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UNIVERSITE CADI AYYAD, FACULTE DES SCIENCES SEMLALIA
DEPARTEMENT DE BIOLOGIE
BIOLOGIE MOLECULAIRE
COURS S4 (TROISIEME PARTIE)
DU GENOTYPE AU PHENOTYPE
[ TRANSCRIPTION ]
PROFESSEUR A. A. BENSLIMANE
2006
-0-
DU GENOTYPE AU PHENOTYPE
[ TRANSCRIPTION ]
SOMMAIRE
1. REPERES HISTORIQUES
2
2. MECANISME GENERAL DE LA SYNTHESE
DES PROTEINES
4
3. LA TRANSCRIPTION
6
I. LA TRANSCRIPTION CHEZ LES PROCARYOTES
1.
2.
3.
INITIATION (et caractéristiques de la RNA-polymérase)
ELONGATION
TERMINAISON
α- REGULATION DE L’EXPRESSION GENIQUE CHEZ LES
PROCARYOTES
β- OPERONS : CONCEPT DE BASE
γ- REGULATION GENIQUE NEGATIVE : ‘REPRESSIBLE’ ou
bien ‘INDUCTIBLE’
δ- REGULATION GENIQUE POSITIVE
II. LA TRANSCRIPTION CHEZ LES EUCARYOTES
1.
2.
3.
4.
5.
INITIATION (RNA-POLYMERASE II)
ELONGATION
TERMINAISON
MODIFICATIONS DU PRE-MESSAGER : MATURATION DU
mRNA
α- LA FIXATION DE LA COIFFE EST TRES PRECOCE
β- LES RNA SONT LE PLUS SOUVENT POLYADENYLES
γ- L’EPISSAGE ELIMINE LES INTRONS DU TRANSCRIT
PRIMAIRE
MECANISME GENERAL DE L’EPISSAGE
CAS PARTICULIERS DE L’EPISSAGE DES INTRONS
L’EPISSAGE EN TRANS (« trans-splicing »)
L’EPISSAGE ALTERNATIF (OU DIFFERENTIEL)
L’AUTO-EPISSAGE (NOTION DE RYBOZYMES)
δ- ‘RNA-EDITING’ (CORRECTION DU RNA)
TRANSPORT DU mRNA VERS LE CYTOPLASME
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DU GENOTYPE AU PHENOTYPE
[ TRANSCRIPTION ]
Un zygote humain possède dans le DNA de son noyau les instructions essentielles à la
construction d’une personne particulière avec ses caractères propres. Le phénotype de chaque
individu résultera de la combinaison de son bagage génétique unique et des influences du
milieu.
Le DNA contrôle le métabolisme en commandant aux cellules de fabriquer des enzymes
spécifiques et d’autres protéines. C’est en dictant la synthèse de ces protéines que le DNA
hérité d’un organisme va produire les caractères spécifiques d’un individu : le phénotype.
Remarque terminologique : on désigne les gènes avec des minuscules en lettres italiques (ou
soulignées). On écrira par exemple les gènes lac (ou lac). Pour chaque gène particulier, on
fera suivre d’une majuscule (exemple : gène lacZ, lacY, lacA). Les mêmes lettres sont
utilisées pour le produit du gène ou bien pour le phénotype mais la première lettre sera écrite
en majuscule et l’ensemble en lettres droites. On écrira ainsi la protéine LacZ (il s’agit de la
β–galctosidase) et la bactérie Lac+ ou lac- selon qu’il s’agit de bactérie sauvage (+) ou
mutante (-).
Les protéines forment le lien entre le génotype et le phénotype.
1. REPERES HISTORIQUES
La génétique moderne remonte aux travaux de Mendel, qui le premier établit les lois de
l'hérédité. Il publie ses résultats en [1866], mais ils passent alors à peu près inaperçus. Leur
redécouverte n'aura lieu qu'en [1900].
Emergence de la génétique formelle : Les lois de Mendel impliquent l'existence d'éléments
autonomes et reproductibles, qui contrôlent de façon discrète les caractères héréditaires de
génération en génération. Chaque caractère est représenté dans l'oeuf fécondé par deux - et
seulement deux - éléments, provenant l'un du père, l'autre de la mère.
Ces éléments autonomes, unités de l'hérédité, se verront, en [1909], attribuer par le biologiste
danois Wilhem Johannsen la dénomination de « gènes ».
Support de l’hérédité : le chromosome : Ce sont les travaux de Morgan [1904] (Prix Nobel
1933), sur la drosophile (Drosophila melanogaster), qui conduisent au développement de la
« théorie chromosomique » de l'hérédité. Les gènes sont alors localisés sur les
chromosomes, et avec Sturtevant, ils pourront même y être ordonnés par l'étude de la
ségrégation des caractères, constituant les premières « cartes génétiques ». C'est encore dans
le laboratoire de Morgan que sont développées les procédures de « mutagenèse
expérimentales » par Muller [1927] (Prix Nobel 1946) (induction artificielle de mutations par
les rayons X).
Convergence de la biochimie et de la génétique : Si la présence des gènes sur les
chromosomes est alors établie, rien n’est connu de la nature biochimique des gènes ou de leur
mode d’action.
-2-
La première relation entre gène et un enzyme est établie en [1909] par Garrod à partir d’une
observation portant sur une maladie humaine : l’« alcaptonurie ». Cette maladie se manifeste
par le noircissement des urines lorsqu'elles sont exposées à l'air. Le noircissement est dû à la
présence dans les urines d'acide homogentisique, qui est un produit intermédiaire de la
dégradation de la tyrosine et de la phénylalanine. Cette substance est dégradée chez les
individus normaux, mais pas chez les alcaptonuriques, chez lesquels elle s'accumule. Le
sérum des premiers contient l'enzyme capable de la métaboliser « l'homogentisate 1,2
désoxygénase », mais cet enzyme n'est pas présent dans le sérum des seconds. Garrod
propose que chaque enzyme serait le fruit de l'activité d'un gène.
Cette corrélation allait être généralisée par
Beadle et Tatum [1941] (Prix Nobel 1958)
grâce aux mutants métaboliques de
Neurospora crassa, un système plus
accessible à l’expérimentation. L'ensemble
de ces travaux aboutissent finalement à la
conclusion que les gènes contrôlent la
synthèse des enzymes, et que chaque
protéine est codée par un gène différent ;
d’où l’expression : « un gène. ↔.une
enzyme » généralisé par la suite en « un
gène ↔ un polypeptide ».
-3-
Des travaux similaires seront par la suite produits selon cette stratégie par de nombreux autres
chercheurs. Tous confirment que chaque étape des voies biochimiques est contrôlée par un
gène unique, codant l'enzyme impliquée à cette étape.
DNA comme support de l’information génétique : Le premier phénomène qui allait
permettre de progresser dans l'identification du support de l'hérédité est celui de la
transformation bactérienne, rapporté en [1928] par l'anglais Griffith (travaux sur Diplococcus
pneumomiae – souris). Ce phénomène représente alors un test d'activité biologique, grâce
auquel il est possible de déterminer la nature du matériel génétique. Ce test ne sera pas mis à
profit par Griffith lui même, mais par Avery [1944] qui l'utilise pour élucider la nature
biochimique du matériel génétique : il s'agit de DNA. Cette découverte est toutefois accueillie
avec beaucoup de scepticisme.
Il faudra de nombreux autres travaux pour que cette réalité soit acceptée : en particulier ceux
de Chargaff [1950] (rapports A+T/C+G et A/T, C/G) ou de Hershey [1946] (travaux menés
sur les bactériophages ; phage T2 en particulier). L'acceptation définitive ne viendra qu'avec
l'élucidation de la structure du DNA par Watson et Crick [1953] (Prix Nobel 1962). C’est à
partir de ce moment que la biologie moléculaire va connaître son apothéose et son
développement dans presque tous les domaines et disciplines scientifiques.
2. MECANISME GENERAL DE LA SYNTHESE DES
PROTEINES
Qu’est ce qu’un gène ? : La définition du gène a évolué au fur et à mesure de l’avancement
scientifique des connaissances. En fait chacune des définitions a son utilité selon le
contexte dans lequel on étudie les gènes.
Les concepts mendéliens définissent le gène en tant qu’unité héréditaire discontinue
possédant une influence sur un caractère phénotypique.
Morgan et ses collaborateurs ont localisé le gène sur un endroit précis du chromosome : locus.
Ensuite, une définition fonctionnelle du gène a été formulée ; « le gène est une séquence de
DNA codant pour une chaîne polypeptidique spécifique » : « un gène - un polypeptide ».
Cette dernière définition doit être utilisée avec discernement.
En effet, la plupart des gènes eucaryotes comprennent des régions non codantes
« introns », c'est-à-dire de grands segments qui n’ont pas d’équivalents dans les
polypeptides.
Les biologistes moléculaires incluent également dans le gène les promoteurs et
d’autres régions régulatrices qui ne sont pas transcrites, mais on peut considérer que
ces séquences font partie du gène parce que le gène ne sera exprimé qu’en leur
présence.
A l’échelle moléculaire, la définition du gène doit également englober le DNA qui
code pour le RNA ribosomal, RNA de transfert et autres petits RNA. Ces gènes ne
produisent pourtant pas de polypeptides.
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La définition suivante s’applique donc à l’échelle moléculaire d’une façon plus générale :
« Un gène est une région du DNA essentielle à la fabrication d’une molécule de RNA »
Langage utilisé du DNA au polypeptide : Nous verrons dans cette partie du cours comment
se fait l’expression de l’information génétique grâce à la synthèse des protéines.
La synthèse des protéines comprend 2 étapes importantes :
La transcription. (même langage nucléotidique)
(Transcrire = recopier en utilisant le même langage)
La traduction. (nucléotides → acides aminés)
(Traduire = Lire ou écrire en utilisant une langue différente)
En général, les mécanismes sont
semblables dans les cellules procaryotes et
eucaryotes. La principale différence est la
maturation des RNA qui se produit dans
le noyau des eucaryotes.
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3. LA TRANSCRIPTION
Définition : La transcription est le mécanisme par lequel les RNA cellulaires sont synthétisés.
L’enzyme responsable de cette synthèse est la « RNA polymérase ».
Puisque la RNA polymérase ne peut fonctionner sans DNA, on dit qu’elle est « DNA
dépendante ». Le DNA sert de modèle. Le RNA produit est une copie complémentaire
et antiparallèle du DNA.
La RNA polymérase utilise comme substrat les 4 types de nucléotides sous forme de
triphosphate (ATP, GTP, CTP et UTP).
Tout le DNA n’est pas transcrit, mais seulement certaines portions.
Seul l’un des deux brins de DNA est copié mais ce n’est pas toujours le même brin qui
est copié tout au long de la molécule de DNA. Pour certains gènes, ce sera un brin, pour
d’autres ce sera l’autre brin.
La transcription se déroule en trois étapes :
1. L’initiation
2. L’élongation
3. La terminaison
Par convention, on appelle « +1 » le premier nucléotide à partir duquel la transcription
démarre : « site d’initiation » et « -1 » le nucléotide qui le précède.
Brin codant
ou brin sens
Brin transcrit
ou brin antisens
SCHEMA GENERAL
DE LA TRANSCRIPTION
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I. LA TRANSCRIPTION CHEZ LES PROCARYOTES
1. INITIATION (et caractéristiques de la RNA-polymérase)
Le signal de début de transcription est le « promoteur ». C’est une région du DNA
comprenant environ 40 paires de nucléotides située juste avant le début de la région où
démarrera la transcription.
Les séquences de nucléotides ont été déterminées pour plus de 100 promoteurs de différents
gènes de E. coli. Ces promoteurs comportent des séquences de composition très voisine dites
« séquences conservées » ou « séquences homologues ». Il s’agit en particulier de courtes
séquences de 6 paires de nucléotides séparées l’une de l’autre par environ une vingtaine de
paires de nucléotides : « séquence -35 » et « séquence -10 ».
Séquence -35 : TTGACA (T82T84G78A65C54A45),
Séquence -10 : TATATT (T80A95T45A60T50T96). Appelée aussi « Pribnow box »
NB : Les lettres en gras correspondent à des résidus hautement conservés (>>75%).
On peut considérer cette « boîte Pribnow » comme une région d’avertissement pour la RNA
polymérase. Le compte à rebours est commencé : -10, -9….-2, -1 et à +1, la transcription
démarre.
Les différences entre les promoteurs de différents gènes augmentent les différences
d’efficacité de l’initiation de la transcription et contribuent dans la régulation de l’expression
des gènes.
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Les courtes séquences conservées à l’intérieur des promoteurs sont les sites auxquels la RNApolymérase et facteurs de transcription se fixent pour lancer ou réguler la transcription.
Chez E. coli, La RNA-polymérase est composée de sous-unités. L’ensemble « α2ββ’ » forme
le noyau (ou cœur) de l’enzyme. Ce noyau contient le site catalytique responsable de
l’élongation. L’ensemble « α2ββ’σ » forme l’enzyme complète appelée « holoenzyme ».
α2
β
Remarque : La structure de la majorité des
RNA-polymérases procaryotes est une structure
à plusieurs sous-unités. Ceci n’est en fait pas une
nécessité absolue. Les RNA-polymérases
encodées par les bactériophages T3 et T7 sont
des chaînes polypeptidiques monoténaires
reconnaissant leurs propres DNA à des
séquences spécifiques (vitesse de synthèse du
RNA : 200 nucléotides / seconde à 37°C).
β’
‘Core enzyme’
σ70
‘holoenzyme
σ54
Afin de permettre au brin matrice d’être utilisé pour l’appariement de bases (DNA-RNA), la
double hélice du DNA doit être localement déroulée sur environ 17 pb. Le déroulement
commence au site du promoteur reconnu par la RNA-polymérase. La totalité de l’enzyme se
fixe sur une région couvrant environ 60 pb. La polymérase lance ensuite la synthèse du brin
de RNA à partir du site d’initiation (nucléotide +1 : une purine G ou A dans 90 % des gènes).
Aucune amorce n’est requise pour la synthèse du RNA.
La sous-unité σ ou « facteur sigma » permet à la RNA-polymérase de reconnaître les sites
promoteurs. L’enzyme complète (holoenzyme : α2ββ’σ) est nécessaire pour l’initiation de la
transcription. Cependant le facteur σ n’est pas requis pour l’élongation. Il est libéré du
complexe de transcription après l’initiation de celle-ci (le facteur σ se dissocie du cœur de
l’enzyme lorsque le transcrit atteint 8 à 9 nucléotides de longueur). Ces premiers nucléotides
sont incorporés sans recourir au déplacement de la polymérase.
En fait, la polymérase va entreprendre plusieurs initiations de chaînes avortées. A partir du
moment où l’initiation est réussie, le facteur σ est libéré et la polymérase cœur commence
l’élongation en se déplaçant le long du DNA (vitesse de synthèse : 40 nucléotides / seconde à
37 °C).
La RNA-polymérase de E. coli nécessite la présence d’ions Mg2+ pour son
fonctionnement.
Les deux sous unités α sont identiques, encodées par le gène « rpoA », ne
jouent pas de rôle concret dans la transcription mais sont indispensables
pour l’assemblage de l’enzyme cœur et semblent jouer un certain rôle dans la
reconnaissance du promoteur.
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La sous-unité β constitue le centre catalytique de la RNA-polymérase. La
« rifampicine » et les « streptolydigines » sont des antibiotiques qui se
fixent sur la sous-unité β : 1) La rifampicine bloque l’initiation mais pas
l’élongation ; 2) les streptolydigines inhibent l’élongation. Les mutations qui
augmentent la résistance à ces antibiotiques sont cartographiées en « rpoB »
(gène codant la sous-unité β). Ceci montre que la sous-unité β contient deux
domaines responsables chacun de l’initiation et de l’élongation.
La sous-unité β’, encodée par le gène « rpoC », est liée à deux ions de Zn2+.
L’ « l’héparine », un polyanion, se fixe à cette sous-unité. Elle inhibe la
transcription in vitro en entrant en compétition avec le DNA pour la fixation
de la RNA-polymérase. Il ressort de cela que la sous-unité β’ peut être
responsable de la fixation au DNA matrice.
Le facteur sigma le plus fréquent dans E. coli est « σ70 » (PM=70 Kda).
Celui-ci joue un rôle très important dans la reconnaissance du promoteur
mais n’est pas requis pour l’élongation : il réduit l’affinité de l’enzyme cœur
pour les sites non spécifiques du DNA par un facteur de 104 et augmente
l’affinité pour le promoteur.
E. coli possède plusieurs facteurs σ différents (σ28, σ32, σ54…). Ces derniers
participent à la reconnaissance de classes spécifiques de promoteurs.
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Les promoteurs régulés sont activés par la fixation de facteurs d’activation
accessoires tels que la protéine réceptrice d’AMPc : CPR ou CAP
(Catabolite Activator Protein) dans le cas du promoteurs lac par exemple.
2. ELONGATION
Lorsque l’initiation est lancée correctement, l’enzyme libère le facteur σ et forme un
complexe ternaire (DNA-RNA-polymérase). La polymérase quitte le promoteur et avance le
long du DNA : « clairance du promoteur » permettant la relance d’une nouvelle initiation.
ribosomes
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La région déroulée du DNA, appelée « bulle de transcription » semble se déplacer le long
du DNA avec la polymérase. La taille de cette bulle reste constante (17 pb environ).
L’extrémité 3’ du RNA naissant forme un hybride d’environ 12 pb avec le brin antisens
(transcrit).
La RNA-polymérase ajoute des ribonucléotides de manière covalente à l’extrémité 3’ de la
chaîne croissante de RNA (précurseurs = ribonucléosides triphosphates) : 40 nucléotides /
seconde à 37 °C.
L’énergie nécessaire pour former les liaisons ester entre les différents nucléotides du RNA est
apportée par les nucléotides eux-mêmes. Seul le premier nucléotide du RNA consrve son
groupement triphosphate.
3. TERMINAISON
La terminaison de la transcription a lieu au niveau de séquences spécifiques appelées
« terminateurs ». Il s’agit de régions auto-complémentaires qui forment une structure
secondaire RNA en « épingle à cheveux ». Cette région pousse la polymérase à marquer un
temps d’arrêt et par conséquent à cesser la transcription.
Cette région à symétrie imparfaite est immédiatement suivie par une courte séquences riche
en bases A et T (le brin du DNA transcrit contient à ce niveau une séquence de plusieurs A).
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Il s’agit d’une région où les appariements sont plus lâches et d’où la polymérase peut plus
facilement se détacher.
Certaines séquences terminateurs peuvent, à elles seules, mettre fin à la transcription, alors
que d’autres séquences terminateurs requièrent un facteur accessoire la protéine rho « ρ ».
α- REGULATION DE L’EXPRESSION GENIQUE CHEZ LES PROCARYOTES
Les mutations et les divers mécanismes de recombinaison génétique, étudiés dans la première
partie du cours, engendrent une variation génétique qui rend possible la sélection naturelle.
Par son action sur un grand nombre de générations d’une population bactérienne, la sélection
naturelle augmente la proportion d’individus adaptés à certaines conditions du milieu, telle la
présence d’un certain antibiotique par exemple.
Cependant, une bactérie qui a hérité un génome précis va devoir faire face aux fluctuations de
son environnement. Prenons l’exemple d’une cellule d’E. coli vivant dans un intestin humain,
un milieu extrêmement instable. En effet son approvisionnement en nutriments dépend des
habitudes alimentaires capricieuse et variables de son hôte. Si la bactérie manque de
tryptophane par exemple, un acide aminé dont elle a besoin pour survivre, elle réagit en
activant une voie métabolique qui lui permet de synthétiser cette substance à partir d’un autre
composé. Plus tard, si son hôte absorbe un repas riche en tryptophane, la cellule cesse d’en
synthétiser pour elle-même, évitant ainsi de gaspiller ses ressources pour produire une
substance déjà toute prête dans le milieu environnant.
La régulation métabolique s’exerce de deux façons :
En premier lieu, les cellules peuvent faire varier le nombre de molécules d’une
enzyme donnée en contrôlant l’expression du gène correspondant.
En deuxième lieu, les cellules peuvent modifier l’activité des enzymes déjà présentes.
Ce second mode de régulation, plus immédiat, repose sur la sensibilité d’un grand nombre
d’enzymes à des facteurs chimiques qui font augmenter ou diminuer leur activité catalytique.
Par exemple, l’activité de la première enzyme de la voie de biosynthèse du tryptophane est
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inhibée par la présence du produit final de la voie. Donc, si le tryptophane s’accumule dans la
cellule, il met fin à sa propre synthèse : rétro-inhibition ». Ce mode de régulation permet à la
cellule de s’adapter aux fluctuations à court terme de la concentration d’une substance dont
elle a besoin.
Si, dans notre exemple, le milieu continue de fournir tout le tryptophane nécessaire, la cellule
cesse de produire les enzymes de la voie du tryptophane. Cette régulation s’exerce sur à
l’étape de la transcription (synthèse du RNA messager codant pour ces enzymes).
De façon plus générale, de nombreux gènes du génome bactérien sont activés ou inactivés par
les fluctuations de l’état métabolique de la cellule. Le mécanisme fondamental de ce mode de
régulation de l’expression génique, appelé « modèle de l’opéron », a été découvert par Jacob
et Monod [1961] (Prix Nobel 1965).
A partir de l’exemple de la régulation de la synthèse du tryptophane, nous allons voir en quoi
consiste un opéron et comment il fonctionne.
β- OPERONS : CONCEPT DE BASE
E. coli synthétise le tryptophane à partir d’un substrat initial en passant par une série d’étapes,
chaque réaction étant catalysée par un enzyme spécifique.
Les gènes codant pour les chaînes polypeptidiques de ces enzymes sont regroupés sur le
chromosome. Un seul promoteur dessert l’ensemble de ces gènes qui forment une seule et
même unité de transcription. La transcription produit donc une longue molécule de mRNA
qui représente l’ensemble de la voie de biosynthèse du tryptophane. La cellule pourra traduire
ce transcrit en polypeptides distincts parce que le mRNA porte les signaux de départ et d’arrêt
qui marquent le début et la fin de traduction de chacun d’eux.
Les gènes qui codent pour des polypeptides sont appelés « gènes de structure ». Le fait que
des gènes de structure aux fonctions connexes (liées, assdociées) se trouvent dans la même
unité de transcription représente un avantage majeur car il suffit d’un seul ‘interrupteur’ pour
commander l’ensemble des gènes : « l’opérateur ». celui-ci se trouve à l’intérieur du
promoteur ou entre le promoteur et les gènes de structure. Il commande l’accès de la RNApolymérase aux gènes de structure.
L’ensemble gènes de structure, opérateur et promoteur constitue un opéron.
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Si l’opérateur représente la zone de DNA où s’exerce la régulation de la transcription, quel est
le facteur qui détermine si l’opérateur sera activé ou inactivé ? Seul, en lui-même, l’opérateur
est activé : la transcription a lieu. L’opéron est inactivé par une protéine appelée
« répresseur ». Quand le répresseur se lie à l’opérateur, il empêche la RNA-polymérase de
s’attacher au promoteur.
Les répresseurs sont spécifiques : ils ne reconnaissent et ne se lient qu’à l’opérateur d’un
certain opéron. Le répresseur provient lui-même d’un gène appelé « régulateur » qui se
trouve en général à une certaine distance de l’opéron qu’il contrôle. Les gènes régulateurs se
font transcrire de façon continue (de manière constitutive), à rythme lent et par conséquent il
y a toujours des molécules de répresseur dans la cellule. Si tel est le cas, pourquoi l’opéron
n’est pas inactif de façon permanente ? Pour deux raisons :
La liaison entre les répresseurs et les opérateurs est réversible.
Le répresseur peut adopter deux formes : une forme active qui peut reconnaître
l’opérateur et une forme inactive. Le passage d’une forme à une autre dépend de la
fixation ou non sur le répresseur d’une molécule appelée selon les cas « corépresseur »
ou « inducteur ». Il s’agit d’un métabolite qui collabore avec le répresseur pour
inactiver ou bien activer un opérateur. Le métabolite en question est une petite molécule
organique qui représente un précurseur, un intermédiaire ou le produit final d’une voie
métabolique. Exemples : tryptophane, allolactose).
γ- REGULATION GENIQUE NEGATIVE : ‘REPRESSIBLE’ ou bien ‘INDUCTIBLE’
Le tryptophane est un acide aminé produit par l’intermédiaire d’une voie anabolique
catalysée par des « enzymes répressibles ». L’accumulation du tryptophane, le produit final
de cette voie a pour effet de réprimer la synthèse de ces enzymes. Le mécanisme est illustré
sur la figure ci-dessous.
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Par contre, la synthèse des « enzymes inductibles » se trouve stimulée, et non inhibée, par la
présence de métabolites particuliers. Tel est le cas de l’opéron lactose chez E. coli.
Ces deux exemples montrent comment l’expression génique peut répondre aux changements
qui surviennent dans les milieux internes et externes de la cellule.
δ- REGULATION GENIQUE POSITIVE
Dans les deux exemples précédents, les gènes subissent une régulation négative parce que
les opérons sont inactivés par la conformation active du répresseur. Techniquement, on peut
considérer l’inducteur (l’allolactose par exemple) davantage comme un ‘dérépresseur’ que
comme un inducteur de gène.
On ne parle de régulation génique positive que dans le cas où une molécule d’activateur
interagit directement avec le génome pour entraîner la transcription. L’exemple de régulation
positive illustré ci-dessous se rapporte également à l’opéron lactose.
Pour que les enzymes de dégradation du lactose (en galactose + glucose) se fassent synthétiser
en grande quantité, la présence de lactose (→ allolactose) ne suffit pas. L’absence de glucose
est également indispensable.
Si on lui laisse le choix des substrats pour la glycolyse et d’autres voies métaboliques, E. coli
se sert en priorité du glucose, le glucide le plus souvent présent dans le milieu nutritif. La
plupart des gènes nécessaires au catabolisme du glucose sont des gènes constitutifs, c'est-àdire des gènes dont la transcription se fait de façon continue.
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Comment la cellule d’ E. coli perçoit-elle la concentration de glucose et comment cette
information est transportée jusqu’au génome ?
Une protéine appelée CAP « Protéine activatrice du catabolisme » (également appelée
protéine réceptrice d’AMPc : CRP) est une protéine qui accélère la transcription d’un opéron
en s’unissant au promoteur et en facilitant la fixation de la RNA-polymérase. Comme la CAP
se fixe directement au DNA afin de stimuler la transcription, on peut parler ici de régulation
positive.
L’absence de glucose dans la
cellule entraîne l’accumulation
d’une molécule appelée AMP
cyclique (AMPc), un dérivé de
l’ATP. La CAP possède un site de
liaison pour l’AMPc. Le complexe
CAP-AMPc se lie au promoteur de
l’opéron lactose et stimule la
transcription des gènes pour le
catabolisme du lactose.
Si on ajoute du glucose, la
concentration d’AMPc diminue et
les molécules de la CAP quittent les
promoteurs de lac.
L’opéron lac subit donc une double
régulation : une régulation négative
par le répresseur lac et une
régulation positive par la CAP.
Bien que nous ayons pris l’opéron
lac comme exemple, la CAP agit,
contrairement aux répresseurs
spécifiques, sur plusieurs opérons
différents. Lorsque le glucose est
présent et que la CAP est inactive,
il y a ralentissement général de la
synthèse des enzymes nécessaires à
l’utilisation de tous les catabolites
sauf du glucose. Quand il y a
pénurie de glucose, les catabolites
présents (lactose par exemple)
déterminent alors quels opérons
deviendront activés.
Tout se passe comme si l’opéron
en question est à la fois commandé
par un interrupteur et un bouton de
volume (intensité).
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II. LA TRANSCRIPTION CHEZ LES EUCARYOTES
Le mécanisme de la transcription eucaryote est similaire à celui des procaryotes. Cependant,
le grand nombre de polypeptides associés à la machinerie de la transcription eucaryote rend
celui-ci bien plus complexe.
Chez les eucaryotes, trois complexes de RNA-polymérases sont responsables de la
transcription des différents types de gènes. Elles ont été identifiées par la purification
chromatographique et l’élution à différentes concentrations de sel. Chaque RNA-polymérase
possède une sensibilité différente à la toxine fongique « α-amanitine ».
1. ARN Polymérase de Type I (ou A) :
Transcription de la plupart des gènes rRNA (RNA ribosomiaux).
Localisation: Nucléole.
Insensible à l’α-amanitine
Activité: 50-70%
2. ARN Polymérase de Type II (ou B) :
Transcription de tous les gènes codant les Protéines (mRNA) et certains snRNA.
Localisation: Nucléoplasme.
Très sensible à l’α-amanitine.
Activité: 20-40%
3. ARN Polymérase de Type III (ou C) :
Transcription des gènes pour les tRNA, le rRNA 5S, le snRNA U6.
Localisation: Nucléoplasme.
Modérément sensible à l’α-amanitine.
Activité: 10%
REMARQUES : En plus de ces RNA-polymérases nucléaires, les cellules eucaryotes
possèdent des RNA-polymérases supplémentaires dans les mitochondries et les chloroplastes.
Les trois RNA-polymérases sont de grosses enzymes contenant chacune au moins 12 sousunités. Elles contiennent des sous-unités homologues aux sous-unités de la RNA-polymérase
cœur de E. coli (α2ββ’). Au moins cinq petites sous-unités sont communes aux trois
différentes RNA-polymérases. Chacune contient également 5 à 7 sous-unités supplémentaires
qui sont uniquement présentes dans un seul type.
Comme les RNA-polymérases bactériennes, chacune des enzymes eucaryotes catalyse la
transcription dans la direction 5’ → 3’ et synthétise le RNA complémentaire au brin matrice
- 17 -
antisens. La réaction nécessite les nucléotides précurseurs (ATP, GTP, CTP et UTP) et ne
requiert pas d’amorce pour l’initiation de la transcription.
Nous allons nous intéresser essentiellement au mécanisme de transcription catalysé par la
RNA-polymérase II. Celle-ci est responsable de la transcription de tous les gènes codant pour
les protéines eucaryotes. Néanmoins et dans la mesure du possible, nous allons exposer
certains éléments comparatifs concernant les deux autres RNA-polymérases I et III.
En fait, la RNA-polymérase II synthétise des précurseurs de RNA messagers « pré-mRNA ».
Ces derniers doivent subir une « maturation » par la formation d’une « coiffe » (ou capsule)
à l’extrémité 5’ du RNA, l’ajout d’une « queue poly A » et l’enlèvement des « introns » par
« épissage ».
1. INITIATION (RNA-POLYMERASE II)
En amont du premier nucléotide transcrit (+1) d’un gène de structure eucaryote, se trouve
toute une « région 5’ » non transcrite qui joue un rôle essentiel dans le contrôle de la
transcription. Cette région, appelée « promoteur proximal », s’étend sur environ une
centaine de paires de bases. On y trouve essentiellement la « TATA box », présente dans
presque tous les gènes, ainsi que la « CCAAT box » et la « GC box » moins
systématiquement retrouvées.
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La RNA-polymérase eucaryote est incapable, à elle seule,
de reconnaître directement le promoteur. Il semble qu’elle
reconnaît plutôt un complexe multiprotéique. Ce complexe
est formé d’au moins 5 protéines : TFIIA, TFIIB, TFIID,
TFIIE, TFIIF et TFIIH (TF = ‘transcriptional factor’).
TAFII
Il a été démontré que ces facteurs s’assemblent sur les
promoteurs de base en un ordre spécifique et sont sujets à
de multiples niveaux de régulation.
Seul TFIID (TBP +TAFII) se fixe sur la TATA box par
l’intermédiaire de la « TATA binding protein » (ou
TBP).
CTD
TFIIA stabilise le complexe TFIID-DNA et neutralise les
effets des facteurs inhibiteurs auxquels TFIID peut être lié.
TFIIB agit comme un facteur permettant le recrutement de
la RNA-polymérase avec un facteur supplémentaire TFIIF.
CTD
Après fixation de la RNA-polymérase, d’autres facteurs de
transcription se lient rapidement au complexe (TFIIE,
TFIIH).
La TFIIH contient une activité kinase et une activité
hélicase permettant la phosphorylation du « domaine
terminal-carboxyle » (CTD) de la RNA-polymérase et de
dénaturer la double hélice du DNA au site d’initiation de CTD phosphorylé
la transcription.
Cette phosphorylation conduit à la formation d’un
complexe De RNA-polymérase fonctionnel et permet à la
RNA-polymérase de quitter la région du promoteur.
Ce groupe de facteurs généraux de la transcription ainsi que la RNA-polymérase constituent
le « complexe d’initiation ». Celui-ci catalyse la formation de la première liaison entre les
deux premièrs nucléotides du pré-mRNA. La transcription commence à quelques nucléotides
en aval de la TATA box au « site d’initiation » de la transcription (+1).
Ce mécanisme de reconnaissance et de fixation de la RNA-polymérase, beaucoup plus
complexe que chez les procaryotes, est dû à la sélectivité de la transcription chez les
eucaryotes. Seuls les promoteurs ayant fixés certains « facteurs trans-régulateurs » seront
fonctionnels.
En plus de la région de contrôle appelée ‘promoteur proximal’, la transcription des gènes
eucaryotes peut être modulée par une série d’autres séquences de DNA « éléments cisrégulateurs » constituées de quelques nucléotides (6 à 8 le plus souvent, voire une vingtaine).
Ces séquences forment ce qu’on appelle « séquences distales » du promoteur. Ces séquences
peuvent se trouver aussi bien en amont qu’en aval du gène voire même au milieu dans
certains cas (au niveau des introns).
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Il Existe Plusieurs Niveaux de Compaction du DNA
Correspondant à des Niveaux d ’Activité Transcriptionnelle Différents
Transcription Possible
Transcription Impossible
Zone
Accessible
Histone acétylase
‘Chromatin remodeling complex’
Sur ces ‘séquences cis-régulatrices’, étonnamment conservées dans les gènes de nombreuses
espèces, vont se fixer des ‘facteurs trans-régulateurs’. La Fixation de ces facteurs provoquera
selon les cas un démarrage, une activation ou plus rarement une diminution de la
transcription.
Dans le cas d’une activation ou d’une inhibition de la transcription, les séquences cisrégulatrices sont appelées respectivement « enhancers » (activatrices en français) ou
« silencers » (exctinctrices). Leur particularités est : 1/ d’être parfois localisées à de très
grandes distances (1 à 30 Kb), 2/ d’agir indépendemment de leur position (aval ou amont) ou
de leur orientation.
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Les facteurs de transcription possèdent une structure modulaire constituée de :
Domaines de fixation au DNA : ‘hélice-tour-hélice’, ‘à doigt de zinc’, ‘Leu zipper’…
Domaines d’activation : ‘riche en proline’, riches en glutamine’, ‘hélice-α-acide’…
Exemple avec un facteur de
transcription à trois doigts de zinc.
Parmi les méthodes utilisées pour caractériser les séquences cis-régulatrices et les facteurs
trans-régulateurs on peut citer les techniques « retard sur gel », « chromatographie d’affinité
du DNA », « immunoprécipitration de la chromatine » …
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Retard sur gel
Chromatographie d’affinité
du DNA
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2. ELONGATION
L’élongation du pré-mRNA se fait selon le même mécanisme que chez les procaryotes.
3. TERMINAISON
Le signal de fin de gène (et non de fin de transcription) est la séquence consensus : AATAAA
lue sur le brin non transcrit (brin sens). La RNA-polymérase reconnaît ce signal sur le DNA
mais continue à transcrire encore au-delà. Toutefois, les transcrit seront ensuite racourcis et se
termineront par le signal « AAUAAA » suivi de 10 à 15 nucléotides.
4. MODIFICATIONS DU PRE-MESSAGER : MATURATION DU mRNA
Structure des mRNA : différences entre procaryotes et eucaryotes
α- LA FIXATION DE LA COIFFE EST TRES PRECOCE
Ceci représente la première étape de maturation du RNA
messager. La coiffe (capsule, capuchon, chapeau ou cap) se
met en place dès le début de la transcription, avant que 30
nucléotides ne soient assemblés.
La coiffe est un GMP ayant un groupe méthyle sur l’azote
en position 7 (ce qui apporte une charge positive). Il est
relié au premier nucléotide par une liaison anhydride
d’acide.
Les deux premiers nucléotides du RNA peuvent également
être méthylés sur les hydroxyles en position 2’ du ribose.
La coiffe protégerait ainsi l’extrémité 5’ des mRNA de
l’attaque par des enzymes (phosphatases et nucléases). La coiffe joue également un rôle
important dans le transport du mRNA et l’initiation de la traduction. En effet, la petite sousunité du ribosome, aidée par la reconnaissance de la coiffe, se fixera ainsi à l’extrémité 5’ du
mRNA
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β- LES RNA SONT LE PLUS SOUVENT POLYADENYLES
Une fois synthétisés, les pré-RNA (ou transcrits primaires), sont coupés du côté 3’ à une
vingtaine de nucléotides en aval de la séquence ‘AAUAAA’ déjà signalée plus haut. Cette
séquence qui fut considérée au début comme une séquence de reconnaissance pour la
polyadénylation n’est en fait que le signal pour la coupure.
‘AAUAAA’ est suivie 11 à 20
nucléotides par 5’YA3’ (Y =
pyrimidine) et très souvent
d’une séquence riche en GU en
aval. Un certain nombre de
facteurs protéiques reconnaît
ces éléments de la séquence et
se fixe au pré-mRNA. Lorsque
le complexe est rassemblé, le
coupure a lieu et l’un des
facteurs,
« La
poly
A
polymérase » (ou PAP), ajoute
jusqu’à 250 A consécutifs chez
les mammifères et 100 chez les
eucaryotes inférieurs.
Vraisemblablement, seuls les messagers d’histones sont dépourvus de queue poly A.
Une protéine de 70 KDa, la « poly A binding protein » ou PABP, se fixe sur la queue polyA.
La queue poly A associée à la PABP semble jouer un rôle dans la stabilisation des messagers
et dans l’initiation de la traduction.
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Il est important de signaler que la présence de cette queue poly A sur les mRNA eucaryotes a
permis l’isolement et la purification de ces molécules des autres RNA cellulaires permettant
ainsi la construction de « banques de cDNA » (voir cours S3) desquelles des gènes
spécifiques ont été caractérisés et leurs fonctions analysées.
γ- L’EPISSAGE ELIMINE LES INTRONS DU TRANSCRIT PRIMAIRE
Robert et Sharp ont obtenu le Prix Nobel 1993 pour leur découverte de la structure
discontinue (ou fragmentée) des gènes eucaryotes. Le gène eucaryote comprend :
des « exons » qui contiennent l’information héréditaire qui s’exprimera en donnant des
polypeptides. (Le mot exon dérive en fait de ‘exit’ en relation avec la partie du RNA qui
sortira du noyau vers le cytoplasme).
des « introns » qui sont intercalés entre les exons. Ils seront transcrits mais ne seront
pas traduits.
Structure de deux gènes humains
C’est au cours de la maturation du pré-mRNA (‘processing’ en anglais) que les introns seront
éliminés par un mécanisme appelé « épissage » (‘splicing’ en anglais). Les exons vont être
soudés bout à bout : les exons sont épissés ; les introns sont excisés.
L’épissage est une opération délicate qui doit être parfaitement précise et fiable. En effet, une
erreur d’un seul nucléotide au niveau de l’excision changerait le « cadre de lecture » lors de
la traduction et aboutirait à des protéines incorrectes.
Il est important de ne pas confondre les introns au niveau du DNA avec ceux au niveau du
pré-mRNA. Les introns excisés sont ceux du RNA et non du DNA.
Nous décrirons d’abord le mécanisme général de l’épissage et nous évoquerons ensuite
quelques cas particuliers (épissage en trans, épissage alternatif, auto-épissage)
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MECANISME GENERAL DE L’EPISSAGE
Trois éléments du pré-mRNA jouent un rôle important lors de l’épissage :
Le « site donneur d’épissage » situé à
la jonction 5’exon-intron3’. Se site
commence par ‘GU’ au niveau de
l’intron.
Le « site accepteur » situé à la
jonction 5’intron-exon 3’. ce site se
termine par ‘AG’ au niveau de l’intron.
Le « site de branchement » situé à
environ -30 nucléotide de l’extrémité 3’
de l’intron. Sur ce site se trouve un ‘A’
appelé « A du branchement ».
Las so ou
‘lariat’
Le mécanisme d’épissage peut être décomposé en deux étapes comprenant chacune une
réaction de « transestérification ».
Dans notre cas, la transestérification est une réaction où une liaison ester phosphate est
transférée d’un sucre à un autre, sans hydrolyse et donc sans nécessité d’un apport d’énergie.
1ère étape : Première coupure en 5’ de l’intron. L’attaque de cette liaison ester est due au
l’hydroxyle en position 2’ du A du branchement. Ainsi, le G en position 5’ de l’intron se soude par
une liaison covalente au A du branchement formant une structure en « lasso » (‘lariat’ en anglais).
2ème étape : Deuxième coupure en 3’ de l’intron. Soudure des deux exons et libération du
lasso qui sera dégradé par les nucléases.
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Ce processus est contrôlé et guidé par un
complexe
nucléoprotéique
appelé
comprenant
plusieurs
« spliceosome »
snRNA (U1, U2, U4, U5 et U6) associés
chacun à plusieurs protéines appelées
« snRNP ».
U1 reconnaît le site donneur, U2 reconnaît le
site de branchement et U5 reconnaît le site
accepteur.
U6 et U4 sont associés par des liaisons
complémentaires. U6 est vraisemblablement
impliqué dans la catalyse et serait régulé par
U4 qui pourrait jouer le rôle de ‘RNA
antisens’. U4 se dissocie du spliceosome
juste avant ou pendant la première coupure.
L’élimination des introns s’effectue dans le
noyau. Le pré-messager (muni de la coiffe et
de la queue poly A) doit être tenu à l’écart
tant qu’il contient des séquences qui ne
doivent pas être traduites.
Le spliceosome situé au niveau de chaque intron, tout au long du transcrit primaire, ont pour
fonction de retenir le pré-mRNA dans le noyau. Les spliceosomes sont tellement encombrants
qu’ils empêchent le passage du RNA tant qu’il y a un seul intron non excisé.
CAS PARTICULIERS DE L’EPISSAGE DES INTRONS
L’EPISSAGE EN TRANS (« trans-splicing »)
L’épissage des exons, après excision des introns, concerne généralement des exons
appartenant au même transcrit primaire : « cis-splicing ». C’est le cas général décrit plus haut.
Chez quelques organismes (trypanosome et une espèce de nématode), un mécanisme
d’épissage en trans a été décrit. Dans ces cas, l’épissage d’exons a lieu entre des transcrits
primaires différents et donnant ainsi un mRNA mosaïque.
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Ce mécanisme particulier d’épissage est décrit sur la figure ci-dessous en comparaison avec le
mécanisme général.
L’EPISSAGE ALTERNATIF (OU DIFFERENTIEL)
L’épissage alternatif est un mécanisme qui permet à un gène possédant plusieurs exons de
coder plus d’une protéine. Cette possibilité s’explique par le fait qu’un même transcrit
primaire peut être épissé différemment. Par exemple, certains exons seront choisis dans un
type de cellules, tandis que d’autres exons seront retenus dans un autre type de cellules.
L’utilisation alternative des exons produit ainsi plusieurs sortes de mRNA et donc plusieurs
protéines différentes. Ce mécanisme permettant d’augmenter la capacité de codage des gènes
se rencontre en particulier dans le muscle et le cerveau.
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L’AUTO-EPISSAGE (NOTION DE RYBOZYMES)
Jusqu’aux années 1980, on pensait que les enzymes ne pouvaient ^être que des protéines.
Altman et Cech [1981], Prix Nobel 1989, ont découvert que certains RNA pouvaient être
doué de propriétés enzymatiques. Ces RNA ont été appelés « ribozymes ».
Ces ribozymes ont été mis en évidence dans certains cas particuliers où ils interviennent dans
le clivage de pré-tRNA (chez E. coli) ou dans l’épissage de pré-rRNA (chez Tetrahymena
thermophilus, un protozoaire) et de certains pré-mRNA (champignons, mitochondrie et
chloroplastes de plantes).
Les introns excisés par auto-épissage sont subdivisés en deux groupes (I et II).
Les introns de groupe I ont été les
premiers ribozymes a être découverts,
par Tom Cech, dans le précurseur du
rRNA 26S du protozoaire Tetrahymena
thermophilus. Ils ont la capacité d'autoépissage sans aucun autre apport
extérieur que celui d’un GMP et de l'ion
magnésium. Cet épissage est réalisé par
2 réactions de trans-estérification après
l'attaque initiale du GMP sur le site
d'épissage 5'.
Schéma récapitulatif des étapes d'autoépissage des introns de groupe I
Les différents introns de groupe I, bien qu'ayant peu de similarité dans leur séquence, ont en
commun des éléments courts de structure primaire. Ces éléments appartiennent à des
domaines indispensables pour le repliement correct de l'ensemble, amenant à la structure
catalytique active. Le site actif de la catalyse naît ici principalement de 3 éléments :
Le premier élément important est la création d'une poche de fixation pour le GMP. Cette
poche peut discriminer entre le GMP et les autres nucléosides. Elle permet de positionner le
GMP pour une attaque nucléophile sur le site d'épissage en 5'.
L'alignement du site d'épissage est réalisé par l'appariement d'une séquence riche en
pyrimidine de l'exon en 5' avec une séquence guide « IGS » de l'intron (‘Internal Guide
Sequence’).
Le site d'épissage en 3', bien qu'éloigné dans la séquence, est aussi présent dans le site
catalytique pour permettre, lors de la 2ème transestérification, la soudure des 2 exons et la
libération de l'intron.
La réaction conduit à 2 produits : le premier est constitué par les 2 exons correctement
épissés. Le second est libéré. Ce dernier après perte de 19 nucléotides donne un RNA linéaire
(RNA L-19). Cet RNA L-19 contient l'IGS et la poche de fixation du GMP, ce qui suffit pour
lui conférer une activité enzymatique.
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Schémas des étapes de l'épissage des introns de groupe I
Les introns de groupe II quant à eux sont trouvés majoritairement dans les champignons et
dans les mitochondries et chloroplastes de plantes. Leur mécanisme d'auto-épissage se
rapproche plus de mécanisme général de l'épissage des mRNA en ce sens qu'il fait intervenir
la forme "lasso" comprenant une liaison phosphodiester 2'-5'. Néanmoins, à l'instar des
introns de groupe I, les introns de groupe II font intervenir un repliement précis de la structure
pour obtenir une forme catalytique active.
δ- ‘RNA-EDITING’ (CORRECTION DU RNA)
L’expression anglaise « RNA-editing » est le plus souvent traduite par ‘édition du RNA’, ce qui
est en fait inexact. ‘to edit’ en anglais signifie ‘corriger une épreuve avant l’impression finale’
DEFINITION : Le ‘RNA
éditing’ concerne tout
traitement
du
mRNA
aboutissant à un mRNA
dont la séquence diffère de
celle du brin de DNA sens :
addition,
suppression,
substitution d’une ou de
plusieurs
nucléotides.
L’excision d’introns est,
bien évidemment, exclue de
cette définition.
Ces modifications peuvent
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avoir une incidence considérable sur l'expression des gènes. Par exemple, chez l'Homme, le
remplacement de C par U modifie la séquence de certains mRNA de l'apolipoprotéine B et
provoque l'apparition d'un codon stop prématuré. De ce fait, la protéine synthétisée à partir
des mRNA “modifiés” sera environ deux fois plus courte. Un même gène peut donc donner
naissance à deux mRNA différents, traduits en apoB100 dans le foie ou en apoB48 dans
l'intestin (Greeve et al [1993]).
5. TRANSPORT DU mRNA VERS LE CYTOPLASME
Consécutivement à ces différentes étapes, le mRNA mature d'un eucaryote est composé de
séquences exons et contient trois parties :
1. une région 5' ‘non traduite’ portant une coiffe,
2. une région ‘traduite’ débutant par un « codon d'initiation » de la traduction
AUG et se terminant par un « codon stop »,
3. une région 3' ‘non traduite’ se terminant par une queue poly A.
Chez les eucaryotes, la transcription et la traduction se déroulent dans deux compartiments
différents puisque la première a lieu dans le noyau et la seconde dans le cytoplasme. La
continuité entre le noyau et le cytoplasme est assurée par les « pores nucléaires ». Les
structures multi-protéiques de ces pores nucléaires, ancrées dans la membrane, se comportent
comme des sites de transport actif permettant les échanges macromoléculaires entre le noyau
et le cytoplasme.
L’enveloppe nucléaire renferme l’ADN et défini le
compartiment nucléaire. Elle est formée de 2
membranes concentriques qui se continuent avec le
réticulum endoplasmique. Bien que la membrane
interne et externe du noyau soit continue, les deux
membranes ont une composition en protéines
différentes.
Le trafic bidirectionnel entre le cytoplasme et le
noyau est incessant. La plupart des protéines qui ont
une fonction dans le noyau (incluant les histones, les
ADN et ARN polymérases, les protéines régulateurs
de gènes, les protéines permettant les traitements de
des RNA) sont sélectivement importées du cytosol où
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elles ont été synthétisées vers l’intérieur du compartiment nucléaire. Dans le même temps, les
tRNA et mRNA qui ont été synthétisés dans le noyau sont eux exportés vers le cytoplasme.
Comme le processus d’importation, le processus d’exportation est sélectif : les mRNA, par
exemple, sont exportés seulement après qu’ils aient été modifiés correctement. Les protéines
fixées sur les mRNA au niveau du noyau ne sont pas toutes exportées vers le cytoplasme.
Certaines sont strictement nucléaires et se détachent du mRNA avant le transit par les pores
nucléaires et d’autres restent liées au mRNA et peuvent jouer un rôle important dans le
transport vers le cytoplasme et l’initiation de la traduction.
Dans certain cas, le processus de transport est complexe : les protéines ribosomales, par
exemple, sont synthétisées dans le cytosol, importées dans le noyau (où elles sont assemblées
en particules avec des rRNA nouvellement synthétisés) et ensuite réexportées vers le
cytoplasme en tant que sous-unité ribosomale. Chacune de ces étapes implique un transport
sélectif au travers de la membrane nucléaire.
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