donne sens à une nécessaire vie en groupe. Pourtant aujourd’hui en
Occident, depuis la scission entre le laïque et le religieux et la
prédominance d’une vision scientifique, l’occident a perdu une partie
de sa culture religieuse, de sa mémoire chrétienne, ce qui n’est pas
le cas chez les musulmans, très croyants, ni chez les juifs. Cette
absence cultuelle dans nos établissements laïques provoque une
plus grande intolérance face à d’autres croyances religieuses, de
surcroîts actives, comme chez les musulmans ou le judaïsme. Cette
rupture cultuelle et culturelle est un danger pour notre « éducation à
la paix » car comment comprendre les « croyances » et « rites » des
uns et des autres, si nous ne croyons qu’en l’économie du marché ?
La distance prise par rapport à l’institution religieuse en occident
n’est pas un phénomène universel et bien des cultures comme la
culture musulmane, juive et bouddhique ne pense pas cette
séparation entre le religieux et le politique. Il serait donc grave de
considérer que les cultures sur d’autres continents, fonctionnent sur
le modèle de la laïcité occidentale.
L’imaginaire implicite français
La France, pays laïc par excellence, connaît très mal l’islam. Elle
connaît à peine mieux le judaïsme et le christianisme, du fait que la
religion n’a pas vraiment de place dans le système scolaire.
L’histoire du voile a suscité autant de réactions émotionnelles car
chacun voyait le problème au travers des seules lunettes que lui
donne, soit la foi, soit la croyance en la laïcité (c’est aussi une
croyance...) La laïcité naît dans la Déclaration des Droits de
l’Homme et du Citoyen du 26 Août 1789 lors de la révolution
française qui dans l’article 10 stipule en effet que nul ne doit être
inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur
manifestation ne trouble pas l’ordre public. Puis vint la loi du 9
Décembre 1905 : Loi de la séparation de l’église et de l’État, Loi qui
assure que seule la République assure la liberté de conscience. Elle
assure le libre exercice des cultes, sous les seules restrictions
édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. La laïcité pourrait
aujourd’hui apparaître comme le cadre qui permettrait le mieux
l’expérience religieuse de chacun, à condition que chacun rencontre
l’autre dans son expérience et que la laïcité ne fasse pas fi de
l’expérience religieuse. Il ne s’agit pas de prôner un endoctrinement
religieux, mais ne pourrait-on pas à l’heure actuelle envisager dans
le processus d’éducation à la Paix, une éducation, un enseignement
de l’histoire des religions et plus particulièrement des trois
monothéismes. Cet enseignement pourrait mettre en évidence la
spécificité de chaque monothéisme, du respect nécessaire face à
chaque croyance et surtout permettre une distinction entre religion
vécut comme spiritualité et une « religion idéologique
». La
position interculturelle n’est pas là pour confirmer ou informer la
supériorité d’une religion sur une autre. La démarche interculturelle
prend le fait religieux comme une partie intégrante de la culture et de
l’imaginaire culturel et social.
E.Weber, l’Islam sunnite, Brépols, 1993