pour retrouver des images données sans paroles, il faut sans doute remonter à des
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