Gènéthique - n°46 – Octobre 2003
- l’information du patient et son
consentement éclairé, et donc le choix
pour le patient d’arrêter les traitements
actifs.
Les critères d’arrêt de réanimation
existent lorsque les traitements sont
devenus disproportionnés en phase
terminale. En revanche, une question
reste aujourd’hui posée :
l’abstention d’alimentation pourrait-
elle être demandée par un patient ?
Cette question surgit parfois en
gériatrie ou en cancérologie et c’est au
cas par cas que les médecins et les
soignants décident de poursuivre ou
non une alimentation.
En conclusion, légiférer de manière
générale pour abréger la vie d’un
patient, qu’il soit tétraplégique,
handicapé, en phase terminale ou
isolé, créerait un risque majeur de
dérive. En effet, épargner la souffrance
éventuelle d’une agonie trop longue
provoquerait d’autres souffrances liées
à la rupture du contrat social qui fonde
toute l’humanité, comme l’interdit du
meurtre et celui de l’inceste. Aucune loi
nouvelle légalisant l’euthanasie ou la
dépénalisant ne peut aujourd’hui, pour
les équipes de soins palliatifs, répondre
à des situations rares, complexes et
auxquelles on doit réfléchir au cas par
cas.
1/ Le Quotidien du Médecin 7-10-2003
(revue de presse www.genethique.org )
Sur l’euthanasie voir aussi :
- Gène-éthique n° 4 et n°31
- la revue de presse quotidienne
sept-oct 2003 sur www.genethique.org
Le projet de recherche sur les embryons devant l’Assemblée Nationale
Les députés vont prochainement
reprendre des débats difficiles pour la
deuxième lecture devant l’Assemblée
nationale du projet de loi bioéthique.
La recherche sur l’embryon
La question éthique cruciale concerne
la recherche sur les embryons. La
recherche implique en effet leur
destruction. Le législateur voit bien qu’il
s’agit d’une transgression du « principe
qui doit rester fondateur : le respect de
la vie dès son commencement 1» mais
le ministre de la santé, J.-F. Mattéi, qui
énonce ce principe avec conviction, ne
croit pas « que la médecine puisse
progresser à des moments
déterminants sans transgression
[…telle] la loi sur l'interruption de
grossesse, qui est vécue comme une
transgression dans un cas particulier.
Chaque fois que nous allons également
vers le diagnostic prénatal, nous
voyons bien l'exception… » Il en est de
même de l’assistance médicale à la
procréation qui conduit à la recherche
sur l’embryon et allonge la liste des
transgressions. Aussi, en transgressant
un principe fondamental proclamé par
la loi, le ministre de la santé admet que
l’on puisse faire des recherches sur les
embryons, à titre exceptionnel, pour
des études très sélectionnées, et
durant une période limitée à cinq ans.
Création d'embryons
Par rapport au texte voté par le Sénat,
et tout en s’opposant à la création
d’embryons pour la recherche, le projet
de loi à l’Assemblée ouvre la possibilité
de ne pas limiter la recherche aux seuls
embryons surnuméraires « en stock » à
la date de promulgation de la loi, mais
propose aussi de l’étendre au « flux »
des futurs embryons surnuméraires qui,
demain, ne feront plus l’objet d’un
projet parental. Cette disposition
introduit subrepticement, mais
clairement, la constitution d’embryons
pour la recherche, ce que le projet de
loi semblait pourtant vouloir condamner
par ailleurs.
L’article le plus important et le plus
controversé est l’article 19, disposant
des limites auxquelles serait soumise
une recherche sur l’embryon, malgré
l’interdiction formelle placée en
exergue. Cette exception est assortie
de neuf conditions ; l’embryon doit avoir
été conçu in vitro dans le cadre de
l’AMP, et n’être plus couvert par un
projet parental, fait attesté par le couple
sur un écrit mentionnant l’acceptation
des recherches. Les autres conditions
concernent le sérieux du projet,
l’absence d’alternative et le contrôle par
l’Agence de la biomédecine, nouvel
organisme d’État créé par la loi et
unifiant tous les dispositifs de contrôle
et de gestion de la recherche.
L'absence d'alternative ?
Les thérapeutiques dont il s’agit sont
les thérapies régénératrices par les
cellules souches embryonnaires. Or,
« les perspectives de guérison » sont
pour le moment inapplicables à
l’homme car les greffes de cellules
souches embryonnaires ne sont pas
sans danger. J.-F. Mattei le dit
d’ailleurs sans ménagement : "Parler
aujourd'hui d'espoir thérapeutique
immédiat est donc un mensonge."
"Dans le discours, ne trompons pas les
associations de malades, ne trompons
pas les patients. C'est une longue
route… qui n'a en réalité pas
commencé à produire le premier début
de la moindre preuve, même sur les
modèles animaux. » On sait en effet
que de telles recherches sont
entreprises depuis une vingtaine
d’années dans les pays anglo-saxons
et les résultats se font attendre. Or, on
sait que l’embryon n’est pas la seule
source de cellules souches car il
existe des cellules souches adultes
dans la moelle osseuse et dans
différents organes de tout individu ainsi
que dans le sang du cordon. La
recherche dans ce domaine bat son
plein dans le monde entier et observe
déjà des résultats positifs2. C'est déjà
plus qu'une alternative à l’utilisation des
embryons humains. Nombre de
scientifiques pensent que c'est la seule
voie d'espoir.
Enfin, malgré la rhétorique, nul ne croit
que ces recherches puissent être utiles
à l’embryon. Certes, elles font entrer
l’embryon dans le domaine de la
médecine, mais au profit d’autrui.
1- Audition devant la commission des
affaires sociales au Sénat, le 12
décembre 2002
2- Gène-éthique n° 32 et n°33
Sur la révision des lois de bioéthique,
voir aussi Gène-éthique n° 36 et n°38
Lettre mensuelle gratuite, publiée par la Fondation Jérôme Lejeune - 31 rue Galande 75005 Paris
Directeur de la publication : Jean-Marie Le Méné Rédacteur en chef : Aude Dugast
Contact : Aude Dugast - adugast@genethique.org Tel : 01.55.42.55.14 - Imprimerie PRD S.A. – N° ISSN 1627 – 49 89