le savoir sur le bout des doigts

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ENL GROUP PEOPLE INITIATIVES NEWS
LE SAVOIR SUR LE
BOUT DES DOIGTS ?
No. 19 - APRIL 2016
SHOWCASE
ENL INSIDE
L’entrecoupe,
période
décisive au bon
déroulement
de la récolte
Sommaire
Salaires et bénéfices :
Mieux comprendre
les politiques de rémunération
22-23
8-9
PERSPECTIVES
Le savoir sur le bout
des doigts ?
12-16
Shyama Soondur
OUTREACH
Communication & PR
Quand la jeunesse
voit bleu
18-19
OUTBOUND
Velogic s’implante au Kenya
FACE TO FACE
Aleksandar Ivancic
& Miguel Sodupe
(Anteverti):
“Mauritius
is developing.
Let’s do it properly”
26
Il y a de quoi rougir de plaisir ! Et, peut-être, aussi de quoi s’étonner ? Car cette notoriété suggère un vivier de connaissances et de
savoir-faire qui devrait faire décoller en flèche l’économie du savoir,
la carte que Maurice veut jouer pour passer à un palier supérieur de
croissance. Or, cette économie du savoir est toujours en construction… Nous faisons ici un point d’étape (pp. 12-16).
En attendant, les Smart Cities offrent une opportunité d’améliorer les zones urbaines afin de mieux s’adapter aux besoins futurs du
pays. Encore faudrait-il que ces développements suivent un processus transparent et participatif, nous disent deux experts présents au
Smart City Summit de février dernier (pp. 18 et 19).
20-21
A publication of ENL Group
Editor
ENL House
Vivéa Business Park
Moka, Mauritius
www.enl.mu | [email protected]
Contributors
Executive Editor
Claire Coulier
Désiré Eléonore
Ideos Communications
Claire Théveneau
Shyama Soondur
Printing
Concept, Layout & Art Direction
April 2016
Republic of Mauritius
Lemon Agency
2
ENLIGHTEN No 19
T-Printers
C'en est étourdissant ! La Banque mondiale,
l’Heritage Foundation et le Forum économique
mondial à travers son Global Competitiveness
Index s’accordent tous à dire que l’économie
mauricienne compte parmi les plus performantes
et les plus compétitives de la région…
Nous évoquons aussi l’évolution du port qui, encore une fois,
dépoussière son ambition de devenir un centre névralgique régional pour rester en phase avec les ambitions économiques du
pays (pp. 24 et 25). Ce qui n’empêche pas Velogic, l’un de
ses acteurs principaux, de prendre ses quartiers secondaires à
Mombassa (p. 26).
REFLECTION
Modernisation du port :
Un sujet
de constante actualité
24-25
Pour en revenir à une autre activité économique traditionnelle,
pensiez-vous que l’industrie sucrière somnolait entre deux coupes ?
Détrompez-vous et lisez tout ce qui s’y passe pendant que la canne
pousse (pp. 8 et 9).
Également dans nos pages, un coup d’œil sur les dynamiques du
marché de l’emploi à Maurice (pp. 22 et 23), car la question de
révision et de compensation salariales revient bientôt sur le tapis.
Petit détour, auparavant, par Bagatelle Mall, qui étoffe son offre de
loisirs avec le foot à cinq et très prochainement, le bowling (p. 11).
Bonne lecture !
APRIL 2016
3
INSPIRATION
AT A GLANCE
Et c’est parti pour la « Smart City » de Moka !
As entrepreneurs who have ten years
of experience developing Moka into
an integrated suburban destination,
we see the merits of the Smart Mauritius
strategy.
T
he pathway to the next development
threshold of Mauritius will go through
cities. Through smart cities, to be precise.
These new towns will be hotspots of opportunity
and enterprise, supported by modern, connected
and eco-friendly infrastructure. The country can
expect to derive significant collateral benefits in
the form of smoother-flowing traffic, lower energy
bills and safer neighbourhoods.
The government-sponsored Smart City Scheme
thus sets the scene for a sustainable Mauritius.
As citizens of this island nation, we cannot but
welcome the promise of a greener, cleaner and
more smartly urbanised island. We can see the
bigger picture, one in which Mauritius becomes
a dynamic city-state, made up of a network of
bustling towns, each with its own special energy.
As entrepreneurs who have ten years of
experience developing Moka into an integrated
suburban destination, we see the merits of the
Smart Mauritius strategy. To a large extent, we
have already seen it at work in Moka. Our master
plan to urbanise an additional 1,500 arpents of
freehold land in the Moka-Saint Pierre region is
permanently changing the economic and social
profile of the region.
Several hundred new families have come to live
in the modern and connected neighbourhoods
that we have created so far. Once predominantly
agricultural, the region is now home to a flourishing services sector. Company headquarters as
4
ENLIGHTEN No 19
well as enterprises engaged in business process
outsourcing, financial services, building, civil
engineering and architectural design have all set
base in the Vivéa and Bagatelle business parks.
Moka is now gearing up to be a hub for start-ups,
powered by our two newest initiatives, the Turbine
business incubator and ENL Corporate Ventures.
Many different factors drive an individual’s
choice of where to live. Marketing Moka as the
hometown of choice to non-natives for the past
decade has taught us that the vibrancy of a town
and the diversity of its entertainment offering are
key considerations. Moka’s wide-ranging leisure
and lifestyle infrastructure, which includes shops,
restaurants, pubs, indoor sporting activities,
mountain biking and cross-country races, sports
and health clubs, garden and horticultural fairs,
contributes to the area’s definitely upbeat vibe.
While there is no evidence of any direct correlation between urbanisation and economic
development, cities can be escalators of growth.
They may not create wealth directly but they are
certainly conduits for it. Statistically, countries
in which 50% of the population lives in cities
generate up to four times more income than
those with a less urbanised population. Three of
the USA’s largest metropolitan areas are home
to only 13% of the country’s population but
account for 70% of its GDP!
Mankind is an urban species, and one of our
greatest gifts is our capacity to learn from
Le gouvernement a donné son accord de principe à la création de la Smart City de Moka, dont le périmètre s’étend de Verdun à Bagatelle. Le Board
of Investment a octroyé une Letter of Comfort le 25 mars dernier pour le développement de la première phase de cette ville sur une superficie globale
d’environ 450 arpents.
L’urbanisation par ENL de cette région, qui jouxte le village de Moka-St-Pierre, a démarré il y a une dizaine d’années. L’initiative se traduit par un plan directeur dont la mise en œuvre a déjà abouti à la création de lieux de vie intégrés comprenant résidences, commerces, bureaux, écoles, universités, hôpitaux
et centres sportifs dans un rayon de quelques kilomètres. La Smart City de Moka sera bâtie autour d’eux.
« Cinq zones de développement, à savoir Bagatelle, Telfair, Les Allées d’Helvétia, Vivéa Business Park et la zone industrielle de St-Pierre sont concernées. Elles ont chacune un noyau déjà développé. Les phases ultérieures de leur développement s’effectueront selon les conditions prescrites
par le Smart City Scheme », explique Samuel de Gersigny, General Manager d’Espral et responsable du dossier chez ENL Property.
one another. Cities provide the perfect setting for
this learning. We gather insights just by watching
people do things that they are good at or by
observing things that don’t work; by exchanging
ideas informally and by letting ourselves be more
easily contaminated by the sense of possibility.
The most happening cities have evolving demographics. People arriving from other shores
bring along their dreams, their know-how and
their ambitions. More than top-notch infrastructure, they are what gives an edge to cities that
welcome them. It is just as well that through the
Smart City Scheme, Mauritius is further opening
its doors to the world. For this is where growth
will truly come from!
Hector Espitalier-Noël
CEO, ENL Group
La réalisation de cette phase de la Smart City de Moka s’échelonnera sur une dizaine d’années et mobilisera quelque Rs 7 milliards d’investissement.
Elle continuera à se faire dans un climat de consultation et de collaboration avec toutes les parties prenantes, selon la tradition chez ENL.
L’urbanisation de Moka était d’ailleurs un des points évoqués lors d’une récente réunion d’information à ENL House avec les représentants de la
circonscription et les autorités locales. Les députés Leela Devi Dookhun-Lutchmun, Pravind Jugnauth et Yogida Sawminaden étaient accompagnés de
Renganarden Sooben et Ghovadarajah Ramanjooloo, respectivement président et CEO du conseil de district de Moka, et de plusieurs autres officiels.
Soutien à L’Escalier
Johan Pilot,
CEO d’ENL Property
Johan Pilot a été nommé Chief Executive Officer d’ENL Property à compter
du 1e avril. La trentaine et expertcomptable de formation, il a fait ses
premières armes au sein de l’équipe
il y a huit ans, période durant laquelle
il a su faire preuve de dynamisme et
de détermination. Il est désormais chef
de file d’une équipe d’environ 100 personnes engagées dans la conception,
la réalisation et la commercialisation de
développements immobiliers. « J’ai accepté cette
nouvelle responsabilité avec beaucoup d’humilité
et d’enthousiasme aussi. C’est un super challenge
pour moi et j’ai la chance de pouvoir compter sur
une équipe solide et un beau portefeuille de projets. Je compte veiller à ce que l’esprit d’équipe et
la devise d’ENL Property – Doing business is fun
– prévalent en toute circonstance », dit-il.
Les groupes ENL et Omnicane unissent à nouveau leurs efforts pour soutenir
les habitants de L’Escalier. L’ONG Caritas s’est jointe à eux pour aider cette
communauté du sud à mieux se prendre en main. La collaboration a déjà
donné de premiers résultats. Une étude de terrain a été menée pour faire remonter les besoins des villageois en termes d’aide et de soutien. En outre, une
trentaine de leaders communautaires ont été formés en Lifeskill Management
afin d’être des relais efficaces des initiatives de développement qui seront à
présent proposées.
Réforme du Syndicat des Sucres
Le Syndicat des Sucres, institution responsable de la commercialisation
du sucre produit à Maurice, a entamé une réflexion relative à la mise à
jour de sa structure et de son fonctionnement afin de rester en phase
avec l’évolution récente de l’industrie. Dans ce contexte,
Hector Espitalier-Noël, son président en exercice, a eu une série de
consultations en mars avec les principaux acteurs du secteur afin de
mieux comprendre leurs attentes. Avec le démantèlement du régime
préférentiel européen, faudrait-il revoir la stratégie
pour le commerce sucrier ? Comment
évoluer pour continuer à bien
représenter les intérêts de tous les
acteurs de l’industrie ? Ce sont
là quelques-unes des questions qui restent posées.
APRIL 2016
5
AT A GLANCE
SHOWCASE
VINCENT CAVALOT, « HOTEL MANAGER » DE VOILÀ BAGATELLE :
«Les étoiles doivent tenir compte
des attentes des clients»
Voilà Bagatelle, en opération depuis bientôt quatre ans, a été primé
cette année par les « Travelers’ Choice Awards » de TripAdvisor.
Vincent Cavalot, « Hotel Manager », explique la proposition commerciale
et de valeur de l’établissement, ainsi que les implications du nouveau
classement hôtelier introduit à l’île Maurice.
La Turbine tourne !
L’activité bat son plein à la Turbine. Son quartier général, aménagé dans la salle des machines de
l’ancienne usine sucrière de Mon Désert-Alma au cœur de Vivéa Business Park, sera bientôt prêt.
Ces locaux pourront accueillir leurs premiers locataires dès juillet.
VOILÀ BAGATELLE SE CLASSE DANS LE TOP 10 DES HÔTELS
OFFRANT LE MEILLEUR RAPPORT QUALITÉ-PRIX AUX
« TRAVELERS’ CHOICE AWARDS » 2016 DE TRIPADVISOR.
DE QUOI S’AGIT-IL ?
C’est la première fois que nous recevons cette distinction, qui est attribuée
annuellement sur la base de commentaires et avis de voyageurs publiés sur
le site TripAdvisor. Ce dernier est un outil essentiel au marketing hôtelier :
avant de réserver, 77 % des voyageurs se réfèrent aux avis sur un hôtel postés en
ligne par des internautes qui y ont séjourné. C’est pour cela que nous avons investi
dans un système de gestion de la réputation en ligne, qui nous permet d’entretenir
au mieux notre activité sur le site.
En même temps, la Turbine a formé 20 entrepreneurs en herbe dans le cadre de son programme
Inspire. Cette formation vise à leur apprendre à affiner leur projet commercial et à le présenter de
manière professionnelle à de futurs investisseurs.
Deux coachs de l’incubateur suédois STING, partenaire de la Turbine, ont fait le déplacement pour
animer les ateliers. À la clôture d’Inspire le 24 mars, les candidats ont défendu leurs projet d'entreprise
devant un jury de trois investisseurs, qui ont ensuite partagé en direct leurs réactions et commentaires.
La Turbine s’apprête à présent à lancer Incubate, son programme résidentiel qui propose, à partir de
juillet, un accompagnement sur un an aux entrepreneurs. Visitez la page Facebook de l’incubateur pour
les détails concernant l’inscription.
Voilà s’agrandit
L’hôtel Voilà Bagatelle propose, à partir d’avril,
davantage d’espace restaurant/lounge pour satisfaire sa clientèle. Les travaux d’agrandissement,
entrepris au coût de Rs 3 millions, permettent à
l’hôtel de recevoir jusqu’à 150 personnes pour
les repas principaux. L’investissement est surtout
motivé par Voilà Meetings, l’offre MICE de l’hôtel.
« Nous pouvons désormais accueillir de plus
grandes conférences et aussi mieux satisfaire nos
résidents, qui demandent des séjours en demipension », explique Béatrice Fabre, Marketing
Manager de l’hôtel. Celui-ci continue sur sa
lancée, avec un taux de remplissage de plus
de 70 % prévu pour cette année.
PARLEZ-NOUS DE VOTRE POSITIONNEMENT
ET DE VOTRE OFFRE, UN PEU HORS DU COMMUN
SUR LE MARCHÉ LOCAL...
Situé entre Ébène et Port-Louis, Voilà Bagatelle est idéalement placé
pour une clientèle d’affaires. Mais notre plus gros avantage, c’est le centre commercial de Bagatelle, avec ses boutiques, ses salles de cinéma et
maintenant, son foot à cinq. Cela nous permet de faire du Urban Lifestyle
Booking orienté vers ceux qui, par exemple, veulent profiter du mall sans
avoir à reprendre la route par la suite.
Bagatelle Mall
se connecte
Bagatelle Mall of Mauritius passe
à l’ère numérique. Le centre commercial sera une zone wi-fi gratuite
à partir de juin. Cet investissement
jette les bases pour la mise en
place de toute une infrastructure
visant à privilégier l’interaction
entre le mall et ses visiteurs. L’objectif final est d’améliorer l’expérience du visiteur en lui proposant
un parcours amélioré.
Voilà Meetings a un peu bousculé le concept. C’est une offre un peu différente. Notre proposition commerciale unique consiste en notre rapport
qualité-prix, notre emplacement géographique au centre de l’île et le fait
d’offrir une technologie de pointe à notre clientèle.
ENL roule
avec Le Vélo Vert
Le Vélo Vert, activiste de l’agro-écologie, est entré
en partenariat avec le groupe ENL pour améliorer
sa distribution de fruits et légumes du terroir issus
de l’agriculture organique et raisonnée. Ce dernier
a en effet investi Rs 1 million pour créer
LVV Organic Distribution Ltd, une compagnie dite
solidaire de l’organisation qui milite en faveur de
produits agricoles sains en agissant sur deux fronts :
l’éducation des agriculteurs et consommateurs,
ainsi que le développement d’un réseau de vente
qui permet aux agriculteurs de proposer leurs produits directement aux consommateurs. Le soutien
d’ENL à cette initiative s’inscrit dans le cadre des
engagements du groupe à encourager l’entreprenariat et à promouvoir une agriculture saine.
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ENLIGHTEN No 19
PROFIL
Rentré au pays au début des années 2000, après plusieurs années en France, Vincent Cavalot
a intégré le service des ventes
de Veranda Leisure & Hospitality. En 2005, il a rejoint
La Palmeraie, puis a été responsable des ventes pour
Le Touessrok et ensuite directeur
adjoint de Sugar Beach Resort.
Hotel Manager à Voilà Bagatelle
depuis 2013, il détient une
maîtrise d’ingénierie et de commercialisation de produits hôteliers et touristiques, ainsi qu’un
brevet de technicien supérieur
en hôtellerie et en restauration.
L’OFFRE DE VOILÀ A-T-ELLE SA PLACE DANS LE SYSTÈME
DE CLASSIFICATION HÔTELIÈRE RÉCEMMENT INTRODUIT
À L’ÎLE MAURICE ?
Cette classification est une très bonne chose. Il faut formaliser le secteur. L’hôtellerie va continuer à se démocratiser et il y aura de plus en plus de petits hôtels.
Il faut aussi dire que les critères d’évaluation ne sont pas les mêmes pour les
Inland Hotels et les Business Hotels que pour les Beach Hotels. Par contre,
les critères de classification doivent rester des recommandations macroéconomiques. Il est impensable que l’on vienne imposer des services sans prendre en
compte la clientèle et l’offre des différents établissements hôteliers. Les critères
doivent être plus généraux et les étoiles doivent être accordées sur la base de la
qualité du service et comment celui-ci répond aux demandes des clients.
EST-CE LE CAS CONCERNANT VOILÀ BAGATELLE ?
Oui, et c’est pour cela que notre performance est montée en flèche
depuis le lancement de l’hôtel. Nous sommes passés d’un chiffre d’affaires
d’environ Rs 56 millions en 2012 à un chiffre d’affaires prévisionnel de
Rs 115 millions cette année.
APRIL 2016
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SHOWCASE
SHOWCASE
L’entrecoupe,période décisive
au bon déroulement de la récolte
CANNE À SUCRE
EN CHIFFRES
HERBICIDES
ENTRECOUPE
15 décembre
au
15 juin
BOUTURES
7
replantées
fois
besoins importants en eau, surtout
durant sa croissance. Grâce à une
forte pluviosité (moyenne annuelle
de 3 000 mm), la région de
Mon Désert-Alma ne dépend pas
de l’irrigation autant que Savannah,
situé sur le littoral sud, avec une
moyenne de 1 100 mm de pluie par
an. ENL Agri a mis en place tout un
réseau constitué de plusieurs types
de systèmes d’irrigation, à savoir le
pivot, le goutte-à-goutte et l’irrigation
à gros débit.
Si la période de coupe de la
canne à sucre ne passe jamais
inaperçue, notamment avec les
camions chargés sur nos routes
et les cheminées qui fument,
l’entrecoupe n’en reste pas
moins une phase cruciale pour
la production du sucre.
Stellio Prefumo, « Agricultural
Manager » d’ENL Agri, lève
le voile sur cette époque de
l'année où l’arrière-scène de
l’industrie sucrière occupe
les devants.
8
ENLIGHTEN No 19
L
a culture de la canne à sucre
est la principale activité
d’ENL Agri, qui fait pousser
cette plante sur presque
4 900 hectares dans le centre
et le sud de l’île. La compagnie
récolte environ 365 000 tonnes
de canne chaque année et produit
approximativement 37 000 tonnes
de sucre à travers les usines
d’Alteo et d’Omnicane.
La période de coupe de la
canne s’étend sur six mois de
l’année, habituellement du
15 juin au 15 décembre, et les
six mois restants constituent ce
que l’on appelle l’entrecoupe
dans le milieu. Entre préparation
des sols, réparation et maintenance, aménagement des
champs, plantation, analyse et
réflexion, cette phase est décisive
au bon déroulement de la récolte.
La récolte ayant pris fin, il s’agit
d’abord de créer les conditions optimales pour la repousse de la canne.
Fertilisation, contrôle des mauvaises
herbes, irrigation... Des équipes
d’ouvriers agricoles soutenues, là où
les conditions le permettent, par des
équipements agricoles sophistiqués,
entrent en scène. La terre est enrichie
de nutriments de synthèse et organiques, dont des granulés, liquides
et écumes provenant des usines
sucrières. Cette phase dure généralement de septembre à janvier.
Les mauvaises herbes sont éliminées pour éviter toute compétition
avec la canne. Il s’agit d’une étape très
technique, négociée sous la supervision rapprochée de l’agronome,
qui se plie lui-même aux standards
de l’Institut de recherche de l’industrie sucrière (MSIRI). ENL Agri
pratique un contrôle intégré visant
à réduire le recours aux herbicides.
La paille laissée derrière grâce à la
récolte mécanique est utilisée pour
recouvrir le sol et barrer la route
aux mauvaises herbes. La stratégie
de pulvérisation d’herbicides est
affinée pour les éliminer tôt, avant
qu’elles prennent racine. L’intervention humaine à l’aide de la bonne
vieille pioche complète l’arsenal
mobilisé contre les mauvaises
herbes. Grâce à ces pratiques,
ENL Agri a réduit de 50 % ses
dépenses en herbicides en l’espace de 5 ans !
Vient ensuite l’étape importante
de l’irrigation, la canne ayant des
Stellio Prefumo
Agricultural Manager
RÉPARATION
ET ENTRETIEN
Après la coupe, vient le temps
des réparations et de l’entretien.
Il faut retaper les routes et chemins
d’accès aux champs, usés par les
allées et venues de poids lourds,
mais aussi les ponts, drains et cours
d’eau, qui subissent le même sort,
afin d’éviter les inondations
Dépenses
réduites de
%
50
2
VARIÉTÉS
plantées :
hâtive
et tardive
en périodes de fortes pluies. Quant
à la maintenance, elle concerne
toute la machinerie lourde sollicitée
pendant les six mois de coupe. Il
s’agit notamment de démonter les
machines pour les nettoyer, avant de
les réassembler. Ces deux activités
sont répétées tous les ans et durent
environ trois mois, de mars à mai.
Épierrage des champs de canne.
AMÉNAGEMENT
DES CHAMPS
L’aménagement des champs
consiste, entre autres, à les épierrer
en vue d’une plus forte mécanisation des opérations agricoles.
Cette étape doit être répétée tous
les ans, car il est difficile d’arriver à bout de toutes les masses
rocailleuses. ENL Agri a mis en
place un programme d’épierrage
jusqu’en 2018 pour ses sites de
Mon Désert-Alma et Savannah. Le
sol est ensuite travaillé à l’aide de
machines et on y répand enfin une
matière organique appelée « écume »,
ainsi que des fertilisants.
PÉPINIÈRE
Chez ENL Agri, la canne à sucre
a sa propre pépinière, où sont cultivées des boutures. Celles-ci subissent un traitement à l’eau chaude
pour favoriser la pousse de la canne
et éliminer les maladies avant d’être
plantées dans les champs. Il faut
savoir qu’une bouture est récoltée
sept fois avant d’être remplacée.
ENL Agri replante 10 à 12 % de la
superficie totale sous canne chaque
année. Deux variétés de canne sont
plantées, la « hâtive » (récoltée en
début de coupe) et la « tardive »
(variété de fin de coupe).
BILAN, ANALYSE
ET STRATÉGIE
Loin des champs de canne,
l’heure est à la réflexion.
Stellio Prefumo, Agricultural
Manager d’ENL Agri Limited, et
son équipe font le bilan de la coupe
passée pour préparer la stratégie
et les budgets de celle à venir.
Cette phase implique, entre autres,
la préparation des contrats avec
les différents partenaires et les
négociations, ainsi que les appels
d’offres visant les fournisseurs de
produits agrochimiques. Une étape
importante qui permet de déterminer les actions à reconduire ou à
éliminer pour la prochaine saison.
Du côté des ressources humaines,
il est temps d’évaluer les équipes et
de les remotiver pour leur permettre
encore une fois de donner le meilleur d’elles-mêmes. Cette période
est marquée notamment par des
formations et des team building.
LES AUTRES
ACTIVITÉS
D’ENL AGRI
ENL Agri, c’est aussi, et
tout au long de l’année, des
pépinières qui servent aux
projets d’ESP Landscapers,
des cultures vivrières horssol (laitue, tomate, concombre anglais, poivron) et en
plein champ (pomme de terre
de table et semences), une
salle d’empaquetage dédiée
à la marque haut de gamme
Field Good et l’élevage de
poulets de chair à Savannah.
APRIL 2016
9
SHOWCASE
SHOWCASE
ESP LANDSCAPERS
Dixansdéjà!
ESP Landscapers célèbre
en juillet ses 10 années
d’existence. Pour marquer
l’occasion, voici le parcours
de cette entreprise partie de
rien, qui a su s’imposer en
quelques années comme
leader sur le marché local de
l’aménagement paysager.
se constituer un portefeuille de
clients hors groupe. S’ensuit une
période de croissance rapide
durant laquelle ESP Landscapers
s’impose comme leader sur le
marché local. Son chiffre d’afenoit Mariette, General
faires passe de Rs 4 millions en
Manager d’ESP Landsca2007 à Rs 154 millions en 2012,
pers, se souvient encore de année de performances record.
son petit bureau situé derrière la
La conjoncture est alors proposte de Minissy, à Moka. En 2006, pice au développement immobiils n’étaient que deux collaborateurs lier, avec le déploiement dans le
à se le partager et à mettre la main pays de domaines IRS et RES,
à la pâte. Il se rappelle aussi du
centres commerciaux, bureaux et
premier projet qui leur a été confié : hôtels… ESP Landscapers s’en
nourrit et élargit sa palette de
un morcellement de 100 lots à
services, se positionnant comme
Gentilly, avec de grands espaces
un guichet unique pour la
verts, marque de fabrique d’ENL.
À l’époque, la compagnie n’offrait
conception, la réalisation et
que deux services : la fourniture
l’entretien d’espaces paysagers.
de plantes décoratives et l’exécuSa clientèle grandit aussi. Outre
tion de plans d’aménagement
ENL Property, qui grossit en pade jardins.
rallèle en tant que promoteur
Depuis, ESP Landscapers a
immobilier, Les Villas d’Albion by
fait du chemin. Créée initialement Club Med, Centara Grand Azuri
pour habiller de verdure les déve- Resort & Spa, les parties communes
loppements immobiliers d’ENL,
du village d’Azuri, West Island
la société prend son autonomie
Resort, la rénovation des hôtels
deux ans plus tard et s’attelle à
Outrigger Mauritius Beach Resort
B
10
ENLIGHTEN No 19
et Solana Beach Resort, ainsi que
des projets résidentiels tels que
Latitude, à Rivière-Noire, ne sont
que quelques-uns des projets qui
retiennent les services du paysagiste. Clairement, la détermination
de Benoit Mariette et de son équipe
à faire briller ESP Landscapers
également en dehors du groupe ENL
porte ses fruits.
« Nous cultivons notre passion
pour notre métier, ainsi qu’un
sens de responsabilité très fort
envers le client. C’est sans doute
cette culture, ajoutée au travail
d’équipe et à la mise en valeur de
l’expertise mauricienne, qui nous
a permis de réussir, en partant de
zéro, à nous imposer comme une
référence en matière d’aménagement paysager à Maurice »,
indique Benoit Mariette.
La contre-performance continue de l’industrie de la construction au cours des deux dernières
années laisse, malgré tout,
des séquelles : les nouvelles
commandes se font rares et la
compétition plus âpre.
ESP Landscapers en profite pour
revoir sa structure et son mode
opératoire en vue d’améliorer sa
compétitivité. Elle repense son
Business Model et mise sur le
service d’entretien pour s’assurer une rentabilité sur la durée.
La stratégie s’avère payante,
puisque l’entreprise réalise aujourd’hui le plus gros de son chiffre
d’affaires, soit 60 %, à partir de
services d’entretien.
ESP Landscapers s’investit
également à fond dans le marketing, s’intéressant à de nouveaux
créneaux, dont celui des particuliers.
« Le marché de l’aménagement
paysager a beaucoup évolué en
10 ans. La croissance du secteur
immobilier ralentit, alors que le
marché des particuliers est en progression constante. Les Mauriciens
portent de plus en plus d’attention à
leur jardin et y consacrent un budget
à part entière lors de la construction
de leur maison », constate
le General Manager.
Lorsqu’il regarde vers le futur,
Benoit Mariette souhaite surtout
maintenir le cap pour conforter
sa place de leader sur le marché
local, notamment en mettant
en avant le pôle Maintenance,
qui assure des contrats sur le
long terme et la récurrence des
interventions. Quant au marché
régional, le secteur hôtelier
présenterait des opportunités à
l’île de La Réunion et surtout aux
Seychelles. Affaires à suivre…
UN GUICHET UNIQUE
ESP Landscapers, c’est une équipe
de 20 professionnels, soutenue
par 200 jardiniers. La société
dessine les plans d’aménagement
paysager, proposant au client un
concept artistique, ainsi qu’un plan
technique détaillé. Elle réalise ces
plans en s’appuyant notamment
sur la puissante capacité de
production horticole d’ENL Agri
et de la Compagnie sucrière de
Bel-Ombre. Elle s’occupe enfin
de l’entretien des espaces ainsi
créés jusqu’à leur maturité et les
maintient en parfait état.
BAGATELLE MALL OF MAURITIUS
Lesloisirspour
aguicherles«shoppers»
Avec l’ouverture de FootFive
en février et celle annoncée
du bowling en octobre prochain,
Bagatelle Mall of Mauritius
étoffe sérieusement son offre
de loisirs.
U
ne bonne partie de
foot entre copains,
le corps en sueur et
l’adrénaline coulant à flots dans les
veines, on serait loin d’imaginer qu’à
seulement quelques pas, se trouvent
les restaurants et boutiques de mode
de Bagatelle Mall of Mauritius. C’est
pourtant exactement l’univers créé
depuis février avec l’ouverture à
Bagatelle Home & Leisure de
FootFive, qui propose des terrains
pour jouer au football à cinq.
Bagatelle est ce qu’on appelle un
centre commercial à usage mixte.
On vient y faire son shopping, certes,
mais aussi passer un bon moment
entre proches au restaurant, au
cinéma et désormais, sur un terrain
de foot en salle.
L’objectif stratégique poursuivi est
de proposer une expérience « lifestyle »
– plutôt qu’uniquement commerciale
– aux visiteurs. Avec l’aménagement
de terrains de foot à cinq, le mall
s’est offert un argument de taille pour
asseoir ce positionnement. L’ouverture d’un bowling d’ici à octobre de
cette année viendra le consolider
davantage. Une salle dédiée est
actuellement en construction à côté
de FootFive. L’offre de loisirs du mall
est-elle désormais complète ? Pas si
sûr, car un univers destiné à distraire
les enfants serait à l’étude.
« Si vous venez à Bagatelle,
vous y passerez un moment
formidable », explique le Centre
Manager, Shakeel Dilmahomed.
Les conditions sont réunies
pour inciter le visiteur à y passer
quelques heures, une journée et
même plusieurs jours, puisque
Voilà Bagatelle, l’hôtel annexé
au mall, est à peine cinq minutes
plus loin. « C’est de plus en plus
ce que veut le visiteur et nous
nous engageons naturellement à
satisfaire cette demande. »
Bagatelle Mall alloue actuellement
environ 25 % de l’espace disponible
aux restaurants, Food Courts, cafés,
salles de cinéma et autres loisirs,
le rôle principal de ces commerces
étant d’attirer les visiteurs.
La tendance de réunir toute une
palette de services complémentaires
autour des enseignes traditionnellement regroupées dans les centres
commerciaux vient des États-Unis.
Dans ce pays où autrefois, une salle
de cinéma était tout juste tolérée à
l’intérieur d’un complexe commercial,
il est désormais jugé impératif d’en
avoir une aménagée à la pointe de
la technologie, avec espaces de
bien-être et restaurants attenants !
La tendance des malls à usage
mixte a aujourd'hui gagné le reste de
la planète, qui semble également y
voir une manière de maintenir l’attrait
des centres commerciaux auprès
des jeunes générations, pour qui
acheter en ligne est plus naturel.
Bagatelle a emboîté le pas et la
stratégie s’avère payante, puisque
le nombre de visiteurs continue de
croître, avec une hausse de 4,8 %
l’année dernière.
JOUER AU FOOT À BAGATELLE
FootFive propose quatre terrains de football en salle,
assortis de vestiaires et d’un lounge pour se remettre
de ses émotions sur le terrain et se désaltérer après un
match. Deux options s’offrent aux amateurs de foot : réunir
dix joueurs et louer un terrain pour un match ou alors, se
joindre à une ligue pour jouer contre une équipe différente
chaque semaine. Les terrains peuvent également être
privatisés pour d’autres jeux, dont le badminton, le volleyball, le tennis-volley et le tennis-football. FootFive cible les
particuliers, mais aussi les entreprises pour leurs activités
de team building et autres événements « corporate ».
APRIL 2016
11
PERSPECTIVES
DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
LE SAVOIR SUR LE
BOUT DES DOIGTS ?
12
ENLIGHTEN No 19
PERSPECTIVES
Jadis, on prospérait en creusant la terre pour en tirer l’or et les richesses
qu’elle renferme. Aujourd’hui, ce ne sont plus tant les ressources naturelles
que nous exploitons. L’information, l’innovation, la technologie de pointe et
des ressources humaines capables de naviguer avec aise sur ces
trois fronts sont davantage ce qui alimente la croissance économique
mondiale. Ensemble, elles constituent la base d’une économie fondée sur le
savoir, statut que l’île Maurice souhaite atteindre le plus rapidement possible.
Cette ambition est-elle aujourd’hui à portée de main ? Point d’étape.
D
e nos jours, la richesse d’un pays se compte
davantage par le nombre de brevets
déposés que les tonnes de minéraux extraites du sol. Nous pénétrons en effet, progressivement et durablement, dans un nouveau monde
immatériel où le savoir et l'innovation sont au cœur
de la croissance et du développement économique.
De nouveaux acteurs émergent et prospèrent sur
cette nouvelle scène : des travailleurs et des professionnels du savoir, des organisations fortement
axées sur la connaissance, qui se localisent et
bourgeonnent le plus souvent au sein de hubs ou
d’agglomérations.
Soucieuse d’intégrer ce nouvel ordre économique,
l’île Maurice poursuit la création de ces hubs du savoir depuis plusieurs années. Une première tentative
d’intégration a amené le pays à se positionner, avec
un certain succès, comme un centre pour l’externalisation des services administratifs et financiers. Depuis
peu, trois nouvelles familles d’activités sont ciblées
avec persistance : l’éducation, la médecine et la biotechnologie, ainsi que l’océanographie.
La Commission européenne définit plus précisément les trois industries qui sont les moteurs de
l’économie du savoir : la recherche-développement
et l’innovation (RDI), l’éducation, ainsi que les technologies de l'information et de la communication (TIC).
Et pour y réussir, il n’y a pas d’autres moyens que
d’investir dans une infrastructure technologique
avancée, une main-d’œuvre hautement instruite, des
programmes de recherche et d’innovation dynamiques, et un environnement régulateur propice.
Sensible à cette prescription, le gouvernement du
jour affine à sa manière la stratégie nationale pour
intégrer l’économie du savoir. La politique économique sur cinq ans énoncée dans le budget 2015-16
propose d’améliorer la connectivité, de faciliter l’implantation des universités étrangères, de recentrer la
politique de développement des ressources humaines
et de créer une banque pour soutenir et encourager
l’entreprenariat. Les Smart Cities, concept nouvellement introduit, devront être conçues pour créer un
cadre propice, est-il indiqué.
Maurice a connu quelques succès encourageants
après plus d’une décennie à poursuivre une stratégie
d’intégration de l’économie du savoir. Plusieurs multinationales ont adopté l’île comme base d’opération
régionale, dont Orange, Microsoft, Nestlé et Huawei.
Maurice s’est également affirmée comme centre
d’excellence de PwC pour l’Afrique.
« Nous disposons définitivement d’un avantage
concurrentiel dans des secteurs tels que la finance et
les nouvelles technologies », estime Raj Makoond,
CEO de Business Mauritius, organisme représentant le secteur privé mauricien. « Il y a clairement
une opportunité et un fort potentiel économique à
développer. »
La transformation de Maurice en
une économie fondée sur le savoir,
le savoir faire et le savoir-être tarde
à trouver sa vitesse de croisière.
Anthony Leung Shing, partenaire de PwC, est
d’accord. Il cite l’exemple du PwC Africa Centre of
Excellence, dont il est le directeur. « Le réseau international de PwC puise de notre expérience et de
nos réseaux et connaissances pour avancer sur le
continent. Notre bilinguisme est un atout. Par exemple, il n’y avait pas de cabinet bilingue au Burundi
et de fait, tous les dossiers de ce pays étaient gérés
de Maurice. Dans le consulting, notre travail sur le
continent représente à peu près 30 à 40 % de notre
chiffre d’affaires. »
Malgré ce succès relatif, la transformation de
Maurice en une économie fondée sur le savoir, le savoir-faire et le savoir-être tarde à trouver sa vitesse de
croisière. Les freins principaux demeurent la qualité
des compétences disponibles, ainsi que l’insularité des
Mauriciens. « C’est peut-être aussi parce que chacune
des actions initiées pour construire l’économie du savoir est envisagée de manière déconnectée », avance
Pradeep Dursun, Chief Operating Officer (COO) de
Business Mauritius (voir l'interview à la p. 16).
C’est une chose de créer les infrastructures urbaines, informatiques et autres. C’en est une autre
de développer les ressources humaines qui peuvent
les exploiter pour créer de la richesse. Et sur ce
plan, Maurice a du mal à créer une masse critique
de compétences de pointe qui ferait de l’île une destination compétitive pour attirer les cerveaux et les
capitaux étrangers.
APRIL 2016
13
PERSPECTIVES
INSTAURER UNE CULTURE
DE L’INNOVATION
CHIFFRES-CLÉS
M
ÉCART DE COMPÉTENCES
5,487
de services TIC ont été
exportés en 2014.
4,8 %
du PIB du pays proviennent
du secteur de l’éducation.
6,4 %
C’est la contribution des TIC
au PIB mauricien.
Source : Board of Investment
14
ENLIGHTEN No 19
L
es indices internationaux sont unanimes à
conclure que Maurice est une destination sûre,
stable et fiable, où il est relativement facile de
monter et d’opérer une entreprise. Sa population est
relativement éduquée et généralement bilingue. Un
judiciaire indépendant s’appuyant sur les traditions britannique et française, une fiscalité simple, ainsi qu’une
bonne connectivité avec le reste du monde sont d’autres cartes dont la destination dispose pour asseoir sa
compétitivité à l’échelle africaine.
S’agissant de la connectivité, Maurice se classe 45e
au Networked Readiness Index 2015 du Forum
économique mondial, loin devant l’Afrique du Sud et
en tête des pays facilitant l’accès à l’Internet en Afrique.
La capacité TIC du pays continue de s’améliorer avec
une troisième autoroute optique envisagée pour relier
Maurice et Rodrigues au reste du monde.
L’État prévoit que tout le territoire aura accès à
l’Internet à haut débit d’ici à trois ans. Le nombre de
points wi-fi gratuits à travers le pays passera de 15 à
350 d’ici là. Les Mauriciens seront formés à l’usage
de l’Internet et les entreprises seront encouragées à
créer des activités TIC à valeur ajoutée, notamment
en étant autorisées à importer des compétences.
Reste l’épineuse question des ressources humaines. Force est de constater que nos écoles et universités semblent avoir du mal à produire les talents
et les compétences dont le pays a besoin pour
prospérer et encore moins pour s’épanouir comme
une économie fondée sur le savoir.
Anthony Leung Shing, du cabinet d’expertscomptables PwC, constate une inégalité croissante
entre ceux qui sont capables d’intégrer une économie nationale de plus en plus sophistiquée, et ceux
qui n’ont aucune formation et sont mis à l’écart. « Le
taux de chômage à Maurice est de 8 % et 40 % des
chômeurs ont moins de 26 ans. De ceux-là, seulement
20 % ont un diplôme universitaire », souligne-t-il.
L’État investit en moyenne 0,5 % du PIB dans le
développement des ressources humaines, alors que
la norme internationale se situe autour de 1,5 %, indique Pradeep Dursun, COO de Business Mauritius.
Le déficit est comblé par le secteur privé, qui s’est
toujours montré intéressé par la formation, que ce
soit technique ou académique.
Le gouvernement passe également en revue
et recadre actuellement les formations proposées
par le Mauritius Institute of Training and Development pour offrir plus de formations professionnelles. Il propose aussi une « Chambre des Métiers »
pour reconnaître les compétences des techniciens et
des gens de métier, et pour délivrer des « cartes de
compétences ».
Selon Pradeep Dursun, il faut un plan Marshall
pour la formation professionnelle. Il est catégorique :
pour créer un véritable vivier de savoir et d’innovation, il faut retenir les jeunes talents attirés
pour les études et ouvrir davantage le pays aux
compétences internationales. Comme le fait ressortir
Anthony Leung Shing, « il y a un bassin de talents qui
s’installe à Maurice qui a déjà une longueur d’avance
sur les Mauriciens, même ceux qui sont qualifiés. Tout
le bénéfice pour nous est dans leur frottement avec la
population locale, le Knowledge Transfer ».
ême si les Mauriciens sont habitués à retrouver le nom du pays à la tête d'indices
de performance divers et variés, celui-ci
ne figure même pas au classement des pays les plus
innovants. Pourtant, l’innovation est l’un des quatre piliers d’une économie fondée sur le savoir. Cela
probablement parce qu’elle permet aux pays de
faire des bonds pour rattraper leur retard en termes
de compétitivité et de développement, tant social
qu’économique.
Les experts s’accordent à dire que quand il s’agit
d’innovation, le mieux, c’est de créer les conditions
propices, d’instaurer une culture qui porte. C’est un
peu ce qu’a voulu faire ENL à l’échelle de l’entreprise.
Le groupe a créé la Turbine, un incubateur pour aider
les entrepreneurs à mettre leurs idées en œuvre et à
les amener sur le marché. « Il s’agit pour nous d’établir
notre crédibilité et de gagner la confiance des entrepreneurs. Nous jetons pour ainsi dire les bases d’un
partenariat solide et durable », explique Elizabeth Elis,
responsable des opérations à la Turbine.
ENL accompagne cette initiative d’une autre, à savoir la création d’un fonds de capital-risque. Celui-ci se
réserve l’option d’investir dans les entreprises ayant
mûri au sein de l’incubateur. Cependant, il reste ouvert à des partenariats ailleurs, dans des domaines qui
n’ont, a priori, rien à voir avec les secteurs d’activités
traditionnels du groupe.
« Notre objectif est de nous rapprocher de là où les
idées nouvelles germent, de nous en imprégner et de
nous y associer, si l’occasion s’y prête, dans le cadre
d’accords gagnant-gagnant. Nous espérons ainsi identifier et développer de futurs relais de croissance pour
notre groupe », explique Fabrice Boullé, Manager
d’ENL Finance. Cette démarche s’ajoute à l’innovation continue au sein des entreprises du groupe dans
le cadre normal de leurs activités.
À l’échelle du pays, le gouvernement adopte une
stratégie pour booster l’innovation qui n’est guère
différente. La politique économique prônée par l’État
cherche à encourager des activités à haute valeur
ajoutée dans le secteur des TIC. L’ambition affichée
est d’établir une culture de techno-entreprenariat
grâce à la création d’incubateurs de haut niveau avec
de la technologie de pointe et de créer une Smart
Mauritius en intégrant la technologie dans la vie de
tous les jours.
Le budget national 2015-16 a prévu un fonds
de Rs 125 millions pour un National Innovation
Programme, dont le but est d’insuffler une nouvelle vie à la recherche-développement dans le pays.
Même si rien de très concret n’a transpiré de cette
initiative à trois mois de la fin de l’année financière,
celle-ci a le mérite d’exister. L’État préconise également un ensemble de mesures pour soutenir les entrepreneurs et les petites et moyennes entreprises,
dont une banque pour faciliter l’accès au crédit.
Pour qu’une économie du savoir émerge à Maurice,
il est crucial de créer un écosystème de l’innovation
qui regroupe les entrepreneurs, les professionnels aux
compétences poussées et les investisseurs dans les
industries-clés. Les initiatives d’ENL et de l’État rejoignent divers autres programmes du secteur privé pour
encourager l’innovation et l’entreprenariat : incubateurs, Business Angels, concours d’idées…
Il suffit juste que tous ces acteurs bien-intentionnés
se parlent et coordonnent leurs interventions…
LE « KNOWLEDGE HUB »,
STRATÉGIE-CLÉ
La stratégie de faire de Maurice un Knowledge Hub régional est un élément crucial,
car c’est de là que viendront les compétences qui alimenteront les industries du savoir.
Le gouvernement s’est fixé comme objectif
d’avoir un diplômé par famille et d’attirer
jusqu’à 100 000 étudiants étrangers avant
2020, et il existe maintenant plus de 70 institutions d’enseignement supérieur à Maurice.
Le pays multiplie les initiatives pour accroître
le niveau de formation de la main-d'œuvre
mauricienne et ainsi, combler les lacunes du
marché du travail, mais mise également sur
l’implantation d’institutions étrangères sur le
territoire pour apporter de l’investissement
en capital et, en sus, des effets multiplicateurs en termes économiques, avec une
population estudiantine étrangère qui se
loge et consomme localement.
FAVORISER LA
« CONTAMINATION
POSITIVE »
Le marché local est extrêmement restreint,
avec 1, 3 million de personnes, ce qui n’est
guère suffisant pour pourvoir aux besoins en ressources humaines et de marché
des grandes entreprises – notamment
des TIC – qu’on voudrait attirer à Maurice.
D’où l’importance de retenir ceux qui
viennent étudier sur le territoire, et d’ouvrir le pays aux compétences internationales. D’ailleurs, la logique de l’économie
du savoir et de la globalisation veut que
les travailleurs les plus hautement qualifiés
migrent de plus en plus fréquemment. Les
économies les plus riches du monde en
termes de produit intérieur brut réel (PIBR)
par habitant ont souvent d'importantes
populations de travailleurs migrants
étrangers qui ont grandement contribué
à la croissance, et dont l’implication dans
l’économie est cruciale pour leur prospérité
continue. À titre d’exemple, en 2010, il y
a avait 38,7 % de travailleurs migrants à
Singapour, 38,8 % à Hong-Kong, 43,8 %
aux Émirats Arabes Unis et 74,2 % au Qatar.
APRIL 2016
15
PERSPECTIVES
IN-SHAPE
Travailler la tête…
« Nous n’avons pas
encore une stratégie
bien cohérente »
pour de meilleures jambes
Comment cultiver un mental de champion, cet état d’esprit qui
permet de vaincre la résistance à l’effort et de se surpasser ?
Yannick Lincoln, préparateur physique chez Synergy Sport
and Wellness Institute et champion de vélo qui défendra le
quadricolore mauricien aux Jeux Olympiques de Rio cette
année, nous livre ici quelques clés.
Y
Le « Chief Operating Officer » de Business Mauritius préconise une approche
holistique afin de constituer la masse critique de compétences nécessaire pour
permettre à l’économie basée sur le savoir de décoller véritablement.
Où en sommes-nous avec la création d’une
économie fondée sur le savoir ?
C’est un Work in Progress. L’idée est de
développer une économie basée sur le savoir,
avec une contribution beaucoup plus importante du secteur tertiaire et des services. Le développement des Knowledge Hubs prôné par
l’État est une des tactiques qui viennent étayer
cette stratégie et préparer les jeunes à intégrer
cette économie.
La qualité de nos ressources humaines suffit-elle pour soutenir cette ambition ?
Les Mauriciens sont connus pour être compétents, versatiles et bosseurs. Ce qu’il nous
manque, c’est la masse critique de compétences
pour permettre à l’économie basée sur le savoir
de décoller véritablement. Et cette masse critique
semble être difficile à atteindre, sachant que le
système éducatif national rejette 30 à 40 % des
jeunes talents qui l’intègrent au départ. J’ai bien
peur qu’un pays qui se permet ce luxe est voué à
l’échec à long terme.
Pour l’immédiat, nous avons déjà perdu du
business international par manque de compétences. L’Afrique est aujourd’hui incontournable
dans la stratégie de croissance des multinationales. Les Big Four (les quatre plus importants
cabinets d’audit internationaux, PwC, EY, KPMG
et Deloitte), ainsi que les grands groupes de TIC,
s’installeraient bien à Maurice plutôt qu’au Kenya
ou en Afrique du Sud. Malheureusement, nous
n’avons pas toute la main-d’œuvre formée, la
masse critique de compétences, qu’il leur faut.
Le « Knowlege Hub » ne vise-t-il pas précisément à bâtir rapidement cette masse
critique de talents et de compétences ?
Le Knowledge Hub s’appuie en effet sur une
stratégie de diversification, visant à attirer ici
des étudiants étrangers, surtout africains, pour
pouvoir atteindre une masse critique de savoir.
Les formations dispensées dans les institutions
16
ENLIGHTEN No 19
annick Lin
coln.
LE SOUTIEN DES PROCHES
d’enseignement supérieur mauriciennes peuvent
être de niveau mondial. Il y a des successstories d’étudiants indiens qui ont préféré venir ici
en raison d’une compétition trop exacerbée en
Inde, et qui sont par la suite allés travailler dans de
grands hôpitaux tels que John Hopkins. Cependant, nous n’avons pas encore une stratégie bien
cohérente pour aborder les pépinières de talents
régionales, voire internationales.
Que nous manque-t-il pour impulser une
économie fondée sur le savoir ?
Il faut recentrer le débat : comment l’économie basée sur le savoir s’accorde-t-elle avec la
trajectoire de notre développement économique
et avec le mouvement de l’économie globale ?
Cette dernière tend vers une ouverture de plus
en plus grande, avec plus de migration, de mouvements de produits, de services, d’intellectuels,
de savoir-faire…
Il faut une politique cohérente. Lorsque
nous parlons de Knowledge Hub, nous devons considérer l’économie au grand complet.
Par exemple, il faut penser à bien intégrer les
Smart Cities avec tout le reste de l’économie,
car elles peuvent venir alimenter la stratégie de
Knowledge Hub, de Medical Hub, etc.
De même, nous devons réaliser une fois pour
toutes que notre insularité nous limite énormément. Nous nous sommes longtemps protégés,
mais une intégration régionale, voire internationale, est à présent inévitable compte tenu de
l’exiguïté du territoire national et de la taille de
la population.
Nous nous voyons comme un petit Singapour,
mais l’ouverture du pays est toujours un tabou.
Or, c’est le frottement avec les autres qui nous
permettra d’avancer. Il nous faut de la contamination positive sur le plan de l’expertise et des
cultures du travail, si ce n’est que cela. Il est absurde, par exemple, de faire venir des étudiants
étrangers sur le territoire et de ne pas les retenir
par la suite.
Quel que soit le niveau de pratique sportive, l’attitude des
proches a un impact certain sur la motivation, l’assiduité et la
réussite. L’encouragement motive. Mais des proches qui ne
font pas de sport et qui reprochent injustement que cela prend
trop du temps « familial » enlèvent au sportif les bénéfices
physiques et psychologiques qui peuvent faire de lui un
conjoint plus équilibré. À charge au pratiquant du sport de ne
pas abuser du soutien de la famille.
L’INDISPENSABLE
OBJECTIF
Pas de secret pour être motivé : il faut
avoir un objectif, et ne pas seulement
faire du sport « pour la santé ».
Cette approche est directement
liée à la notion de « récompense »
(psychologique, physique et sociale)
et de bien-être. La motivation ne dure
pas longtemps si on ne se fixe pas un objectif
clair : une performance précise (temps, classement, etc.),
une course particulière à terminer, une meilleure forme
ou une sortie que l’on prépare entre copains…
Pradeep Dursun
Chief Operating Officer
de Business Mauritius
L’effort, source de plaisir
Physiologiquement et chimiquement, l’effort sportif est
associé à des sensations de « plaisir », parce qu’une pratique régulière permet de libérer des endorphines et de la
dopamine. Ces dernières sont des neurotransmetteurs,
substances qui permettent la diffusion de signaux dans le
système nerveux et qui procurent au corps une sensation de
bien-être physique et psychologique. Notre corps est donc
déjà préparé à ressentir du plaisir grâce au sport. Mais pour
obtenir cet effet de bien-être, il faut accepter de passer le
cap de la douleur associée à l’effort.
Les traces du passé
Notre regard sur le sport et sur l’effort à produire (et à subir) pour le pratiquer régulièrement et en tirer
satisfaction est lié aux idées positives ou négatives générées par notre vécu. Un enfant qui a grandi en
voyant ses aînés (parents, proches, etc.) faire régulièrement du sport et en tirer satisfaction, et qui a vécu le
sport comme un jeu, sera psychologiquement plus enclin à l’effort sportif et à une pratique régulière tant à
l’adolescence qu’à l’âge adulte.
LE SPORT
ET LE « SOCIAL »
Le sport, c’est aussi des occasions de rencontres, avec un effet sur la motivation. Les
sports collectifs permettent évidemment
d’évoluer en équipe, avec un esprit de camaraderie parfois encourageant. Des sports
individuels (tels que le trail ou le vélo) peuvent être pratiqués en groupe avec des personnes de même niveau, donnant l’occasion
de rencontrer, de partager, et de se lancer
de petits défis. Tout cela contribue à la motivation et à une pratique régulière qui favorise
l’atteinte des objectifs.
Stress positif
et négatif
Ayez l’œil pour le stress, associé
généralement à une projection
psychologique d’un échec éventuel. Chaque personne a sa façon
d’y réagir. Pour certains, c’est un
stress positif : ils ont besoin de
se sentir au pied du mur pour se
dépasser et réaliser leurs meilleurs
résultats. Pour d’autres, ce stress
est inhibant : le corps peut être
prêt, mais dans la tête, c’est la
paralysie totale… qui amoindrit la
performance physique.
APRIL 2016
17
OUTREACH
OUTREACH
Quand la jeunesse
voit bleu
Plus de 50 jeunes ont participé
en 2015 à la 2e édition de la
compétition #SeeingBlue, dont
ENL Foundation est l’un des
partenaires financiers. Cette
initiative lancée en 2014 a pour
objectif d’aider les jeunes à devenir
des promoteurs de la protection
de l’océan.
« Nous prenons souvent l’environnement
marin pour acquis et ne tenons pas assez
compte de la nécessité de comprendre,
d’aimer et de protéger l’océan. Nous avons
pourtant une relation très forte avec la mer,
car nous vivons sur une île », soutiennent les
cofondatrices de SYAH, Meghna Raghoobar
et Karuna Rana. Elles préconisent tout un
plan pour aider les jeunes générations à
nourrir leur relation avec la mer, notamment
aire des jeunes des activistes de à travers la pratique de la natation et de la
l’écologie marine. Telle est la mission plongée sous-marine.
Dans la foulée, l’ONG a lancé le programme
que se sont donnée les ONG SIDS
Youth AIMS Hub (SYAH) et Global #SeeingBlue, une compétition annuelle auShapers – Port Louis Hub. L’objectif est de tour de thèmes relevant de la protection de
créer un réseau reliant les jeunes qui œuvrent l’écosystème marin. Lors de la 2e édition en
pour le développement durable dans les petits 2015, les participants ont été invités à proÉtats insulaires en développement (PEID).
poser des solutions innovantes au problème
F
18
ENLIGHTEN No 19
des déchets marins, tant à l’échelle locale et
nationale qu’internationale. L’appel à projets
était destiné aux jeunes de deux catégories
d’âge, 13 à 18 ans et 19 à 30 ans.
Au total, 18 projets ont été reçus. Le point
d’orgue de l’initiative #SeeingBlue 2015
est le Young Ocean Champion Award remis aux jeunes qui ont le mieux exprimé leur
engagement et leur créativité. Trois projets
proposant des initiatives concrètes pour
préserver notre écosystème marin, au-delà
de la simple prise de conscience, ont été
récompensés dans chaque catégorie.
La cérémonie de remise des prix a eu
lieu le samedi 27 février à Moka, au siège
social du groupe ENL, qui est sponsor de
#SeeingBlue aux côtés d’autres mécènes,
dont la Commission de l’océan Indien.
Partie prenante du projet dès le départ,
ENL Foundation y trouve un écho à son engagement à protéger l’environnement.
Dans la catégorie des 13 à 18 ans,
Lukshinee Muddhoo et Niranjana Mudhoo
ont remporté le premier prix pour leur
projet de préservation et de plantation
de mangroves à Grande-Rivière-Sud-Est.
Le deuxième prix est allé à Lidesh et
Yeshnee Jungly pour l’organisation d’une
régate de pêcheurs du sud-est afin de
promouvoir une pratique traditionnelle et
durable de la voile. Dans la catégorie des
19 à 30 ans, un groupe d’étudiants de l’université de Maurice a raflé le premier prix.
Pratibha Ramroop, Lakshita Jhowry, Marie
Anielle Espiègle, Soomeïyah Bibi Khodabux
et Deepshi Gunness ont soumis une étude
de cas sur l'embouchure de la rivière de
Le Goulet, dont l’objectif était d’évaluer
le problème des pesticides, des produits
chimiques et des déchets plastiques
grâce à une série de pièges à débris.
UN « OCEAN ADVOCASEA
BOOTCAMP » EN AVRIL
Marie Lori Debora John a reçu le deuxième
prix pour son projet de recyclage de bouteilles en plastique.
Les gagnants ont décroché une prime de
Rs 25 000 et un accompagnement dans la
réalisation de leurs projets. Ils ont aussi accès
à un réseau de contacts et à des conseils.
« Les lauréats de #SeeingBlue 2015 peuvent
devenir de véritables porte-parole de la protection de l’océan », souligne Karuna Rana.
« #SeeingBlue aide les jeunes à mieux cerner les enjeux du développement durable »,
ajoute Meghna Raghoobar, qui est aussi la
présidente de SYAH.
La prochaine édition de #SeeingBlue sera
lancée en janvier 2017.
Les gagnants et finalistes du « Young Ocean
Champion Award » participeront à un programme d’accompagnement qui leur donnera
les outils pour mettre en œuvre et diffuser
leurs projets. SYAH compte organiser un
« Ocean AdvocaSea Bootcamp » en avril dans
le cadre du programme #SeeingBlue. Ce séminaire résidentiel comportera une formation à
la gestion de projets, des séances interactives
sur les stratégies de sensibilisation et de
préservation de l’océan, ainsi que des cours
pratiques de natation et de plongée. Les
participants recevront un certificat de mérite
au terme de la formation. Ils auront également
entrevu des solutions au niveau individuel et
national pour potentiellement répondre aux
problèmes évoqués pendant le « Bootcamp ».
Un nouveau
toit pour
les sinistrés de
novembre 2015
L
es quatre familles de cité Ste-Catherine
qui occupent le Village Hall de
L’Agrément depuis novembre ont
enfin pu voir la lumière au bout du
tunnel. Grâce à l’élan de solidarité initié par
ENL Foundation, elles devraient emménager
dès avril dans des maisons flambant neuves,
en construction depuis janvier à la place de
celles qui avaient été réduites en cendres.
« Nous avons été un peu embêtés par le
mauvais temps qui a prévalu ces dernières
semaines, qui a retardé les travaux », déplore
Mario Radegonde, Head of CSR et directeur
d’ENL Foundation.
La fondation a mobilisé plusieurs partenaires des secteurs privé et public dans
le but de redonner un toit aux familles concernées. Leur relogement a été soutenu
par le groupe Food & Allied, la HSBC,
Lottotech, BCE et World Knits, ainsi que par
le conseil de district de Moka et la National
Empowerment Foundation.
« La responsabilisation des bénéficiaires
reste un objectif-clé de tout élan de solidarité auquel nous nous associons. Dans ce cas précis,
les quatre familles auront à participer au financement de leurs nouvelles maisons, même
si cette participation reste symbolique », explique Mario Radegonde.
Chaque maison a coûté environ Rs 600 000.
La National Housing Deveopment Company
étudie actuellement le montant et les modalités
de la contribution des bénéficiaires.
APRIL 2016
19
FACE TO FACE
FACE TO FACE
Aleksandar Ivancic & Miguel Sodupe (Anteverti):
“Mauritius is developing.
Let’s do it properly”
Aleksandar Ivancic, an expert
in energy, urban infrastructure
and the environment, and the
architect and urbanist.
Miguel Sodupe are
consultants for Anteverti,
an independent firm that
advises the private and
public sectors on facing
up to new challenges
through innovation.
We caught up with them
at the Smart Mauritius
Summit held in February
and invited them to
shed some light on the
Smart City scheme,
its potential and
limitations as well as
its implications for the
future development
of Mauritius.
20
ENLIGHTEN No 19
What is Anteverti? What does the firm do?
Aleksandar Ivancic [AI]: Anteverti was set
up around 5 years ago in Barcelona, when the
smart city concept was just getting off the ground.
The team includes a broad range of talent, from
urban planners to engineers. We typically help to
define the high-level strategy of how to push cities
to become smarter. In rarer cases, we delve into
the details of how to improve energy and water
utilisation, for instance.
What brings you to Mauritius?
What has your involvement been with
the Smart City Scheme?
AI: We were invited to take part in the Smart
Mauritius Summit and to undertake a SWOT analysis of the scheme. We analysed the document, its
legal ramifications and the framework of documents
referenced within it, and provided some recommendations for improvement that were well received.
When you are working from abroad, you miss
certain details and local specificities that are important to take into account. The conference was
an opportunity to make contact and work with
local companies and professionals.
AI: Based on statistics, there is a big problem
with social segregation in Mauritius, starting from
basic primary education. Around 33% of people
MS: There is also a plan for new neighbour- abandon their studies before completing primary
hoods related to Port Louis. This would provide school. In the Seychelles, South Africa and other
new housing and make new arguments for the countries, it’s typically around 10%. This disparrelevance of the historic city, as well as provide ity needs to be addressed if you want to create
logistic support for the port. This is forward-think- equitable growth. You can’t just focus on highing and doesn’t always happen in other countries. level technology – you need to provide lower-level
training opportunities and take everyone with you.
We also strongly believe that there is a need
to better communicate on the scheme and interact more widely with society, because there is a
considerable misunderstanding about what smart
cities are. Some of the news coverage has been
quite negative. I think it’s necessary to establish
some trust and fair play communication.
industrial heritage such as that [in ENL’s Smart
City Scheme for Moka].
It’s important to
recognise the progress
that has been made;
you can then build upon
it for the next project.
Who benefits from the smart cities? Are
they going to be places where people will
want to live and work, or are they first and
foremost a business opportunity for the
private sector?
MS: It's an opportunity for the private sector,
yes. But the government is asking the private
sector to develop mixed-use areas with business
parks, technological projects, residential areas,
green spaces and new basic services. The projects must include the infrastructure to manage
energy, water, sewage and waste; as well as providing affordable housing and another minimum
Miguel Sodupe (MS): Mauritius is growing. It 25% should be sold to Mauritian citizens. It is not
needs a number of different things, among them easy for the private sector to deliver these things
new services, places of work, places for people because they cannot turn a profit on them.
to live, and places for people to play. We can no
It’s amazing that three of the smart city projects inlonger keep building the way we have been so clude plans to create universities. In Europe, governfar: it’s resulted in sustainability and technological ments have to impose educational and other services
problems and a lack of mixed-use space. The smart upon the private sector. However, some tasks, such
city concept tries to improve the living, working as pedestrianizing streets or relocating residents,
and sustainability conditions in each of the existing cannot be left only in the hands of private promoters.
areas that have been proposed for development.
The point of smart cities is to improve
Has anything surprised you about Mauritius? the quality of life. Are there consultations
AI: We are impressed with the dynamics of the with the residents of the areas being
whole country and its track record, which is quite developed in Mauritius on the future
positive on the whole. It’s important to recognise of their neighbourhoods?
the progress that has been made; you can then
MS: It would be much better to allow the peobuild upon it for the next project. For instance, ple who are affected to participate. If this is an
we’ve also just learned about the deep-sea water exercise in making the rich even richer, then there
cooling project for air conditioning in Port Louis. is no point. The scheme needs to be inclusive and
Without knowing the details, this is a good move. sustainable. The approach should be, ‘Let’s talk
We are also impressed by the integration of about my neighbourhood’.
What do you think of the Smart City
Scheme in Mauritius? Is it appropriate to
the context?
AI: Our understanding is that 13 smart neighbourhoods are being planned within one metropolitan area, which is in fact the whole island. Our
perspective is: the country is developing. It’s happening anyway, so let’s do it well. The ‘smart’ layer
involves a greater awareness of environmental
issues and the use of new technologies that will
be an asset for Mauritius in the future.
WHAT IS A
SMART CITY?
The smart city agenda emerged in response
to cities’ growing demographic and resource
pressures. Because no two cities face the same
set of challenges, each smart city approach is
different. Broadly, they are developed urban
areas that create sustainable economic growth
and improve the quality of life by seeking
out ‘smart’ solutions to issues such as local
governance, energy, infrastructure, and
healthcare. Examples of this include area-based
redevelopment to transform and redevelop
existing urban neighbourhoods and improve
their liveability; using information technology
and data to improve local infrastructure and
public services; and empowering citizens to
co-create services and take an active role in the
government of their city. The smart city agenda
has also evolved over the past ten years from a
focus purely on technology to one that is more
socially oriented. There is a strong focus on
sustainability and on inclusive approaches to
development, leading to better outcomes for all
residents, including the poor and disadvantaged.
APRIL 2016
21
ENL INSIDE
Plan de
pension
ENL INSIDE
Outils de travail
de qualité
Couverture
médicale
Bonis
Salaire
Savoir-faire
Compétence
Voiture
de fonction
du marché mauricien de l’emploi
AUGMENTATION
dressé par Hay Group en 2015. SALARIALE
L’étude a touché 117 entreprises
La performance individuelle, le
du pays, dont neuf des dix plus marché et l’inflation. Ce sont les
grandes d’entre elles et la moitié trois facteurs pris en compte par la
du Top 30.
majorité des employeurs pour réviser
les salaires. Dans cet ordre-là. L’influence des syndicats, l’ancienneté, l’acMARCHÉ STABLE
Un marché compétitif, caractérisé quisition de nouvelles compétences,
par une forte mobilité des talents, ou encore la perception d’équité en
accroît la difficulté pour l’entreprise interne, en tant que tels, sont des
de retenir les compétences et d’en at- considérations moindres.
tirer de nouvelles. Selon Hay Group,
le marché mauricien de l’emploi est
LES JOBS
plutôt stable : un employé sur deux LES MIEUX PAYÉS
compte 7 ans d’ancienneté ou plus.
L’administration, le Top ManageLes salariés changent bien moins ment, les finances, l’informatique,
souvent d’emploi qu’il y a cinq ans. l’assurance qualité et le marketing
La majorité des personnes travaillant sont les domaines d’expertise qui
dans les secteurs bancaire, finan- rapportent le plus. En général, un
cier, manufacturier et commercial ont salarié perçoit une rémunération
moins de 50 ans. Le contraire est vrai maximale pour son grade au bout
de six à 10 ans de service.
dans le secteur des services.
CE QUI MOTIVE
L’EMPLOYEUR
Salaires et bénéfices :
Mieux comprendre les politiques
de rémunération
Une récente étude de
Hay Group portant
sur les politiques
de rémunération
mises en place
par les entreprises
mauriciennes donne
des clés intéressantes
pour comprendre ce
qui détermine les
salaires et bénéfices
que l’on peut percevoir.
22
ENLIGHTEN No 19
Q
uand il s’agit de rémunération, il est rare
de trouver un salarié
qui ne se considère
pas moins bien payé que ses homologues dans d’autres entreprises.
Ce constat est d’ailleurs universel.
Selon Hay Group, société internationale de service-conseil en matière de ressources humaines, la
moyenne mondiale de salariés qui
estiment ne pas être payés équitablement est de 61 %.
L’une des raisons qui pourraient
expliquer cette insatisfaction relève d’une incompréhension de
la manière dont la rémunération
est structurée. « Le salarié a tendance à se focaliser sur le montant cash qu’il ramène chez lui à
la fin du mois. Or, sa rémunération
globale vaut souvent bien plus,
même si cela n’est pas visible
sur son compte en banque »,
explique Alan Cunniah, Head of
HR du groupe ENL.
Le moment est opportun pour
essayer d’en savoir plus. L’État et
de nombreuses entreprises mauriciennes commencent à travailler sur les prévisions budgétaires
pour la nouvelle année financière
qui débute en juillet. Révisions
et compensations salariales sont
parmi les questions qui se décideront dans les mois qui viennent.
La rémunération d’un employé comprend le salaire de
base et tout autre bénéfice que
son employeur peut lui offrir
selon la nature de son travail et son niveau hiérarchique
dans l’entreprise. « Ces bénéfices peuvent représenter jusqu’à
50 % du salaire de base »,
souligne Alan Cunniah. Typiquement, on parle ici de couverture
médicale, de plan de pension, de
voiture de fonction ou d’allocation
automobile, d’un environnement et
d’outils de travail de qualité, de divers bonis ou encore, d’une participation aux profits de l’entreprise…
Et qu’est-ce qui détermine au
juste la politique de rémunération
des entreprises mauriciennes ?
L’âge, l’expérience, les qualifications ? Quel est le poids de l’inflation ? Ces questions méritent
qu’on s’y intéresse de près si on
veut mieux gérer sa vie professionnelle. Voici quelques éléments de
réponse puisés de l’état des lieux
L’employeur mauricien cherche
avant tout à être compétitif, surtout
quand il s’agit de recruter aux échelons supérieurs. Il accorde plus
d’importance au savoir-faire et aux
compétences des candidats à l’emploi qu’à leur éducation et à leurs
qualifications. L’ancienneté, bien
que valorisée, ne pèse pas très lourd
dans la rémunération ou la décision
d’augmenter un collaborateur.
AUTRES BÉNÉFICES
Pratiquement tous les employeurs
sondés ont un plan d’assurance santé
pour leurs collaborateurs, tous grades
confondus. Deux tiers d’entre eux ont
aussi un plan de pension contributif.
En revanche, la mise à disposition
d’une voiture de fonction est moins
répandue : une entreprise sur deux
seulement en propose à ses managers
et équivalents (experts techniques). La
pratique est plus courante dans le cas
des membres de l’exécutif.
EN TOUTE CANDEUR
Questions à...
Alan Cunniah,
Head of Human Resources
d'ENL Corporate Services :
« Nous avons une
approche équilibrée »
Où se situe ENL par rapport aux grandes tendances dessinées par
Hay Group ?
Nous sommes alignés sur la plupart des points. Nous avons une gestion moderne et pointue des ressources humaines, avec des stratégies
claires pour l’acquisition, la rétention et le développement des talents
nécessaires au développement du groupe. Ces stratégies sont guidées
par les valeurs du groupe, qui prône l’équité et l’humanité, ainsi que la
performance, le dynamisme et l’innovation.
Dans la pratique, cela donne quoi ?
Nous avons une approche équilibrée. Par exemple, nous investissons
beaucoup sur le collaborateur pour lui permettre d’être toujours en phase
avec l’évolution de son entreprise et de répondre à nos exigences de performance. Dans le même temps, nous valorisons l’ancienneté et la fidélité
à l’entreprise, qui représentent souvent une somme inestimable d’expérience du métier et de connaissance de l’entreprise.
Comment se positionne ENL en matière de rémunération ?
Les salariés d’ENL perçoivent tous une rémunération équivalente ou
supérieure à la moyenne sectorielle. Au-delà des salaires et bénéfices,
nous tenons à proposer un environnement de travail propice non seulement à la performance individuelle et collective, mais aussi à l’épanouissement personnel du collaborateur. Nous jouons sur ces deux fronts à la fois
pour rester compétitifs sur le marché de l’emploi.
How do you get into the business of helping other businesses? Elizabeth Ellis,
Manager of the ENL-backed incubator, the Turbine, explains what led her to
this role and gives us her take on the entrepreneurial community in Mauritius.
A Canadian by birth, Elizabeth Ellis studied political science in Germany and Sweden before starting her career in Johannesburg, South Africa, attracted by its reputation as a start-up hub. There, she
worked for the start-up luxury brand, Yswara; then at the African Leadership Academy, where she recruited young leaders from francophone Africa; and finally at the Anzisha Prize, the largest award for
young entrepreneurs on the African continent.
Elizabeth Ellis
ne
Manager, The Turbi
I want to work with
the people who make
things work
Elizabeth moved to Mauritius and joined the Turbine team in 2015. “The Turbine is a really exciting
next step. I went from being part of a start-up to looking for people with similar experiences for the
African Leadership Academy, and now I’m designing support programmes for entrepreneurs with
the Turbine.”
Elizabeth believes that it’s important to build a culture of trust and mutual respect within the entrepreneurial community in Mauritius. “I’m disappointed that we weren’t able to speak more about the
great ideas we received from the Turbine Business Ideas Competition finalists. The more the community starts trusting each other, the more people will see that there is a lot of innovation taking place.”
She adds, “There are so many opportunities in Mauritius. It’s easy to point out what isn’t working.
I want to work with the people who want to make things work.”
APRIL 2016
23
REFLECTION
REFLECTION
© www.theymetinmauritius.info
MODERNISATION DU PORT
24
ENLIGHTEN No 19
L’utilisation de Port-Louis pour
l’accostage de navires remonte à la
première partie du XVIIe siècle, après
l’installation des Hollandais dans l’île.
Initialement baptisé « Noordwesterhaven » (Port-Nord-Ouest), il changera
plusieurs fois de nom par la suite, de
Port-Louis à Port de la Montagne, ou
encore Port-Napoléon, avant de reprendre le nom qu’on lui connaît aujourd’hui après la prise de possession
par les Britanniques en 1810.
CITADELLE DE LA FRANCE
DANS L’OCÉAN INDIEN
On doit la première « modernisation » du port au Malouin
Bertrand-François Mahé de La Bourdonnais, arrivé en 1735. « De l’Isle
de France, il veut faire « un autre
Batavia ». Ce sera un entrepôt pour
les navires de la compagnie ; ce sera
un point de ralliement, un abri, un
arsenal pour les vaisseaux du Roy ;
ce sera un nid de corsaires », écrit
Raphaël Barquissau dans Les Isles.
Antilles – Île Bourbon – Isle de France
– Isle Dauphine ou Madagascar.
La Bourdonnais établit notamment des pontons pour décharger
et caréner les navires, une machine
pour les soulever et en permettre
le radoub, construit des gabares
et des chalands, des canots et des
chaloupes, un brigantin en 1737,
deux plus gros bâtiments l’année
suivante et même un vaisseau de
cinq cents tonneaux armé en guerre,
ajoute l’auteur.
Pour Georges Lacour-Gayet,
auteur de La marine militaire de la
France sous le règne de Louis XV,
La Bourdonnais « comprit l’intérêt
exceptionnel de l’île de France au
point de vue commercial et militaire ;
mais il fallait compléter l’œuvre
de la nature. Des deux ports alors
fréquentés, Port-Sud-Est et PortNord-Ouest, le second était dans
des conditions particulièrement
favorables ; il le transforme, il en
fait un port de premier ordre et
une ville, Port-Louis ». C’est ainsi
que vers le milieu du XVIIIe siècle,
l’île devient la citadelle de la France
dans l’océan Indien.
© www.theymetinmauritius.info
La question de modernisation du port,
pierre angulaire de l’économie nationale, et
de partenariat stratégique pour en faire un
port d’éclatement, ainsi qu’une plate-forme
régionale entre l’Asie et l’Afrique, est un
sujet de chaude actualité. Une occasion toute
indiquée pour revenir sur les changements
apportés depuis plus de trois siècles pour
dynamiser et développer les flux commerciaux
maritimes, auxquels Rogers, filiale d’ENL,
est partie prenante depuis sa création.
Port-Louis en 1880.
la rade de Port-Louis en 1980. L'on peut aussi voir, encerclé en arrière-plan, ce qui
deviendra plus tard Rogers House.
En 1767, la Couronne française décide de reprendre le
contrôle de l’île d’une Compagnie
des Indes en faillite. Durant les dernières années d’administration de
cette dernière, par manque d’attention, le port s’était envasé et
se retrouvait encombré d’épaves
de navires frappés par des cyclones. L’Intendant Pierre Poivre,
puis l’ingénieur naval BernardMarie Boudin, dit le Chevalier de
Tromelin, contribuent à redresser
la situation.
Sous l’administration royale, des
changements majeurs sont apportés
pour créer les conditions nécessaires
au développement du commerce international. Durant la seconde partie
du siècle, le port connaît une activité
maritime intense, notamment avec
son ouverture en 1787 aux navires
et marchands de toutes nationalités.
ENTRE MOROSITÉ
ET EMBELLIE
Avec le passage aux mains des
Britanniques au début du XIXe siècle,
le développement des infrastructures se poursuit. Après avoir été
une plaque tournante de la traite
négrière, le flux de personnes ne
tarit pas à l’abolition de l’esclavage,
puisqu’alors débute l’« engagisme »
indien. Un boom sucrier vers le
milieu du siècle et l’accroissement
rapide de l’importation de produits
alimentaires et manufacturés alimentent également l’activité du port.
La fin du siècle est un peu plus
morose. Port-Louis perd de son importance stratégique avec l’ouverture du canal de Suez en 1869. Des
épidémies de choléra, de malaria et
de peste, des cyclones dévastateurs,
ainsi que les incendies de 1893
contribuent à un recul des exportations. C’est dans un tel contexte
que Walter Rogers fonde en 1899
Rogers & Co. Ltd, qui opère initialement dans le commerce et le transport maritime.
La chute des échanges internationaux avec la Première Guerre
mondiale n’arrange pas les affaires.
Après une embellie durant l’entredeux-guerres, l’activité portuaire
pâtit à nouveau de l’interruption des
liaisons par bateau de 1939 à 1942.
La guerre finie, le port profite de la
fermeture du canal de Suez de 1967
à 1975 et se modernise à nouveau.
Les années 1970 sont toutefois
également des « années de braise »,
avec une série de grèves dans le
port, principale porte d’entrée dans
le pays, conduisant à la proclamation
de l’état d’urgence.
CHANGEMENT DE BRAQUET
Le tournant des années 1980
marque un changement de braquet.
D’un port d’aconage, Port-Louis se
transforme en un port en eau profonde avec des installations pour le
fret et les porte-conteneurs, ainsi que
de nouveaux systèmes de gestion
opérationnelle. Le port de pêche de
Trou-Fanfaron, construit en 1985,
est agrandi en 1990. Il y a aussi
l’élargissement du bassin d’évitage,
ainsi que l’acquisition de remorqueurs de port et de haute mer.
La décennie suivante est tout
aussi cruciale avec la mise en service du Mauritius Container Terminal à Mer-Rouge, équipé de
portiques et d’installations annexes.
Port-Louis se positionne comme une
porte d’entrée régionale avec notamment des travaux de dragage et de
comblement, la création du port franc
et la reconstruction des quais A et D.
Avec l’avènement du XXIe siècle,
quelque peu victime de son
propre succès, le port connaît des
contraintes de capacité dues à l’essor de l’activité de transbordement.
D’autres projets sont enclenchés
pour moderniser davantage les
infrastructures et installations portuaires, dont l’expansion du parc à
conteneurs, la construction d’une
jetée pétrolière au Canal Anglais,
l’extension du terminal à conteneurs et de nouveaux travaux de
dragage. Un effort de diversification
est aussi entrepris avec l’aménagement en 2009 d’un port de croisière à Les Salines, qui devrait dans
un proche avenir être doté d’un terminal plus moderne.
Et aujourd’hui encore, l’on
annonce des investissements de
Rs 8,9 milliards sur la période de
2015 à 2019. L’on entend aussi parler de Bunkering, d’économie bleue,
de Seafood Hub, de hub maritime,
d’un brise-lames pour permettre le
débarquement de marchandises par
tous les temps, d’Island Container
Terminal pour répondre aux besoins
de transbordement à long terme,
ainsi que d’un éventuel partenariat
stratégique avec le géant mondial
Dubai Ports World…
Plus d’un siècle de
transport maritime
L’histoire de Rogers est intrinsèquement liée, depuis sa création il y a
plus de 115 ans, à celle du port et du
transport maritime à Maurice. Son
pôle logistique, Velogic, est un acteur
majeur du secteur depuis plus d’une
trentaine d’années, avec également
sous son aile les activités de Rogers
Shipping. Associant un réseau global
de partenaires à ses connaissances
et compétences locales, ce dernier
fournit tout un éventail de services
d’agence maritime, dont le courtage
maritime, l’équipage, l’approvisionnement en vivres, l’aconage et l’assurance maritime (lire aussi p. 26).
APRIL 2016
25
OUTBOUND
Velogic s’implante au Kenya
En ce début d’année 2016, Velogic officialise une prise de participation dans deux sociétés
au Kenya, en partenariat avec The Kibo Fund, qui a des liens avec le groupe CIEL.
Son CEO, Vishal Nunkoo, explique comment la société, qui regroupe depuis 2009 toutes
les activités logistiques du groupe Rogers, affirme sa présence en Afrique de l’Est
à travers cette transaction.
GROS PLAN
SUR L’ENTREPRISE
V
elogic confirme donc sa prise
de participation dans General
Cargo Services et General
Cargo Transport, deux sociétés
kenyanes proposant des services de
dédouanement et de transport routier
respectivement. Cette acquisition
s’est effectuée en partenariat avec
The Kibo Fund, fonds de Private Equity
du groupe CIEL dont l’objectif principal
est de fournir à ses investisseurs des
opportunités intéressantes de placement de capitaux propres dans des
régions cibles, telles que l’Afrique australe et orientale, ainsi que les îles de
l’océan Indien.
EN COULISSES
Pour finaliser cette transaction,
il aura fallu une année à Velogic et à
son partenaire, ainsi qu’un travail colossal en amont : identifier les bonnes
opportunités, trouver les fonds et
26
ENLIGHTEN No 19
dénicher quelqu’un de confiance, qui
connaît les particularités de la région,
entre autres. Cette personne s’appelle Mehul Bhatt. Employé au départ
comme Head of Business Development, il a joué un rôle déterminant dans
l’aboutissement du projet et contribuera
désormais à son succès en tant que
Country Manager pour le Kenya. Les
bonnes opportunités ont été identifiées
et les négociations bouclées, mais
d’autres défis feront surface, car il s’agit
pour Velogic d’opérer dans un environnement social, politique et économique
différent et beaucoup plus concurrentiel
que celui de l’île Maurice.
LA VISION
DE VELOGIC
Cette prise de participation s’inscrit
dans une politique d’expansion que
mène Velogic depuis 20 ans. La nécessité d’élargir son champ d’action
s’explique par un marché mauricien
étriqué, où le niveau des exportations
stagne depuis la délocalisation de la
production textile. Malgré une hausse
des importations, la croissance reste
insuffisante. La société de logistique
doit donc aller la chercher ailleurs
et notamment en Afrique de l’Est,
proche et relativement stable. De
plus, la population de l’Afrique est
nettement plus importante qu’à
Maurice. La classe moyenne – et
donc la consommation – est également en hausse, ce qui attire de plus
en plus d’investisseurs.
« Le Kenya est désormais le deuxième
plus grand bureau de Velogic après
Maurice, avec 200 employés et un
chiffre d’affaires de USD 8,5 millions »,
indique Vishal Nunkoo, CEO de
Velogic. Après le Kenya, la Tanzanie ou
l’Ouganda pourrait intéresser le pôle
logistique de Rogers.
32 bureaux
Projet Perso
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