Il y a une fonction polémique de l’apprentissage : comment ces différentes logiques des acteurs se
rencontrent, y compris en provoquant du « bruit » ?
"Les compagnies aériennes les plus sûres dans le monde sont celles où l'on regarde l’erreur non pas
comme un échec mais comme une possibilité d’apprendre." Ainsi, être capable de jouer cette fonction
polémique (construction dialectique du rapport au savoir) est essentiel, et l’alternance le permet.
C’est une source d’apprentissage autonome, les alternants oscillent entre la singularité des
expériences et la conformité des référentiels. Il y a aussi, dans l’alternance, une logique éducative au
sens de conduire d’un point à un autre, l’alternance tend d'ailleurs à remettre en cohérence le monde
des adultes, à poser des repères.
L’alternance comme « temps plein de formation à rythme approprié » fonctionne si on retravaille sur
l’entreprise (tutorat, confier des responsabilités à l’alternant ce qui peut, moi dans ma pratique, me
réinterroger, etc.). Ceci passe notamment par une révision des modalités de fonctionnement des
organismes de formation et des formateurs : comment outiller le lien entreprise / OF, entreprise /
famille … dans ce domaine ? Il y a un vrai travail à conduire...
Une expérience, menée en Aquitaine, est présentée par Béatrice SERRAJ.
Celle-ci vise à mettre en place des contrats d’apprentissage pour des publics particulièrement en
manque d’autonomie, ce qui demande une capacité de changement de l’ensemble des acteurs en
présence (organisme de formation, autres alternants, entreprise).
La situation : un apprenti, préparant un bac pro de mécanicien, ayant des troubles cognitifs
(dyslexie) à un niveau important, si bien qu'il a des difficultés de lecture, de compréhension, d'écoute
et de prise de note simultanée, etc.
Un aménagement est proposé : Il s'agit de la mise à disposition d’un lecteur-scripteur, prise de note
à la place de l’apprenti, avec des enregistrements, des appuis pédagogiques individualisés, un
renforcement de l’accompagnement en entreprise et également un apport à l’entreprise pour
comprendre les contraintes du jeune, etc.
Les résultats : parcours de 3 ans, réussite à l’examen, CDI dans l’entreprise dans laquelle la
personne handicapée a fait son apprentissage. Au-delà de la personne, une valorisation des
formateurs et de l’entreprise.
L’accompagnement comme modalité incontournable de la réussite d’un parcours en partant des
besoins des personnes en termes d’acquisition des compétences et en assurant le suivi. (parcours
sur mesure).
Systématiquement en début de parcours, il convient de réunir l’entreprise, le CFA, le référent de
parcours et, si la situation de handicap le nécessite, un « expert » handicap. Étant entendu que dans
ce modèle, on postule que chaque partie prenante a son expertise. Des temps sont dédiés à cette
coordination au cours du parcours de l’apprenant,
Les acquis d’une expérience partenariale de cette densité, sont porteurs d’une évolution de pratiques
qui va au-delà des personnes en situation de handicap puisque la densité partenariale mise en
œuvre à l’occasion de ce type de parcours essaime bien au-delà.
Ce projet a été primé lors de la remise des trophées de l’alternance en Aquitaine.
Cette situation n’est pas une exception, il existe aujourd’hui de multiples parcours de ce type avec
cette « confluence d’acteurs ».
Une 2ème expérience, portée par Charlotte FLEURENT, alternante qui revient sur son parcours
en alternance, vient ensuite illustrer la réflexion.
Charlotte FLEURENT a 23 ans, elle est apprentie en BTS MUC (BTS Management des unités
commerciales) via la MFR, en alternance dans une entreprise familiale.
Charlotte témoigne du souhait de ses parents de la voir poursuivre dans la filière générale, ce qu’elle
fait avant de s’engager dans la voie de l’apprentissage (« en sortant de 3ème je savais que je voulais
apprendre un métier, donc l’alternance me convenait »). Elle s'engage en bac pro avec mention très
bien avant d’obtenir le prix du meilleur apprenti et entre en BTS MUC.
Dans ce cadre, elle doit présenter à l’entreprise ses projets, ses perspectives d’évolution, en
travaillant avec son tuteur. Elle constate un très bon encadrement au sein de la MFR, des apports
très importants également des autres apprentis. Elle est 2 semaines en entreprise / 2 semaines à
l’école.
L’apprentissage permet aussi, selon elle, d’avoir une rémunération (élément fort de motivation,
volonté d’indépendance vis-à-vis de la sphère familiale) et donc de créer les conditions d’une
autonomisation : achat d’une voiture, permis de conduire, appartement, etc. Pour réduire la fatigue
liée au temps de transport, la MFR a loué un appartement qu’elle met à disposition des apprentis
pour un loyer réduit.