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Les intentions de mise en scène
« Alice (je sais qui j'étais quand je me suis levée ce matin) est une très libre adaptation des
deux opus de Lewis Carroll Alice aux pays des merveilles et De l'autre côté du miroir.
Ça aurait pu s'appeler « De l'autre côté des merveilles », puisque l'illusion y est mise à nue :
Quelqu'un sur la scène attend son Alice. Quelqu'un dans la salle se lève et va entretenir
avec cette Alice rêvée une relation intime, à distance parfois. Ça aurait pu être toi… ou toi !
Cette quête du soi et de sa réalité que raconte Lewis Carroll, ce besoin insatiable de se
perdre autant que de se trouver, prend un sens paroxysmique lorsque « Alice » est ce
«quelqu'un» qui accepte de monter sur scène sous le regard des autres […] et de jouer –
jouer à faire, jouer à être – sous le regard et le désir des autres. Mais comment faire pour
être (libre)? »
Le dispositif scénique laisse place à l'évocation mais chaque élément y est coercitif et
autoritaire : le téléphone qui dit ce qu'il faut et ne faut pas […] / la porte qui surveille, qui
envoie, qui transforme, qui confronte / la lumière qui indique le chemin, qui rappelle au
spectateur sa propre réalité et le prend à parti. Les objets […] sont les passeurs, entre réalité
et fiction - des choses bricolées, des accessoires de pacotille emballés comme des cadeaux
[…] - et les rencontres aussi : ce sont des figures hybrides moitié paquets - moitié chair,
toujours promptes à édicter des règles, mais si peu vivantes.
Les mots sont ceux de Lewis Carroll, ceux d'Alice et ceux de celle qui s'est levée dans la
salle ce jour-là. Ils auraient pu être les tiens… ou les tiens !
Acceptons d'être des curieux sans réponse et que tout cela soit aussi peu saisissable que la
confiture promise à Alice par la Reine Blanche, car c'est « confiture hier ou confiture demain
mais jamais confiture aujourd'hui ».
Virginie Gaillard, metteur en scène
Le théâtre d’objets est la colonne vertébrale de la création de ce
spectacle. C'est un genre qui invite aux passages instantanés d’une
échelle à une autre, d’un espace à un autre […].
Dans Alice, les problématiques d’identité sont liées de façon très directe
à la croissance et donc à l’enfance, mais elles demeurent centrales tout
au long de nos existences.
C’est pourquoi le spectacle Alice (je sais qui j'étais quand je me suis levée ce
matin) correspond à la manière dont la compagnie Art Zygote envisage le
travail en direction du jeune public : en proposant de multiples niveaux de
lecture, elle souhaite s’adresser à des individus complets et complexes, sans
délimitation arbitraire adulte / enfant.