L`amour David Roper

L’amour
David Roper
Ceci fait partie de la série
De

1
Considérez mon trousseau de clés. Il y a une
clé pour démarrer la voiture, et c’est tout ce
qu’elle peut faire. Il y a une clé pour le local de
l’Eglise, et elle n’a aucune autre utilité. Mais j’ai
également une clé qui ouvre plusieurs portes.
Elle ouvre la porte d’entrée, la porte des caves, la
porte des garages et la porte de mon logement. Je
voudrais parler d’une clé spirituelle comme celle-
là, une clé qui ouvrira plusieurs serrures, une clé
pour plusieurs problèmes spirituels.
Avant d’identifier cette clé, laissez-moi
vous parler des problèmes auxquels je pense.
Examinons la première épître de Paul aux
Corinthiens. L’Eglise de Corinthe était
encombrée de problèmes : attachement anormal
à tel ou tel prédicateur ; procès intentés entre
frères ; immoralité non disciplinée ; association
avec le culte des idoles ; mauvais usage du repas
du Seigneur, etc. Mais derrière tout cela se cachait
le problème des mauvaises attitudes.
Par exemple, il existait un problème de jalou-
sie : “En effet, puisqu’il y a parmi vous de la
jalousie et de la discorde, n’êtes-vous pas char-
nels et ne marchez vous pas d’une manière tout
humaine ?” (1 Co 3.3). Mais non seulement
étaient-ils jaloux, ils étaient orgueilleux : “Et
vous êtes enflés d’orgueil ! Et vous n’avez pas
plutôt pris le deuil” (1 Co 5.2).
Pour voir toutes ces mauvaises attitudes
décrites dans une seule section de la lettre de
Paul, il suffit de lire les chapitres 12–14. Les trois
attitudes déjà mentionnées s’y trouvent. Ceux
qui possédaient (selon eux) dons miraculeux
les moindres jalousaient ceux qui avaient les
“meilleurs”, alors que ces derniers étaient remplis
L’AMOUR
La réponse de Dieu à de
nombreux problèmes
d’orgueil. Et l’égoïsme abondait puisque tout le
monde pensait à soi-même plutôt qu’aux besoins
du corps dans son ensemble.
On pourrait également faire la liste d’autres
mauvaises attitudes. Ils étaient impatients et
malveillants les uns envers les autres. L’attitude
décrite en 12.21 montre qu’ils ne pensaient pas
aux sentiments de l’autre : “je n’ai pas besoin de
toi.” Ils étaient désagréables et discourtois.
Lorsqu’un premier parlait dans l’assemblée et
qu’un deuxième voulait parler, il l’interrompait.
Ils ne se souciaient apparemment pas de savoir si
leurs actions faisaient de l’Eglise la risée de la
population. Ils se montraient irritables dans
toutes leurs relations et soupçonneux les uns
envers les autres. Leurs relations se carac-
térisaient par un manque d’affection.
Prenez du recul et regardez cette liste de
problèmes d’attitude : impatience, malveillance,
jalousie, orgueil, impolitesse, égoïsme, irritabilité,
soupçons, manque d’affection. La réaction nor-
male est : “Quelle gâchis ! Ces gens ont des
problèmes majeurs. Comment résoudre tout ceci
et remettre ces chrétiens sur la bonne voie ?”
Ceci nous amène à la clé qui ouvre plusieurs
portes. L’évangéliste V.P. Black1 suggère que
dans 1 Corinthiens 13 Paul ne montre pas
seulement que l’amour est supérieur aux dons
miraculeux, mais il donne aussi aux Corinthiens
la clé pour corriger les mauvaises attitudes qui
tourmentaient l’Eglise dans cette ville. Ceci est
surtout vrai dans les versets 4 à 7, où il donne les
1 V.P. Black, Back to Basics (Nashville, Tenn. :
Williams Printing, 1979), 205 sv.

2
caractéristiques de l’amour.
Prenons le temps de regarder les versets 4 à
7 de cet angle, gardant à l’esprit que nous parlons
de l’amour agape.
LE PROBLEME DE L’IMPATIENCE :
L’AMOUR EST PATIENT
Le terme grec employé ici identifie la pa-
tience avec autrui. Il existe un autre terme
grec signifiant persévérance ou endurance,
c’est-à-dire la patience avec les circonstances.
Chrysostome disait que le mot utilisé ici est celui
qu’on employait pour décrire l’homme mal traité
mais qui refuse de se venger, alors qu’il en a la
possibilité. Combien nous faut-il cette patience !
Le commentateur Barclay en donne une mer-
veilleuse illustration :
Personne ne traitait Lincoln avec plus de dédain
que ne le faisait Stanton. Il l’appelait “un min-
able clown rusé”. Il lui donna le nom de “gorille
originel” et disait que Du Chaillu était fou de
parcourir l’Afrique à la recherche d’un gorille
quand il aurait pu en trouver un si facilement
à Springfield, dans l’Illinois. Mais Lincoln ne
disait rien. Il nomma Stanton au Ministère de la
Guerre parce qu’il était le meilleur homme
pour ce poste. Il traita Stanton avec toutes les
aménités. (...) Le soir vint où un assassin tua
Lincoln par balle dans le théâtre. Dans la petite
pièce où on avait mis le corps du président, là
se tenait Stanton. (...) Et, regardant le visage
silencieux de Lincoln (...), Stanton dit, les larmes
aux yeux : “Voici le plus grand chef d’état que
le monde ait jamais connu.” La patience de
l’amour avait vaincu2.
Henry Drummond, dans son célèbre sermon
sur l’amour intitulé “La plus grande chose au
monde”, dit que la patience est l’amour passif.
La prochaine qualité montre un amour actif.
LE PROBLEME DE LA MECHANCETE :
L’AMOUR EST SERVIABLE
Quelqu’un l’a exprimé comme ceci : “L’amour
est doux envers tous.” La bienveillance est
obligatoire pour le chrétien. En Ephésiens 4.32,
Paul dit : “Soyez bons les uns envers les autres”.
Pensons à la vie de Jésus et au temps qu’il passait
à aider les autres, à être bon, à rendre les gens
heureux.
Ne serait-ce pas bien si nous pouvions
apprendre tout simplement à être bons les uns
envers les autres ? Tant de cœurs ont été brisés
parce que nous ne sommes pas bons. V.P. Black
raconte une histoire sur ce point qui me touche le
cœur et la conscience3.
Il s’agit d’un homme d’affaires allant à son
travail, et qui s’arrêta pour se faire cirer les
chaussures. Le petit garçon qui lui cirait les
chaussures allait trop lentement pour l’homme
d’affaires ; alors celui-ci dit : “Tu ne peux pas
aller plus vite ? Je suis pressé et j’ai un rendez-
vous important.” Ayant dit cela, il regarda et vit
une larme sur sa chaussure. Le petit garçon
pleurait. “Qu’est-ce qu’il y a ?” dit-il d’un ton
dur. “Tu es malade ? Si tu es malade, il fallait
rester à la maison. Je t’ai dit que je suis pressé.”
Le garçon le regarda et dit : “Non, monsieur, je
ne suis pas malade. Ma mère est morte, et je
travaille pour pouvoir acheter des fleurs.”
L’homme arriva à son bureau. Il avait bien
des choses à faire, mais il ne pouvait oublier les
paroles du garçon. Malgré les nombreux rendez-
vous au programme de la matinée, il sortit du
bureau, marcha une bonne distance vers le garçon
et lui donna dix dollars pour les obsèques de sa
mère.
Souvent nous manquons de bonté parce que
nous ne comprenons pas vraiment la situation.
Mais l’amour est bon. Nous devons peut-être
apprendre à dire la prière de la petite fille qui
disait : “Dieu, fais que tous les méchants de-
viennent bons, et que tous les bons deviennent
gentils.”
LE PROBLEME DE L’ENVIE : L’AMOUR
N’EST PAS ENVIEUX
L’envie est un horrible péché. Il a sa place
dans la liste des péchés les plus abominables (Ga
5.19–21). C’est par envie que Caïn tua son frère
(1 Jn 3.12). Les frères de Joseph, dévorés d’envie,
le vendirent à des étrangers (Ac 7.9). C’est à
cause de l’envie que Saül poursuivit David
comme on chasserait un animal (1 S 18). Pilate
remarqua que c’était par envie que les Juifs
avaient livré Jésus (Mt 27.18). Salomon appela
l’envie “la carie des os” (Pr 14.30). Aujourd’hui il
l’appellerait le cancer des os. Pensez à tous les
cœurs brisés, les déceptions, les deuils et les
tristesses causés par une personne jalouse et
2 William Barclay, The Letters to the Corinthians, The
Daily Study Bible Series, 2d ed. (Philadelphia, Pa. :
Westminster Press, 1956), 133. 3 Black, 211–212.

3
manipulatrice !
Drummond appelle l’envie l’amour en com-
pétition.
Je vais vous dire les choses comme elles sont.
Peu importe ce que vous faites, quelqu’un va le
faire mieux que vous. Peu importe votre impor-
tance, quelqu’un sera plus important. Peu importe
votre succès dans la vie, quelqu’un réussira
mieux. Sinon aujourd’hui, alors demain. Et vous
devez apprendre à accepter cela, avec grâce.
Comment surmonter la terrible tendance à
être envieux ? Paul nous dit que la réponse se
trouve dans l’amour. Toutes mes filles possèdent
un talent particulier. La plus jeune sait très bien
chanter. J’étais un bon baryton dans le temps,
mais même quand je chantais de mon mieux, je
ne chantais jamais comme peut le faire ma fille.
Alors, quand je l’entends chanter, je suis rouge
de jalousie, n’est-ce pas ? Vous savez que ce n’est
pas vrai. Ce cœur de père n’abrite aucune jalou-
sie, mais plutôt une très grande reconnaissance
envers Dieu pour son don à sa petite fille.
Pourquoi ? Parce que je l’aime.
Je connais un prédicateur qui travaille seule-
ment pour des petites assemblées. Il a un fils qui
est prédicateur dans une des grandes assemblées
de notre fraternité. Mais lorsqu’il parle de son
fils, il y a de la fierté dans sa voix, et aucune
envie. Pourquoi ? C’est son garçon, et il l’aime.
Si je suis jaloux, c’est que je n’aime pas assez.
LE PROBLEME DE L’ORGUEIL :
L’AMOUR NE SE VANTE PAS
Les qualités que nous avons vues concernent
l’amour dans les situations où les autres font
mieux que nous. Cette qualité concerne les mo-
ments où nous sommes les meilleurs. Même
quand on fait bien, l’amour ne ressent aucun
besoin de se vanter.
Rien n’est plus déplaisant que la personne
qui se sent obligée de chanter constamment ses
propres louanges. Il est dit d’un certain prédi-
cateur qu’il est le seul homme capable de se pavaner
dans une position assise. Et on dit d’un autre
homme que si on pouvait l’acheter pour ce qu’il
vaut et le vendre pour ce qu’il croit valoir, on
ferait fortune. En Matthieu 6, parlant de ceux qui
désirent être admirés des hommes, Jésus dit : “Ils
ont reçu leur récompense” (vs. 2, 5).
Par contraste, l’amour possède une qualité
effacée, humble. Paul commanda en Romains
12.3 : “Je dis à chacun d’entre vous de ne pas
avoir de prétentions excessives et déraisonnables.”
Si je comprends bien le principe biblique de
l’humilité, il ne s’agit pas de se dénigrer, mais
plutôt de ne pas penser à soi-même du tout,
tellement on voudra encourager, exalter, édifier
les autres. Cet amour n’a pas besoin de s’exalter
lui-même.
LE PROBLEME DE L’IMPOLITESSE :
L’AMOUR EST AVENANT
La Bible du Semeur traduit “il ne fait rien
d’inconvenant” (“rien de laid” - TOB ; “rien de
honteux” - FC). Drummond appelle ceci l’amour
“en société”.
Certains peuvent trouver étrange que cette
qualité ait sa place dans la liste des choses
importantes comme la bonté et l’humilité. Quelle
différence, disent-ils, si l’on est courtois ou pas,
avenant ou pas, poli ou pas ?
Cela fait une énorme différence, car un souci
pour les sentiments d’autrui est à la racine de
l’authentique courtoisie. Notre politesse avec les
gens influence l’impression que nous laissons,
elle exprime notre rôle, qui est d’être le sel et la
lumière de la terre, à la gloire de Dieu (Mt 5.12–
16), et non de repousser notre prochain par nos
mauvaises actions.
Le prédicateur Charles Hodge écrit qu’à
l’occasion d’une série de conférences sur le cam-
pus d’une de nos universités chrétiennes, il avait
parlé avec bon nombre de serveurs et serveuses
dans des restaurants autour de l’université. Ils
redoutaient tous ces conférences à cause de
l’impolitesse de ceux qui y assistaient. Le plus
triste était que les plus discourtois étaient souvent
ceux qui, avant de manger, baissaient la tête
pour remercier Dieu.
L’amour est prévenant, attentionné, respec-
tueux, courtois, plein de tact, poli. Certains
peuvent considérer ces qualités comme dépassées
et vieillies, mais Paul dit que ceux qui sont remplis
d’amour agiront ainsi.
LE PROBLEME DE L’EGOISME : L’AMOUR
NE CHERCHE PAS SON INTERET
On a appelé ceci la meilleure définition de
l’amour en une seule phrase. On pourrait traduire,
pour revenir à une définition de l’amour agape
donnée plus haut : “l’amour cherche le plus
grand bien de la personne aimée.”

4
Le prophète dit : “Et toi, tu rechercherais de
grandes choses ? Ne les recherche pas !” (Jr 45.5).
Paul écrit :
Ne faites rien par rivalité ou par vaine gloire,
mais dans l’humilité, estimez les autres supérieurs
à vous-mêmes. Que chacun de vous, au lieu de
considérer ses propres intérêts, considère aussi
ceux des autres. Ayez en vous la pensée qui
était en Christ-Jésus (Ph 2.3–5).
Il est difficile de se soucier plus des autres
que de soi-même. Paul dit que le secret se trouve
dans l’amour. Barclay remarque que le monde
est divisé en deux camps principaux : ceux qui
s’occupent de leurs droits, et ceux qui s’occupent
de leurs responsabilités4. Les premiers pensent à
ce que la vie leur doit, et les derniers pensent à ce
qu’ils doivent à la vie. Ce deuxième groupe a
entrevu l’amour agape.
L’amour ne pense pas à soi, mais à l’autre.
LE PROBLEME DE L’IRRITABILITE :
L’AMOUR NE S’IRRITE PAS
La TOB traduit : “n’entretient pas de rancune”.
La Bible du Semeur traduit “ne s’aigrit pas contre
les autres”.
Il n’existe aucun élément de la nature humaine
plus destructif que la mauvaise humeur. Tant de
choses terribles ont été dites, tant d’horribles
actes commis, tant de relations précieuses détruites
à cause d’un mauvais tempérament. Beacoup
de ceux qui ne s’enivreraient jamais d’alcool
deviennent pourtant ivres de colère ; et ils font
autant de destruction.
Par contraste, l’amour ne s’irrite pas, il n’est
pas sensible, il ne garde pas rancune envers
autrui, parce qu’il ne se soucie pas de lui-même,
mais plutôt de l’autre. Lorsque je suis offensé,
que je deviens trop sensible et que je suis de
mauvaise humeur, il s’agit généralement d’une
chose que quelqu’un m’a fait. Mais si le “moi”
n’est pas important, alors les affronts, réels ou
imaginés, ne me touchent pas.
Mais quelqu’un objecte : “C’est trop difficile.
Je suis comme cela (ou bien “on est comme cela
dans ma famille”). C’est naturel avec moi.” Je
réponds : est-ce que cela veut dire que l’on ne
peut rien y faire ? Permettez-moi de demander :
Etait-ce “naturel” de se laisser conduire jusqu’au
Calvaire, de permettre que l’on transperce sa
chair avec des clous, de subir toutes la souffrance
de la croix ? N’oubliez pas qu’à tout moment,
Jésus aurait pu appeler une légion d’anges à son
secours. Comment Jésus a-t-il pu traverser cette
épreuve ? C’est qu’il nous aimait.
Il existe dans l’amour une puissance capable
de transformer les attributs de toute une vie.
LE PROBLEME DU CYNISME : L’AMOUR
NE SE REJOUIT PAS DE L’INJUSTICE
N’est-ce pas vrai que nous sommes parfois
prêts à croire que les gens sont injustes ? Si
quelqu’un fait quelque chose de bien, nous disons
qu’il l’a fait pour frimer. Si quelqu’un nous fait
un compliment, nous pensons qu’il n’est pas
sincère. Mais l’amour ne pense pas du mal des
gens. Il pense plutôt du bien. Nous verrons
plus bas le verset 7 : “il pardonne tout, il croit
tout, il espère tout, il supporte tout.” Bien des
commentateurs pensent que la signification de
l’expression “il croit tout” signifie “il met le
meilleur visage” sur les événements de la vie.
Si j’aime vraiment quelqu’un, je vais m’assurer
de mettre le meilleur visage sur ce que fait cette
personne, jusqu’à ce que je sois obligé de faire
autrement. Mais même dans ce cas, je vais espérer
tout. Je maintiendrai l’espoir que le bien-aimé
changera.
Mais on peut encore apprendre d’autres
choses sur cette caractéristique. Le terme traduit
“ne se réjouit pas de l’injustice” vient d’un con-
texte de comptabilité, d’un terme décrivant les
feuilles de comptes. Il se réfère à une chose écrite
afin que l’on ne l’oublie pas, que l’on puisse s’y
référer demain, le lendemain, ou dans dix ans.
Ne sommes-nous pas souvent comme cela ? Si
nous sommes blessés, nous l’écrivons dans un cahier
mental et nous le classons avec soin. Nous boudons
sur ces douleurs jusqu’à ce qu’elles deviennent
pour ainsi dire impossibles à oublier. Nous
dorlotons notre colère, afin de la garder au chaud.
Mais l’amour n’est pas égoïste. Il ne se soucie
pas des offenses dont il est l’objet, il est capable
de mettre le meilleur visage même sur ce qui lui
arrive. Et il peut oublier. Il n’inscrit pas les of-
fenses sur une liste ; il ne se réjouit pas du mal.
LE PROBLEME DU MANQUE DE
COMPASSION : L’AMOUR SE REJOUIT
DE LA VERITE
On peut résumer ces paroles en disant que
4 Barclay, 135, adapté.