le petrole a prix casse – saison 2

publicité
LE PETROLE A PRIX
CASSE – SAISON 2
10 février 2016




En 2016, contrairement à 2015, la
chute des prix du pétrole aura un
impact globalement négatif sur
l’économie.
Deux conséquences majeures :
déséquilibres dans les émergents,
notamment au Brésil (dette publique
à 86% du PIB en 2017) et hausse
des défauts sur le High Yield US (à
7,8%).
Impact négatif sur le secteur du
pétrole, des banques, des matériaux
de construction et des support
services.
Impact positif sur BTP/concessions,
les
compagnies
aériennes,
l’agroalimentaire, le tourisme et
l’automobile.

www.research.natixis.com
BANQUE DE GRANDE CLIENTELE / ÉPARGNE & ASSURANCE/ SERVICES FINANCIERS SPÉCIALISÉS
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Sommaire
Résumé – conclusion
4
1. La baisse des prix du pétrole n’est plus une bonne nouvelle pour l’économie mondiale
6
Comment expliquer un prix du baril sous les 30 $ ?
6
La baisse du baril est-elle tirée par la demande ou par l’offre ? Une réponse par l’économétrie
12
Pourquoi la nouvelle baisse du prix du pétrole réduit désormais la demande mondiale et déstabilise
les marchés financiers ?
15
2. Quels impacts sur l’économie américaine et les taux de défaut du HY ?
23
Quelles conséquences d’un pétrole bas pour l’économie américaine ? Consommation, investissement,
ventes autos…
23
28
3. Quels impacts sur le risque émergent ?
Vers une crise de la dette ? Si oui, de quel type ?
28
Le niveau des spreads souverains des pays émergents tient-il suffisamment compte de la déroute
des matières premières ?
33
Taux de change : un impact négatif sur la plupart des devises à l’exception du dollar
36
38
4. Un marché de la dette sous forte pression
En fondamental, est-ce grave docteur ?
39
Quel risque de défaut dans le HY Oil & Gas US en 2016 ?
45
Quelle valorisation des crédits Oil & Gas ?
47
Quels impacts sur le marché High Yield ?
49
5. La baisse du pétrole sera-t-elle un jour un soutien pour les actions ?
52
6. Quels secteurs seront les gagnants ?
55
BTP / Concessions : un impact globalement positif
55
Aéronautique : un pétrole à 30 $, une aubaine pour l’aérien
57
Automobile: globalement positif
59
Food-HPC : un double tailwind surtout pour Unilever
63
Tourisme : impact positif
66
Médias : peu d’impact à part pour Ubisoft
67
Biens d’équipement électriques : l’exposition industrielle pèse
69
Utilities : peu ou pas d’impact en 2016
70
72
7. Les secteurs les plus touchés
Pétrolières intégrées : des ajustements toujours plus difficiles
72
Tubistes : les yeux sur le cash-flow
75
Services pétroliers : s’il ne devait en rester qu’un
78
Banques : plus de peur que de mal ?
79
Matériaux de Construction : pas d’euphorie
82
Support Services : prudence sur les Bases-vie
86
10 février 2016
3
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Résumé – conclusion
Sylvain Broyer
+49 699 7153 357
[email protected]
Thibaut Cuillière
+33 1 58 55 80 56
[email protected]
Stéphane Houri
+33 1 58 55 03 65
[email protected]
En 2016, contrairement à 2015, la baisse des cours du baril va devenir défavorable à
l’économie mondiale et cela pour trois raisons essentiellement : 1/ les pays exportateurs de
pétrole réduisent leurs investissements en actifs financiers et se remettent à épargner, ce qui
déstabilise les marchés et réduit les exportations des pays de l’OCDE, 2/ les pays importateurs
de pétrole, principalement le G7 et l’Asie émergente, consomment moins qu’avant le revenu
supplémentaire qu’ils tirent de la baisse des cours et 3/ la chute du baril a été si violente qu’elle
devrait entraîner une forte remontée du taux de défaut des sociétés dans le secteur de
l’énergie, fortement représenté sur le marché du crédit aux US.
Quels sont les impacts sectoriels de ce scénario sur le pétrole à prix cassé ?
-
Les secteurs les plus pénalisés sont évidemment le secteur pétrolier (services et
intégrés), les bancaires, les matériaux de construction et les support services. Dans ce
contexte, sont impactés négativement : Eurotunnel, Salini Impregilo, Compass ou
Sodexo.
-
L’impact est globalement neutre pour les utilities, bien que la lecture en soit négative
notamment pour E.ON, EdF, Engie, Fortum ou Vattenfall. Il est aussi neutre pour le
secteur des biens d’équipements électriques (avec une nette préférence pour Legrand vs
Schneider) et celui des médias (avec l’impact positif des devises comme le CAD pour
Ubisoft).
-
A contrario, certains secteurs bénéficient globalement de cette situation, notamment les
BTP/concessions, les compagnies aériennes, l’agroalimentaire, le tourisme et l’automobile.
Renault, Faurecia, Plastic Omnium, Carnival, MTU, Elior font partie des principales
valeurs que nous recommandons à Acheter dans ce contexte (cf. tableau ci-dessous pour
plus de détail)…
Tableau 1 : Impacts sectoriels
Crédit
BTP / Concessions
Equity Impact secteur
x
Positif
Recommandations
Eiffage, Vinci, ADP (+)
Eurotunnel, Salini (-)
Commentaires
Positif pour Autoroutes et aéroports (effet trafic), neutre
Contracting dans l'ensemble
Compagnies Aériennes
x
Positif
MTU, Airbus, Thalès, Dassault (+)
Impact favorable sur la rentabilité, hausse du trafic
Neutre pour la défense
Automobile
x
Positif
Faurecia, Plastic Omnium, Renault (+)
Impact favorable sur le mix, dans une moindre mesure sur la
demande
Food-HPC
x
Positif
Unilever (+)
Impact positif sur la consommation dans les pays matures +
marges, qui fait plus que compenser l'effet négatif sur le prix
Tourisme
x
Positif
Carnival, TUI, Thomas Cook (+)
Fortement positif pour les croisiéristes, dans une moindre
mesure pour les tour-opérateurs
Médias
x
Neutre
Ubisoft, Publicis, Mediaset (+)
Effet devise positif pour la production au Canada dans le cas
d'Ubisoft
x
Neutre
E.ON, EdF, Engie, Fortum, Vattenfall (-)
Négatif électriciens à moyen terme, plus mitigé pour les
gaziers
Neutre
Legrand (+)
Schneider (-)
Effet négatif sur l'investissement des entreprises, mais positif
sur la consommation des ménages dans les pays matures
Utilities
x
Biens d'équipement électriques
x
Pétrolières intégrées
x
Négatif
Total, Schoeller Bleckmann (+)
Sous-performance des tubistes
Services Pétroliers
x
Négatif
Technip, GTT (+)
Tecnicas Reunidas (=)
Préférer l'onshore à l'offshore
x
Négatif
DNB (-)
Revenus en baisse, coût du risque en hausse, augmentation
risque pays
Matériaux de Construction
x
Négatif
Saint-Gobain, CRH (+)
Préférence aux valeurs exposées aux pays matures
Répercussions négatives sur les émergents plus fortes que
l’impact positif de la baisse de la facture énergétique
Support Services
x
Négatif
Elior (+)
Compass (-)
Exposition au segment des bases-vie
Banques
x
Source : Natixis
10 février 2016
4
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Nous voyons 2 conséquences majeures à cette situation inédite :
D’une part, nous estimons que la probabilité d’une crise de la dette chez les émergents
exportateurs de matières premières (14,7% du PIB mondial) n’est plus nulle, soit par
insuffisance des réserves de changes (Argentine, Venezuela, Turquie), soit par difficultés de
paiement sur les dettes corporate en devise étrangère (dollar notamment), soit parce que la
dette publique se voit jetée sur une trajectoire insoutenable (Brésil).
D’autre part, nous anticipons une hausse du taux de défaut sur le segment HY Oil & Gas
aux Etats-Unis à fin 2016 à 22,7%, ce qui se traduirait par une forte augmentation du taux de
défaut HY US tous secteurs confondus à 7,8%. Cette évolution n’est, selon nous, pas encore
pleinement valorisée dans les spreads de crédit HY $. En revanche, les spreads de crédit HY
€ valorisent mieux cette poussée de fièvre attendue sur les taux de défaut et nous semblent
plus attractifs que le segment du HY en $ d’un point de vue rendement / risque.
Pour autant, tout n’est pas noir. La bonne nouvelle est que les cours du pétrole semblent
avoir atteint un plancher et nous nous attendons à une remontée vers les 38 $ pour le
WTI en fin d’année. En effet, 60% de la baisse des cours s’explique par l’offre pléthorique
entretenue par l’OPEP. L’année dernière, les Capex des producteurs hors OPEP ont baissé de
200 Md$, ce qui se traduira par une baisse de leur production de 660 000 b/j en 2016. Le
surplus mondial se réduira ainsi à 1,4 Mb/j. Aussi, effet collatéral de la nouvelle baisse des
cours, la Fed sera dans l’impossibilité de remonter plus de deux fois les taux cette année.
Ceci freinera les dépréciations du change dans les pays émergents. La dégradation des
spreads EMBI enfin n’est pas en retard sur celle des fondamentaux, même s’il est évident que
leur ouverture va s’accentuer avec la hausse prévisible des ratios de dette.
10 février 2016
5
CROSS EXPERTISE RESEARCH
1. La baisse des prix du pétrole n’est plus une
bonne nouvelle pour l’économie mondiale
Abhishek Deshpande
+44 20 32 16 92 23
Comment expliquer un prix du baril sous les 30 $ ?
[email protected]
Le baril de Brent a atteint moins de 30 $ courant janvier et certains pétroles de plus faible
qualité ont même baissé à des cours proches 1,5 $ le baril. Jamais depuis 2003, les cours
n’étaient tombés aussi bas. Comment en est-on arrivé là ? Nous regardons les différents points
de la demande et de l’offre mondiale de pétrole en 2015 et leur évolution pour 2016. Le constat
s’impose : les prix vont rester bas encore longtemps.
La demande mondiale a ralenti en 2015…
La croissance de la demande a été exceptionnelle pendant la majeure partie de 2015, à
+1,7 Mb/j en glissement annuel (GA), mais le rythme a ralenti au cours des derniers mois,
faisant écho à l’affaiblissement de la demande mondiale. Ce ralentissement de la demande de
pétrole sur les derniers mois de 2015 s’observe dans les principales régions du monde :
-
En Chine, la demande était de -1,4% sur un an en décembre, après avoir culminé a +9,7%
en mai. Sur l’ensemble de l’année 2015, la progression de la demande chinoise aura été de
3,2% par an.
-
Aux Etats-Unis, la demande stagnait en décembre (-0,1% en GA), alors qu’elle progressait
encore de +7,2% par an en juin. Sur l’ensemble de l’année, la hausse n’est ainsi que de
3,4% sur un an. Même la demande d’essence a commencé à donner des signes de
faiblesse (+3,4% en 2015) malgré les prix bas.
-
Dans l’UE, après avoir culminé à 3,4% en GA au premier trimestre, la demande de pétrole
n’augmentait plus que 0,6% en octobre, soit 2% en moyenne sur l’année 2015.
-
Même le Moyen-Orient a enregistré un ralentissement : +2,3% au T2 15 avant de revenir à
1,9% au T3, et selon les estimations initiales 2,3% au T4.
Il n’y aura eu finalement qu’en Inde que la demande de produits pétrolier est restée robuste en
2015 : +7,4% en novembre pour les principaux produits déréglementés.
Mais elle continuera à progresser en 2016
En 2016, nous estimons que la demande globale augmentera, mais de seulement 1,1 Mb/j
contre 2,8 Mb en moyenne depuis 2011, avec :
-
+200 000 b/j de demande chinoise, principalement tirée par l'essence, le kérosène et les
autres fractions légères.
-
+200 000 b/j pour les Etats-Unis, selon les prévisions, en 2016, mais elle pourrait s'avérer
sensiblement plus faible en raison des gains d'efficacité croissants et éventuellement d'un
ralentissement de la croissance.
-
+50 000 b/j pour l'UE, en ralentissement vs 2015.
-
+180 000 b/j pour l’Inde.
Outre la consommation domestique de produits pétroliers, la Chine devrait accroître la capacité
de ses stocks stratégiques de 69,2 Mb en 2016 et l'Inde de 29,2 Mb étant donné les retards de
construction de pipelines.
10 février 2016
6
CROSS EXPERTISE RESEARCH
La corrélation entre la demande et les prix du pétrole s’est dégradée depuis fin 2014. Elle est
meilleure avec l’offre, comme nous allons le voir dans la partie suivante.
Graphique 1 :
Correlation: Brent market excess 3 mo lag vs oil price
0,8
Correlation: Brent demand 3 mo lag vs oil price
1
0,6
0,8
0,4
0,6
0,2
0,4
0,2
0
0
-0,2
-0,2
-0,4
-0,4
-0,6
-0,6
-0,8
-0,8
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2010
2011
2012
2013
2014
2015
-1
-1
Source :Natixis
L’offre non OPEP, à la peine en 2015, devrait diminuer en 2016, entrainée par les EtatsUnis…
Du côté de l'offre non OPEP, les Etats-Unis, qui avaient volé la vedette en 2014, ont commencé
à être à la peine. Le nombre d’appareils de forage (rig count pétrolier) a chuté de façon
spectaculaire à 498 fin janvier (-59% sur un an), son plus bas niveau depuis avril 2010. Les
volumes de production ont bien résisté, avec une moyenne de 9,18 Mb/j en décembre 2015. En
moyenne, la production en Amérique du Nord a augmenté de 770 000 b/j en 2015. Pour 2016,
nous prévoyons une contraction de l'offre nord-américaine de plus 500 000 b/j. Nous pensons
qu'environ 1 Mb/j produits par des sociétés non investment grade aux Etats-Unis pourrait être
menacés si l'on commençait à assister à des faillites d'entreprises. Si les sept principaux
bassins de schiste perdaient chacun un forage par mois, la production pourrait diminuer jusqu'à
1 Mb/j en six mois.
L'Amérique du Sud est en bonne voie pour augmenter sa production (+100 000 b/j selon nous),
avec de nouveaux projets au Brésil à partir des structures ante-salifères, et une plus grande
stabilité en Colombie permettant de maintenir la production.
La production européenne a également continué à s'améliorer, en particulier en mer du Nord,
où, pour la première fois depuis 2000, celle du plateau continental britannique a augmenté. Sur
2015, dans son ensemble, la production de BFOE (Brent, Forties, Oseberg et Ekofisk) a
progressé de 4%, malgré l'entretien de plusieurs plates-formes importantes, dont celle de
Buzzard, sur le plateau continental britannique. Les chargements de BFOE sont prévus en
hausse de 14% en GA en janvier 2016. Compte tenu des investissements réalisés, la
production de pétrole des pays européens de l'OCDE augmentera légèrement, de 40 000 b/j,
selon nous.
L’offre russe a également crû en glissement annuel, et le calendrier des chargements pour
décembre 2015 montrait une augmentation de 26% en GA. Pour l'ensemble de l'année 2015,
les chargements de l'Est et de l'Ouest ont en moyenne augmenté de 7,1% par rapport à la
même période en 2014. Aidées par la réduction des coûts due à la dévaluation du rouble, les
compagnies pétrolières russes ont poursuivi la plupart de leurs plans de production et
d'investissement en 2015. En 2016, nous prévoyons que la production russe diminuera de
50 000 b/j, les condensats ne compensant pas la baisse de la production des projets
« brownfield ». Nous attendons également de légers replis au Kazakhstan et en Azerbaïdjan en
2016.
10 février 2016
7
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Tout cela signifie que la production des pays ne faisant pas partie de l'OPEP devrait diminuer
de plus de 660 000 b/j en 2016.
Tableau 1 : Variation de l’offre non-OPEP en 2016
En kb/j
Amérique du Nord
OCDE Europe
Amérique du Sud (hors Chili)
Afrique
FSU
Variation nette
Variation de la demande en 2016
OPEC
IEA
Natixis
-450
-60
+40
-20
-180
-660
-450
-140
+110
-10
-70
-580
-500
+40
+100
-50
-100
-660
En kb/j
OPEC
IEA
Natixis
OCDE
Chine
Amérique du Sud (hors Chili)
Autres Asie (yc Inde)
Moyen-Orient
Variation nette
+170
+290
+120
+320
+180
+1 260
+30
+350
+10
+500
+140
+1 210
+170
+200
+50
+410
+150
+1 100
Sources : Natixis, IEA, OPEC
… et les réductions de Capex et d’Opex des compagnies
Pour les producteurs hors OPEP, les réductions de Capex annoncées en 2015 ont été mises en
place et, ressortent actuellement à plus de 176 Md$ pour les sociétés que nous suivons, soit
une baisse moyenne de 37% par rapport aux budgets 2014 (-38% pour les producteurs US).
Selon Wood Mackenzie, qui couvre un nombre beaucoup plus important de sociétés, les
réductions de Capex représentent plus de 200 Md$. Nous avons également examiné les
réductions d'Opex pour les 14 majors pétrolières. En moyenne, la baisse d'Opex (-12%) est
inférieure à celle du Capex (-27%, sauf chez Petronas, dont le Capex baisse de 15% et l'Opex
de 30%). Dans la plupart des cas, les réductions de Capex affecteront la production de brut
hors d'Amérique du Nord après 2017. En Amérique du Nord, et plus particulièrement aux EtatsUnis, l'impact des baisses de Capex sur la production de pétrole brut est déjà perceptible en
2015, et devrait s’intensifier en 2016. Les réductions de Capex se poursuivront en 2016,
certains grands groupes tels que Shell, ConocoPhillips et Chevron ayant déjà annoncé de
nouvelles coupes. Nous tablons également en 2016 sur une réduction croissante des Opex.
Mais la production de l'OPEP, qui a fortement augmenté, va continuer de croitre
Les objectifs de production ont disparu et la compétition fait rage
En 2015, la production de l’OPEP a augmenté de 1 Mb/j et atteint un pic égal à celui du
e
troisième trimestre 2012. Le 4 décembre 2015, lors de sa 168 réunion, l'OPEP a décidé de
maintenir ces niveaux de production record sans parvenir à trouver un consensus sur les
objectifs de production. L'organisation a déclaré qu'elle continuerait à surveiller le marché et
convoquerait une nouvelle réunion si nécessaire. En l’absence de plafond, certains pays,
comme l'Arabie Saoudite et l'Irak, pourraient continuer à produire des volumes élevés, ce qui
maintiendra la situation d'excédent sur le marché au cours des prochains mois (voir le rapport
e
sur la 168 réunion de l'OPEP).
La production de brut en Arabie Saoudite était proche de 10,1 Mb/j en décembre 2015. L'Arabie
Saoudite, l'Irak, l'Iran, les EAU et l'Angola ont tous augmenté leur production en 2015, et l'Irak
de plus de 28% en novembre 2015. Ces hausses ont été progressives et ininterrompues (sauf
en Angola, où la production a été confrontée à des problèmes sur le terrain), les pays ayant
commencé à entrer en concurrence les uns avec les autres depuis le changement de cap de
l'OPEP.
Cette concurrence se manifeste non seulement dans les augmentations des volumes de
production mais également dans une tarification agressive. La guerre des parts de marché
entre l'OPEP et la Russie s'est également intensifiée, l'Arabie Saoudite ayant réduit son prix de
vente officiel à l'Europe. Selon Reuters, le raffineur suédois Preem a importé du brut d'Arabie
Saoudite pour la première fois depuis deux décennies en décembre. L'Arabie Saoudite est
également en train de prendre des mesures pour lutter contre l'effondrement de ses revenus en
réduisant les subventions sur les carburants et d'autres biens de première nécessité, comme
10 février 2016
8
CROSS EXPERTISE RESEARCH
annoncé le 28 décembre 2015. Dans le cadre d'un programme d'austérité sur 5 ans, le prix de
l'essence a été augmenté de 50% et celui du diesel de 2/3 du jour au lendemain. Les pays
méditerranéens et asiatiques seront les principaux terrains de la guerre des prix pétroliers entre
l'Arabie Saoudite, l'Iran et la Russie.
La levée des sanctions permet le retour de l’Iran
Suite à la levée des sanctions contre l’Iran le 16 janvier 2016, le pays pourra, pour la première
fois depuis plus de 4 ans, commencer à produire et à exporter son pétrole sans limite. Il a
également retrouvé accès aux marchés de capitaux internationaux. La production iranienne a
atteint 2,88 Mb/j en décembre 2015, inférieur de 1 Mb/j à son niveau d’avant les sanctions. Le
gouvernement a affirmé plusieurs fois son intention d’augmenter la production de 500 000 b/j
dans l’immédiat, puis de nouveau de 500 000 b/j au cours des douze mois qui suivront la levée
des sanctions. Ayant de nouveau accès aux assurances internationales, l'Iran sera également en
mesure de réduire son stockage flottant de 46 Mb. Cependant, la rapidité avec laquelle ce
pétrole et ce condensat reviendront sur le marché n’est pas encore connue. Nous continuons de
tabler sur une augmentation progressive de 200 000 b/j à 800 000 b/j entre le T1 16 et le T4 16.
Une stabilisation politique en Libye favoriserait la reconstruction du secteur pétrolier
Par ailleurs, la création d'un gouvernement d'unité nationale (suite à la nomination d’un cabinet
de 32 membres le 16 janvier 2016) permettrait à la Libye de bénéficier d'une législature
internationalement reconnue et autoriserait ensuite l'aide internationale, l'accès aux actifs
bloqués et d'autres aides. La Libye pourrait alors commencer à reconstruire son secteur
pétrolier et à lutter contre l'influence croissance de l'Etat islamique. En décembre 2015, la Libye
a produit 394 000 b/j, soit un niveau très inférieur au 1,5 Mb/j produits avant la mort du colonel
Kadhafi. Selon nous, à court terme, la Libye a peu de chance de pouvoir revenir à ces volumes
historiques, étant donné les dégâts subis par les infrastructures ; toutefois, elle pourrait
accroître sa production de quelque 500 000 b/j si le pays retrouvait une certaine stabilité. La
nouvelle devrait accentuer les pressions baissières s’exerçant sur les prix du pétrole.
Encore un marché excédentaire jusqu’en 2017
Sur la base des fondamentaux actuels, nous prévoyons que les marchés resteront en situation
de surplus jusqu'en 2017, avec une moyenne très supérieure à 1,39 Mb/j en 2016. Alors que
l'Arabie Saoudite réduira, selon nous, sa production de 200 000 b/j d'ici la fin du T2 16 en raison
de la baisse saisonnière de la demande, l'Iran l’augmentera de 500 000 b/j d'ici la fin du T2 16.
En rythme annuel, l'Arabie Saoudite augmentera sa production au T1 d'au moins 200 000 b/j et
l'Iran de 500 000 b/j par rapport au T1 15. Nous n’intégrons pas la Libye et ses 500 000 b/j dans
nos hypothèses de base pour 2016. Dans ce scénario, nous tablons sur une augmentation des
stocks mondiaux de brut bien supérieure à 1 Mb d'ici fin 2016.
Graphique 2 : Equilibre physique sur le marché mondial du pétrole en 2016 (en Mb/j)
2.5
2.0
1 925
1 755
1.5
1.0
0.865
0.955
T3 16
T4 16
0.5
0.0
-0.5
-1.0
T1 16
T2 16
Production de l’OPEP-Recours à l’OPEP
Croissance de la demande en GA
Croissance de l’offre non-OPEP
Croissance de l’offre OPEP
Sources : IEA, Natixis
10 février 2016
9
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Et nos prévisions de prix pétroliers sont une nouvelle fois revues à la baisse
Au regard de la levée des sanctions contre l'Iran, les révisions de l'AIE observées dans son
dernier rapport mensuel suggèrent une augmentation de l’offre excédentaire de brut au cours
des derniers mois (cf. graphique 2). L’offre devrait rester excédentaire au moins jusqu’en 2017
et, compte tenu de la formation d’un gouvernement d'union nationale en Libye qui permettrait le
retour de sa production, nous révisons une nouvelle fois nos prévisions à la baisse sur le
prix moyen du Brent de 4 $/b à 35,5 $/b pour 2016 et de 9 $/b à 46 $/b pour 2017. Le prix
du Brent devrait, selon nous, rester sous pression dans les prochains mois. Les capacités de
stockage de pétrole onshore devraient en effet être testées à l’échelle de la planète, l’offre
excédentaire, en se maintenant au même niveau, pourrait obliger un déplacement du brut des
supertankers (stockage pétrolier en mer) et augmenter les pressions sur l'extrémité courte de la
courbe des prix futurs du Brent. Dans cette hypothèse, le Brent pourrait revenir à 20 $/b. En
revanche, le prix moyen du WTI devrait s’établir à 34,3 $/b (prévision revue en baisse de
3 $/b) en 2016, puis à 44 $/b (prévision revue en baisse de 9 $/b) en 2017. Si le WTI se traite
actuellement avec une prime en raison de la pression exercée sur le Brent par le retour de
l’Iran, du ralentissement de la production américaine et de la levée de l'interdiction des
exportations, nous estimons que l'ouverture des arbitrages de la côte Atlantique et que
l’excédent brut revenant des capacités de stockage de Cushing feront de nouveau passer le
WTI sous le Brent pour tenir compte des coûts de transport du brut de Cushing à la côte du
golfe du Mexique. Toutefois, en raison de la rapidité des changements de tendance, le spread
Brent-WTI sera extrêmement volatil en 2016. Au premier semestre 2016, il devrait rester faible.
La fermeté du dollar devrait également peser sur les cours pétroliers, bien que les corrélations
entre le pétrole et le billet vert semblent instables.
Les tensions actuelles entre l'Arabie Saoudite et l'Iran pourraient ajouter une prime de risque
géopolitique importante, mais seulement si les tensions entre les deux rivaux pétroliers
s'intensifiaient au point de perturber l'offre dans la région. L'Iran et l'Arabie Saoudite produisent
à eux deux 14 Mb/j. Selon nous les deux pays seront très attentifs à ne pas perturber ces flux,
car ils sont très dépendants des revenus du brut.
Tableau 2 : Scénario central 2016
En $/b
2014
2015
WTI (moyenne)
t/t-1 (%)
Brent (moyenne)
t/t-1 (%)
93,6
-5,2
99,8
-7,2
48,8
-47,9
53,5
-46,4
En $/b
2015
2016e
WTI (moyenne)
t/t-1 (%)
Brent (moyenne)
t/t-1 (%)
48,8
-47,9
53,5
-46,4
34,3
-29,8
35,5
-33,6
2016e
T1
29,0
-31,1
30,0
-32,9
T2
33,0
13,8
34,0
13,3
T3
37,0
12,1
38,0
11,8
T4
38,0
2,7
40,0
5,3
Annuel
34,3
-29,8
35,5
-33,6
T4
48,0
4,3
50,0
4,2
Annuel
44,0
28,5
46,0
29,6
Source : Natixis
Tableau 3 : Scénario central 2017
2017e
T1
40,0
5,3
42,0
5,0
T2
42,0
5,0
44,0
4,8
T3
46,0
9,5
48,0
9,1
Source : Natixis
Outre notre scénario central, nous avons également préparé un scénario optimiste et un
scénario pessimiste. Dans l’optimiste, le cours du Brent ressort en moyenne à 42 $/b en 2016 si
les producteurs non membres de l'OPEP (et plus particulièrement les Etats-Unis) réduisent
agressivement leur production. L'intensification des tensions entre l'Arabie Saoudite et l'Iran
devrait entraîner une augmentation des prix du pétrole au-delà de notre scénario de base
10 février 2016
10
CROSS EXPERTISE RESEARCH
optimiste mais il est difficile d'intégrer une telle éventualité. Dans notre scénario pessimiste,
nous prévoyons en moyenne le Brent à 29 $/b en 2016 si l'OPEP produit plus que prévu ou
accroît ses capacités de production et que les productions de schistes américaines restent
résilientes. Dans ce cas, le prix du pétrole pourrait rester plus bas jusqu'en 2017. La Libye sera
l'inconnue de 2016, avec la formation d'un gouvernement d'unité nationale et une réunion
imprévue de dernière minute de l'OPEP si la production des Etats-Unis chutait dramatiquement.
Tableau 4: Prévisions des prix du pétrole
En $/b
Scénario pessimiste
WTI
Brent
31 mars 2016e
24
26
30 juin 2016e
24
26
30 septembre 2016e
28
30
31 décembre 2016e
32
34
Scénario central
WTI
Brent
29
30
33
34
37
38
38
40
Scénario optimiste
WTI
Brent
35
36
39
40
43
44
46
48
Source : Natixis
10 février 2016
11
CROSS EXPERTISE RESEARCH
La baisse du baril est-elle tirée par la demande ou par l’offre ? Une
réponse par l’économétrie
Johannes Gareis
+49 (0) 69 97153-354
[email protected]
On a vu que l’offre et la demande de pétrole ont pu contribuer toutes les deux à la baisse
des cours en 2015. Mais quelle est vraiment la part de l’une et de l’autre ? Le déterminer
est important, car de la cause principale découlent des conséquences économiques
différentes. Les conséquences économiques d’une baisse des cours provoquée par une
faiblesse de la demande de pétrole seront assez limitées. En revanche, une baisse du prix du
pétrole qui s’expliquerait par une augmentation de l’offre de pétrole constituerait un choc
exogène sur l'activité économique a priori favorable à la croissance mondiale.
Deux techniques différentes de modélisation économétrique
La première approche consiste à modéliser le prix du pétrole sur des variables liées
principalement à la demande mondiale, en faisant abstraction des facteurs propres au
marché du pétrole. Nous pouvons ainsi facilement isoler l’influence des facteurs liés à la
demande dans la baisse récente du prix du pétrole, les écarts résiduels traduisant alors
l’influence des facteurs d’offre. Plus précisément, nous avons effectué une régression des
variations quotidiennes en pourcentage du prix du Brent en fonction de la variation du
rendement des obligations du Trésor américain à 10 ans, de celle des prix du cuivre, et du taux
de change du dollar américain du 3 janvier 2005 au 30 juin 2014. En général, ces variables
explicatives sont déterminées par la croissance mondiale et sont indépendantes des facteurs
propres à l'offre de pétrole. Nous avons ensuite extrapolé les résultats de cette modélisation
aux observations du prix du pétrole entre le 1er juillet 2014 et le 8 janvier 2016, en tenant
1
compte de l’évolution des mêmes paramètres (graphiques 1 et 2) .
La deuxième approche consiste à démêler les effets des facteurs liés à l'offre de
l’influence de la demande, en partant des similitudes que présentent les évolutions du
2
cours du baril avec les marchés actions . Intuitivement, nous pouvons penser qu’une
contraction de la demande (après un ralentissement de la croissance mondiale par exemple)
pèse à la fois sur les prix du pétrole et sur les cours boursiers. Parallèlement, nous pouvons
anticiper une progression de l’offre de pétrole entraîne un repli de son prix, mais soutient les
cours des actions par une réduction des coûts de l'énergie et par augmentation de la croissance
mondiale. Un rapide coup d'œil à l’évolution des prix du pétrole et à celle des indices actions
suggère que les facteurs liés à la demande ont été déterminants pour expliquer le
comportement du prix du pétrole entre 2005 et 2008 puis fin 2008, lorsque les prix du pétrole et
les actions se sont effondrés. Fin 2014, les prix du pétrole ont toutefois chuté alors que les
marchés actions étaient généralement haussiers, suggérant que des facteurs liés à l’offre ont
influé. La baisse récente des prix du pétrole et des actions, entamée fin 2015, semble de
nouveau s’expliquer par un ralentissement de la demande (graphique 3).
Pour mesurer séparément les effets des facteurs liés à l'offre et l’influence de la demande dans
l’explication de la chute récente du prix du pétrole, nous avons utilisé un modèle vectoriel
autorégressif structurel avec restrictions de signe. Nous avons estimé ce modèle à partir de
l’observation quotidienne des variations en pourcentage du prix du pétrole et de l’indice S&P
500 Composite du 3 janvier 2015 au 8 janvier 2016. À partir de cette estimation, nous
expliquons l’évolution récente du prix du pétrole en fonction de chocs sur la demande et sur
l’offre sur le marché du pétrole sous restrictions du signe de la variation des prix du pétrole et
des actions qui ont suivies (graphique 4). Les restrictions de signe permettant d'identifier les
chocs dans le modèle sont simples. Elles se définissent de la manière suivante : un choc de
demande sur le pétrole entraîne une variation des prix du pétrole et des actions de même
signe, alors qu'un choc d'offre sur le pétrole conduit à une corrélation négative entre les prix du
pétrole et les cours des actions.
Cette approche a également été retenue par Hamilton (2015), « Demand factors in the collapse of oil prices », Econbrowser, janvier 2015.
Voir aussi Banque mondiale (2015), « The great plunge in oil prices: Causes, consequences and policy responses », mars 2015 et FMI (2015),
« Global Implications of lower oil prices », juillet 2015.
1
2
10 février 2016
12
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 1 : Prix observé du Brent et prévisions du
modèle1 (en $/b)
Graphique 2 : Variations journalières cumulées des prix du
pétrole (log, en %)1
120
120
100
100
80
80
60
60
40
40
20
20
07/14
0
0
0
01/14 04/14 07/14 10/14 01/15 04/15 07/15 10/15 01/16
Prévisions du modèle
10/14
01/15
04/15
07/15
10/15
01/16
0
-25
-25
-50
-50
-75
-75
-100
-100
-125
-125
-150
-150
Prix du pétrole
Demande
Offre
Observées
Les résultats sont basés sur une régression à partir des prix du cuivre, du rendement des obligations du Trésor américain à 10 ans et du taux de
change du dollar américain.
1
Sources : Datastream, Natixis
Graphique 3 : Prix du pétrole et marchés actions
Graphique 4 : Variations journalières cumulées des prix du
pétrole (log, en %)2
160
2250
140
2000
120
1750
-25
-25
100
1500
-50
-50
80
1250
-75
-75
60
1000
-100
-100
40
750
-125
-125
20
500
-150
-150
05
06
07
08
09
10
Prix du pétrole brut Brent (G)
11
12
13
14
15
07/14
0
16
Indice S&P Composite (D)
10/14
01/15
04/15
07/15
10/15
01/16
0
Demande
Offre
Observées
Régression à partir d’un modèle vectoriel autorégressif structurel à 2
variables avec restrictions de signe.
2
Source : Datastream
Sources : Datastream, Natixis
Quelle est l’influence des facteurs de demande et d’offre dans l’explication de la baisse
récente du prix du pétrole ?
Les résultats sont immédiats. Les deux modèles indiquent que l’essentiel de la baisse du prix
du pétrole observée jusqu'à récemment s’explique par les facteurs d'offre. Plus précisément,
les résultats du modèle suggèrent que dans l’explication du recul du prix du pétrole
depuis juillet 2014, l’évolution de l’offre de pétrole est pratiquement deux fois plus
déterminante que le comportement de la demande (40% pour les facteurs de demande,
60% pour les facteurs d'offre). Autrement dit, sur la baisse du prix du pétrole de 80 $ observée
depuis juillet 2014, environ 50 $ découlent de facteurs liés à l’offre de pétrole.
10 février 2016
13
CROSS EXPERTISE RESEARCH
S’agissant de la baisse la plus récente du prix du pétrole, depuis fin 2015, les modèles
suggèrent qu’elle s’explique à la fois par des facteurs d'offre et de demande. Les estimations du
modèle n’indiquent toutefois pas que les contributions relatives aux variations du prix de pétrole
ont évolué. La baisse actuelle des prix du pétrole s’explique donc toujours de façon
prépondérante par les facteurs d’offre.
Globalement, les résultats indiquent que l’évolution de l’offre de pétrole a expliqué 60%
de la baisse du prix du pétrole observée depuis mi-2014, contre 40% pour les facteurs
plus généralement liés à la demande.
10 février 2016
14
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Pourquoi la nouvelle baisse du prix du pétrole réduit désormais la
demande mondiale et déstabilise les marchés financiers ?
Patrick Artus
+33 1 58 55 15 00
[email protected]
Une baisse du prix du pétrole réduit aujourd’hui la croissance mondiale
Nous venons de montrer que la baisse du prix du pétrole depuis 2014 (graphique 1) est
due avant tout à l’apparition d’un excès de production mondiale du pétrole. Celui-ci est lié à
la nouvelle stratégie des pays de l’OPEP qui consiste à gagner des parts de marché en
produisant davantage et en rendant ainsi, avec les prix plus faibles du pétrole, non profitable la
production de pétrole cher en dehors de l’OPEP (Arctique, sables bitumeux, pétrole de schiste,
deep offshore) ; cette baisse a probablement été renforcée par un motif géopolitique en Arabie
Saoudite.
Graphique 1 : Prix du pétrole (Brent, $/baril)
160
140
120
100
80
60
40
20
0
96
98
00
02
04
06
08
10
12
14
16
Sources : Datastream, Natixis
Regardons le comportement des pays exportateurs et des pays importateurs de pétrole.
Pays exportateurs de pétrole
Lorsque le prix du pétrole est élevé, une baisse du prix du pétrole conduit surtout à une
réduction de l’épargne (donc de l’excédent extérieur, des placements à l’étranger) des pays
exportateurs de pétrole ; mais plus le prix du pétrole devient bas, plus ces pays sont
obligés de réduire leurs dépenses (donc leur importations).
Les graphiques 2 et 3 montrent qu’en 2008/09 et depuis 2014, il y a un fort recul des
importations des pays exportateurs de pétrole. Cette baisse de la demande dans les pays
exportateurs de pétrole va être renforcée à partir de 2016 par la nécessité de réduire leurs
déficits publics (graphique 4). La baisse du prix du pétrole a fait chuter les recettes fiscales de
ces pays (graphique 5) où l’énergie représente une partie très importante des revenus
(graphique 6). La plupart ont d’ailleurs annoncé des baisses de dépenses publiques en 2016
(salaires des fonctionnaires et retraites en Russie, subventions diverses et investissements au
Moyen-Orient), voire des hausses d’impôts (TVA et taxe sur l’essence en Arabie Saoudite) qui
ponctionneront la demande privée.
10 février 2016
15
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 2 : Balance commerciale de l’OPEP + Russie
et prix du pétrole
Graphique 3 : Russie + OPEP : croissance et importations
en valeur
1 400
160
1 600
12
1 200
140
1 400
10
1 000
120
1 200
8
800
100
1 000
6
600
80
400
60
800
4
200
40
600
2
0
20
400
0
200
-2
-200
0
70
74
78
82
86
90
94
98
02
06
10
14
0
-4
70
Balance commerciale de la Russie+OPEP (Md$, annualisé, Ech. G)
74
78
82
86
90
94
98
02
06
10
14
Imoprtations valeur (Md$, annualisée, Ech. G)
Prix pétrole (brent, $/baril, Ech. D)
PIB volumes (GA en %, Ech. D)
Sources: Datastream, Natixis
Sources : Datastream, Natixis
Graphique 4 : OPEP + Russie : déficit public
(en % du PIB valeur)
Graphique 5 : OPEP+Russie : dépenses publiques et
recettes fiscales (en % du PIB valeur)
8
38
38
6
36
36
34
34
32
32
30
30
28
28
4
2
0
-2
-4
-6
26
-8
26
02
03
04
-10
06
07
08
09
Dépenses publiques
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15
Sources : Datastream, Natixis
05
10
11
12
13
14
15
Pression fiscale
Sources : FMI, Natixis
Graphique 6 : Exportations d'énergie (pétrole et gaz, en % du PIB valeur)
70
70
60
60
50
50
40
40
30
30
20
20
10
10
02
03
04
Russie
05
Iran
06
07
Irak
08
09
Algérie
10
11
Nigéria
12
13
14
Arabie saoudite
Sources : Datastream, OMC, Natixis
10 février 2016
16
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Pays importateurs de pétrole
Lorsque le prix du pétrole est élevé, une baisse du prix du pétrole, qui accroît le revenu
réel des pays de l’OCDE, conduit à un supplément de demande. Mais si le prix du pétrole
est bas, une nouvelle baisse, puisque le revenu réel est déjà élevé, ne stimule plus autant la
demande et conduit à une hausse de l’épargne des pays de l’OCDE.
Les graphiques 7 et 8 montrent que la baisse récente du prix du pétrole a bien redressé la
consommation des ménages dans les pays de l’OCDE, mais pas redressé
l’investissement des entreprises malgré la hausse induite de la profitabilité. Il y a donc eu
une épargne importante des revenus, venant non pas des ménages mais des entreprises.
Graphique 7 : OCDE : importations d'énergie et
consommation des ménages
Graphique 8 : OCDE : importations, investissement et
profits
6
6
5
5
4
4
3
3
2
2
1
1
0
0
-1
-1
-2
-2
-3
20
16
12
8
4
0
-4
-8
-12
-16
-3
80
84
88
92
96
00
04
08
12
20
16
12
8
4
0
-4
-8
-12
-16
70 73 76 79 82 85 88 91 94 97 00 03 06 09 12 15
16
Importations d'énergie (en % du PIB valeur)
Investissement productif (volume, GA en %)
Profits après taxes, intérêts et avant dividendes (en % du PIB valeur)
Importations d'énergie (en % du PIB valeur)
Consommation des ménages (volume, GA en %)
Sources : Datastream, BEA, BCE, ONS, CAO, Natixis
Sources : Datastream, BEA, ONS, Eurostat, CAO, Natixis
De ce fait, une nouvelle baisse du prix du pétrole en 2016 réduirait la croissance
mondiale, la baisse de la demande (Etat, ménages, entreprises) dans les pays exportateurs de
pétrole l’emportant sur le soutien de la demande (ménages) dans les pays importateurs de
pétrole.
La baisse du prix du pétrole reste néanmoins favorable aux pays de l’OCDE : l’exemple
de la zone Euro.
Baisse du prix de l’énergie, baisse de l’inflation
Le graphique 9 montre l’évolution des importations d’énergie de la zone Euro.
Graphique 9 : Zone Euro : importations d'énergie (en valeur)
6
600
5
500
4
400
3
300
2
200
1
0
100
02
03
04
05
06
07
08
09
En % du PIB valeur (G)
10
11
12
13
14
15
16
En Mds € par an (D)
Sources : Datastream, Eurostat, Natixis
10 février 2016
17
CROSS EXPERTISE RESEARCH
La baisse du prix du pétrole depuis 2014 a réduit les importations d’énergie de 1,8 point de
PIB : ce gain a été limité par la dépréciation de l’euro vis-à-vis du dollar sur la même période.
Ceci constitue un supplément de revenu réel associé à la baisse de l’inflation pour les
ménages de la zone Euro (graphique 10).
Graphique 10 : Zone Euro : salaire et revenu disponible réel (déflaté par le prix consommation, GA en %)
4
4
3
3
2
2
1
1
0
0
-1
-1
-2
-2
02
03
04
05
06
07
08
09
10
Salaire réel par tête
11
12
13
14
15
16
Revenu disponible réel
Sources : Datastream, BCE, Natixis
Ceci implique aussi, avec la baisse du coût de l’énergie, une hausse des profits des
entreprises de l’ordre de 0,5 point de PIB (graphique 11).
Graphique 11 : Zone Euro : profits après taxes, intérêts et dividendes (en % du PIB valeur)
12.5
12.0
11.5
11.0
10.5
10.0
9.5
02
03
04
05
06
07
08
09
10
11
12
13
14
15
16
Sources : Datastream, Eurostat, Natixis
La baisse de l’inflation est renforcée par le recul de l’inflation sous-jacente qui vient du
freinage des coûts salariaux (graphique 12), et a permis à la BCE de déclencher le
Quantitative Easing, d’où la baisse des taux d’intérêt (graphique 13). L’effet direct positif de la
baisse du prix du pétrole est donc la hausse de revenu réel, et la baisse du taux d’intérêt avec
la politique monétaire expansionniste.
10 février 2016
18
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 12 : Zone Euro : salaire nominal par tête et coût
salarial unitaire (GA en %)
7
7
6
6
5
5
4
4
3
3
2
2
1
1
0
0
-1
-1
-2
-2
Graphique 13 : Zone Euro : taux d'intérêt sur les crédits à
taux fixe aux ménages et aux entreprises (en %)
6
6
5
5
4
4
3
3
2
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Salaire nominal par tête
2
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Ménages
Coût salarial unitaire
Sources : Datastream, Eurostat, Natixis
Entreprises
Sources : Datastream, BCE, Natixis
Dépréciation de l’euro
Une baisse du prix du pétrole est associée à une dépréciation de l’euro vis-à-vis du
dollar (graphique 14), probablement parce que les pays exportateurs de pétrole, si le prix du
pétrole baisse, ont moins de revenus pétroliers en dollars, alors qu’ils placent en euros une
partie de leurs excédents.
La dépréciation de l’euro est aussi renforcée par la politique monétaire plus expansionniste
menée par la BCE en raison de la baisse de l’inflation.
Graphique 14 : Taux de change du dollar par rapport à l'euro et prix du pétrole
1.6
160
1.5
140
1.4
120
1.3
100
1.2
80
1.1
60
1.0
40
0.9
20
0.8
0
02
03
04
05
06
07
08
Taux de change (1€ = … $, G)
09
10
11
12
13
14
15
16
Prix du pétrole (Brent, $ / baril, D)
Sources : Datastream, Natixis
La dépréciation de l’euro soutient la compétitivité et les exportations de la zone Euro, mais cet
effet s’est révélé être faible (graphique 15), les entreprises de la zone Euro ayant préféré
redresser leurs marges bénéficiaires qui sont basses (graphique 16), plutôt que d’accroître
leurs exportations en volume.
10 février 2016
19
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 15 : Exportations et commerce mondial
(volume, GA en %)
Graphique 16 : Zone Euro : taux de marges bénéficiaires
de l'ensemble des entreprises non financières (en %)
20
20
15
15
10
10
5
5
42.0
0
0
41.5
-5
-5
-10
-10
-15
-15
-20
-20
-25
-25
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Zone euro : exportations hors intra
Commerce mondial
43.0
42.5
41.0
40.5
40.0
39.5
39.0
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Sources : Datastream, Eurostat, Natixis
Sources : Eurostat, Natixis
La dépréciation de l’euro n’a donc pas eu au total un effet très positif sur l’activité réelle de la
zone Euro.
Baisse des exportations vers les pays exportateurs de pétrole
La baisse du prix du pétrole dégrade bien sûr les économies des pays exportateurs de pétrole
(graphique 17), d’où un recul des exportations de la zone Euro vers ces pays (graphique
18) de 0,6 point de PIB, qui consomme un tiers de la baisse de la valeur des importations
d’énergie de la zone Euro.
Graphique 17 : OPEP + Russie : PIB en volume (GA en %)
10
Graphique 18 : Zone Euro : exportations vers Russie et
OPEP (valeur)
250
2.5
8
200
2.0
6
150
4
1.5
2
100
0
50
1.0
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
-2
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Sources : Datastream, Natixis
En mds d'euros (annualisées, G)
En % du PIB valeur (D)
Sources : Datastream, BCE, Natixis
10 février 2016
20
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Dégradation des marchés financiers
La baisse du prix du pétrole a fortement dégradé la situation du secteur de l’énergie, en
particulier aux Etats-Unis : chute de l’investissement (graphique 19), hausse du risque de
défaut donc des spreads de crédit (graphique 20).
Graphique 19 : Etats-Unis : investissement du secteur de
l'énergie (GA en %, valeur)
Graphique 20 : Etats-Unis : spread de crédit du secteur de
l'énergie (en pb, asset swap)
60
600
40
500
20
400
0
300
-20
200
-40
100
-60
0
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Sources : Datastream, BEA, Natixis
Sources : Datastream, Natixis
Ceci fait apparaître une hausse forte de l’ensemble des spreads de crédit aux Etats-Unis
et, par contagion, dans la zone Euro (graphique 21).
Graphique 21 : Zone Euro : spreads de crédit (asset swaps, en pb)
1 750
1 750
1 500
1 500
1 250
1 250
1 000
1 000
750
750
500
500
250
250
0
0
02
03
04
05
06
07
08
09
BBB
10
11
12
13
14
15
16
High Yield
Sources : Datastream, Natixis
La dégradation de la situation des entreprises pétrolières, des services pétroliers, des
industries liées (métallurgie) explique aussi une partie du recul des cours boursiers de la
zone Euro (graphique 22) depuis le printemps 2015.
10 février 2016
21
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 22 : Indice EuroStoxx (100 en 2002)
160
160
140
140
120
120
100
100
80
80
60
60
40
40
02
03
04
05
06
07
08
09
Total
10
11
12
13
14
15
16
Compagnies pétrolières
Sources : Datastream, Natixis
La dégradation des marchés financiers de la zone Euro liée ainsi à la baisse du prix du pétrole
génère une hausse du coût du capital pour les entreprises et un effet de richesse négatif.
Au total, nous observons que la forte baisse du prix du pétrole :
-
Accroit les revenus réels des ménages et les profits des entreprises de la zone Euro,
lesquels sont surtout thésaurisés et pas investis.
-
Conduit à une dépréciation de l’euro et à une baisse des taux d’intérêt.
-
Mais fait apparaitre un recul des exportations de la zone Euro vers les pays exportateurs de
pétrole.
L’effet net total de la baisse du pétrole est positif, mais seulement faiblement. De là on
comprend que les marchés financiers appréhendent la nouvelle baisse du prix du pétrole. La
baisse du prix du pétrole, d’après nous :
-
Dégrade la situation de l’économie mondiale.
-
Améliore (assez faiblement) la situation des pays de l’OCDE.
-
Dégrade bien sûr la situation du secteur pétrolier, ce qui contribue à l’élargissement des
spreads de crédit et au recul des marchés boursiers.
Ainsi, même si la croissance des pays de l’OCDE est accrue, ce bilan complexe explique
l’incertitude de la réaction et la volatilité des marchés financiers des pays de l’OCDE.
Nous détaillons maintenant notre analyse des effets de la baisse du pétrole sur l’économie et
les marchés des Etats-Unis.
10 février 2016
22
CROSS EXPERTISE RESEARCH
2. Quels impacts sur l’économie américaine et les
taux de défaut du HY ?
Thomas Julien
+1 212 8916219
[email protected]
Quelles conséquences d’un pétrole bas pour l’économie américaine ?
Consommation, investissement, ventes autos…
Suite à la révision de nos attentes sur les prix du pétrole, nous analysons ses conséquences
sur l’économie américaine, qui sont de trois ordres :
-
Un impact positif sur la consommation des ménages.
-
Des effets négatifs sur le secteur minier et les secteurs qui lui sont liés (transports,
fabrication de métaux) avec potentiellement des risques de défaut.
-
L’impact sur la dynamique d’inflation et donc sur la conduite de la politique monétaire.
Les effets positifs
En guise de point de départ, nous retenons les estimations fournies par le modèle
économétrique de la Fed (le modèle FRB/US) qui indique qu’une baisse permanente de 12
dollars le baril devrait générer un impact positif sur la croissance de près 0,2 point de PIB
américain à horizon d’un an. Cet impact prend uniquement en compte l’effet positif sur la
demande finale et n’inclut pas les effets sur le secteur minier (côté offre). Cependant, il se
pourrait que l’impact d’une baisse des prix du pétrole ne se répercute pas entièrement sur la
consommation (le principal canal de transmission). Dit autrement, la propension à épargner les
gains additionnels en pouvoir d’achat pourrait être plus forte. C’est ce que l’on observe sur la
période récente avec une légère hausse du taux d’épargne. Plusieurs explications pourraient
entrer en ligne de compte : hystérésis des habitudes de consommation, épargne de précaution
dans un contexte de hausse des incertitudes... Même une fois pris en compte ce facteur,
l’impact sur la consommation devrait se situer entre +0,1/0,2 point de PIB sur l’année 2016.
Graphique 1 :
Etats-Unis : Modèle FRB/US: impact cumulé d’une baisse
permanente des prix du pétrole de 10 $/baril sur le PIB
(trimestres).
Etats-Unis: consommation, revenu disponible brut réel et
taux d'épargne
0.20
10
10
0.18
8
8
0.15
6
6
4
4
2
2
0
0
-2
-2
0.13
0.10
0.08
0.05
-4
-4
06
0.03
0.00
1
2
3
Sources : FRB/US, Natixis
4
5
6
7
8
08
10
Taux d'épargne
12
14
16
Consommation réelle
Revenu réel
Sources : BEA, Natixis
D’un point de vue sectoriel, la demande d’automobiles pourrait de nouveau bénéficier de la
baisse des prix de l’essence, puisque les ventes de voitures sont en général inversement
corrélées à l’évolution des cours du pétrole. A noter également, que, quand le prix de l’essence
est bas, les ménages américains ont tendance à acheter des voitures plus énergivores (SUV,
voitures de luxe). Toutefois, même si les conditions de financement restent avantageuses
10 février 2016
23
CROSS EXPERTISE RESEARCH
(conditions d’octroi de crédit très souples), l’effet de rattrapage observé ces dernières années
pourrait s’essouffler courant 2016 comme le suggère la stabilisation récente de l’âge moyen des
véhicules détenus par les ménages.
Graphique 2 :
Etats-Unis: prix du pétrole et ventes de voitures
Etats-Unis: prix du pétrole et ratio entre ventes de
véhicules sur SUV
600
25
500
30
120
130
110
110
400
100
35
300
90
90
40
200
70
100
45
0
50
80
50
70
30
00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
60
11
Brent (Jan 2000 = 100), G
Part des ventes d'automobiles dans le total des ventes au détail(en
%), D inv.
12
13
14
Brent (Jan 2011 = 100)
15
Auto/light truck (Jan 2011=100)
Source : Datastream
Dans une moindre mesure, la baisse des prix du pétrole devrait également soutenir les marges
des entreprises qui utilisent le pétrole comme input dans leur processus de production. Le
secteur de l’aviation pourrait à nouveau bénéficier de la baisse de ses coûts variables qu’il ne
semble pas avoir totalement répercutée sur le consommateur final.
Toutefois, comme nous l’avons souligné précédemment, cette fois-ci une part non négligeable
de la baisse des cours du pétrole s’explique aussi par une dégradation des perspectives de
demande mondiale. Ce constat ne devrait pas inciter les entreprises à augmenter les dépenses
en investissement productif.
Graphique 3 :
Etats-Unis: part du pétrole et du gaz naturel dans le total
des input par industrie (en %)
5
10
15
20
Etats-Unis: prix du carburant et tarifs des billets d'avions
100
25
20
Produits pétroliers
75
Transport aérien
Transport maritime
50
10
Transport routier
77%
25
0
0
Transport ferroviaire
Utilities
-25
-10
-50
Produits chimiques
Transports de passagers
Collectivités locales
Minier hors pétrole et gaz naturel
Sources : BEA, Natixis
-20
-75
08
09
10
11
12
13
Prix des billets d'avions (CPI), G
14
15
16
Jet fuel (PPI), D
Source : Datastream
Au total, l’impact positif sur la croissance devrait approcher 0,2 point PIB sur l’année
2016.
10 février 2016
24
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Les effets négatifs : Houston on a un problème !
Les effets positifs mentionnés ci-dessus devraient se trouver presque entièrement compensés
par une nouvelle dégradation de l’activité dans le secteur minier et les secteurs liés.
Concernant les effets directs, la baisse du prix des matières premières devrait à nouveau
impacter les dépenses en investissement du secteur minier. L’investissement en infrastructures
minières évolue en ligne avec le nombre de puits de forages, en chute libre depuis la fin 2014.
Cette chute devrait soustraire 0,5 point de PIB sur l’année 2015 et, en se basant sur nos
prévisions de prix du pétrole, encore 0,1 point de PIB en première partie d’année 2016.
L’impact d’une nouvelle baisse des cours du brut devrait être marginalement moins forte
puisque la part de l’investissement minier dans l’investissement total en structure est déjà
retombée sur son niveau d’avant boom de l’exploitation du pétrole de schiste en 2009. L’impact
sur le marché de l’emploi devrait être également faible puisque ce secteur occupe une place
limitée dans l’emploi total (0,5% des emplois hors agriculture).
Graphique 4
Etats-Unis: investissement en structures minières et
appareils de forage (GA, en %)
Etats-Unis: part de l'investissement minier dans le total de
l'investissement en structure (en %)
80
80
33
60
60
30
40
40
20
20
0
28
0
25
-20
-20
23
-40
-40
-60
-60
-80
-80
00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Investissement dans le secteur minier
20
18
15
13
Appareils de forage
00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Sources : BEA, Baker Hugues
Source : BLS
Certains secteurs pourraient également souffrir du ralentissement de l’activité dans le secteur
minier. Parmi la liste des industries dont l’activité est exposée, se retrouvent en première ligne
les secteurs spécialisés dans le transport de pétrole et de gaz (pipeline et transport par train).
Toutefois, il faut noter que la production de brut reste robuste et que, pour le moment, la
demande pour le transport de pétrole devrait rester forte. Ensuite, la baisse du nombre de puits
de forage devrait à nouveau impacter la demande de métaux (primaires et transformés) et la
demande de machines qui dépendent également en partie de l’activité dans le secteur minier.
Graphique 5 :
Etats-Unis: transport de pétrole par train
(miliers baril/jour)
1200
Etats-Unis: puits de forage et production de pétrole
domestique
10000
2500
9000
1000
2000
8000
800
600
7000
1500
6000
1000
5000
500
4000
400
3000
0
05
200
06
07
08
09
10
11
12
13
14
15
16
Production de pétrole domestique (1000 B/D), G
0
10
Source : EIA
11
12
13
14
15
Puits de forage, D
Source : Datastream
10 février 2016
25
CROSS EXPERTISE RESEARCH
L’impact négatif sur la croissance devrait également approcher 0,2 point de PIB et
viendrait donc compenser les effets positifs mentionnés précédemment. En net, l’impact
sur la croissance devrait être neutre.
Risque de défaut massif ?
Le recul des prix du pétrole pourrait également impacter l’économie américaine via un canal
indirect de dégradation des conditions de financement.
Les acteurs du secteur minier onshore américain sont nombreux, il est donc difficile de dresser
un panorama agrégé exhaustif. L’EIA offre tout de même un éclairage sur l’évolution récente
des conditions financières dans le secteur : malgré la forte baisse des coûts opérationnels de
production, la chute des cours du pétrole a réduit les revenus commerciaux. En conséquence,
les producteurs de brut onshore ont réduit leurs dépenses d’investissement (comme illustré cidessus) et augmenté leur dette.
Cette accumulation de dette se traduit aujourd’hui par une hausse marquée de la charge de la
dette pour ces producteurs. Avec l’ouverture des spreads de crédit sur le segment High Yield, il
devient de plus en plus coûteux pour ces producteurs de refinancer leur dette. Les producteurs
qui utilisent du financement de type crédit bancaire font également face au risque de
réévaluation (deux fois par an) de leurs réserves qui servent de collatéral aux prêts.
Il existe donc un risque de hausse des défauts (et de restructuration) dans ce secteur qui
pourrait avoir des répercussions sur les autres secteurs (effets de contagion) ainsi que sur les
acteurs financiers exposés. Le montant des dettes agrégé (autour de 350 Md$ selon les
différentes estimations) ne paraît toutefois pas poser de risque systémique majeur.
Graphique 6 :
Etats-Unis: cashflow des producteurs de pétrole onshore
(Md$, ra)
60
0.9
40
0.6
20
0.3
0
0
-20
-0.3
-40
-0.6
-60
-0.9
12
13
14
15
Emissions nettes d'actions
Produit de la dette
Remboursement de la dette
Variation nette de la dette
Ratio rembrousement de dette sur cashflow
Sources : EIA, Evaluate Energy
Etats-Unis: Bloomberg high yield corporate bond index
(spread, pts)
20
20
15
15
10
10
5
5
0
août-14
0
nov.-14
févr.-15
mai-15
août-15
nov.-15
Composite
Energy
Industrial
Consumer discretionary
Source : Bloomberg
Quelles conséquences pour la politique monétaire : la Fed veut-elle voir
pour croire ?
La dynamique récente des créations d’emplois (sur une tendance solide) devrait permettre à la
Fed de légitimer une nouvelle hausse des taux lors de la réunion de mars après une pause en
janvier. Cette attente reste toutefois conditionnelle à ce que l’environnement externe ne se
dégrade pas trop (dépréciation du Yuan et sortie de capitaux) et qu’il n’impacte pas trop
fortement les conditions domestiques de financement (baisse des cours boursiers). On l’a bien
vu en septembre, la Fed est adverse à ce type de risque et préfèrera jouer la carte de la
prudence.
10 février 2016
26
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Lors de son dernier discours, J. Yellen a de nouveau rappelé sa croyance en la courbe de
Philips : une amélioration du marché du travail renforce les attentes de retour de l’inflation vers
la cible. Toutefois, les minutes de la réunion de décembre suggèrent que certains membres
pourraient bien ne pas souscrire à cette vue et attendent de voir des signes concrets (« hard
evidence ») de remontée de l’inflation, malgré un large consensus en faveur de cette hausse.
Pas surprenant donc que l’inflation occupe aujourd’hui une place importante dans les
discussions des membres du Comité. Le nombre d’apparition du mot « inflation » dans les
minutes, confirme cette intuition : si avant crise la fréquence des discussions relatives à
l’inflation était positivement corrélée au niveau de l’inflation, c’est aujourd’hui l’inverse.
L’inflation devrait donc jouer un rôle important dans la détermination de l’amplitude du cycle de
resserrement monétaire. La révision à la baisse de nos attentes sur les prix du pétrole implique
mécaniquement une révision à la baisse du profil de l’inflation sur l’année 2016 (graphique).
Nous attendons donc une inflation moyenne de 1,3% en 2016 contre 1,9% auparavant.
Combiné à des perspectives de croissance plus modestes du fait des déceptions sur le PIB du
T3 15 (qui nous pousse à réviser nos prévisions de croissance de 2,3% à 2,0% sur l’année
2016) et probablement davantage de pressions à la hausse sur le dollar, le cycle de
resserrement monétaire devrait être plus graduel que ce que nous anticipions auparavant :
nous ne prévoyons désormais plus que deux hausses de taux sur l’année contre quatre
auparavant.
Graphique 7 :
Etats-Unis: dynamique de l'inflation et discussion du sujet
dans les Minutes
10
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
-10
Rupture
8
6
4
2
0
-2
95
97
99 01 03
Inflation, G.
05
07
09
11
13
15
"Inflation" nombre d'apparitions dans les Minutes, D.
Source : Natixis
Etats-Unis: prix à la consommation (% GA)
6
6
Prévisions
5
5
4
4
3
3
2
2
1
1
0
0
-1
-1
-2
-2
-3
-3
99
01
03
05
07
09
11
13
15
17
Inflation totale
Inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation)
Sources : BLS, Natixis
10 février 2016
27
CROSS EXPERTISE RESEARCH
3. Quels impacts sur le risque émergent ?
Sylvain Broyer
+49 699 7153 357
[email protected]
Vers une crise de la dette ? Si oui, de quel type ?
Evidemment, l’effondrement des cours du pétrole profite aux pays émergents qui en sont
importateurs nets. Il s’agit principalement de l’Asie émergente et Israël, qui représentent 27%
du PIB mondial. Cette région du monde reste d’ailleurs la plus dynamique, même à considérer
que le PIB chinois est surestimé de 2 à 3 points dans sa définition officielle. A l’inverse, la chute
des cours affecte les pays émergents exportateurs nets de pétrole et de matières premières
dont les cours lui sont liés : principalement l’Arabie Saoudite, la Russie, le Brésil, l’Indonésie,
l’Afrique du Sud et la Colombie, qui représentent 14,7% du PIB mondial en ajoutant les autres
membres de l’OPEP. Le groupe d’émergents qui bénéficie de la baisse des cours est donc
presque deux fois plus important que celui qui en pâtit.
Tirés par le Brésil et la Russie, les émergents exportateurs nets de matières premières ont
sombré dans la récession. Elle exprime une crise profonde de leurs économies : en point de
départ, la baisse des revenus tirés de l’exportation de matières premières dégrade les balances
courante et budgétaire ; les spreads EMBI s’écartent avec la moindre solvabilité ; les capitaux
étrangers refluent ; les devises se déprécient (-20% en termes effectifs !) ; l’inflation importée se
met à galoper ; les banques centrales remontent les taux, ce qui dégrade davantage les
perspectives d’activité ; les déficits courants continuent de se creuser, malgré la récession, à
cause de l’incapacité des entreprises domestiques à se substituer aux importations devenues
plus chères pourtant. C’est le retour à la case départ : un cercle vicieux est enclenché. La
nature de la crise actuelle est par ailleurs unique. Les exportations peinent à repartir malgré la
forte dépréciation des changes, en raison de la faiblesse du commerce mondial, et de
nombreux pays subissent des goulots d'étranglement structurels (infrastructures, qualité de la
main d'œuvre, ...).
Graphique 1 :
Taux de croissance du PIB (GA en %)
Balance courante (en % du PIB valeur)
10
10
8
8
6
6
4
4
2
2
0
0
-2
-2
-4
-6
-4
-6
00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Economies avancées exportatrices de matières premières
Economies avancées importatrices de matières premières
Economies émergentes exportatrices de matières premières
Economies émergentes importatrices de matières premières
Monde
8
8
6
6
4
4
2
2
0
0
-2
-2
00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Economies avancées exportatrices de matières premières
Economies avancées importatrices de matières premières
Economies émergentes exportatrices de matières premières
Economies émergentes importatrices de matières premières
Sources: Datastream, Natixis
10 février 2016
28
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Si les cours du pétrole et des matières premières ne se reprennent pas, le prochain danger qui
guette les pays émergents exportateurs de matières premières pourrait être une crise de la
dette. Elle s’exprimerait de trois façons :
-
Une crise de liquidité: elle peut être révélée par l'insuffisance des réserves de changes visà-vis de la dette extérieure de court terme ; ce qui fut le point de départ de la crise asiatique
de 1997. L’Argentine, le Venezuela, l’Ukraine et la Turquie (tableau 4) sont concernés
aujourd’hui. On est certes encore assez éloigné des référents de la crise asiatique (la dette
extérieure de court terme atteignait deux fois les réserves de changes de l’Indonésie avant
que la crise éclate). Néanmoins, le Venezuela, faiblement imbriqué à la finance mondiale
aujourd’hui et pays non systémique, pourrait faire défaut en raison de la faible liquidité de
ses réserves de changes. Ces dernières sont majoritairement constituées d'or détenu dans
les coffres de la banque centrale à Caracas. Les coffres sont également vides en Argentine.
Le nouveau gouvernement s’est acheté du temps en renégociant la dette avec les holdouts
et en réformant son économie. La Turquie ne semble pas être aussi risquée, car son statut
d’importateur net de matières premières constitue une force de rappel. L’Ukraine pour sa
part bénéficie d’une ligne de crédit du FMI jusqu’en 2019. Malgré de fortes turbulences sur
ces pays, nous n’attendons pas de répétition de la crise de 1997.
-
Des défauts sur la dette en devise des corporates : le fort différentiel des taux avec les
pays développés, notamment les États-Unis, a stimulé l'endettement en devises étrangères,
qui est une cause classique des crises émergentes (le «péché originel»). Dans notre
échantillon de pays (l’Indice Global Emergents), 82% des obligations émises par des
entreprises non financières sont libellées en dollar US. La forte dépréciation des changes
contre dollar pose donc un problème. Si l’on regarde les pays où la part de l’endettement
des corporates en dollar est élevée et où les devises ont perdu au moins 15% de leur valeur
contre dollar depuis un an, on peut s’inquiéter des situations dans de nombreux pays
(Mexique, Argentine, Brésil, Colombie, Russie, Ukraine, Turquie, Malaisie et Angola :
tableau 1). Les entreprises de ces pays qui sont les plus exposées dans l’Indice Global
Emergents (encours d’obligations et part émise en USD importantes) sont indiquées en
rouge dans le tableau 2. Elles figurent parmi les secteurs minier, pétrole & gaz, chimie,
télécommunications. Nombreuses d’entre elles sont sous la main publique. Les entreprises
ayant les bilans les plus fragiles pourraient faire défaut. Ces difficultés pourraient donc se
répercuter sur le souverain sous-jacent. Ce que nous ne pouvons pas savoir toutefois, est la
part de contrats de change hedgés par ces entreprises, qui viendrait diminuer le risque de
défaut.
10 février 2016
29
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Tableau 1 : Encours de dettes des entreprises non financières des principales économies émergentes
Pays
Nombres
d'entreprises
émettrices
Total encours
de dettes
(moy., MdUS$)
Part de la dette
en US$
(moy., en %)
Part de la dette
en devise locale
(moy., en %)
Taux de change
contre US$
(GA en %)1
NEER2
(GA en %)
1
4
4
13
13
18
3
18
3
6
5
2
6
14
2
5
2
1
4
16
4
5
2
2
0,9
1,3
0,4
6,9
3,1
3,4
5,4
13,9
1,3
3,3
1,6
0,4
4,1
8,9
0,3
2,2
2,3
0,6
2,4
4,3
1,9
1,6
1,0
18,1
100
100
98
78
74
85
72
39
69
71
93
100
84
76
100
92
89
0
100
88
66
90
100
100
0
0
2
14
14
14
28
55
8
20
6
0
16
16
0
3
4
0
0
4
34
1
0
0
-24
0
-35
-33
-14
-4
-25
-6
-10
-5
-10
4
-19
-15
-8
-13
-5
-10
0
-18
-9
-20
-34
-11
11
2
-33
-6
11
-28
3
-2
2
-4
4
-16
-13
-9
-2
3
-1
11
-32
-1
-13
-27
11
Angola
Arabie Saoudite
Argentine
Brésil
Chili
Chine
Colombie
Corée
Hongrie
Inde
Indonésie
Koweït
Malaisie
Mexique
Nigéria
Pérou
Philippines
Pologne
Qatar
Russie
Thaïlande
Turquie
Ukraine
Venezuela
1
Glissement annuel sur des séries trimestrielles; 2 Glissement annuel du taux de change effectif nominal sur des séries trimestrielles
Sources : Reuters, Datastream, Natixis
Tableau 2: Entreprises non financières possédant le plus grand encours de dettes dans l’indice global émergents
Pays
Entreprises non financières
Angola
Arabie Saoudite
Argentine
Brésil
Chili
Chine
Colombie
Corée
Hongrie
Inde
Indonésie
Koweit
Malaisie
Mexique
Nigéria
Pérou
Philippines
Pologne
Qatar
Russie
Thailande
Turquie
Ukraine
Vénézuela
NORTHERN LIGHTS III BV
SAUDI ELECTRICITY GLOBAL SUKUK COMPANY 2
MASTELLONE HERMANOS SA
PETROBRAS GLOBAL FINANCE BV
CORPORACION NACIONAL DEL COBRE DE CHILE
ALIBABA GROUP HOLDING LTD
ECOPETROL SA
KOREA MIDLAND POWER CO LTD
MFB MAGYAR FEJLESZTESI BANK ZRT
BHARTI AIRTEL LTD
MAJAPAHIT HOLDING BV
GIC FUNDING LTD
PETROLIAM NASIONAL BHD
PETROLEOS MEXICANOS
SEVEN ENERGY FINANCE LTD
SOUTHERN COPPER CORP
POWER SECTOR ASSETS & LIABILITIES MANAGEMENT CORP
EILEME 2 PUBL AB
SOQ SUKUK A QSC
GAZ CAPITAL SA
PTT EXPLORATION AND PRODUCTION PCL
HAZINE MUSTESARLIGI VARLIK KIRALAMA AS
METINVEST BV
PETROLEOS DE VENEZUELA SA
Total encours
de dettes
(MdUS$)
Part de la
dette en
US$ (en %)
Part de la
dette en
devise locale
(en %)
Part de l'Etat
dans le capital
de l'entreprise
(en %)
0,9
2,0
0,5
51,9
11,3
8,0
9,7
323,4
2,0
5,7
3,6
0,5
11,1
78,2
0,3
6,0
4,0
0,6
4,0
22,4
3,6
3,8
1,0
35,6
100
100
100
80
92
100
95
24
38
61
100
100
86
63
100
100
79
0
100
57
75
100
100
100
0
0
0
0
2
0
5
76
25
0
0
0
14
19
0
0
9
0
0
0
25
0
0
0
100
89
Sources : Reuters, Bloomberg, Natixis
10 février 2016
30
CROSS EXPERTISE RESEARCH
-
Une crise des dettes souveraines : entre 2003 et 2012, la dette publique des pays
émergents exportateurs a eu tendance à refluer. Leurs recettes fiscales et la croissance du
PIB bénéficiaient du « supercycle » des matières premières et des politiques budgétaires
prudentes étaient mises en place, tirant les leçons des crises asiatique, mexicaine et
argentine. Cette dynamique est cassée désormais. La constellation actuelle de taux d’intérêt
et de déficits publics élevés pourrait même jeter les dettes souveraines de certains pays sur
des trajectoires insoutenables. Une arithmétique sobre (hypothèses à taux de croissance
nominale, taux d’intérêt et balances primaires inchangés), réalisée à partir des multiples
présentés dans le tableau 3, suggère en effet que les dettes publiques du Brésil, de
l’Ukraine, de l’Arabie Saoudite, de l’Algérie et du Koweït vont considérablement augmenter à
horizon deux ans. Plusieurs dépasseraient même le seuil jugé raisonnable par Reihnart et
3
Rogoff de 60% de PIB pour les pays émergents (Brésil, Hongrie, Ukraine, Inde). Avec 86%
de PIB vraisemblablement atteint en 2017, la dette du Brésil nous semble être
particulièrement vacillante ; il n’est pas évident que le marché soit capable d’absorber une
telle hausse de la dette. D’autres aspects relâchent néanmoins la contrainte: les quatre
cinquièmes de la dette publique brésilienne sont libellés en devise locale et un tiers
seulement doit être roulé dans les deux ans à venir. Sur ces deux derniers éléments, la
situation de la Lybie est par exemple bien plus précaire que celle du Brésil.
Graphique 2 :
Dette publique (en % du PIB valeur)
Dette publique (en % du PIB valeur)
140
140
120
120
100
100
80
80
60
60
40
40
20
20
0
100
100
80
80
60
60
40
40
20
20
0
0
99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Mexique
Chili
Venezuela
Argentine
Colombie
0
99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16
Bulgarie
Hongrie
Pologne
Roumanie
République Tchèque
Russie
Ukraine
Turquie
Brésil
Pérou
Dette publique (en % du PIB valeur)
100
100
80
80
60
60
40
40
20
20
0
0
99
00
01
02
03
04
05
06
07
08
09
10
11
China
Korea
Indonesia
Philippines
Thailand
India
12
13
14
15
16
Malaysia
Sources : FMI, Natixis
Au regard de l’ensemble des facteurs pesant aujourd’hui sur les émergents (exposition à la
Chine et aux matières premières, adéquation de la dette extérieure de court terme aux réserves
de changes, part des dettes corpo en devises, trajectoire de la dette publique, solde extérieur et
stabilité du change), les fondamentaux d’Asie émergente et de quelques pays d’Europe
émergente nous semblent les plus solides.
Carmen M. Reinhart & Kenneth S. Rogoff, 2010. "Growth in a Time of Debt," American Economic Review, American Economic Association,
vol. 100(2), pages 573-78.
3
10 février 2016
31
Tableau 3 : Grille d'analyse des principaux risques des pays émergents
Région
Pays
(% PIB mondial)
Dette des
entrepr.
en $
Dette
publique
Dette souv
. en devise
locale
Part dette
souv.
<2A
Déficit
public
Déficit
primaire
Oblig.
10 ans
Prév.
dette
publique
Balance
courante
NEER
T2 15
2014
2014
T3 15
T2 15
T3 15
2015
T4 15
T4 15
Annuel
2016
T4 15
2017
T3 15
T4 15
Moy.
5 ans
Moy.
2015
Moy.
5 ans
Moy.
2015
en % des
export.
totales
en %
du PIB
en % des
export.
totales
en % des
réserves
ext.
en % de la
dette
totale
en % de la
dette
totale
en %
du PIB
en % de la
dette
totale
en % de la
dette
totale
en %
du PIB
en %
du PIB
Rend
en %
en %
du PIB
en %
du PIB
GA
en %
(%)
(%)
(%)
(%)
Mexique (2,0)
0,3
0,0
65,1
40,4
74,5
46,9
52,0
58,1
25,9
-4,0
-0,5
3,1
49,8
-0,8
-12,8
2,9
2,5
3,6
2,7
Argentine (--)
7,5
1,4
15,9
125,0
-
-
52,1
21,7
38,0
-2,5
-2,5
9,1
44,0
2,1
3,3
2,1
-
16,1
Brésil (3,1)
13,9
1,3
15,8
16,5
54,8
71,6
69,9
86,2
32,4
-10,3
-0,9
16,5
86,2
-2,1
-5,9
-33,3
1,6
-3,2
6,7
9,0
Chili (0,4)
22,3
4,1
3,9
32,9
60,2
58,1
18,1
26,4
12,8
-1,6
-1,6
4,5
20,0
-1,1
-5,5
4,2
2,2
3,4
4,3
6,7
4,8
3,6
27,1
91,2
85,1
50,9
96,8
24,1
-2,4
0,0
8,3
51,9
-6,6
-28,0
4,7
3,0
3,3
5,0
Pérou (0,4)
15,5
2,4
1,8
11,7
73,6
-
22,4
72,2
2,3
-2,1
-1,2
7,9
25,3
-1,9
4,9
2,5
3,3
3,5
Venezuela (0,5)
13,1
10,2
0,3
137,9
-
-
53,0
46,0
14,3
-11,5
-22,9
10,3
-6,7
-4,9
-3,8
10,6
0,8
-4,5
43,9
92,6
2,6
Taux de croissance
Bilan
Dette int.
des
entrep.
Inflation
Bulgarie (0,1)
1,8
0,2
23,5
43,9
-
-
28,6
27,2
23,6
-5,8
10,0
0,0
1,4
2,7
1,3
-0,1
Hongrie (0,2)
1,3
-3,2
61,4
46,3
92,4
22,8
75,3
66,8
28,2
-2,6
0,8
3,3
73,1
6,1
-1,7
1,6
2,6
2,2
-0,1
Pologne (0,9)
0,8
-1,2
46,6
44,1
-
-
51,1
72,0
31,1
-3,2
-0,8
2,9
52,3
-2,3
-0,8
3,0
3,6
1,7
-0,9
Roumanie (0,4)
0,8
-0,8
48,1
39,2
1,0
0,0
40,9
54,8
32,8
-2,0
-1,2
3,8
43,5
-1,8
-1,9
2,1
3,7
-0,1
-0,1
Rép. Tch. (--)
1,2
-3,7
62,8
71,8
-
-
40,6
75,5
36,9
-2,0
-0,2
0,7
37,9
-2,6
0,3
1,3
4,5
1,5
0,3
Russie (3,5)
6,8
8,7
4,5
17,0
60,0
33,9
20,4
71,2
19,5
-0,5
-3,0
9,7
24,4
2,2
-31,6
1,7
-3,2
8,7
15,5
Ukraine (--)
5,3
2,2
15,0
174,3
-
-
94,4
45,6
16,0
-4,6
1,4
15,5
116,0
0,3
-26,9
-2,2
-12,6
0,5
1,3
Turquie (1,4)
1,2
-3,9
31,0
121,2
64,0
79,3
32,1
70,9
21,4
-1,3
1,4
10,5
29,4
-1,6
-13,0
4,6
3,4
7,9
7,7
Chine (17,0)
-
-1,7
55,7
29,1
11,6
7,3
43,2
95,3
34,7
-2,1
-1,7
2,9
41,8
2,3
11,3
8,1
7,0
2,8
1,5
22,2
-8,1
62,0
46,2
11,4
5,1
38,2
89,9
43,7
-1,8
0,0
1,7
35,9
8,4
2,6
3,1
2,4
1,9
0,7
Indonésie (2,5)
8,1
0,9
14,7
45,5
77,5
75,5
26,5
65,4
20,8
-2,6
-0,9
8,9
27,1
-1,8
-3,6
5,5
4,7
5,7
6,4
Malaisie (0,7)
11,5
1,9
44,2
88,3
21,4
9,0
55,6
91,3
23,6
-3,5
-1,5
4,3
54,0
1,8
-15,9
5,3
5,1
2,4
2,1
Philippines (0,7)
8,5
-2,0
62,7
20,2
95,4
0,0
35,9
73,9
13,4
-0,6
1,6
4,0
29,9
0,9
2,7
5,9
5,6
3,3
1,4
Thaïlande (1,0)
8,8
-4,1
46,7
29,3
15,8
11,8
43,5
96,9
48,1
-2,5
-0,7
2,7
44,3
7,2
-1,1
3,0
2,9
2,0
-0,9
Inde (7,0)
2,6
-1,7
16,7
24,2
-
-
65,3
95,3
22,0
-4,5
-2,4
8,1
64,4
-1,6
2,2
6,4
6,9
8,0
4,9
Arabie Saoudite (1,5)
Autres
pays
membres
de
l'OPEC
Croissance économique
Dette inter.
de court
terme
Corée du sud (1,6)
Asie
Devise
Export.
Produits
manuf.
Colombie (0,6)
Europe
Dette
Export.
nettes
de MP
-- <0,1
Amérique
Latine
Commerce
Export.
Vers
la Chine
13,1
16,5
0,4
-
-
-
15,6
54,4
13,9
-2,3
-19,7
5,0
53,0
-6,7
11,3
5,1
3,3
3,5
2,2
Algérie (0,5)
0,7
8,1
0,0
-
-
-
20,9
100,0
25,7
-2,1
-11,7
0,5
37,3
-3,7
-5,2
3,2
4,0
4,9
4,8
Nigéria (1,0)
2,0
7,3
2,9
-
-
-
16,7
96,7
52,7
0,1
-2,0
11,1
20,0
-4,0
-9,1
5,0
3,1
9,7
9,0
Koweit (0,3)
13,2
31,1
1,7
-
-
-
9,8
100,0
93,6
26,3
-12,5
12,2
31,0
3,5
5,1
-1,6
3,3
3,3
Qatar (0,3)
1,9
35,4
1,2
-
-
-
28,3
49,6
29,1
13,2
-0,7
3,2
29,0
9,8
11,4
6,3
3,5
2,3
1,6
Angola (--)
44,8
33,4
0,1
-
-
0,0
61,4
68,3
46,4
-2,2
0,6
7,8
51,5
2,7
-
4,8
3,6
10,0
10,2
3,1
7,2
1,6
-
-
0,0
39,3
0,0
41,7
-4,0
-1,6
-
-
-1,8
11,7
4,9
1,1
4,0
4,0
10,8
14,6
0,3
-
-
-
47,5
7,4
55,9
-49,1
-63,4
-
-
-23,3
-
0,2
-21,8
7,2
8,4
Equateur (0,2)
Libye (0,1)
Vert : risque faible – Orange : risque moyen – Rouge : Risque fort
Sources: Banque Mondiale, Banque des règlements internationaux, Reuters, FMI, The International Trade Center, Trade Economics, Datastream, Natixis
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Le niveau des spreads souverains des pays émergents tient-il
suffisamment compte de la déroute des matières premières ?
Lysu Paez Cortez
La volatilité des spreads souverains et les matières premières atteint des niveaux sans
précédent. Depuis juin 2014, les prix des matières premières ont baissé de 70%, entraînant un
écartement des spreads. Si l'effet net n’est pas le même pour les pays importateurs de matières
premières et les exportateurs, comme on peut le comprendre après lecture des pages
Juan Carlos Rodado
+1 212 8725060
précédentes, la déroute des matières premières suggère également que la conjoncture
[email protected]
mondiale se dégrade.
+33 1 58 55 80 97
[email protected]
Emilie Tetard
+33 1 58 19 98 15
[email protected]
Lee Su Young
+1 212 8915799
[email protected]
Autrement dit, pour déterminer si le niveau des spreads souverains des pays émergents tient
suffisamment compte de la chute des matières premières, nous faisons une régression des
spreads EMBI en fonction des notations, des variations des prix du Brent et des matières
premières et de l’aversion au risque. Notre objectif n’est pas seulement d’illustrer le
comportement des déterminants habituels des spreads souverains, mais aussi d’identifier les
pays à éviter si les prix des matières premières devaient rester volatils.
Graphique 1 : Spreads souverain EMBI (en pb)
Amérique latine
Asie
600
1400
500
400
400
300
300
200
200
100
100
1200
400
1000
300
800
200
600
100
400
0
janv.-14
juil.-14
Brésil
Mexique
Equateur (D)
janv.-15
juil.-15
Chili
Pérou
200
janv.-16
Colombie
Argentine (D)
0
janv.-14
juil.-14
Chine
Indonésie
Europe
4000
600
3000
400
2000
200
1000
juil.-14
Russie
Turquie
janv.-15
Kazahkstan
Ukraine (D)
juil.-15
Phillipines
0
janv.-16
Malaisie
Afrique
800
0
janv.-14
janv.-15
juil.-15
0
janv.-16
Pologne
1000
1000
800
800
600
600
400
400
200
200
0
févr.-14
0
août-14
févr.-15
Afrique du Sud
Angola
Marroc
Nigeria
août-15
Ghana
Source : Natixis
10 février 2016
33
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Notre modèle s’écrit :
𝐥𝐧(𝑺𝒑𝒓𝒆𝒂𝒅 𝒔𝒐𝒖𝒗𝒆𝒓𝒂𝒊𝒏 𝑬𝑴𝑩𝑰) = 𝑪 + 𝜷𝟏 ∗ 𝐥𝐧(𝒏𝒐𝒕𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏 𝒅𝒖 𝒄𝒓é𝒅𝒊𝒕 𝒔𝒐𝒖𝒗𝒆𝒓𝒂𝒊𝒏) + 𝜷𝟐 ∗
𝐥𝐧(𝒊𝒏𝒅𝒊𝒄𝒆 𝑽𝑰𝑿) + 𝜷𝟑 ∗ 𝐥𝐧(𝑩𝒓𝒆𝒏𝒕/𝒊𝒏𝒅𝒊𝒄𝒆 𝑪𝑹𝒀)
La notation souveraine d'un pays reflète la qualité de sa dette perçue en fonction de critères
quantitatifs et qualitatifs, à la fois politiques, économiques et financiers. Plusieurs études ont
montré que les notations de crédit avaient tendance à résumer les fondamentaux, et donc le
risque pays, au niveau des spreads souverains. De 1 pour SD à 22 pour AAA, nous
convertissons numériquement les notations émises par S&P.
Nous intégrons le risque externe par le biais de l'indice VIX, le baromètre bien connu des
craintes des investisseurs à l’échelle mondiale. Naturellement, un regain de volatilité conduit à
un écartement des spreads.
Alors que l'effondrement du prix du pétrole (Brent) a occupé le devant de l’actualité, nous
partons d’un indice élargi des prix des matières premières (CRI) pour renforcer le pouvoir
explicatif de notre modèle. En matière d’exportations, de nombreux pays émergents ne
dépendent pas seulement du pétrole, mais aussi des produits agricoles, des métaux de base et
des métaux précieux. Notre échantillon comprend 20 pays émergents avec des observations
allant de janvier 2000 à janvier 2016.
Le tableau ci-dessous montre le pouvoir explicatif du modèle sans impact des matières
premières, avec celui de l’indice CRY, et avec le prix du Brent. Sauf pour le Venezuela et le
Nigeria, notre modèle explique 70% des spreads souverains. Il confirme que la récente
dégradation de la qualité de la dette des pays d’Amérique latine, d’Afrique et, dans une moindre
mesure, d’Asie et d’Europe de l'est résulte de la déroute actuelle des matières premières.
Tableau 2 : Résultats de la régression: comparaison des R-carrés
Sans impact des commodities
Avec l'impact de l'indice CRY
Avec le prix du Brent
intervalle des données
0,562
0,773
0,585
0,434
0,546
0,447
0,629
0,681
0,236
0,699
0,612
0,614
0,340
0,638
0,769
0,352
0,714
0,236
0,268
0,601
0,552
0,752
0,719
0,564
0,876
0,735
0,507
0,814
0,533
0,816
0,826
0,570
0,815
0,791
0,618
0,363
0,717
0,884
0,627
0,762
0,678
0,350
0,702
0,621
0,810
0,720
0,584
0,849
0,645
0,442
0,857
0,494
0,706
0,825
0,751
0,734
0,743
0,711
0,393
0,713
0,864
0,598
0,807
0,514
0,270
0,601
0,553
0,788
0,762
00m01-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
04m06-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
00m07-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
07m01-16m01
10m06-16m01
07m11-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
06m03-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
00m01-16m01
01m12-16m01
Argentine
Brésil
Chili
Chine
Colombie
Indonésie1
Mexique
Pérou
Philippines
Russie
Equateur1
Afrique du sud
Venezuela1
Kazakhstan
Angola1
Ghana
Jordanie
Maroc
Nigéria1
Malaisie
Pologne
Turquie
Ukraine
Les cellules surlignées représentent le modèle avec le R-carré le plus élevé des spreads de chaque pays
1
Pays membre de l'OPEP
Source : Natixis
10 février 2016
34
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Les résultats du modèle suggèrent que :
-
La valeur actuelle des spreads est proche de celle ajustée pour le Chili, la Colombie, le
Mexique, le Pérou, la Jordanie et le Nigéria.
-
Les spreads devraient être plus élevés pour l’Argentine, la Chine, les Philippines, le
Kazakhstan, le Maroc et la Pologne. L'anomalie argentine s'explique par le manque de
réactivité de la notation souveraine, alors que le pays est en situation de défaut de paiement
depuis juillet 2014, et ce malgré les négociations en cours avec les holdouts.
-
Les spreads devraient être plus resserrés pour le Venezuela, l’Equateur, le Brésil, l’Afrique
du Sud, le Ghana, la Malaisie et l’Ukraine. La crise politique pèse probablement sur le
niveau des spreads sur la dette souveraine vénézuélienne. De même pour le Brésil, l'Afrique
du Sud et l’Équateur.
Graphique 2 : Spreads EMBI - valeur actuelle et ajustée (en pb)
Actuelle
Ukraine
Turquie
Malaisie
Pologne
Maroc
Nigéria*
Ghana
Jordanie
Angola*
Kazakhstan
Venezuela*
Afrique du sud
Russie
Equateur*
Pérou
Philipines
Mexique
Indonésie*
Chine
Colombie
Chili
Brésil
Argentine
3 000
2 500
2 000
1 500
1 000
500
0
Ajustée
* Pays membre de l’OPEP
Source : Natixis
Conclusion : les spreads souverains EMBI tiennent compte à la fois des risques internes et
externes. Nous avons montré que globalement, et au-delà des effets de la chute sans
précédent des prix des matières premières, la qualité de la dette et les conditions financières se
sont fortement dégradées pour les pays émergents. Le constat vaut notamment pour
l’Amérique latine et l’Afrique, les finances publiques et les comptes extérieurs des pays de ces
régions étant très dépendants des matières premières. Notre modèle montre que la déroute de
ces dernières affecte la plupart des pays, avec des effets plus ou moins graves selon la sévérité
et la persistance du choc. Pour certains pays émergents, les facteurs idiosyncrasiques et
domestiques continuent en outre de peser sur les conditions de crédit.
10 février 2016
35
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Taux de change : un impact négatif sur la plupart des devises à
l’exception du dollar
Depuis plus de 5 ans, les devises des pays émergents exportateurs de matières premières ont
enregistré un ajustement conséquent. Le maintien durable des cours du pétrole et des autres
matières premières à un niveau bas risque de peser encore sur la plupart d’entre elles. Dans ce
contexte, le dollar continuera de s’apprécier par défaut contre ces devises. Parmi l’ensemble
des taux de changes, les évolutions ne seront pas toutes de la même ampleur suivant leur
situation économique, leur politique monétaire, leur exposition au ralentissement de la
croissance chinoise (voir le tableau 3 précédent à ce sujet) et les avancées en termes
d’investissement dans les infrastructures afin d’améliorer la croissance potentielle du pays. On
distingue ainsi plusieurs types de devises face au risque d’un prix du pétrole durablement bas.
Graphique 1 :
Devises émergentes et indice matières premières CRB
120
110
Dollar DXY & pétrole (Brent)
500
100
25
450
95
45
90
65
300
85
85
250
80
105
400
100
350
90
80
200
70
75
125
150
60
70
100
03
04
05
07
08
10
11
Emerging currencies index
12
14
11
15
12
13
Dollar DXY
CRB index (Ech. D)
15
Brent (Ech. D, inversée)
Source : Bloomberg
Les devises dont le pays est très dépendant du cours des matières premières et dont
l’économie s’est peu diversifiée tel que le RUB et le COP. Ces devises demeureront
durablement faibles, voire pourraient s’ajuster davantage à l’avenir si le cours du pétrole
demeure longtemps autour de 30 $/b. De leur côté, les devises des pays du Golfe seront aussi
sous forte pression, le marché spéculant de plus en plus sur un éventuel abandon de leur peg
comme pour le SAR, scénario auquel nous ne souscrivons pas.
Graphique 2 : Corrélation entre les taux de changes contre $ et le cours du Brent depuis 2010
0.2
0.1
0
-0.1
-0.2
-0.3
-0.4
-0.5
JPY
CHF
CZK
EUR
IDR
HUF
BRL
NZD
TRY
PHP
PLN
CLP
SEK
KRW
INR
GBP
ZAR
SGD
AUD
MYR
NOK
MXN
RUB
-0.6
COP
+33 1 58 55 14 95
[email protected]
CAD
Nordine Naam
Source : Bloomberg
10 février 2016
36
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Il y a ensuite les devises des pays très dépendants de matières premières et dont l’activité
économique profite peu de l’amélioration de la compétitivité changes du fait de l’absence
d’investissements dans les infrastructures dans les transports, l’électricité, l’éducation … ce qui
entretient une inflation élevée et au final rend ces devises peu attractives. C’est le cas du BRL,
le ZAR et dans une moindre mesure l’IDR qui resteront mal orientées dans les prochains mois.
On trouve un autre groupe de devises émergentes, sensibles au pétrole mais ayant un secteur
manufacturier développé tels que le MXN, la MYR, et le CLP. Ces devises devraient finir par se
stabiliser et profiter à terme d’une amélioration de leur compétitivité changes.
Il y a aussi les devises de pays émergents principalement importateurs de pétrole avec une
base manufacturière importante qui devraient finir par se redresser du fait de l’amélioration de
leur compte courant une fois que l’appétit pour le risque sera revenu. On retrouve parmi ces
devises l’INR, la PHP, la THB, le PLN, le HUF, la KRW, et la TRY, toutes choses égales par
ailleurs sachant qu’il y a des risques propres à chaque pays (géopolitique en Turquie, politique
en Pologne, exposition à la Chine pour la Corée du Sud, etc..).
Parmi les devises du G10, le CAD, la NOK, l’AUD et le NZD resteront toujours sous forte
pression baissière si les cours du pétrole restent durablement bas du fait de la poursuite de
l’ajustement des dépenses d’investissement énergétiques d’autant que certaines d’entre elles
restent surévaluées comme le NZD et l’AUD.
Enfin, l’impact du pétrole sur l’EUR/USD restera limité à celui sur le dollar attendu en légère
hausse. Seul le JPY a une tendance à s’apprécier lorsque le cours du pétrole diminue dans la
mesure où cela entraine une nette amélioration de son excédent courant. De plus, la baisse du
prix du pétrole étant souvent accompagnée d’un regain d’aversion au risque, le JPY joue dans
cet environnement le rôle de valeur refuge. Mais l’appréciation du JPY restera limitée par
l’action de la BOJ.
10 février 2016
37
CROSS EXPERTISE RESEARCH
4. Un marché de la dette sous forte pression
Thibaut Cuillière
+33 1 58 55 80 56
[email protected]
Hong My Nguyen
+33 1 58 55 85 27
[email protected]
Depuis la chute des prix du pétrole, initiée durant l’été 2014, les marchés du crédit ont connu
deux régimes nettement distincts : 1/ une faible sensibilité à l’évolution des prix du pétrole, tant
que le Brent évoluait au-dessus des 60 $ le baril (cf. graphique 1 à gauche) puis 2/ une forte
sensibilité des spreads de crédit, en $ surtout, depuis que le prix du baril est descendu sous les
60 $ (c’est-à-dire depuis le début de l’année 2015).
Il est clair que le développement de l’industrie des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis
depuis 2010 est le premier facteur responsable de cette divergence entre l’évolution des
+33 1 58 55 86 07
[email protected] spreads de crédit en $ vs €. En effet, 15% environ de l’encours de l’indice de dette HY $
provient du secteur de l’énergie (avec, en outre, peu de compagnies intégrées, contrairement
au marché de la dette en €), tandis que ce même secteur contribue pour à peine 8% aux
encours de l’indice HY en € (cf. graphique ci-dessous à droite). Dans une moindre mesure, les
indices de crédit en $ sont également plus exposés aux secteurs minier et acier que leurs
cousins européens (cf graphique 1 droite).
Thomas Zlowodzki
Graphique 1 : Spreads HY et exposition des indices aux matières premières
Exposition des indices crédit € et $ aux matières
premières
Evolution des spreads HY € et $ et du prix du pétrole
HY €
HY $
Oil price (rhs inv.)
2500
0
30%
20
25%
40
20%
60
15%
80
10%
2000
1500
1000
100
0%
140
Oct-15
Oct-14
Oct-13
Oct-12
Oct-11
Oct-10
Oct-09
Oct-08
Oct-07
Oct-06
Oct-05
Oct-04
160
Oct-03
0
14.6%
7.9%
9.5%
5%
120
500
20.2%
3.9%
$IG
3.1%
€ IG
Mining & Steel
5.7%
4.2%
$HY
€HY
Energy
Sources : Bloomberg, BofA Merril Lynch, Natixis
Au-delà du poids dans les indices, la nature des émetteurs « Oil & Gas » n’est pas la même des
deux côtés de l’Atlantique. Alors que ceux présents dans les indices de crédit en euro sont pour
la grande majorité des groupes pétroliers intégrés (Total, Statoil, BP, Shell pour l’indice IG €,
Petrobras et Gazprom pour l’indice HY €), les émetteurs de dette en dollar sont davantage
spécialisés dans les différents segments de la chaîne de l’industrie pétrolière : Exploration &
Production, Equipement & Services, Distribution (cf. graphiques 2). Ce sont autant de
divergences dans les catégories de notation (A- pour les émetteurs IG en € contre BBB pour
ceux en $), dans les risques au regard du contexte des prix actuels ainsi que dans la
dynamique des spreads.
10 février 2016
38
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 2 : Comparaison des marchés de la dette € et $ du secteur Oil & Gas –(en Md€ et en Md$ respectivement)
Composition des indices Oil & Gas Investment Grade
700
600
500
400
300
200
100
200
180
160
140
120
100
80
60
40
20
0
Kinder Morgan, William
Partners, Enterprise
Prod.
Schlumberger,
Halliburton
Conoco
Phillips,
Apache
Total, Statoil,
Total, Statoil,
ENI, BP, Shell
BP, Shell,
Pemex
0
EUR IG
Composition des indices Oil & Gas High Yield
US IG
Sabine Pass, Energy
Transf, Targa Res
Partners
Transocean
Petrobras
Gazprom
Chesapeak,
Antero
Resourses,
Whiting Petro,
Newfield
EUR HY
US HY
Integrated Oil & Gas
Exploration & Production
Integrated Oil & Gas
Oil Equipment & Services
Pipelines
Oil Equipment & Services
Exploration & Production
Pipelines
Sources : Markit, BofA Merril Lynch, Natixis
En fondamental, est-ce grave docteur ?
NB : la complexité et le poids des émetteurs « Oil &Gas » au sein des indices américains nous
conduisent à présenter dans cette première partie un « check-up » de la gravité de la situation
pour ces derniers. L’analyse fondamentale des sociétés européennes est traitée de manière
plus granulaire en p. 72 (pétrolières intégrées), 78 (services pétroliers) et 75 (tubistes) de cette
étude.
Une nette dégradation des fondamentaux du secteur
En termes de revenus, l’année 2015 a été rude pour les sociétés américaines du secteur Oil &
Gas ; en moyenne, ceux-ci ont diminué de près de 15% en 2015 (cf. graphique 3 gauche), avec
des chutes de presque 20% pour les sociétés intégrées du secteur E&P (Exploration et
Production). Les perspectives 2016 s’annoncent sombres, le rétablissement des revenus prévu
par S&P ayant été établi en décembre dernier sur une remontée des cours du pétrole vers les
50 $, ce qui n’est plus à l’ordre du jour. Les revenus devraient donc diminuer à nouveau en
2016.
En termes de cash-flows opérationnels (cf graphique 3), la chute a été également spectaculaire
en 2015 (-25%). Si les Capex (-20%) ont suivi la tendance, les dividendes (et rachats d’actions)
n’ont pas encore été réduits notablement, ce qui offre ainsi une (mince) marge de manœuvre
pour 2016. Toutefois, nos analystes actions prévoient que les pétrolières intégrées devraient
continuer de maintenir coûte que coûte le retour à leurs actionnaires, quitte à couper encore
plus violemment dans leurs Capex (cf. p. 72 Pétrolières intégrées). Toutefois, pour servir leurs
actionnaires, elles pourraient continuer de recourir au paiement des dividendes en actions, ce
qui atténuerait l’impact de cette politique sur les niveaux de cash. Selon nos analystes, les
dépenses d’E&P pourraient encore baisser de 30 à 50% par rapport aux niveaux actuels. Les
programmes de cessions d’actifs devraient également se poursuivre.
10 février 2016
39
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 3 : Evolution des revenus et des cash-flows
Croissance des revenus (ajustée)
Croissance et utilisations des cash-flows (en Md$)
30%
1400
20%
1200
1000
10%
800
0%
600
-10%
400
200
-20%
0
-30%
-200
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2005
2007
2009
2011
2013
2015
Drilling Eqpt, Svcs
Integrated, E&P
Capex
Dividends
Midstream
Refining & Mkting
Net Acquisitions
Share Buybacks
Global Oil & Gas
Operating CF
Sources : S&P, Natixis
Au sein du secteur (cf graphique 4), les sociétés de « Drilling Equipment » (-28%) et les
« intégrées E&P » (-15%) ont nettement réduit leurs Capex, alors que celles du « Refining &
Marketing » et « Midstream » les ont au contraire augmentés (respectivement +12% et +10%).
Ceci n’a pas suffi à éviter une nette dégradation des ratios de Dette / EBITDA en 2015
(cf. graphique ci-dessous à droite) : sur l’ensemble du secteur, il est passé de 2,8x à 3,7x.
Graphique 4 : Capex et ratio de levier
Croissance des Capex (ajustés)
Dette / EBITDA (médian, ajusté, x)
5.0
50%
40%
30%
20%
10%
0%
-10%
-20%
-30%
-40%
4.0
3.0
2.0
1.0
0.0
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2012
2013
2014
2015
2016
2017
Drilling Eqpt, Svcs
Integrated, E&P
Drilling Eqpt, Svcs
Integrated, E&P
Midstream
Refining & Mkting
Midstream
Refining & Mkting
Global Oil & Gas
Global Oil & Gas
Sources : S&P, Natixis
Le maintien d’un baril à un prix extrêmement bas devrait ainsi continuer de dégrader la
rentabilité des opérateurs du secteur. La rentabilité des capitaux employés (cf graphique 5),
devrait ainsi en 2016 tendre vers… 0 ! Toutefois, la situation de la liquidité, devrait en moyenne
demeurer soutenable, quoique difficilement : les dettes exigibles à moins d’un an étant de
l’ordre de 10% de l’endettement total, et de 20% pour les dettes exigibles à horizon 2 ans. Bien
entendu, la disparité des situations de liquidité cache sans nul doute des besoins de
refinancement particulièrement urgents pour certains émetteurs.
10 février 2016
40
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 5 : Retour sur capitaux employés et structure de dette
Retour sur capitaux employés
Structure de dette par horizon d’exigibilité
2 000
18%
16%
1 500
14%
1 000
12%
10%
500
8%
6%
0
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
4%
2%
0%
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015
LT Debt Due 1 Yr
LT Debt Due 3 Yr
LT Debt Due 5 Yr
Nominal Due In 1 Yr
LT Debt Due 2 Yr
LT Debt Due 4 Yr
LT Debt Due 5+ Yr
Sources : S&P, Natixis
Les opportunités et les risques sont différents selon les segments du secteur Oil & Gas aux
Etats-Unis (cf tableau 1). Pour les sociétés européennes, les analyses de nos experts sectoriels
sur les pétrolières intégrées, les services pétroliers et les tubistes sont détaillées pages 72 à 78.
Tableau 1 : Opportunités et risques par segment du secteur Oil & Gas aux Etats-Unis
Sous-secteur
Exploration et Production (E&P)
Opportunités
M&A : la consolidation pourrait enfin prendre forme
en raison ; i/du stress des compagnies qui les feront
passer outre le caractère prohibitif des clauses de
CoC sur les dettes, ii/ des niveaux de valorisation
qui pourraient avoir, avec le prix du brent, atteint un
point bas, iii/ le besoin de sécuriser leurs futurs
approvisionnements en remplacement
d'investissements d'exploration par nature
hasardeux
Services pétroliers (Oilfield services)
Raffinage
Situation de liquidité très tendue (hausse des
spreads sur la dette sur le HY, en particulier pour
les émetteurs de notation B ou inférieure)
Même si le nombre de puits de forage a déjà
sensiblement diminué, la production ne fait que
commencer à s'infléchir aux Etats-Unis, en raison
d'un effet retard; la tendance à la baisse de la
production devrait donc s'accentuer
Levée des restrictions à l'export du crude Oil
Contract Drilling
Transport ("Midstream")
Risques
Poursuite de la baisse des prix du brent (retour de
l'Iran avec un volume > la baisse attendue de la
production de pétrole de schiste aux Etats-Unis)
Situation de liquidité très tendue (hausse des
spreads sur la dette sur le HY, diminution des
assiettes de borrowing bases)
Surcapacités persistantes (au US, en Chine) ou à
venir (Diesel : Moyen-Orient, LatAm, Asie) et
pression sur les marges
Récession chinoise ? (impact négatif sur la
demande de produits raffinés)
Offshore drilling particulièrement vulnérable si les
prix du pétrole restent pas
Prix garantis ou couverts
Les projets continuent dans certaines zones
(Marcellus Shale and Permian basin)
Effet volume négatif
Augmentation du coût de financement des
nouveaux projets
Sources : S&P, Natixis
10 février 2016
41
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Une détérioration des notations dans l’industrie
Les notations des sociétés du secteur Oil & Gas se sont significativement dégradées en 2015.
4
En novembre dernier (dernier rapport trimestriel de Moody’s), alors que le prix du Brent était
encore de 50 $ le baril, l’agence Moody’s avait procédé en 2015 à 109 dégradations contre une
trentaine en moyenne de 2009 à 2014 (cf. tableau ci-dessous à gauche). Entre janvier et
septembre 2015, le total de « Negative Outlook changes » a été de 37 contre 14 de « Positive
Outlook changes ».
Ce sont les sociétés du segment « Oilfield services and Drillers » qui ont été les plus dégradées
- 49% du nombre total d’entreprises notées – puis le segment « Exploration et Production »
avec 38% de dégradations (cf. graphique 6 droite).
Graphique 6 : Evolution des notations du secteur Oil & Gas en 2015 chez Moody’s
Dégradation en pourcentage des compagnies notées
par secteur, Jan-09 – Sept-151
Résumé des ratings actions, Jan-09 – Sept-15
120
2.0
100
1.5
60%
50%
80
40%
60
1.0
30%
40
0.5
20
0
0.0
2009
Upgrade
1
2010
2011
2012
Downgrade
2013
2014
YTD
2015
49%
20%
38%
10%
14%
10%
0%
Upgrade to Downgrade Ratio (rhs)
E&P
Oilfield Services and Drillers
Midstream
Refining
Agencé en ordre décroissant du nombre de compagnies notées par secteur
Sources : Moody’s, Natixis
Et ce n’est malheureusement pas terminé. Jeudi 21 janvier dernier, alors que Moody’s
abaissait de près de 40% ses prévisions sur le Brent (de 53 $/b en 2016, 60 $ en 2017 et
68 $ en 2018 à respectivement 33 $, 38 $ et 43 $), l’agence a mis sous surveillance négative
(« review for downgrade ») les notations de 69 sociétés américaines des segments Exploration
& Production et Oilfield services. Le 22 janvier, elle faisait de même avec 120 sociétés du
segment Oil & Gas et 55 sociétés du secteur minier. Et du côté de S&P ? Dans son étude sur
5
les grandes tendances de l’industrie pétrolière, publiée début décembre , l’agence indiquait que
les notations demeureraient sous pression, bien qu’une majorité d’entre elles fussent alors
munies de perspectives stables… parce qu’elles avaient déjà été dégradées. Début décembre,
un quart des sociétés du secteur Oil & Gas était toutefois sous perspective négative. Etant
donné la chute du Brent depuis début décembre (33 $/b aujourd’hui contre 40 $/b le 9
décembre), le même mouvement de dégradation des notations devrait être bientôt observé,
prolongeant ainsi la tendance sur le « biais négatif associé à la notation » (cf graphique 7
gauche). Comme illustré sur le graphique de droite, ce sont les sociétés du segment « Drilling
Equipement » qui ont suivi jusqu’à présent la tendance la plus négative.
4 Oil & Gas Quarterly (Americas), 3 novembre 2015
5 Industry Top Trends 2016 : Oil & Gas. S&P
10 février 2016
42
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 7 :
Biais négatif associé à la notation S&P dans
le secteur Oil& Gas
Biais négatif par sous-secteur
0%
-5%
-10%
-15%
-20%
Oil and Gas
Dec-15
Mar-15
Jun-14
Sep-13
Dec-12
-25%
10%
5%
0%
-5%
-10%
-15%
-20%
-25%
-30%
-35%
-40%
-45%
2013
2014
Global Corporate
2015
Drilling Eqpt, Svcs
Integrated, E&P
Midstream
Refining & Mkting
Sources : S&P, Natixis
Une montée des taux de défaut aux Etats-Unis et en Europe
Les taux de défaut se sont envolés pour le secteur Oil & Gas, et encore davantage pour le
secteur Mining & Steel, avec un effet plus accentué aux Etats-Unis qu’en Europe (cf
graphique 8) .
Sur les derniers chiffres publiés en décembre 2015 par Moody’s, le taux de défaut s’élève à
5,73% aux Etats-Unis et à 3,93% en Europe en ce qui concerne l’Oil & Gas, et grimpe à
10,38% pour le Mining & Steel US contre seulement 2,73% en Europe. Ces chiffres sont à
comparer à ceux observés pour l’ensemble des corporates, pour lesquels le taux de défaut a
grimpé à 1,78% aux Etats-Unis et à 1,88% en Europe (retraitement par nos soins pour ce
dernier chiffre européen) ; les taux de défaut des émetteurs HY sont respectivement de 3,17%
aux Etats-Unis et 3,36% en Europe à fin décembre 2015.
Graphique 8 :
Taux de défaut Moody’s Corp et Oil
and gas US / Europe
Taux de défaut Moody’s Corp, Oil and gas,
Mining & Metals US / Europe
16%
16%
14%
US : Energy: Oil & Gas
Europe : Energy: Oil & Gas
Corp US SG
Corp Europe SG
US : Energy: Oil & Gas
Corp US SG
Mining & Steel US
2016
2015
2014
2013
2012
2011
2010
2009
2016
2015
2014
0%
2013
2%
0%
2012
4%
2%
2011
6%
4%
2010
8%
6%
2009
10%
8%
2008
12%
10%
2008
14%
12%
Europe : Energy: Oil & Gas
Corp Europe SG
Mining & Steel Europe
Sources : Natixis, Moody’s
Ces deux secteurs (Oil & Gas et Mining & Steel) sont les deux dans lesquels la hausse des
taux de défaut est la plus spectaculaire. Les graphiques 9 ci-dessous (représentant l’évolution
des taux de défaut depuis novembre 2014 pour les secteurs ayant aujourd’hui un taux de défaut
supérieur à 3%) montrent que la dynamique est moins alarmante pour les autres secteurs
d’activité. Le troisième secteur qui pourrait être à risque est l’Aerospace & Defense, mais cette
10 février 2016
43
CROSS EXPERTISE RESEARCH
tendance n’est visible qu’aux Etats-Unis et non en Europe, et pas liée à l’évolution du prix du
pétrole. En effet, le secteur aérien bénéficie d’un pétrole bas : le poste carburant ne représente
plus que 18% des coûts des compagnies aériennes, contre 35 à 40% il y a encore quelques
mois, ce qui libère des marges de manœuvre pour commander des appareils. Quant à l’impact
sur le secteur de la défense, il est difficile à mesurer : les pays exportateurs de pétrole (en
particulier dans le Golfe) ont évidemment moins de marges de manœuvre au vu de la tension
sur leurs budgets nationaux, mais la situation est inverse pour les pays importateurs nets de
pétrole (Inde notamment) ; cf. p.58 de cette étude « Un pétrole à 30 $, une aubaine pour
l’aérien ».
Graphique 9 :
Taux de défaut par industrie aux Etats-Unis
Taux de défaut par industrie en Europe
Consumer goods: durable*
Hotel, Gaming, & Leisure
Retail
Consumer goods: durable*
Automotive
Retail
Wholesale*
Automotive
Wholesale*
Environmental Industries*
Environmental Industries*
Media: Advertising, Printing &…
Media: Advertising, Printing &…
Services: Business
Services: Business
Services: Consumer*
Services: Consumer*
Aerospace & Defense
Aerospace & Defense
Energy: Oil & Gas
Energy: Oil & Gas
Metals & Mining
Metals & Mining
0%
US 1/11/14
2%
US 1/05/15
4%
6%
US - 1/11/15
8%
10%
US - 1/12/15
12%
0%
Eur. 1/11/14
2%
Eur. 1/05/15
4%
6%
Eur. - 1/11/15
8%
10%
12%
Eur. - 1/12/15
Sources : Natixis, Moody’s
Les corporates Oil & Gas n’ont que peu de marge de manœuvre, ce qui conduira à des
restructurations et à une hausse des défauts en 2016
Moody’s s’inquiète de la question des borrowing bases. En effet, la chute des prix de l’or noir (et
du gaz) va diminuer mécaniquement les borrowing bases des acteurs du secteur, en particulier
ceux de l’E&P, qui vont ainsi avoir moins de flexibilité pour leur refinancement. Ces borrowing
bases ayant été hedgées, l’effet ne s’est pour l’instant pas fait sentir, mais Moody’s le craint
pour 2016, sans toutefois le chiffrer.
De manière plus générale, l’agence de notation, dans sa note du 4 janvier dernier (« Persistent
Weak prices in 2016 Rein in Capital Spending, Heigthen Financing Risk »), dresse un tableau
sombre pour l’accès au marché des acteurs Oil & Gas. Moins de « surface d’emprunt » via les
borrowing bases comme vu précédemment, accès au marché actions pénalisé par le plongeon
des valorisations, accès au marché du crédit à des taux prohibitifs pour les émetteurs (le spread
moyen de l’indice iBoxx Oil & Gas IG a ainsi progressé de 130 pb depuis mai 2015, avec un
impact plus important sur le HY), voire impossible, un certain nombre d’investisseurs ayant
allégé leurs positions dans le secteur et n’étant pas enclins à s’y renforcer, sans perspectives
de remontée des cours du Brent. Les cessions d’actifs sont également problématiques, la
valeur de ces derniers ayant également fondu depuis la chute des cours de l’or noir. Autre
mauvaise nouvelle pour les investisseurs en dette obligataire dans ce secteur, ces dernières
ont davantage tiré sur leurs RCF (Revolving Credit Facilities), lesquels disposent très
er
fréquemment de garanties de 1 rang sur les actifs des compagnies. L’agence prévoit en 2016
une nette augmentation des restructurations de dettes en 2016 (« Distressed Exchanges »)…
et des défauts.
10 février 2016
44
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Le pire est-il à venir ? Les raisons d’être inquiets étaient déjà nombreuses en fin d’année
dernière. Les perspectives ne peuvent donc être que très sombres, si l’on considère que les
rapports d’agence, déjà alarmistes, se basaient sur des prix du baril supérieurs aux prévisions
actuelles, qui ont toutes été drastiquement revues à la baisse.
Quel risque de défaut dans le HY Oil & Gas US en 2016 ?
Quelles hypothèses sur les fondamentaux des sociétés ?
L’accroissement des taux de défaut dans l’industrie de l’énergie aux Etats-Unis observée en
2015 (cf. partie précédente) est loin d’être derrière nous, compte tenu de la baisse des prix du
pétrole de 50 $ à 35 $ le baril en moyenne sur 2015 et 2016 et des hypothèses suivantes sur
les fondamentaux des sociétés du secteur (et nous l’appliquons par extension à celui des
miniers / acier) :
-
Un recul d’environ 30% des CA des entreprises du secteur.
-
En raison des restructurations en cours (baisse des Opex), une moindre baisse des EBITDA
en 2016 vs 2015 (-25%) que des CA.
-
Une nouvelle diminution de 25% des Capex en 2016.
-
La coupe des dividendes a également commencé en 2015, elle devrait se poursuivre en
2016 (-30% estimés par rapport à ceux versés en 2015).
Nous supposons ensuite une version simplifiée de l’évolution de la dette nette en 2016, à l’aide
de la formule suivante :
Dette nette 2016 = Dette nette 2015 – EBITDA 2016 + Intérêts nets 2015 + Capex 2016 +
Dividendes 2016
Quelles conséquences sur les ratios de levier et le risque de défaut des sociétés du
secteur ?
Une fois ces hypothèses émises, nous avons récupéré les données d’EBITDA (12 mois
glissants), de dette nette, de Capex et de dividende au T3-15 sur un échantillon d’entreprises
faisant partie :
-
Des secteurs visés : Oil & Gas, Métaux, Miniers et Acier (OGMMA).
-
Des indices crédit IG et HY en $.
Notre échantillon correspond à 62% de la dette des secteurs OGMMA de l’indice IG $ et à 71%
de la dette des secteurs OGMMA de l’indice HY $.
Afin d’en déduire i/ un ratio moyen de dette nette / EBITDA par catégorie de notation au T3 15
et ii/ une projection de ratio dette nette / EBITDA au T3 16, sur la base de la formule explicitée
ci-dessus. Le graphique 10 à gauche illustre le résultat obtenu : en moyenne, le levier (pondéré
par les encours obligataires dans les indices de crédit en $) devrait augmenter de 2,3 points
selon nos estimations entre le T3 15 et le T3 16.
Une telle détérioration des ratios de crédit devrait engendrer un accroissement supplémentaire
des taux de défaut: en calibrant une fonction fournissant l’évolution du taux de défaut selon le
ratio de dette nette / EBITDA ajusté S&P, nous estimons à 74,2 Md$ le volume d’encours de
dette qui tombera en défaut additionnel entre le T3 15 et le T3 16; ces 74,2 Md$ représentent
10,7% de l’encours de notre échantillon. Le graphique ci-dessous à droite montre le résultat
obtenu pour chaque catégorie de notation sur notre échantillon. En somme, en supposant que
10 février 2016
45
CROSS EXPERTISE RESEARCH
notre échantillon est représentatif de l’ensemble du secteur OGMMA, le taux de défaut du
secteur passerait de 5,7% à fin 2015, à 10,7% à fin 2016. Sur la part HY OGMMA seule, le
taux de défaut passerait à 22,7%.
Graphique 10 : Evolution du ratio dette nette / EBITDA et risque de défauts additionnels des industries Oil & Gas
Evolution du ratio de dette nette / EBITDA des secteurs
concernées aux US par catégorie de notation
Volume de défauts additionnels dans les industries
Oil & Gas, Métaux, miniers et acier à fin 2016
10
20 000
9
18 000
8
16 000
7
14 000
6
12 000
5
10 000
4
8 000
3
6 000
2
4 000
1
2 000
0
AA
A
BBB
Net debt / Ebitda 2015
BB
B
CCC
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0
0%
AA
Net debt / Ebitda 2016
A
BBB
in $mn
BB
B
CCC
As a %, rhs inv.
Sources : Bloomberg, Natixis
Quel taux de défaut anticiper sur le HY US à fin 2016 ?
Pour déterminer un taux de défaut global sur le segment HY américain, il convient de séparer le
segment Oil & Gas, Mining & Steel du reste des corporates non-financières. En ce qui concerne
le premier, nous tablons (cf. ci-avant) sur un taux de défaut de 10,7% sur l’ensemble de
l’industrie, dont 22,7% sur le segment HY spécifiquement. Pour les autres industries, nous
avons modélisé le taux de défaut HY US provenant de Moody’s en fonction du VIX, de la
croissance du PIB (1/3 Etats-Unis, 2/3 Monde), du resserrement des conditions de crédit
appliquées aux entreprises américaines selon la Senior Loan Survey (SLS) et d’un ratio de FCF
/ Dette nette estimé sur les entreprises non-financières américaines (les données brutes
provenant des Flow of Funds de la Fed), en calibrant le modèle sur la période de février 1997 à
janvier 2015 (afin d’exclure le stress provenant des défauts dans les industries pétrolières et de
matières premières depuis cette dernière date).
Le modèle calibre bien l’évolution du taux de défaut sur la période considérée (cf. graphique cidessous à gauche) et permet également d’expliquer la remontée du taux de défaut HY depuis
le début de l’année 2015. Compte tenu de l’effet retard observé entre une dégradation de la
SLS d’une part et de la hausse du VIX d’autre part sur l’évolution des taux de défaut HY, nous
anticipons dans notre scénario central (VIX moyen de 20%, SLS inchangée par rapport au
niveau du T3 15) une remontée structurelle du taux de défaut global HY en 2016 de 3,2% à fin
décembre 2015 vers 4,3% à fin décembre 2016 (cf. graphique 11 droite), ceci en excluant le
stress à prévoir sur les industries du pétrole et des matières premières.
Dans un scénario pessimiste (VIX à 25%, SLS se dégradant de 7,5% à 15% de resserrement
net), le taux de défaut HY US structurel pourrait même remonter à 5,3% (cf. graphique cidessous à droite), auquel il faudrait rajouter le poids des défauts provenant du segment HY des
industries du pétrole et des matières premières (22,7% attendu, cf. ci-avant).
Au total, le taux de défaut HY US pourrait donc grimper à 7,8% (en pondérant les défauts
par les encours de dette sur les deux segments considérés) dans notre scénario central,
et même 8,6% dans notre scénario pessimiste !
10 février 2016
46
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 11 : Taux de défaut HY US
Modèle Natixis sur le taux de défaut HY US
Scénarios de taux de défaut HY US à fin 2016
16%
14%
12%
10%
8%
6%
4%
2%
1997
1998
1999
2000
2001
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2011
2012
2013
2014
2015
2016
0%
10%
9%
8%
7%
6%
5%
4%
3%
2%
1%
0%
42034
42398
Dec 2016 Central
Oil & Gas, Metal, Mining & Steel
Observed default rate
Modeled default rate
Dec 2016
Pessimistic
Excluding Oil & Gas, Metals, Mining & Steel
Sources : Bloomberg, Moody’s, Natixis
Quelle valorisation des crédits Oil & Gas ?
Dans ce contexte dégradé, nous nous posons la question de la valorisation des spreads de
crédits du secteur Oil & Gas tout d’abord i/ en tenant compte des fondamentaux actuels (en
particulier de la dynamique de défaut dans le secteur), puis ii/ en nous appuyant sur les
prévisions de défaut établies dans la section précédente.
Les spreads Oil & Gas actuels intègrent-ils les risques liés au défaut ?
Au regard de l’évolution du taux de défauts du secteur Oil & Gas (cf. graphique de gauche cidessous), la remontée de ce dernier vers 5,7%, soit des niveaux comparables à ceux de fin
2008, n’a pas entrainé un mouvement d’écartement de spreads aussi massif que celui observé
en 2008. Mais rappelons que le contexte de marché a été nettement plus tendu fin 2008, en
termes de volatilité de marché, mais également du côté des prix du pétrole.
Pour intégrer l’ensemble de ces facteurs, nous avons construit un modèle économétrique long
terme des spreads iBoxx IG Oil & Gas US sur la base des variables explicatives suivantes : i/
prix du contrat Brent, ii/ taux de défaut (12 mois glissants) Moody’s du secteur Oil & Gas US et
iii/ indice VIX de volatilité implicite actions aux US. Avec un R² de 78% et une significativité
satisfaisante des coefficients, le modèle présente les sensibilités suivantes aux variables :
-
Hausse de +1 point du taux de défaut  +18 pb.
-
Hausse de +1 point de VIX  +3,3 pb.
-
Baisse de 1 $/baril de Brent  +0,7 pb.
L’écartement de 118 pb des spreads depuis juillet 2015 est expliqué pour plus de 50% par la
hausse du taux de défaut (passant de 1,3% à 5,7%), pour 30% par l’augmentation de la
volatilité implicite actions et 20% par la chute des cours du brut.
Actuellement, le spread théorique s’établit à 359 pb, soit 19 pb au-dessus du spread actuel
(340 pb). En d’autres termes, le spread actuel n’intègre pas encore pleinement les risques
associés à la dégradation du contexte de marché (hausse de la volatilité, chute des prix du
pétrole), ni à la croissance du taux de défaut sectoriel (cf. graphique de droite ci-dessous).
10 février 2016
47
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 12 : Modèle de spreads de crédit Oil & Gas en $
Spreads iBoxx $ Oil & Gas vs. taux de défaut Moody’s
6%
Modèle Natixis des spreads $ Oil & Gas
550
550
500
5%
4%
3%
2%
1%
0%
2008
450
450
400
400
350
350
300
300
250
250
200
200
150
150
100
2009
2010
2011
2012
2014
150
500
100
50
0
-50
-100
100
-150
2008 2008 2009 2010 2011 2011 2012 2013 2014 2014 2015
2015
Oil & Gas Moody's default rate (lhs, in %)
Difference (rhs)
iBoxx Oil & Gas US (rhs, in bp)
iBoxx $ Oil & Gas
Natixis model
Sources : Bloomberg, Natixis
Quelle prévision de spreads de crédit Oil & Gas ?
En nous appuyant sur notre modèle, nous avons établi dans le tableau ci-dessous des
simulations de spreads pour différents scénarios de prix du Brent et de taux de défaut. Selon
notre scénario principal qui implique une remontée du baril de brut vers 40 $/b à fin 2016, d’une
dégradation du taux de défaut du secteur à 10,7% et d’un indice de volatilité VIX à 25%, les
spreads de crédit IG Oil & Gas sont donc susceptibles de s’écarter de 79 pb pour atteindre
419 pb.
L’écartement peut s’avérer plus violent si les prix du pétrole continuent de se dégrader et si le
taux de défaut grimpe plus rapidement que notre prévision. A 20 $/b et un taux de défaut
sectoriel à 15%, le spread pourrait ainsi atteindre 511 pb, même avec une hypothèse optimiste
d’une volatilité actions à 25%. Or, si cette volatilité explose et dépasse 30%, on peut s’attendre
à un niveau de spread avoisinant 530 pb.
Graphique 13 : Simulation des spreads Oil & Gas US selon des scénarios de taux de défaut et de prix du pétrole à fin
2016
Current default rate : 5,7%
Current Oil & Gas spread : asw + 340bp
Degradation of default rate
Decreasing oil prices ($/bl)
80
60
50
40
30
20
Scale (as % of current level)
2%
234
247
254
261
268
275
> 130%
5%
288
302
309
316
322
329
110% < x < 130%
8%
343
356
363
370
377
384
90% < x < 110%
10%
379
393
399
406
413
420
70% < x < 90%
10.7%
392
405
412
419
426
433
< 70%
12%
415
429
436
443
449
456
470
483
490
497
504
511
15%
* assumption of VIX = 25%
baseline scenario : +79 bp vs current spread
Sources : Bloomberg, Natixis
10 février 2016
48
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Quels impacts sur le marché High Yield ?
Marché HY $ : des spreads larges par rapport à la fair-value de notre modèle
« classique »…
L’écartement des spreads HY $ observé depuis le S2 15 ne reflète pas la seule évolution des
taux de défaut HY (cf graphique 14 gauche). En modélisant les spreads HY $ en fonction du
VIX, du taux de défaut Moody’s, de la SLS, de la croissance mondiale et de l’évolution de la
dette nette des corporates US, nous parvenons à expliquer 93% des variations de spread sur
les 10 dernières années. Cependant, l’amplitude de l’écartement des spreads observé
depuis la fin de l’année 2015 n’est pas complètement expliquée (cf. graphique 14 droite) :
d’après notre modèle « classique », la fair-value des spreads HY $ s’établit à OAS+675 pb,
contre OAS+785 pb observé le 26/01/16, soit 110 pb de potentiel de resserrement
« théorique ».
Graphique 14 : Modèle de spreads de crédit HY $
Spread HY $ vs taux de défaut HY
Modèle Natixis sur les spreads HY $
2 100
16%
1 900
14%
1 700
1000
US HY spread
900
Natixis Model
12%
Jan-16
Aug-15
Oct-14
Mar-15
300
May-14
Moody's HY default rate (rhs)
Jul-13
US HY Oas spreads
400
Dec-13
0%
Feb-13
100
500
Apr-12
2%
2016
2015
2014
2013
2012
2011
2010
2009
2008
2007
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
300
600
Sep-12
4%
500
Jun-11
700
700
Nov-11
6%
Jan-11
8%
900
Aug-10
1 100
800
Oct-09
10%
Mar-10
1 300
May-09
1 500
Sources : Moody’s, Bloomberg, Natixis
Cette prime de 110 pb du marché du HY $ par rapport à notre modèle « classique » s’explique
cependant presque pour moitié par la part des secteurs Oil & Gas, Mining & Steel (OGMS)
dans les indices de crédit en $. En effet, les graphiques 15 à gauche pour l’IG et à droite pour le
segment HY témoignent d’une prime de risque significative de ces secteurs. En intégrant
l’impact de cette prime par catégorie de notation et au prorata des encours de dette dans les
indices, nous estimons l’impact de la prime OGMS sur l’ensemble de l’indice IG à 40 pb pour
l’indice IG et à 50 pb pour l’indice HY.
10 février 2016
49
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 15 : Prime de risque Oil & Gas sur le marché du crédit IG $ et HY $
Prime de risque par secteur sur le marché du crédit IG $
700
Spread par notation et par secteur, HY $
1800
Metals/Mining
1600
600
Steel
500
1400
1200
Construction
400
1000
Basic
800
Energy
600
300
200
Techno
Cap Goods
100
A
A-
Chemicals Forestry/Paper
Real Estate BuildingMat
Transport
Leisure
ServicesMedia Auto
Retail
Telecom
Consumer
Healthcare
BBB+
BBB
400
200
BB+
BBB-
BB
Energy
BB-
B+
Mining / Steel
B
B-
CCC+
Other
Sources : Bloomberg, Natixis
Si l’on retraite le spread observé de l’indice HY $ (785 pb) de l’impact du secteur OGMS
(50pb), nous obtenons alors un spread « hors prime OGMS » d’OAS+735 pb. Celui-ci
reste 60 pb plus large que la fair-value estimée (OAS+675 pb) par notre modèle
économétrique « classique ». Faut-il alors être acheteur de HY $ sur les niveaux actuels ?
… mais encore trop bas relativement au risque de défaut à fin 2016
Nous ne le croyons pas : en effet, si l’on suppose que le taux de défaut HY $ hors pétrole et
matière première devrait poursuivre son ascension pour atteindre 4,3% à fin 2016 (cf. scénario
central décrit ci-dessus), le spread fair-value à fin 2016 ressort à OAS+700 pb, en supposant
que les autres paramètres de notre modèle sont stables d’ici à la fin de l’année (VIX, SLS,
croissance mondiale notamment). Soit un potentiel de resserrement de 35 pb (vs le spread hors
prime OGMS de 735pb).
A supposer que la SLS se dégrade vers 15% en fin d’année et que le VIX remonte à 25%, avec
5,3% de taux de défaut hors Oil & Gas, Metals & Mining (scénario pessimiste), le spread fairvalue monte à 790 pb, soit un potentiel d’écartement de 55pb (vs le spread hors prime OGMS
de 735pb).
Il y a ainsi plus à perdre dans la seconde hypothèse qu’à gagner dans la première : le couple
rendement / risque ne nous semble donc pas encore suffisant pour être acheteur de HY $ (hors
Oil & Gas), d’autant que nous avons ici exclu toute contagion des secteurs Oil & Gas, Metals &
Mining vers les autres industries.
Quels risques pour le marché HY € ?
Il est difficilement concevable qu’un écartement des spreads HY $ ne soit pas accompagné
d’un effet de contagion sur les spreads HY en €. Historiquement, l’élasticité du HY € au HY $
est de l’ordre de 57%. Cependant, la dépendance accrue de l’indice HY $ au secteur pétrolier
par rapport à l’indice HY € a eu pour effet de diminuer cette élasticité, à « seulement » 37%
depuis 2013.
Notre modèle économétrique des spreads HY € basé sur le V2X, les spreads souverains
périphériques, le taux de défaut Moody’s, le taux de swap 10 ans et la BLS, indique que le
spread actuel est 68 pb au-dessus de sa fair-value (à asw+518 pb vs asw + 450 pb), dont 45 pb
de prime liée aux secteurs Oil & Gas et Mining & Steel.
10 février 2016
50
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Seulement, si on tient compte de la croissance du taux de défaut HY global à 6,2% à fin 2016
contre 3,4% actuellement, sous l’effet de la dégradation du taux de défaut US (à 7,8%), les
spreads HY en euro présentent un potentiel d’écartement de 20 pb pour atteindre asw + 540 pb
(cf. graphique ci-dessous à gauche).
Contrairement au marché HY $, il est difficile ici de définir un scénario beaucoup plus
pessimiste sur le marché du HY €, compte tenu du fait qu’une dégradation de la SLS aux EtatsUnis n’a aucune raison objective d’entraîner une détérioration de la BLS en Europe. Le seul
motif d’inquiétude proviendrait d’un risque de contagion des spreads HY $ vs le marché du HY
en € : dans notre scénario pessimiste, le risque d’écartement des spreads HY $ est de 120 pb
environ, ce qui se traduirait par 44 pb d’écartement supplémentaire des spreads HY €. Au total,
dans ce scénario pessimiste, l’excess return à horizon 1 an généré par le segment HY €
s’élèverait à 3,6%, contre 3,4% pour le HY $, ce qui constitue une performance
remarquable compte tenu d’une plus faible volatilité et d’un portage inférieur de 2,7% pour le
HY € vs $ (cf. graphique 16 droite).
Surpondérer le HY € vs $
Le graphique ci-dessous à droite montre, en effet, que, d’un point de vue rendement / risque, le
marché du HY € doit encore être privilégié par rapport au HY $, en dépit de la sousperformance de ce dernier depuis 2 mois. Ainsi, le rapport spread / volatilité (calculée sur 1 an)
est plus élevé sur le marché du HY € (1 point de plus environ que le HY $) et surtout l’excess
return en cas de scénario pessimiste rapporté à la volatilité des spreads est nettement plus
élevé en € qu’en $.
Graphique 16: Valorisation du marché HY € et comparaison avec le marché du HY $
Modèle Natixis sur l’évolution du spread HY €
850
6
HY euro spreads
Model
750
Ratio de Sharpe du HY € vs $ à 1 an
5
4
650
FV = 540 bp
550
3
2
450
1
350
0
Carry vs Vol
Oct-15
Mar-16
May-15
Jul-14
Dec-14
Feb-14
Apr-13
Sep-13
Jun-12
Nov-12
Jan-12
Mar-11
Aug-11
Oct-10
250
Excess return / Vol
$
€
Sources : Bloomberg, Natixis
10 février 2016
51
CROSS EXPERTISE RESEARCH
5. La baisse du pétrole sera-t-elle un jour un
soutien pour les actions ?
Sylvain Goyon
+33 1 58 55 04 62
[email protected]
Emilie Tetard
+33 1 58 19 98 15
[email protected]
L’année commence par un nouvel épisode dans le scénario chinois, avec des PMI décevants
qui ont entraîné dans leur sillage le Brent et le WTI qui subissaient déjà des pressions
baissières. L’impact sur les marchés actions est encore une fois négatif, avec des
performances YTD assez mal engagées (-7% pour l’EuroStoxx et pas loin de -5% pour le
S&P500 au 27 janvier 2016). Peut-on encore penser que, à travers les prix du pétrole, le
ralentissement chinois pourrait être favorable aux économies développées et être un
facteur de soutien pour les actions ?
Graphique 1 : Corrélation Brent - S&P 500
1.0
1.0
Corrélation positive - prédominance
des facteurs demande
0.8
0.8
0.5
0.5
0.3
0.3
0.0
0.0
-0.3
-0.3
-0.5
-0.8
-1.0
-0.5
-0.8
-1.0
Corrélation négative - prédominance
des facteurs d'offre
84
86
88
90
92
94
96
98
00
Corrélation sur 6 mois glissants, perf. hebdomadaires
02
04
06
08
10
12
14
16
Corrélation sur 1 an glissant, perf. hebdomadaires
Sources : Natixis, Datastream
L’analyse de la corrélation pétrole / actions montre que, dans l’histoire, il y a peu d’épisodes où
la corrélation pétrole/actions est restée durablement négative :
-
Pas vraiment de régime clair jusqu’à la crise de 2008.
-
Crise de 2008/09 : corrélation positive, les deux actifs (pétrole / actions) partageant des
drivers communs (demande mondiale, aversion pour le risque).
-
Depuis 2014, cette corrélation s’est affaiblie, avec l’apparition de facteurs idiosyncratiques
(excès d’offre, stratégie de l’OPEP) impactant négativement le prix du pétrole.
-
Plus récemment (depuis mi 2015), le ralentissement chinois, est venu impacter
simultanément le pétrole et les actions, à la baisse, renforçant ainsi la corrélation entre les
deux.
Ainsi, lorsque que la corrélation actions/pétrole est positive, on l’explique par des facteurs
communs (demande mondiale, aversion pour le risque). Lorsque ces actifs sont impactés par
des facteurs idiosyncratiques (facteurs d’offre de pétrole, croissance des bénéfices par action),
la corrélation est au mieux nulle. A-t-on vu dans l’histoire des épisodes où la baisse du prix
du pétrole, a eu un impact significativement positif sur les actions ?
Sur le graphique ci-contre, chaque point correspond à une date (un point par semaine) depuis
1986, l’abscisse à la performance sur 6 mois du brent, et l’ordonnée à celle du S&P 500 (le
résultat serait similaire avec l’EuroStoxx).
10 février 2016
52
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Les épisodes de forte baisse du pétrole sont les suivants :
-
1986, qui présente de nombreux points communs avec la situation actuelle (cf Record du 15
juin 2015 : Dollar et pétrole : The field of honor is never a pretty sight) est le seul
épisode qui a vu une hausse durable des marchés actions coïncider avec un pétrole en
baisse, mais difficile d’associer les deux (en 1987 alors que le pétrole remontait, les actions
continuaient de performer, comme décrit plus haut, corrélation peu significative).
-
2008/09, baisse très nette des deux actifs (expliquée par des facteurs communs).
-
Depuis septembre 2014, la tendance n’est pas très claire, ceci tenant probablement à la
nature de la baisse des prix du pétrole que l’on a pu observer.
Graphique 1 :
S&P500 - performance sur 6mois
60%
40%
20%
0%
-20%
-40%
-60%
-100%
-50%
0%
50%
1986 - today Brent
jan- 86
- mai 87 sursep
08 - avr 09
performance
6 mois
100%
150%
sep 14 - today
Source : Natixis
D’une part, celle-ci n’est pas purement idiosyncratique, et s’explique pour 40% par des facteurs
de demande, comme il a été montré en amont de l’étude. Ces facteurs impactent négativement
le pétrole, mais également les actions. Mais lorsque la baisse du pétrole est expliquée par des
facteurs d’offre (ou par des facteurs idiosyncratiques, climat notamment), ce qui est
majoritairement le cas aujourd’hui, les entreprises devraient profiter de la baisse des coûts
et du regain de consommation des ménages. Pourquoi ne voit-on au mieux qu’une
corrélation nulle ? Nous voyons deux explications possibles :
-
Sectorielle : si certains secteurs, essentiellement domestiques bénéficient de la baisse, ceux
liés à la production d’énergie en souffrent.
-
Difficultés des pays exportateurs de pétrole, et donc baisse de la demande en provenance
de ces pays. Pour les entreprises des pays développés, l’impact compense donc pour partie
le surcroît de demande domestique lié à la baisse des prix du pétrole.
A l’échelle des indices, l’impact semble donc globalement faible, il faudra avoir une analyse
plus fine par secteur et par zone d’exposition (émergente versus développée) pour
trouver des vrais gagnants à la baisse des cours du pétrole.
Quelques pistes pour détecter les gagnants. Si l’année 2015 s’est révélée convenable en
Europe avec une progression de l’ordre de 4% du Stoxx 600 (hors dividende), le début de
l’année 2016 a largement effacé ces gains. Force est de constater que l’accroissement du
revenu réel de la zone Euro ne s’est pas retrouvé entièrement dans les chiffres de croissance
du PIB (voir la contribution de Patrick Artus à cette étude).
10 février 2016
53
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Les explications de ce décalage apporte un éclairage intéressant sur les secteurs / groupes
potentiellement gagnants de cette situation. La baisse du prix du pétrole a bénéficié à la
consommation : en conséquence il convient d’être acheteurs des thématiques liées
(consommation discrétionnaire dont luxe et automobile, la consommation de base avec une
prédilection pour les spiritueux et la distribution alimentaire pour bénéficier de l’inflation
alimentaire positive ) sur les marchés importateurs nets d’énergie (Europe, Japon, Chine, Asie
Emergente et Etats-Unis). Concomitamment, des thématiques connexes liées au pouvoir
d’achat bénéficient également de cette nouvelle donne avec en premier lieu les loisirs
(media, jeux video et hors aléas terroriste le tourisme/ hôtellerie).
En ce qui concerne les entreprises, la baisse des importations d’énergie a réduit de 1,0% de
PIB la valeur de la consommation d’énergie, et donc augmenté d’autant leur résultat
d’exploitation. Certes cette répartition n’est pas du tout homogène avec, comme grands
gagnants, les secteurs fortement consommateurs d’énergie (compagnies aériennes, cimentiers,
transport routier) et, à l’autre extrémité du spectre, un impact nul pour les activités de services.
Mais ce supplément de cash-flow opérationnel n’a pas été utilisé pour investir ce qui est
d’ailleurs perceptible au regard de la faiblesse du cycle d’investissement productif (0,5% de
contribution au PIB) comparé aux reprises précédentes (1,0% de PIB en 1995-1998-2006) en
zone Euro. Dans ce cadre, il convient de se montrer prudent sur les secteurs des biens
d’équipements et, bien que cela sonne comme une évidence, sur ceux liés à
l’investissement dans le secteur pétrolier (services pétroliers, tubistes).
Enfin le « déficit » de croissance de la zone Euro s’explique en dernier lieu par la perte de
débouchés auprès des pays exportateurs de pétrole. Le phénomène est moins marqué à
destination des pays non membres de l’OPEP (Brésil, Canada, Colombie, Norvège,
Mexique…) qui n’ont reculé que de 0,1% de PIB. Ceci nous conforte dans notre prudence
envers les secteurs fortement exposés à ces marchés (agroalimentaire, brasseurs pour
les pays non OPEP).
10 février 2016
54
CROSS EXPERTISE RESEARCH
6. Quels secteurs seront les gagnants ?
BTP / Concessions : un impact globalement positif
Gregoire Thibault
+33 1 58 55 35 45
[email protected]
Pour le secteur BTP/Concessions, l’impact est globalement positif. Les
gagnants « naturels » de cet environnement sont les autoroutes et les aéroports, qui
bénéficieront d’un trafic soutenu par le pétrole bas. Les groupes actifs à la fois dans la
gestion autoroutière et aéroportuaire, comme Vinci et Atlantia, en profiteront donc à
double titre. En revanche, cette situation sera, selon nous, défavorable à Groupe
Eurotunnel, inversement corrélée au prix du baril. Côté Contracting (BTP), impact neutre
dans l’ensemble, mis à part pour certaines zones géographiques telles que l’Afrique, où
la capacité financière des clients est dépendante des cours du pétrole.
Concessions : quel trafic !
Autoroutes : ça roule
Après une excellente année 2015 (hausse de près de 3% sur le réseau français), le trafic 2016
devrait rester bien orienté: pétrole bas, certes, mais aussi léger rebond économique, effet
rattrapage des poids lourds (toujours < niveaux d’avant crise), effet tourisme (vu le contexte
géopolitique, les gens auront tendance à rester sur la côte nord-méditerranéenne) et
développement du co-voiturage et du transport en autobus (Loi Macron). Sur ce secteur, nous
privilégions Eiffage (top pick sectoriel, Acheter, objectif de cours 74 €) et Vinci (Acheter,
objectif de cours 70 €), devant Atlantia (Neutre, objectif de cours 24 €) et Abertis (Alléger,
objectif de cours 13,7 €), essentiellement sur des critères de valorisation.
Pour 2016, nous tablons à ce stade sur une croissance du trafic de 1,5%e en France et en
Italie, et de +2,5%e en Espagne (rebond économique et effet de rattrapage plus forts). Toutes
choses égales par ailleurs dans nos valorisations, 1 point de croissance trafic en plus en 2016 a
l’impact positif suivant sur nos objectifs de cours : +1%e pour Eiffage, Vinci et Abertis, +2%e
pour Atlantia.
Aéroports : Paris gagnant
Un pétrole bas profite aux compagnies aériennes, allégeant leurs coûts et, in fine, drainant plus
de trafic… ce dont profitent les aéroports. Un pétrole plus bas, une essence moins chère, c’est
aussi plus de revenus disponibles pour les passagers, donc un pouvoir d’achat plus fort dans
les boutiques des aéroports. Sur ce segment, nous privilégions ADP (Acheter, objectif de
cours 125 €) et jouons le pair trade Long ADP / Short Fraport (Neutre, objectif de cours
61 €). Cet arbitrage s’explique par une meilleure visibilité réglementaire (contrat de régulation
économique pour 5 ans signé l’été dernier), un levier plus important sur les activités
commerciales (positionnement spécifique de Paris et du luxe « à la française ») et plus de
triggers (spéculation ?) pour ADP. Au contraire, Fraport devrait continuer de pâtir à nos yeux
d’une politique commerciale décevante et d’un risque réglementaire (pas de visibilité sur les
redevances, happy end fin S1 16 ?, alors que les Capex vont augmenter à partir de 2016 avec
les travaux du Terminal 3 à Francfort).
Au niveau du trafic, l’année 2015 aura été bien orientée : +3,0% à ADP malgré la baisse de fin
d’année post attaques terroristes, +2,5% à Francfort (impact négatif de la grève Lufthansa en
novembre). Pour 2016, nous tablons sur un trafic en hausse de 2,5%e à Paris (en espérant que
le retour à la normale post terrorisme se matérialise rapidement) et 2,5%e à Francfort.
Toutes choses égales par ailleurs dans nos SOP, 1 point de croissance trafic en plus en 2016
(+3,5%e vs +2,5%e dans notre cas de base) a un impact positif sur l’objectif de cours d’ADP de
+3%e, et sur celui de Fraport de +4%e.
10 février 2016
55
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Groupe Eurotunnel, un « short » pétrole bas
Le poste énergie des compagnies de ferries, concurrentes de GET, représente ~25%e de leurs
Opex. Le pétrole bas leur donne donc de la marge de manœuvre pour être plus agressives sur
les prix. GET pourrait donc avoir plus de mal à faire passer des hausses de prix sur ses
navettes aussi importantes que ces dernières années (le yield, focus du groupe).
Au final, malgré des perspectives opérationnelles moyen terme solides, nous restons prudents
sur GET (Neutre, objectif de cours 12 €). Le court terme est incertain, la guidance EBITDA 15
et 16 ambitieuse, et le consensus trop élevé.
Contracting : attention aux émergents
La situation de pétrole bas est, dans l’ensemble, neutre pour le contracting. La baisse du prix
du bitume, positive à court terme pour les groupes, finit par être « redonnée » aux clients.
Toutefois, en termes d’activité, comme en 2015, certaines zones émergentes (productrices de
matières premières) devraient continuer de souffrir. Nous pensons en premier lieu à l’Afrique,
dont la capacité financière de certains clients, publics et privés, est dépendante des cours du
pétrole. La faiblesse du baril et des matières premières entraîne donc une réduction des
volumes et des marges. Ce constat est vrai également sur des zones telles que l’Amérique du
Sud ou la Russie.
La société de notre univers de couverture la plus exposée aux émergents est, de très loin,
Salini Impregilo (Neutre, objectif de cours 4,4 €) : l’Afrique et l’Amérique latine ont
représenté respectivement 33% et 14% de l’activité 2014. Dans une moindre mesure, Vinci et
Bouygues Construction / Colas seront encore impactés en 2016: rappelons que l’Afrique a
représenté en 2014 environ 5%e de leur activité.
10 février 2016
56
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Aéronautique : un pétrole à 30 $, une aubaine pour l’aérien
Antoine Boivin
Champeaux
Le pétrole n’est plus le premier poste de coûts
+33 1 58 55 33 67
[email protected]
Les compagnies aériennes n’ont jamais été aussi rentables
Au niveau actuel du baril, le poste carburant ne représente plus que 18% des coûts
opérationnels des compagnies aériennes contre 35/40% il y a encore 18 mois. Dans ces
conditions, les compagnies aériennes sont déjà extrêmement rentables, à commencer par
2015, et ceci va se poursuivre.
Tableau 1 : Résultats net cumulés des compagnies aériennes adhérentes à IATA vs variation trafic mondial
En Md$
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016e
Résultat net
Trafic mondial (var. %)
-26,1
1,9
-4,6
-1,1
17,3
8,0
8,3
6,3
9,2
5,3
10,7
5,7
17,3
6,0
33,0
6,7
36,3
6,9
Souce : IATA
Et la forte hausse du trafic permet de déclencher les nouvelles commandes même si les
avions sont gardés plus longtemps
Historiquement, les compagnies aériennes dépensent plus en nouvelles commandes et
maintenance quand elles génèrent plus de profits et que le trafic est soutenu, hypothèse très
probable en raison de la baisse programmée du prix des billets. Ceci devrait largement
compenser le fait que le marché du renouvellement de flotte (40% du marché) sera
probablement moins porteur, l’incitation à changer d’avion pour des modèles récents plus
économes étant moins forte.
Pour ce qui est de la maintenance, les motoristes et les sociétés pondérées en après-vente
(Safran, MTU Aeroengines, Zodiac Aerospace et dans une moindre mesure Rolls-Royce) vont
profiter à plein de la meilleure santé des compagnies et du fait qu’elles garderont les avions en
service un peu plus longtemps.
La baisse du pétrole est globalement neutre pour la défense
Les émergents producteurs et importateurs dans des situations opposées
En matière de défense, le pétrole bon marché n’est sans doute pas aussi favorable, notamment
pour ce qui est des clients producteurs de pétrole (Arabie Saoudite, Brésil,..). Ainsi, le budget
de défense saoudien 2016 évolue comme le PIB, en baisse sensible de l’ordre de 25% par
rapport aux plus hauts de 2014. Il nous semble toutefois que les réductions affectent plus les
opérations que les achats d’armement en tant que tels.
Cela étant, d’autres pays émergents tels l’Inde ou la Chine devraient profiter pleinement de la
baisse du prix du pétrole via des importations moins chères. Ainsi, le déficit courant de l’Inde
est tombé à 1% du PIB.
Le solde net de la baisse des prix du pétrole dans les pays émergents (environ 30% de la
dépense mondiale d’armement) est probablement relativement neutre, ceux-ci devant continuer
de progresser à 5/10% par an selon nous.
Les pays occidentaux ont sensiblement revu leurs budgets de défense à la hausse
Par ailleurs, les tensions actuelles ne présagent pas d’un ralentissement, mais plutôt d’une
légère accélération des dépenses mondiales d’équipement puisque les pays occidentaux ont
stoppé la baisse de leurs budgets.
10 février 2016
57
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Par exemple, aux Etats-Unis, qui restent le premier acheteur d’équipement de défense au
monde (35% du marché global), le Congrès a voté une hausse pour l’exercice en cours et les
prochaines années, ce qui n’était pas arrivé depuis 2010.
Nos recommandations restent différenciées
Des convictions fortes sur quatre valeurs
Au sein de notre secteur, nous privilégions MTU Aeroengines (Acheter, objectif de cours
105 €), Airbus Group (Acheter, objectif de cours 80 € ), Thales (Acheter, objectif de cours
80 €) et Dassault Aviation (Acheter, objectif de cours 1 260 €).
Mais une prudence sur les sept autres de notre échantillon
Nous restons plus prudents sur Zodiac Aerospace (Neutre, objectif de cours 22,5 € ;),
Safran (Neutre, objectif de cours 66 €), Rolls-Royce (Neutre, objectif de cours 600 p), LISI
(Neutre, objectif de cours 25 €), BAE Systems (Alléger, objectif de cours 450 p),
Finmeccanica (Neutre, objectif de cours 12,5 €), Cobham (Neutre, objectif de cours 300 p)
en raison de problèmes d’exécution, de stratégie ou de niveaux de valorisation.
10 février 2016
58
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Automobile: globalement positif
Georges Dieng
La faiblesse prolongée des prix du pétrole a un impact globalement positif sur le secteur
automobile qu’il faut toutefois relativiser en raison de certains effets contraires (en particulier la
pression accrue sur les économies émergentes très dépendantes des hydrocarbures). Dans un
Michael Foundoukidis contexte de coûts de financement toujours attractifs post QE 2, ceci devrait contribuer à la
+33 1 58 55 04 92
poursuite de la reprise de la demande automobile en Europe (+3%e), avec un effet de levier
[email protected]
plus sensible dans le mass market (Peugeot, Renault, FCA) que dans le premium (BMW,
Mercedes, Audi). Grâce à son cycle produits particulièrement dynamique en 2016, Renault
(Acheter, objectif de cours 120 €) devrait en être le principal bénéficiaire et reste notre
top pick parmi les constructeurs européens.
+33 1 58 55 05 34
[email protected]
L’Europe sera également le moteur de la croissance bénéficiaire des équipementiers première
monte qui devraient, en outre, tirer profit, de la baisse attendue des coûts matières liées aux
dérivés pétrochimiques, après renégociation avec leurs clients constructeurs. Faurecia
(Acheter, objectif de cours 52 €) et Plastic Omnium (Acheter, objectif de cours 38 €)
pourraient ici être les principaux gagnants compte tenu du poids plus important du
plastique dans leurs achats matières.
Enfin, les pneumaticiens pourraient bénéficier d’une dynamique plus favorable sur le marché
remplacement grâce à un enrichissement tendanciel du mix et à une hausse des distances
parcourues. Pour autant, rappelons également que ce contexte a des effets pervers sur
l’environnement prix qui resterait favorable aux acteurs low cost (essentiellement chinois) au
détriment des acteurs premium. Au global, il est donc difficile d’identifier de vrais gagnants
à court terme sur ce segment. Si Nokian Tyres (Neutre, objectif de cours 34 €) a
beaucoup souffert ces deux dernières années de son exposition à la Russie, celle-ci est
aujourd’hui beaucoup plus limitée (<20%e) et il est probable que le point bas ait été
touché en 2015.
Plus d’impact sur le mix que sur la demande
S’il est communément admis que les ventes de voitures sont inversement corrélées au prix du
pétrole, il est important de nuancer ce postulat car cette relation est variable selon les pays et
de nombreux autres facteurs plus décisifs, (taux d’intérêt, perspectives d’emploi…) entrent en
ligne de compte dans l’acte d’achat automobile.
D’une manière générale, la baisse des prix du pétrole a permis de réduire le budget carburant
des consommateurs, accroissant ainsi leur pouvoir d’achat et leur propension à consommer, ce
supplément étant soit réalloué à l’achat d’autres biens soit au financement de l’achat d’un
nouveau véhicule. Ce gain de solvabilité est plus sensible pour les consommateurs à revenus
faibles ou moyens, incités à conduire davantage et à renouveler plus volontiers leur véhicule,
généralement d’un âge avancé. Avec des conditions de financement toujours attractives grâce
au maintien de la politique ultra-accommodante de la BCE, ceci devrait soutenir la demande en
2016, notamment dans les segments du mass market en Europe. Ce facteur de soutien est
moins évident pour le segment premium dont les clients disposent déjà de moyens financiers
élevés et dont la décision d’achat n’est que marginalement influencée par l’économie induite
par la baisse des prix des carburants (estimée entre 50 et 100 €/mois selon le type de véhicule
et le kilométrage moyen parcouru).
Cette sensibilité de la demande au prix du pétrole est variable selon l’importance de la
fiscalité qui pèse sur les carburants (ces taxes ne dépendant pas des fluctuations du prix du
baril) et s’avère plus tangible en Amérique du Nord où la part des taxes ne représente
qu’environ 15% du prix final à la pompe contre 50% à 70% en Europe. Le consommateur
américain est de ce fait plus réactif face à la baisse des prix du pétrole et du coût d’usage qui
en découle.
10 février 2016
59
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Avec près de 95% des achats d’automobiles financés à crédit, la forte dynamique récente du
marché US est principalement imputable à des conditions de financement particulièrement
attractives (taux d’intérêt historiquement bas, rallongement des durées de leasing, conditions
d’octroi de crédit plus faciles…). En revanche, la faiblesse des prix de l’essence a eu une
influence directe sur la montée en puissance des achats de véhicules plus grands et plus
énergivores tels que les SUVs, pick-up trucks, très recherchés car offrant plus de place et un
sentiment accru de sécurité. Les ventes de light trucks ont ainsi représenté 56,6% de la
demande de véhicules légers en 2015 alors que le prix de l’essence s’établissait à 2,4 $/gallon,
contre un point bas à 42% du marché en juin/juillet 2008 avec un prix de l’essence à 4 $/gallon.
Graphique 2 : Evolution comparée du prix du gallon et du poids des light trucks dans lesventes totales (Base 100 janvier
2008)
150
65%
60%
55%
50%
45%
40%
35%
30%
25%
20%
125
100
75
Prix essence ($/gl)
déc.-15
juil.-15
févr.-15
sept.-14
avr.-14
nov.-13
juin-13
janv.-13
août-12
mars-12
oct.-11
mai-11
déc.-10
juil.-10
févr.-10
sept.-09
avr.-09
nov.-08
juin-08
janv.-08
50
Poids light trucks
Sources : Automotive News, Datastream, Natixis
Cet enrichissement du mix a largement contribué à l’amélioration de la rentabilité des
constructeurs américains (Ford, GM) qui dégagent désormais des marges à deux chiffres en
Amérique du Nord. Cette situation a conduit FCA dont la rentabilité dans la zone Nafta reste à
la traîne (~6% en 2015) à transformer son outil industriel afin de mettre ses capacités de
production en phase avec une tendance de fond jugée désormais permanente.
En ce qui concerne la demande proprement dite, même si les conditions de financement restent
avantageuses (le relèvement des taux d’intérêt de la Fed pouvant s’avérer plus graduel
qu’initialement prévu) et le prix de l’essence bas, le cycle haussier du marché américain entamé
en 2010, arrive à son terme, le record historique de 2000 ayant été dépassé en 2015. Nous
anticipons une hausse limitée de 1,5% en 2016 avant un retournement cyclique en 2017/18.
Côté équipementiers première monte, ces derniers pourraient, sans surprise, bénéficier d’un
momentum de production plus élevé, mais il est difficile d’identifier un gagnant particulier. Parmi
les pneumaticiens, et au-delà de l’impact – limité – sur la première monte, il existe
effectivement, dans un environnement macroéconomique porteur, une corrélation forte entre les
distances parcourues et l’évolution des prix de l’essence à la pompe, comme l’ont montré les
derniers mois aux Etats-Unis.
Cette hausse des distances parcourues favorise la croissance du segment pneumatiques
remplacement (près de 80% des volumes des pneumaticiens dans les économies matures et
une part encore supérieure de leurs profits). Pour autant, si l’impact peut être notable aux EtatsUnis, il l’est moins en Europe où le poids des taxes a tendance à effacer une part significative
de la baisse des carburants (le recul vs 2012 s’établit à environ 30% contre plus de 50% aux
Etats-Unis) et donc gommer l’effet induit sur la demande de remplacement. Dans ce contexte, il
semble donc, qu’au-delà d’une baisse des coûts de carburant, l’environnement
macroéconomique reste prépondérant (la hausse des distances parcourues a d’ailleurs
démarré en 2014… avant l’amorce de la baisse des prix des carburants). Enfin, à plus long
10 février 2016
60
CROSS EXPERTISE RESEARCH
terme, les manufacturiers devraient profiter d’une amélioration du mix au profit des SUVs dont
les dimensions des pneumatiques sont plus grandes.
Graphique 3 : Evolution des distances parcourues aux US (échelle de droite) vs le prix de l’essence (échelle de gauche)
4,5
4
3,1
3,5
3
3
2,5
2
Prix de l'Essence (USD/Gallon)
oct.-15
juil.-15
avr.-15
janv.-15
oct.-14
juil.-14
avr.-14
janv.-14
oct.-13
juil.-13
avr.-13
janv.-13
oct.-12
juil.-12
avr.-12
janv.-12
oct.-11
juil.-11
avr.-11
2,9
janv.-11
1,5
Distances parcourues (en millions de miles)
Sources : FactSet, EIA, USDT
Un effet bénéfique sur les coûts opérationnels
L’ensemble de l’industrie devrait tirer parti de l’impact de la baisse des prix du pétrole
sur ses coûts d’achats (notamment via les clauses d’indexation auprès des fournisseurs)
ainsi que sur ses dépenses énergétiques et logistiques. A ce stade, les constructeurs n’ont
pas encore communiqué sur leurs guidances 2016, mais ne semblent pas avoir intégré
d’hypothèses particulièrement favorables à ce titre, sans doute en raison d’un environnement
toujours très compétitif. Nous n’identifions pas de forte discrimination entre constructeurs sur
cette thématique, qui devrait toutefois bénéficier davantage aux généralistes (Peugeot, Renault,
FCA, VW) compte tenu de la relative faiblesse de leur rentabilité automobile.
Parmi les équipementiers, les acteurs les plus exposés au plastique, comme Plastic Omnium et
Faurecia, devraient ressortir gagnants d’un tel environnement puisque ces derniers estiment
pouvoir conserver entre 20 et 30% des gains après leurs négociations avec les constructeurs.
Rappelons qu’il s’agit toutefois pour une grande majorité de plastiques complexes et que, par
conséquent, la corrélation des prix n’est pas parfaite avec le sous-jacent pétrole.
Enfin, chez les pneumaticiens, nous continuons de penser qu’un tel environnement est
défavorable car ce contexte de matières premières peu chères favorise les acteurs low cost au
détriment des acteurs premium comme Michelin et pourrait accentuer la pression sur les prix,
obérant les gains obtenus sur les coûts matières.
Des effets négatifs à prendre en compte
La forte chute des prix du pétrole n’a pas que des effets positifs sur l’industrie automobile.
En termes de demande, il faut en effet tenir compte de son impact négatif sur les
économies émergentes fortement dépendantes des matières premières et des
hydrocarbures en particulier. La Russie est en première ligne, avec une économie rendue
exsangue par les sanctions internationales et l’effondrement du rouble : la demande automobile
s’est effondrée de 35,6% en 2015, portant à 45% la chute cumulée du marché depuis fin 2012.
Cette chute devrait se poursuivre en 2016 (-5% à -10% attendus selon les constructeurs),
sombre perspective qui conduit le gouvernement russe à envisager un vaste plan de soutien de
50 Md de roubles (611 M€) au secteur automobile, dont les contours restent à préciser. On
notera toutefois que le poids de la Russie dans les ventes des principaux constructeurs s’est
fortement atténué, ne représentant que 2 à 3% du CA des constructeurs en 2015. La poursuite
10 février 2016
61
CROSS EXPERTISE RESEARCH
d’une demande vigoureuse en Europe en 2016 fera plus que compenser le manque à gagner
résultant de la déprime du marché automobile russe.
Par ailleurs, en tirant le mix des ventes vers des véhicules plus énergivores, la baisse
continue des prix du pétrole, pourrait, à terme, poser un véritable problème aux
constructeurs automobiles, face au durcissement des normes environnementales (CO2
en particulier). La demande accrue de crossovers et SUV (reflet d’une évolution sociétale
autant que d’un effet d’offre) tend en effet, à accroître le poids moyen des flottes en dépit des
efforts d’allégement visibles sur les nouvelles générations de véhicule. En outre, la faiblesse
des prix des carburants réduit l’intérêt (déjà limité) que portent les consommateurs aux
motorisations alternatives (électriques, hybrides, hybrides rechargeables, fuel cell…) qui restent
sensiblement plus onéreuses que les motorisations thermiques, malgré les incitations fiscales
octroyées dans certains pays. Ceci pourrait retarder le développement de masse de ces
technologies, rendant plus difficile la rentabilisation des lourds investissements consentis par
l’industrie automobile mondiale. Au total, les constructeurs devront surmonter le défi lié à la
divergence accrue entre la demande des consommateurs et une offre partiellement dictée par
les régulateurs qui ne comptent pas relâcher leur pression, surtout depuis le scandale
Volkswagen. Rappelons que les objectifs CAFE (Corporate Average Fuel Economy) imposés à
l’industrie aux Etats-Unis visent une performance de 35,5 miles per gallon (~154g CO 2/km) pour
l’année modèle 2016 et de 54,5 mpg (~98g CO 2/km) à l’horizon 2025 tandis qu’en Europe, la
limite d’émission de CO2 passe de 130g CO2 en 2015 à 95g CO2 en 2020/21 et sans doute
68/78g en 2025.
10 février 2016
62
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Food-HPC : un double tailwind surtout pour Unilever
Pierre Tegnér
+33 1 58 55 24 34
[email protected]
La baisse des prix du pétrole est favorable au secteur Food HPC tant boursièrement
qu’opérationnellement. Certes, la baisse des coûts matières peut comprimer l’effet prix et donc
les taux de croissance organique mais entre l’impact positif sur la consommation et le bénéfice
sur les marges, un pétrole bas reste positif. Il enclenche un cycle favorable de « modest growth,
soft inflation » qui rééquilibre fortement le rapport entre croissance et rentabilité et serait un
support aux niveaux de valorisation actuels. Ce rééquilibrage est visible sur 2015 et 2016 où
tous les groupes de notre secteur devraient générer une croissance organique moyenne et
assez homogène (4,2%e) mais aussi une progression moyenne de leur MOP courante de
30 pb. Il serait naïf de penser que la baisse du prix du pétrole est la seule raison mais c’est une
aide indiscutable malgré le ralentissement macroéconomique qu’elle reflète. Unilever (Neutre,
objectif de cours 41 €) est, selon nous, la valeur pétrole du secteur.
Surperformance du secteur quand le pétrole baisse : ça marche encore !
Comme mis en avant à plusieurs reprises, la corrélation boursière entre la performance
relative des valeurs du Food HPC et l’évolution des prix du pétrole est fortement négative
depuis au moins 2007. tant pour des raisons boursières que fondamentales.
Boursièrement, en période de baisse des prix du pétrole, les investisseurs se reportent
sur les défensives au détriment des cycliques. Les raisons fondamentales tiennent au
fait qu’une grande partie des coûts matières sont eux-mêmes corrélés à l’évolution du
prix du pétrole. Le risque de déflation est présent dans l’esprit de la majorité des investisseurs.
Mais il ne faut pas négliger l’impact positif des baisses de coûts sur les marges, même si une
partie sera redonnée au consommateur, ainsi que l’effet indirect sur le pouvoir d’achat et donc
sur la croissance, a fortiori dans les pays matures. Au total, si un prix bas du pétrole comprime
les perspectives de croissance organique à travers l’effet prix, nous pensons qu’en « net »,
l’impact est positif sur les résultats.
Nous pensons qu’en net, l’effet restera bénéfique sur 2016 puisqu’à ce stade la baisse
moyenne de leur panier de devises (effet devises de -2% à -4% sur le CA total des groupes
européens de Food HPC), est de loin moins forte que la division par 2 des prix du pétrole.
Unilever est le groupe le plus sensible au pétrole en raison de son mix-produits. Le titre
est certes identifié comme une valeur pays émergents mais boursièrement sa corrélation avec
l’évolution du prix du pétrole est fortement négative, en raison de la sensibilité de ses coûts aux
matières premières directement et indirectement liées au pétrole.
« Food for fuel » : matières agricoles ? ou pétrole ?
L’impact opérationnel le plus important et le plus visible d’un prix du pétrole bas concerne les
coûts matières. Mais l’impact peut aussi être positif sur l’inflation sous-jacente des coûts fixes.
Les pays émergents et notamment ceux d’Amérique latine subissent un phénomène d’inflation
importée qui pénalise la consommation. Mais dans des pays comme le Brésil, le Mexique ou
l’Indonésie, on observe depuis quelques mois un ralentissement de la hausse des salaires
nominaux aussi.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les groupes de notre univers transforment
essentiellement des matières premières corrélées au pétrole soit directement (notamment
les oléagineux (soja, maïs et huiles de palme dont les cours sont de plus en plus dépendants
de l’évolution des prix du pétrole depuis l’émergence des biocarburants) soit indirectement (le
packaging et les pétrochimiques).
10 février 2016
63
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Les achats matières représentent 20% à 40% du CA des groupes européens du Food
HPC et ceux dont les prix sont corrélés directement et indirectement au pétrole
représentent en moyenne 30% des achats matières des larges caps européennes du Food
HPC.
Unilever est le plus exposé au pétrole avec près de 45% de ses achats corrélés directement et
indirectement au pétrole. Son mix-produits (lessives, aides culinaires, sauces, margarines,
cosmétiques) combiné à son positionnement mass market expliquent le poids important des
plastiques, pétrochimiques et huiles végétales dans ses achats matières. Le CFO du groupe a
plusieurs fois déclaré en 2015 que les achats directement corrélés au baril représentaient 20%
à 25% des achats du groupe. Mais ces achats ne comprennent pas les huiles végétales qui
représentent, selon nos estimations, près de 20% des achats du groupe. Nous y incluons les
huiles végétales, les pétrochimiques, le PET et les autres plastiques.
Aussi, une baisse de 10% des prix des achats corrélés au pétrole a un impact brut de +200 pb
sur la MOP courante d’Unilever ; ce qui représente une hausse de 14% de son résultat
opérationnel courant.
Tableau 1 : Décomposition des achats matières en % du CA : Nestlé et L’Oréal sont les moins sensibles
En % du CA
Unilever
Danone
Nestlé
Henkel
Corrélé au pétrole brut
Dont huiles végétales
Dont autres produits corrélés au pétrole brut
Matières premières agricoles
Dont lait
Dont spécialités (café, thé, fruits, cacao)
Dont autres matières premières agricoles
Autres
Total achats
20
7
13
8
2
5
2
10
38,5
8
0
8
21
15
3
2
9
38,5
5
1
4
25
7
13
5
5
35,9
11
0
11
0
0
0
0
19
30
11
0
11
0
0
0
0
14
25
6
0
6
0
0
0
0
15
20
5
0
5
0
0
0
0
12
16
12
29
(1) Corrélé au pétrole brut
(2) Matières premières agricoles
(3) Emballage non corrélé directement au pétrole brut
(4) Autres
(1)+(2)+(3)+(4) = Total achats
20
8
5
6
38,5
8
21
5
4
38,5
5
25
4
0
34,9
11
0
2
18
30
11
0
3
12
25
6
0
5
10
20
5
0
4
8
16
29
13
8
5
11
7
5
9
4
4
10
8
2
11
8
3
10
5
5
8
4
4
Emballage avec achats
Dont corrélé au pétrole brut
Dont non corrélé au pétrole brut
Reckitt Beiersdorf
L'Oréal Moyenne
9
8
10
Sources : Sociétés, Natixis
Net de l’effet déflationniste, l’impact est positif
Un consensus a émergé depuis fin 2014 autour de l’idée que le risque déflationniste était
le principal risque pour le secteur.
 Nous ne souscrivons pas à cette idée sans pour autant occulter ce risque. L’impact
négatif de la déflation sur la croissance organique est indéniable et c’est ce qui
explique que la croissance organique moyenne des groupes européens du Food HPC
soit passée de 5,5% sur 2011/12 à 5% en 2013 puis à 4,2% sur 2015 et 2016e. Mais
nous pensons que c’est en grande partie un « faux problème ». Nous restons en effet
plus sensibles au BPA, à la rentabilité opérationnelle, au FCF opérationnel et au ROIC et la
croissance organique n’est qu’un des moyens d’en apprécier la qualité et la pérennité.
 Pour une fois, la baisse des prix des commodités n’est pas répercutée sur les prix de
vente, sauf en Europe. L’explication officielle est la nécessité de couvrir l’inflation
locale qui est générée par la baisse des devises par rapport au dollar US. Mais cela ne
peut expliquer les effets prix constatés sur les 9M, dans un contexte de redressement
10 février 2016
64
CROSS EXPERTISE RESEARCH
des devises (elles n’ont baissé qu’à partir d’août !). En outre l’impact devises qui est
actuellement négatif est inférieur à la baisse des coûts matières et surtout de celles
corrélées au pétrole.
 L’appréciation du USD crée conjoncturellement un environnement concurrentiel peu
favorable aux baisses de prix massives. Les groupes nord-américains (P&G, Mondelez,
Colgate, PepsiCo, Coca-Cola, etc.) qui sont les principaux concurrents mondiaux des
groupes européens font face à un dollar fort qui pénalise fortement leurs résultats. Lors de
ses résultats du T2 fiscal, P&G a indiqué que le dollar allait réduire son BPA courant de 10%
sur l’exercice fiscal et qu’il allait compenser une partie de cet effet par du « pricing »
(essentiellement dans les émergents) et par des économies de coûts. Bien que ce soit une
erreur selon nous (le consommateur n’a que faire de l’impact du dollar sur les BPA de P&G),
cette politique est favorable à une baisse limitée des prix et permet aux groupes européens
soit de conserver une plus grande part des gains matières soit de réinvestir en prix avec un
effet de levier sur les volumes (gains de PdM) meilleur que prévu.
10 février 2016
65
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Tourisme : impact positif
Geoffrey D’Halluin
Pour le secteur du Tourisme, l’impact est globalement positif, notamment pour les croisiéristes,
qui bénéficieront de la croissance de la demande et de la baisse des coûts liés à la faiblesse du
pétrole, et dans une moindre mesure les Tour-opérateurs. En revanche, le pétrole bas devrait
pénaliser les Support Services (à l’exception d’Elior) qui sont exposées au segment des basesJourdain Johanna
+33 1 58 32 34 90
vie (pétrole, gaz et mines) et dépendent de l’activité de leurs clients dans ce secteur. Les
[email protected]
valeurs de notre univers qui devraient le plus profiter d’un pétrole bas sont Carnival, Royal
Caribbean, TUI et Thomas Cook.
+33 1 58 55 05 36
[email protected]
Tourisme : le pétrole offre une belle éclaircie
Croisiéristes : vent porteur
Après une solide année 2015 en termes de croissance des yields (Carnival à +4,0% et Royal
Caribbean à +3,5%e), la croissance et l’amélioration opérationnelle sur le secteur devraient
rester bien orientées en 2016 : croissance structurelle de la demande pour le secteur avec un
faible taux de pénétration offrant encore un fort potentiel, protection contre de nouveaux
entrants avec un secteur fortement capitalistique et sans risque technologique (type Uber ou
Airbnb), seul segment dans le tourisme permettant de contourner certaines zones géopolitiques
à risque en modifiant les itinéraires des croisières, pétrole bas soutenant la baisse des coûts
(<10% des coûts actuellement, vs. 10-15% historiquement) et ainsi l’amélioration des BPA et
des ROCE. Sur ce secteur, nous privilégions Carnival (top pick sectoriel, Acheter, objectif
de cours de 4 200 p), devant Royal Caribbean (Neutre, objectif de cours de 830 NOK),
Carnival bénéficiant d’un meilleur potentiel d’amélioration des yields après avoir été
pénalisé par des accidents en 2012 (Costa Concordia) et 2013 (Carnival Triumph).
Pour 2016, nous attendons, à ce stade, une croissance des yields de 3,0% pour Carnival, en
ligne avec la guidance du groupe, mais nous n’excluons pas que celle-ci soit relevée au cours
de l’année compte tenu des bons niveaux de réservations et de la hausse des prix. Pour Royal
Caribbean, nous tablons également sur une croissance des yields de 3,0%, ce qui est reste
prudent à ce stade de l’année avant la période de réservations au T1 (Wave season). Toutes
choses égales par ailleurs, pour Carnival, une baisse de 10% du prix du baril a un impact positif
de 3% dans le BPA 16 (sensibilité donnée en décembre avec un baril à environ 38 $).
Tour-Opérateurs : globalement positif
Les tour-opérateurs devraient également profiter de la baisse du prix du pétrole, ces derniers
bénéficiant d’une flotte d’avions importante. Cependant, nous estimons qu’une partie de ces
gains devraient être répercutés à leurs clients. Sur ce segment, nous privilégions TUI
(Acheter, objectif de cours 18,5 €), qui est hedgé à hauteur de 95% sur la saison hiver
2015/16 et à 83% sur la saison été, et Thomas Cook (Acheter, objectif de cours 150 p),
exposé au pétrole essentiellement via sa division aérienne, sachant que le groupe possède un
programme de hedging et est couvert à plus de 90%.
10 février 2016
66
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Médias : peu d’impact à part pour Ubisoft
Jérôme Bodin
+33 1 58 55 06 26
[email protected]
Pavel Govciyan
+33 1 58 55 56 02
[email protected]
De façon générale, la baisse du cours du pétrole a peu d'impact sur le secteur médias : certes
la consommation est stimulée dans les pays matures, mais cet effet est compensé par l'impact
négatif sur les devises émergentes.
De façon assez surprenante, seul Ubisoft (Acheter, objectif de cours 34 €) est impacté
positivement par un cours du pétrole bas. En effet, le groupe a de longue date installé ses
studios de développement au Canada (et notamment au Québec), ce qui lui est très favorable
avec l'évolution actuelle des devises. En effet, le pétrole bas fragilise le dollar canadien, qui
baisse face au dollar US. Or la moitié environ du CA d'Ubisoft est réalisée sur le marché
américain. Et cet effet positif (13% de l'EBIT 15/16e et encore 10% de l'EBIT 16/17e) n'est pas
contrebalancé par la fragilité des émergents, où les jeux vidéo sur consoles constituent un
marché naissant, et donc encore en forte croissance.
Pour les valeurs exposées à la publicité, peu d'impact
La baisse durable du cours du pétrole doit théoriquement stimuler la consommation dans les
pays matures, et donc la publicité. Or cet effet est négativement compensé par les troubles sur
les devises émergentes. Dans ce contexte, nous privilégions 1/ parmi les agences de publicité :
Publicis (Acheter, objectif de cours 75 €), qui affiche la plus forte exposition américaine (52%
du CA 15e), zone la plus dynamique sur le plan publicitaire, mais aussi celle avec la moindre
exposition à l’Amérique latine, à l’Afrique et au Moyen-Orient (6% du CA), zones émergentes
qui souffrent le plus de la baisse des prix des matières premières ; 2/ parmi les diffuseurs,
Mediaset (Acheter, objectif de cours 5,1 €) qui est uniquement exposée à l'Europe du Sud
(Espagne et Italie) et devrait également bénéficier du rebond publicitaire après une baisse plus
marquée que dans le reste de l'Europe.
Ubisoft est le seul vrai grand gagnant de la baisse du prix du pétrole
Ubisoft bénéficie d’un mix géographique idéal dans les marchés actuels : une très faible
exposition aux marchés émergents et une forte exposition aux US (appréciation du $ vs €). En
outre, Ubisoft produit une part significative au Canada (près de 50% de sa base de coûts selon
nous), dans un contexte où la banque du Canada a choisi de laisser flotter le CAD par rapport
au $. En d’autres termes, le €/$ baisse (donc le CA d’Ubisoft augmente) mais le taux €/CAD
baisse beaucoup moins vite (donc les coûts d’Ubisoft n’augmentent pas dans les mêmes
proportions que son CA).
Le groupe a fourni les hypothèses de change à retenir pour l’exercice 2015/16, compte tenu
des couvertures mises en place. Sur cette base, l’impact sur l’EBIT 15/16e, imputable
uniquement aux effets devises, devrait être globalement de ~30 M€, après un impact déjà
positif sur l’exercice 2014/15, grâce à l’appréciation du $ fin 2014 et début 2015 en particulier :
Tableau 1 : Impact des devises (€/£, €/$, €/CAD) sur l’EBIT 2015/16e – guidance Ubisoft
En M€
€/$
€/£
€/CAD$
2014/15
2015/16
Variation (%)
Impact théorique (1% sur l'EBIT 2014/15)
Impact réel sur l’EBIT 2014/15
1,27
0,78
1,44
1,14
0,74
1,35
+11
+5
+7
+3,0
+1,1
-1,4
34,2
5,9
-9,3
Total
30,8
Sources : Ubisoft, Natixis
10 février 2016
67
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Nous comprenons que la société à couvert l’essentiel de ses devises pour l’exercice 2015/16,
ce qui fixe donc l’impact réel autour de 30 M€ (soit 15% de l’EBIT ajusté selon le consensus).
Mais, à date, les évolutions de devises sont bien plus favorables que celles données par la
société : le €/$ a gagné 15% tandis que le dollar canadien est resté quasi stable. Ainsi l’impact
positif théorique des devises est plus proche de ~55 M€ sur l’exercice actuel. Autrement dit,
puisqu’Ubisoft n’a pas encore couvert les devises pour l’exercice suivant (2016/17), le groupe
bénéficie d’un nouveau réservoir de gain d’EBIT de ~25 M€ (~55 M€ moins les ~30 M€ de
l’exercice actuel).
Tableau 2 : Impact théorique des devises (€/£, €/$, €/CAD) sur l’EBIT 2016/17e
En M€
€/$
€/£
€/CAD$
2014/15
2015/16
Variation (%)
Impact théorique (1% sur l'EBIT 2014/15)
Impact réel sur l’EBIT 2014/15
1,27
0,78
1,44
1,10
0,74
1,35
+15
+8
+1
+3,0
+1,1
-1,4
45,4
8,9
-1,0
Total
53,4
Sources : Ubisoft, Natixis
Au final, la tendance de baisse de l’€ et de baisse du CAD par rapport au $ est très positive
pour Ubisoft, et devrait continuer à soutenir la rentabilité à court et moyen-terme. Avec une
réserve évidente sur l’évolution du cours du dollar canadien, très indexé à la situation actuelle
sur le pétrole de nature à générer de la volatilité.
10 février 2016
68
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Biens d’équipement électriques : l’exposition industrielle pèse
Si la baisse récente du prix du pétrole a contribué au redressement de la consommation
des ménages dans les pays de l’OCDE, elle n’a, en revanche, pas permis celui de
l’investissement des entreprises. Dans ce contexte, nous serions tentés de préférer les
émetteurs davantage exposés à la consommation et à la construction plutôt qu’à
l’industrie. Sur ces bases, Legrand présente le mix-métiers le plus défensif tandis que
Schneider, exposé par ailleurs au secteur pétrole et gaz à hauteur de 7%, nous semble
moins bien positionné.
La faiblesse des prix du pétrole pèse sur les débouchés industriels des producteurs de
biens d’équipement électriques
En effet, exposé à hauteur de 7% de son chiffre d’affaires au secteur pétrole et gaz, Schneider
a accusé un recul de son activité sur les neuf premiers mois de 2015 (-1,1% en organique). La
division Industry affiche la plus faible performance avec un recul de 5% en organique, tout
comme la zone Amérique du Nord. Au-delà de cette exposition directe, le groupe pâtit du
ralentissement de l’activité industrielle dans certains pays émergents exportateurs de pétrole
tels que la Russie ou le Brésil. Le distributeur d’équipements électriques Rexel est lui moins
directement exposé au secteur pétrole et gaz, à hauteur de 4% environ de son chiffre d’affaires.
A l’inverse, certains groupes semblent relativement immunes au déclin des prix des matières
premières en raison de l’absence de corrélation mécanique en termes de débouchés et de la
quote-part significative de produits de remplacement (de l’ordre de 50%) à l’image de Legrand.
Davantage exposés au marché de la construction et au marché européen, nous préférons ainsi
Legrand et Rexel (avec une surpondération de ce dernier pour des questions de valorisation).
Graphique 1: Evolution des indices PMI par région et répartition du mix-métiers des producteurs de biens d’équipement
de notre échantillon
60
55
50
45
zone de contraction
Monde
Régions émergentes
Brésil
juil.-15
oct.-15
avr.-15
janv.-15
juil.-14
oct.-14
avr.-14
janv.-14
juil.-13
oct.-13
avr.-13
janv.-13
juil.-12
oct.-12
40
avr.-12
+33 1 58 55 98 66
[email protected]
janv.-12
Sandra Pereira
Régions développées
US
Legrand
Construction
Rexel
Industry
Schneider
o/w oil & gas
Other
Sources : Sociétés, Natixis
Un mix prix coût stable.
La baisse des prix du pétrole ne profite que marginalement à la baisse des coûts de production.
En effet, le pétrole entrant dans la composition de plastiques (isolants, boîtiers) constitue une
part mineure des coûts d’achats relativement aux métaux non ferreux (cuivre notamment). Sa
contribution aux coûts énergétiques est relativement modeste. Par ailleurs, si le coût des
matières premières tend à reculer, cette baisse est compensée par les pressions sur les prix de
vente subies par les producteurs.
10 février 2016
69
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Utilities : peu ou pas d’impact en 2016
Philippe Ourpatian
Pour le secteur des utilities pris dans son ensemble, les canaux de transmission de la nouvelle
des prix du pétrole sont multiples, compte tenu de la diversité des activités parmi les
quatre principaux segments d’activité (électriciens intégrés, gaziers intégrés, spécialistes
environnementaux, réseaux régulés). Pour 2016, l’impact attendu du surcroit de pression
baissière sur les prix du pétrole devrait être limité, mais des disparités sont à relever entre les
activités voire au sein des quatre segments précités. Au total, dans notre univers de
couverture, Engie (Neutre, objectif de cours 15,50 €) et, dans une moindre mesure Gas
Natural Fenosa (Neutre, objectif de cours 18,20 €), ressortent comme les acteurs les plus
pénalisés en 2016.
+33 1 58 55 05 16
chute
[email protected]
Ivan Pavlovic
+33 1 58 55 82 86
[email protected]
Electriciens : un impact indirect négatif… mais pas pour tout de suite
Pour les électriciens européens, la nouvelle chute des prix du pétrole constitue une source de
pression supplémentaire sur les prix de gros de l’électron. Rappelons que sur la plupart des
marchés de gros européens, compte tenu des diverses évolutions structurelles observées
depuis 2010, la génération d’électricité à base de charbon est désormais la technologie
« marginale », c’est-à-dire celle qui fixe le prix d’équilibre pour l’électron. Ceci explique le
caractère homothétique des évolutions du prix de l’électricité sur le marché de gros allemand et
du prix mondial du charbon observées depuis 2011. Mondial, le prix du charbon est pour une
part influencé par celui du pétrole. En effet, le prix du charbon intègre une composante coûts de
production et de transport influencée par les prix du pétrole.
Les deux derniers mois ont donc vu une accélération de la pression baissière des prix de
l’électron. Sur le marché de gros allemand, l’EEX, le prix forward « base » à un an est ainsi
passé de 30 €/MWh au 30/11/2015 à 23 €/MWh au 26/01/2016. Compte tenu, de la part des
ventes à terme réalisées par la majeure partie des électriciens en Europe (la production 2016 a
été pré-vendue pour l’essentiel entre 2013 et 2015 dans notre univers de couverture), cette
baisse n’affectera pas les marges de génération cette année. En revanche, elle commencera à
pénaliser les marges des électriciens à partir de 2017. L’ampleur de cet impact dépendra de la
structure des coûts des électriciens. Comme déjà relevé dans notre document de perspectives
sectorielles pour 2016 (cf. 2016 : les uns et les autres…), plus la structure de coûts des
électriciens est rigide (cas des acteurs exploitant des centrales à dominante nucléairehydraulique-lignite, E.ON, Fortum, RWE et Vattenfall dans notre univers de couverture), plus
l’impact d’une baisse des prix est élevé au niveau de l’EBITDA. Avec la disparition d’une partie
er
des tarifs règlementés en France au 1 janvier 2016 (25% de la consommation domestique),
EDF rentre désormais dans cette catégorie. A contrario, plus la structure des coûts de
génération est variable (cas des acteurs exploitant des centrales à dominante charbon-gaz,
Enel, EDP, Gas Natural Fenosa et Iberdrola dans notre univers de couverture), plus l’incidence
sur l’EBITDA d’une baisse des prix de gros est faible.
Gaziers : des impacts mitigés
Dans notre univers de couverture, les activités « gazières » sont principalement le fait d’E.ON,
Engie, Gas Natural Fenosa et RWE. Elles regroupent trois grands types de métiers :
1/ L’exploration-production (E&P) de gaz et de pétrole, lesquels concernent E.ON (actifs en
cours de scission dans le cadre de la formation d’Uniper) et Engie. Ce segment est évidemment
le plus impacté par le mouvement récent sur les prix du pétrole ;
2/ L’achat-revente de gaz en Europe sur le marché de gros et/ou sur le marché de détail,
qui concernent les quatre acteurs précités. Dans ce segment, l’impact de la nouvelle chute des
prix du pétrole est neutre voire légèrement positif. En effet, les niveaux des prix de gros du gaz
en Europe relèvent de facteurs mondiaux (persistance de mécanismes d’indexation des prix du
gaz importé sur ceux du pétrole) mais également régionaux (état de la demande, structure de
10 février 2016
70
CROSS EXPERTISE RESEARCH
l’offre). Pour cette raison, leur corrélation avec les prix du Brent n’est pas intégrale. En résulte
en proportion une moindre baisse des premiers que des seconds sur les 2 derniers mois
(baisse de 22% des prix du TTF aux Pays-Bas vs. -30% pour le Brent entre le 30/11/2015 et le
27/01/2016). Au total, sur ce segment d’activité, l’impact de la chute des prix du pétrole devrait
être globalement neutre (cas d’Engie, en raison de l’importance des ventes de gaz aux tarifs
règlementés en France), voire légèrement positif pour E.ON et RWE. Notons toutefois chez
E.ON que les activités de négoce « de gros » ont vocation à être affectées à Uniper, l’entité
issue de la scission en cours de finalisation ;
3/ Le négoce de gaz hors d’Europe, qui concerne essentiellement Engie et Gas Natural
Fenosa à travers les ventes de gaz naturel liquéfié (GNL) en Asie. Dans cette zone, le prix de
vente du GNL est généralement indexé sur celui du Brent, ce qui explique la pression baissière
sur les marges unitaires qu’ont subie Engie et Gas Natural Fenosa en 2015, partiellement
compensée par la dépréciation de l’euro par rapport au dollar (devise de transaction sur ce
marché). La nouvelle chute des prix des pétroles laisse donc augurer un surcroit de pression
baissière sur les marges unitaires d’Engie et de Gas Natural Fenosa. Pour répondre à cet
environnement dégradé, ce dernier envisageait, dès novembre 2015, une politique de
« volume » visant à compenser cette pression persistante sur les marges unitaires et stabiliser
la génération d’EBITDA. Reste à savoir dans quelle mesure cette stratégie n’aboutirait pas à
l’effet inverse.
Spécialistes environnementaux : quasiment pas d’impact
Pour Suez et Veolia Environnement, l’exposition directe au pétrole est limitée aux coûts dans
les activités de propreté et de services énergétiques (Veolia Environnement ; via Dalkia
International). Or, dans ces activités, les coûts énergétiques sont traités selon des mécanismes
de « pass-through ». Leur évolution à la hausse ou à la baisse est quasi-automatiquement
répercutée dans le niveau du prix facturé au client final. Elle n’affecte donc pas la marge
dégagée par l’opérateur.
Réseaux régulés : pas d’impact
Pour les réseaux régulés de notre univers de couverture (Elia, National Grid, REE, RTE, SNAM,
Terna), les coûts énergétiques font, comme les activités de propreté et de services à l’énergie
précités. l’objet de mécanismes de pass-through. Leur évolution à la hausse ou à la baisse est
automatiquement répercutée dans le niveau du prix au client final, via des ajustements du
niveau des charges à couvrir par les tarifs.
Tableau 3 : Synoptique des impacts d’un pétrole durablement baissier
Sociétés
CEZ
E ON
EDF
EDP
Enel
ENGIE
Fortum
Gas Natural Fenosa
Iberdrola
RWE
Suez
Vattenfall
Veolia Environnement
Electricité
Exploration
& Production
Achat-revente
de gaz
Négoce de gaz
hors d'Europe
Propreté
(collecte)
réseaux de chaud
et froid urbains
total
=
=
=
=
=
=
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
+
=
na
=
na
=
na
+
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
na
=
na
=
na
na
na
na
na
=
na
na
na
na
na
na
na
=
=
=
=
=
=
=
=
Source : Natixis
10 février 2016
71
CROSS EXPERTISE RESEARCH
7. Les secteurs les plus touchés
Pétrolières intégrées : des ajustements toujours plus difficiles
Baptiste Lebacq
+33 1 58 55 29 28
[email protected]
Dans un environnement de prix du pétrole durablement bas, les compagnies pétrolières vont
poursuivre et même accélérer les ajustements. Leur objectif final devrait rester le maintien des
retours aux actionnaires. Elles ont déjà commencé à réduire la voilure du côté des Capex et
travaillent à la réduction les coûts opératoires. Les bilans pourraient rester sous pression et les
programmes de cessions être plus difficiles. Enfin, les groupes qui ont initié des opérations de
rapprochement « trop tôt », pourraient également être affectés par des dépréciations d’actifs.
Au final, nous conservons une opinion Performance en ligne sur le secteur en évitant les
acteurs dont les bilans pourraient être sous une pression très forte avec la baisse du baril. Total
(Neutre, objectif de cours 46 €) est, dans ce cadre, notre valeur favorite dans le secteur.
De nombreuses variables d’ajustements actionnables
Afin d’être en mesure de maintenir le retour à l’actionnaire, les groupes pétroliers peuvent 1/
réduire de nouveaux les enveloppes de Capex et d’Opex, 2/ poursuivre les cessions d’actifs et
3/ maintenir la politique de scrip dividende (économisant ainsi les sorties de cash liées au
versement du dividende).
1/ Vers une nouvelle coupe de Capex : l’ensemble des groupes se sont lancés dans des
baisses de Capex. Une partie de cette baisse de l’enveloppe d’investissements émane de la
déflation dans les services pétroliers (selon l’indicateur IHS CERA, les prix en
exploration/production sont en baisse de 16% sur 2015).
Tableau 1 : Guidances de Capex en 2015 et 2016
Royal Dutch Shell
Total
BP
ENI
Repsol
OMV
2015
2016 et au-delà
33  30 Md$ (maintenu au T3)
23/24 Md$ confirmés
< 20 Md$ vs ~20 Md$
 de 14% à change constant
Capex amont stables à 4,5 Md$
2,7 Md€, -30%
40 33 Md$ yc BG Group avec une option pour la baisser
20/21 Md$ sur 2016 puis 17/19 Md$ sur 2017/2019
> 16 Md$
nd
Capex amont stables à 4,5 Md$ yc Talisman
2,5/3,0 Md€ pour 2015/2017
Sources : Natixis, sociétés
Les pétrolières pourraient, dans ce scénario de prix bas, poursuivre leurs réductions de Capex;
mais cela pourrait mettre en risque leur profil de croissance future en organique. Il est aisé pour
elles de diminuer leurs investissements en décalant les prises de décisions sur de nouveaux
projets ou en prônant davantage la simplification de ces derniers. Les dépenses d’exploration et
de production pourraient alors, dans un tel contexte, encore baisser de 30/50% par rapport aux
niveaux actuels.
2/ Des programmes de cessions d’actifs : ces derniers concernent aussi bien les groupes qui
ont procédé à des opérations de croissance externe que ceux qui poursuivent leur
développement en organique.
BP suite à l’accident de Macondo a été le premier à se lancer dans un programme de cession
d’actifs (forcé) avec comme devise « shrink to grow ». Au final, il a cédé, depuis 2011, près de
30 Md$ d’actifs.
Total, de son côté, a lancé un programme de cessions d’actifs sur 2015/2017 de 10 Md$ ; à ce
stade il a déjà cédé pour environ 5 Md$ (cessions de FUKA, Geosel, Laggan notamment), soit.
à mi-chemin de son objectif.
10 février 2016
72
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Repsol vise sur 2016/2020 une enveloppe de cessions de 6,2 Md€ (3,1 Md€ sur 2016/17 dont
1 Md€ déjà réalisé avec les cessions de CLH, et de pipe GPL et 3,1 Md€ sur 2018/2020).
Shell, suite à l’acquisition de BG Group, va également se lancer dans une cure
d’amaigrissement avec notamment comme objectif la réduction du gearing du groupe (qui
atteindra près de 30% post fusion). Le programme de cession est calibré à hauteur de 30 Md$
sur 2016/2018. Cependant en cas de maintien de conditions défavorable, le groupe a annoncé
qu’il pourrait doubler l’enveloppe de cessions.
ENI a un programme de cessions d’actifs de 8 Md€ (8,7 Md$) sur les 4 prochains exercices
avec un désengagement partiel de Versalis (activité de chimie).
La conjonction de l’ensemble de ces programmes de cessions pourrait cependant créer des
pressions sur les multiples de transactions. Les fonds d’infrastructures devraient continuer de
marquer leur intérêt pour des actifs « régulés » à l’image des réseaux de pipelines. Cependant,
du côté des actifs en amont, les intérêts pourraient être limités ou les multiples de transactions
être moins généreux que par le passé (de nombreux actifs à céder dans des conditions de
marchés peu propices).
3/ Maintenir le retour à l’actionnaire sous la forme d’un scrip : le script dividende permet de
limiter les sorties de cash via le dividende et il devrait être privilégié en l’absence de remontée
du baril.
L’ensemble des groupes ont généralisé le choix du versement du dividende soit sous la forme
cash ou en titres (script). Cette deuxième alternative limite les sorties de cash pour les pétroliers
en ces temps difficiles. Par exemple, Total pourrait le prolonger au-delà de 2017 (date à partir
de laquelle sur la base d’un baril à 60 $ le free cash-flow devait couvrir le dividende en
organique).
Les situations financières sous pression
Les groupes pétroliers sont en mesure d’assurer leurs retours aux actionnaires dans un
environnement adverse limité. Notre scénario de reprise graduelle du cours du brut soutient ce
scénario. En cas de maintien des cours du brut sous les 30 $, aucun groupe n’est, selon nous,
capable de générer suffisamment de cash pour assurer le paiement de son dividende.
Dans un tel scénario et en l’absence de dépréciations d’actifs, les gearings devraient alors
croître significativement. Nous avons tenté de le modéliser pour les valeurs de notre secteur en
retenant comme hypothèses 1/ une nouvelle baisse des investissements de 20% par an sur
2016 et 2017 et 2/ une stabilité des dividendes des groupes pétroliers (versement en scrip
maintenu).
Graphique 1 : Des gearings sous forte pression
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
2015
2016
ENI
BP
Repsol
2017
Shell
Total
Source : Estimations Natixis
10 février 2016
73
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Au final, tous les groupes voient leur gearing se tendre, passant en moyenne de 28% en 2015 à
44% en 2017e. Pour certains à l’image de Total et de BP, la hausse du gearing est
« maîtrisée » ; par contre pour les groupes ayant récemment procédé à des opérations de
croissance externe (Shell et Repsol) la tension sur le gearing est très vive.
Des risques de dépréciations d’actifs
En raison de cours du baril sur des niveaux toujours bas, les groupes pétroliers pourraient être
amenés à déprécier des actifs. Ce risque est beaucoup plus important pour les groupes qui se
sont lancés dans des opérations de croissance externe alors que le baril était élevé. C’est le
cas notamment de Repsol (acquisition de Talisman) et de Shell (acquisition de BG Group).
Le risque sur Repsol nous semble plus important, le rachat de Talisman s’étant réalisé lorsque
le baril était à 60 $) et intégralement payé en cash.
Vers un mouvement de consolidation ?
Les grands mouvements de consolidation historiquement se sont déroulés lorsque le baril avait
commencé à se stabiliser, voire à remonter. A ce stade, nous n’anticipons pas de tels
mouvements de consolidation majeurs en raison notamment des projets de plus en plus
complexes qui se traduisent par des hausses des points morts des différents groupes.
Les principales opérations de croissance externe initiées par des majors devraient davantage
concerner l’acquisition de ressources, ce qui pourrait ainsi limiter les effets négatifs de la
réduction des dépenses d’exploration sur les ressources des groupes.
Graphique 2 : Historique des grands mouvements de consolidation dans le secteur
300
250
200
150
100
50
0
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015
Opérations en Md$
Brent
Source : Natixis
Les principales cibles pourraient être des pétrolières indépendantes nord-américaines dont la
situation bilancielle est tendue, à l’image de sociétés américaines qui se sont placées en
chapter 7 ou 11 (41 groupes en 2015 pour un volume de faillites de l’ordre de 15 Md$). Un tel
repositionnement, favorisé par la multitude de petits acteurs, permettrait ainsi de « mettre la
main » sur des ressources dont les volumes de production et les Capex sont beaucoup plus
faciles à ajuster en fonction des conditions du marché.
En conclusion, les groupes pétroliers peuvent continuer à ajuster leurs coûts et à réduire les
investissements ainsi que maintenir les paiements du dividende sous forme de scrip. Au final,
nous privilégions les groupes dont les bilans sont les moins à risque, Total est dans ce cadre-là
notre valeur favorite dans le secteur.
10 février 2016
74
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Tubistes : les yeux sur le cash-flow
Nous maintenons notre recommandation Sous-performance sur le secteur des tubistes.
L’année 2016 devrait à nouveau être marquée par des faibles volumes et des effets prix
fortement négatifs. Dans le cadre du maintien du baril sur des niveaux bas, nous estimons que
la reprise en Amérique du Nord pourrait être très limitée. Dans ce cadre-là, nous continuons de
privilégier les groupes les plus réactifs. Schoeller Bleckmann (Neutre, objectif de cours
48,6 €) est notre valeur favorite, En effet outre sa capacité d’ajustement (réduction des
effectifs de 36 % sur un an), le groupe bénéficie d’une situation de leader incontesté dans un
secteur de niche, d’une structure bilancielle solide et d’un caractère de cible pour un acteur
comme General Electric.
Un déséquilibre du marché qui s’accroit
Sur la première moitié de l’exercice 2015, l’activité des tubistes était restée relativement
résiliente. Cependant, la baisse du nombre d’appareils de forage initiée en Amérique du Nord
(première zone en matière de consommation de tubes) à partir du point haut d’octobre 2014 a
commencé à avoir des répercussions sur les activités des groupes à partir du second semestre.
Le niveau des stocks chez les distributeurs atteint actuellement 7/8 mois ne laissant pas
présager de rebond de la demande de la part de ces derniers avant le second semestre.
Graphique 3 : Evolution du nombre d’appareils de forage aux Etats-Unis
1 800
1 600
1 400
1 200
1 000
800
600
400
200
0
2006
160
140
120
100
80
60
40
20
2007
2008
2009
2010
USRRUSI (Ech. G)
2011
2012
2013
2014
2015
0
2016
CRUDOIL (Ech. D)
Source : Datastream
Le maintien du baril sur des niveaux inférieurs au point mort des indépendantes américaines
devrait les amener à ajuster une nouvelle fois à la baisse leurs dépenses en forage et donc la
consommation de tubes. Cette baisse des investissements interviendrait alors que dans le
même temps, Tenaris lance de nouvelles capacités ce qui déstabiliserait encore un peu plus le
marché américain.
Au final, dans un scenario où les tubistes laisseraient leurs capacités inchangées aux US et où
la consommation de tubes s’inscrirait en repli de 10% par an d’ici fin 2017, la surcapacité
pourrait y atteindre près de 3 Mt !
10 février 2016
75
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Graphique 4 : Vers un déséquilibre persistant du marché américain (en Mt)
4
3
2
1
T1 10
T2 10
T3 10
T4 10
T1 11
T2 11
T3 11
T4 11
T1 12
T2 12
T3 12
T4 12
T1 13
T2 13
T3 13
T4 13
T1 14
T2 14
T3 14
T4 14
T1 15
T2 15
T3 15
T4 15
T1 16
T2 16
T3 16
T4 16
T1 17
T2 17
T3 17
T4 17
0
US Steel
Tenaris
Vallourec
TMK-Ipsco
TPCO
Benteler
demand
Sources : Sociétés, estimations Natixis
La fragilité des cash-flows pèsent sur la situation financière
Au final, les groupes ont tous été en mesure de générer des free cash-flow positifs via
notamment des réductions des enveloppes de Capex, mais pour certains, cette génération de
FCF positif serait fortement dans le rouge en l’absence de soutien lié aux effets de variation du
besoin en fonds de roulement.
Dans le cadre de ce scenario, les groupes les plus fragiles et les moins « adaptables »
devraient voir leurs situations financières fortement se dégrader, et ceci malgré la poursuite des
efforts sur les investissements.
Tableau 2 : Evolution des free cash-flow
En M€
Schoeller Bleckmann
Tenaris (M$)
Vallourec
2014
2015e
2016e
2017e
24
258
274
76
1 397
8
18
77
-415
22
370
-255
Source : Natixis
Le groupe le plus à risque est Vallourec. En l’absence de reprise, le groupe pourrait alors dès
2017 casser son unique covenant (gearing < 75%) le poussant ainsi à le renégocier avec les
banques ou renforcer ses fonds propres.
Graphique 5 : Evolution des gearings des équipementiers
100%
80%
60%
40%
20%
0%
-20%
-40%
2007
2008
2009
2010
2011
Schoeller Bleckmann
2012
2013
Tenaris
2014
2015e
2016e
2017e
Vallourec
Source : Natixis
10 février 2016
76
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Des risques de nouveaux impairments
Dans ce scénario 2016, de nouvelles dépréciations d’actifs ne sont pas à exclure notamment en
Amérique du Nord où jusqu’alors elles ont été peu nombreuses.
Vallourec avait déprécié, au titre de l’exercice 2014, 1,1 Md€ d’actifs (sur les Unités
Génératrices de Trésorerie européennes et du Brésil) et ce montant n’intégrait rien pour le
marché d’Amérique du Nord. En l’absence de rebond du marché américain et dans un contexte
de prix sous pression, des ajustements comptables ne sont pas à exclure. En outre, l’ajout de
nouvelles capacités de la part de Tenaris à Houston (capacités additionnelles de 650 Kt)
pourrait déséquilibrer de manière plus structurelle l’équilibre du marché.
Poursuite des ajustements des effectifs
En l’absence de rebond, de nouveaux ajustements des effectifs pourraient avoir lieu afin de
réduire les coûts. Des fermetures définitives de capacités sont, selon nous, difficilement
envisageables, mais nous pensons plus que des arrêts d’usines pourraient être plus fréquents
en l’absence de prises de commandes.
10 février 2016
77
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Services pétroliers : s’il ne devait en rester qu’un
Baptiste Lebacq
+33 1 58 55 29 28
[email protected]
Le scénario d’un baril durablement bas conforte notre arbitrage en faveur de l’onshore au
détriment de l’offshore, et en faveur des bilans les plus solides. Cet arbitrage sera d’autant plus
valable dans l’hypothèse d’un retour des compagnies pétrolières en Iran. La perspective d’un
rebond des Capex E&P s’éloigne davantage, même s’ils devraient toutefois bénéficier de la
baisse des prix des services et des équipements. Une reprise des volumes devrait ainsi
s’amorcer, à l’horizon 2017.
Pas d’embellie en exploration : nous pensons que le renouvellement des réserves des
principales compagnies pétrolières se fera par le biais d’acquisitions d’actifs, pour bénéficier de
valorisations avantageuses, plutôt que de se lancer dans des programmes d’exploration par
définition incertains. Ceci nous fait craindre un nouveau décalage de la reprise des secteurs de
la sismique et du forage.
Toujours plus prudent sur l’offshore : les initiatives des principaux groupes de services,
basées sur une combinaison des offres (SURF, SPS, réservoir), pour réduire les coûts de
développement, se heurtent à l’extrême faiblesse du prix du brut. De nouvelles coupes
budgétaires seraient également probables chez Petrobras, ce qui aurait un impact sur les
groupes les plus exposés à la compagnie nationale au sein de notre échantillon : Subsea 7,
Technip, Bourbon, SBM Offshore.
L’onshore plus préservé : la remise à niveau des infrastructures iraniennes, rendue
nécessaire par des années de sous-investissement, devrait agir en soutien. Mais nous restons
prudents sur le timing, dans la mesure où toutes les sanctions ne sont pas encore levées. En
revanche, de nouveaux investissements en GNL nous semblent compromis, compte tenu de la
surcapacité à court terme, qui contraint les opérateurs à consentir des baisses de prix sur leurs
contrats long terme.
Refinancer & restructurer…encore : de nouveaux retraits d’actifs seront nécessaires. Des
augmentations de capital sont probables (Bourbon, pour lequel nous attendons un ratio
DN/EBITDA de 7x fin 2017e, ou Subsea 7, dont l’OC de 700 M$ expire en 2017), et celles
annoncées récemment pourraient ne pas suffire (CGG, PGS, Saipem).
S’allier pour résister : si les Etats-Unis ont été le théâtre de quelques rapprochements ces
derniers mois (Baker Hughes et Halliburton fin 2014, Schlumberger et Cameron en 2015),
l’Europe n’a pas encore connu de fusions significatives. Un allongement du creux de cycle
devrait déclencher une vague de consolidation. Un rapprochement entre Technip et FMC
Technologies, partenaires de la JV Forsys Subsea, pourrait bien se concrétiser à moyen terme.
S’il n’en devait en rester qu’un : ce serait Technip (Alléger, objectif de cours 40 €), pour sa
diversification et son faible endettement, même si le groupe n’est pas immune à ce creux de
cycle, et l’exécution du projet Yamal LNG en Russie constitue, à nos yeux, un challenge
important. Tecnicas Reunidas (Neutre, objectif de cours 40 €) devrait également bénéficier
de la visibilité de son backlog historique (13 Md€), de son exposition à l’onshore E&C, et de son
profil peu capitalistique (trésorerie nette). Nous restons à l’écart du secteur de la sismique
(PGS, CGG). Même si nous apprécions le profil « asset light » de GTT (Acheter, objectif de
cours 56 €) et la visibilité sur son dividende en 2016 et 2017, il devrait souffrir du manque
d’investissements en GNL, qui pèsera sur la prise de commandes, et donc sur le volume
d’activité à partir de 2018.
10 février 2016
78
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Banques : plus de peur que de mal ?
Alex Koagne
+33 1 58 55 04 39
[email protected]
Le risque pour les banques d’un pétrole bas est, selon nous, abordable sous 3 angles :
-
Un impact négatif sur les revenus lié aux conséquences de la baisse du prix du baril sur
les projets d’investissements des compagnies pétrolières (gel, baisse en valeur des
financements octroyés).
-
Un impact négatif limité en termes de coût du risque associé au fait que les difficultés de
certains acteurs du secteur pétrolier peuvent entrainer des pertes sur les portefeuilles de
crédit des banques exposées.
-
Enfin, un impact négatif sur les perspectives de l’économie globale et en particulier
pour les banques significativement exposées à des pays fortement dépendant du pétrole
(Russie…).
Steven Gould
+33 1 58 55 72 32
[email protected]
Robert Sage
+44 20 3216 9170
[email protected]
Elie Darwish
+33 1 58 55 84 32
[email protected]
Nelson Ribeirinho
+33 1 58 55 85 29
[email protected]
Au global, les banques qui pourraient être le plus affectées sont principalement les
banques françaises, ING, DNB et StanChart.
Des effets notables pourraient être observés sur les revenus pour les banques les plus actives
dans les métiers de financement de projets pétroliers. A titre indicatif, l’un des plus grands
acteurs dans le négoce de matières premières Glencore a d’ores-et-déjà annoncé un plan de
réduction de sa dette de 10 Md$ et pourrait logiquement servir d’amorce à d’autres
mouvements similaires à court/moyen terme.
Nous considérons en revanche que l’exposition des banques au secteur pétrolier ne constitue
pas un trigger suffisant pour dérouter le coût du risque de sa tendance générale baissière.
Certaines banques devraient certes être amenées à constater de nouvelles provisions au cours
ème
du 4
trimestre ainsi que potentiellement en 2016 afin de faire face à leur exposition au
secteur pétrolier compte tenu des niveaux très bas atteints par le baril. Toutefois, eu égard à la
nature et à la structure du risque liées à cette exposition, nous ne pensons pas que le taux de
perte sera très important, même si ce dernier sera in fine déterminé par le niveau du prix du
pétrole sur long terme.
Graphique 4 : Exposition des banques européennes au secteur pétrolier (en Md€ à fin septembre 2015)
Sources : Natixis, données sociétés
Si certains montants d’exposition peuvent paraitre non négligeables en absolu, plusieurs
éléments permettent toutefois d’en relativiser le degré réel de risque associé. En effet,
l’exposition crédit est très largement ‘investment grade’ avec généralement un collatéral pour
garantir une partie du prêt accordé, ce qui au final ne devrait pas amener à un impact significatif
sur le coût du risque. A titre d’exemple, on notera ainsi que :
10 février 2016
79
CROSS EXPERTISE RESEARCH
-
Pour BNP Paribas, 75% du portefeuille de crédits au secteur pétrolier est noté Investment
Grade et 40% est d’une maturité inférieure à 1 an.
-
Pour Crédit Agricole SA, 90% du portefeuille est d’une maturité inférieure à 1 an et
seulement 5 Md€ de celui-ci (soit ~15% de l’exposition totale) est véritablement à risque
dans le cas d’un prix du pétrole durablement inférieur à 50 $ le baril.
-
Pour Société Générale 24% du portefeuille est d’une maturité inférieure à 1 an et que 67%
de celui-ci est Investment Grade.
-
Pour ING, 90% du portefeuille est Investment Grade et 50% d’une maturité inférieure à 1 an,
avec in fine une exposition véritablement à risque en cas de prix de pétrole durablement
sous la barre des 20 $ le baril limitée à 6 Md€ (soit ~22% de l’exposition totale).
Graphique 2 : Exposition au secteur Energie (en % des fonds propres tangibles 2015e)
Sources : Natixis, données sociétés
Un risque toutefois pris de plus en plus au sérieux outre-Atlantique !
Outre Atlantique, les craintes de faillites au sein du secteur pétrolier sont de plus en plus
élevées et il s’agit d’un vrai sujet de préoccupation pour les banques même si celles-ci se sont
attachées à communiquer sur le niveau a priori limité de leurs expositions (~3% en moyenne
des crédits totaux) :
-
Selon certains experts, 1 compagnie pétrolière US sur 3 risque la faillite d’ici 2017 alors que
celles-ci perdraient en cas de poursuite de la baisse du prix du baril (~20 $) près de 2 Md$
de revenus par semaine ; plus de 40 compagnies pétrolières nord-américaines auraient
annoncé leur faillite en 2015 (représentant un endettement total de 13Md$). Par ailleurs les
producteurs énergétiques pourraient être contraints de réduire leurs budgets de près de
90 Md$ (soit une baisse de moitié par rapport à 2014).
-
Selon les calculs de la Fed et des régulateurs bancaires américains (FDIC/OCC ),
l’exposition à risque des banques US associée au secteur pétroler s’élevait à environ
34 Md$ à fin 2015. Selon Standard & Poor’s, la moitié des obligations à haut rendement
(high yield) liées au secteur pétrolier seraient actuellement ‘en difficulté’.
6
ème
JP Morgan a d’ores-et-déjà affiché sa prudence lors de la publication des résultats du 4
trimestre 2015 : bien que rappelant que le secteur pétrolier ne représente que 2% de ses
crédits (exposition totale de 13 Md$) et que les crédits concernés sont souvent adossés à des
actifs (plate-formes pétrolières, puits...), le groupe a indiqué que l’effondrement du prix du
pétrole devrait ‘peser sur les résultats 2016’ principalement en raison de l’augmentation du coût
du risque. Le groupe a ainsi provisionné 124 M$ au T4 à ce titre et prévoit de porter cette
6
FDIC : Federal Deposit Insurance Corporation, OCC : Office of the Comptroller of the Currency
10 février 2016
80
CROSS EXPERTISE RESEARCH
enveloppe de provisionnement à 750 M$ si le prix du baril devait se maintenir durablement
autour de 30 $.
Bank of America, dont l’exposition à l’énergie ressortait à ~21 Md$ à fin 2015, a indiqué que le
montant des défauts de paiement de ses clients corporates pétroliers s’est accru de 100 M$ sur
le seul T4. Citigroup (exposition de 20 Md$) a, de son côté, provisionné 300 M$ et prévoit
er
600 M$ de pertes sur crédit associées au secteur de l’énergie au cours du 1 semestre, tandis
que Well Fargo (exposition de 17 Md$) a fait de même à hauteur de 1,2 Md$ pour une
exposition « sub-investment grade » comprise entre 17 Md$ et 20 Md$. Si 17 Md$ semble un
montant élevé, il est à rapprocher des fonds propres comptables de la banque qui ont atteint fin
2015 : 194 Md$ !
Le cas particulier des banques nordiques
De par l’activité d’extraction en mer du Nord, et la forte importance des activités de shipping des
banques nordiques, ces dernières font partie des « usual suspects » dès lors qu’il s’agit
d’identifier les banques les plus à risques, en ce qui concerne les expositions au pétrole. Nous
présentons ci-dessous les informations que nous avons pu rassembler sur ces dernières dans
leur communication financière. Si l’exposition des banques suédoises (en relatif à leurs fonds
propres tangibles) semble à peu près contenue, celle de DNB est, elle, beaucoup plus
importante.
Le cas de DNB est intéressant, la banque n’ayant que très peu provisionné jusqu’ici, et, le
superviseur norvégien, dans une lettre du 21 décembre rendue publique début janvier, a
prévenu les banques qu’elles ne pourraient pas « continuer d’ignorer la baisse des cours du
pétrole ». Dans cette même lettre, le superviseur s’étonnait du fait que le coût du risque des
dites banques, 25 pb sur les 9 premiers mois 2015, soit équivalent à celui de 2014. Ceci dit,
puisque DNB est détenu à 34% par l’Etat norvégien, le risque est assez limité de voir la
solvabilité se dégrader substantiellement selon nous.
Tableau 1 : Exposition au secteur pétrolier des banques nordiques
Danske bank
Curr.
Exposure
(bn curr.)
€ equiv.
(bn)
Type
Tangible
equity
%
DKK
17
2
Group exposure
142
12%
Curr.
Exposure
(bn curr.)
€ equiv.
(bn)
Type
Tangible
equity
%
NOK
176
19
Exposure at
Default
152
115%
Curr
Exposure
(bn curr.)
€ equiv.
(bn)
Type
Tangible
equity
%
EUR
6
6
NA
27
22%
Curr
SEB (loc.)
€ equiv.
Type
Tangible
equity
SEK
52
6
Gross Loan
portfolio & Mining,
oil & gas
extraction
117
According to Q3-15 results presentation: "Oil-related exposures amounts to DKK
17,4bn; o/w 11.9bn offshore, 1,7 oil majors and 3,8 oil service providers. 78% of oil
related exposure in USD ."
DNB
According to Q3-15 results transcripts "NOK120m energy sector, and that's related to
petrochemical sector. When it comes to the offshore being in the oil supply side, we
are talking about total NOK300m. "
Nordea
According to Q3-15 results transcripts: "So that, our direct exposures to these
segments which are impacted directly by oil price, i.e., oil and gas companies, oil
services companies, offshore segment is relatively, first of all, limited. All in all, we are
talking about €6bn total exposure ."
SEB
NA
44%
Sources : Natixis, données sociétés
10 février 2016
81
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Matériaux de Construction : pas d’euphorie
Sven Edelfelt
+33 1 58 55 29 03
[email protected]
Pour le secteur des Matériaux de Construction, impact plutôt négatif. L’environnement de
pétrole bas est une thématique positive pour les producteurs de matériaux de construction mais
les répercussions au monde émergent pourraient être sévères sur la demande (pays
producteurs de pétrole et dans leur sillage, pays dépendant des matières premières). Dans ce
cadre, nous continuons de favoriser les groupes exposés aux pays matures notamment SaintGobain et CRH.
Privilégier les valeurs exposées aux pays matures
Saint-Gobain (Acheter, objectif de cours 45 €)
1/ Un risque de déception limité sur les estimations 2015/016 du consensus, après le warning
du T3 15. La douceur de l’hiver pourrait même entrainer une bonne surprise sur le T4, selon
nous, 2/ Le retournement attendu de l’activité en France en 2016, premier marché du groupe à
25% du CA, 3/ Un levier opérationnel fort, soit pour 1 € de CA supplémentaire une marge
opérationnelle dans les Activités Manufacturières de 35/55% et de 20/30% dans la Distribution,
4/ L’épilogue de l’opération Sika avec la décision attendue du tribunal de Zug courant S1. Un
impact positif quelle qu’en soit l’issue : Saint-Gobain encaisserait, dans le pire des cas (pas de
transaction), environ 300 M€ sur la couverture de change.
CRH (Acheter, objectif de cours 32 €)
Le titre CRH nous semble un bon pari pour jouer 2016 compte tenu : 1/ du redémarrage du
business model, basé sur la croissance externe, 2/ d’une forte exposition à la reprise
européenne (39%e de l’EBITDA 16e), 3/ d’un potentiel de rebond aux Etats Unis (51%e de
l’EBITDA 16e) après la signature d’un accord bipartisan aux infrastructures dans le pays
(+0,835t de ciment par an supplémentaires en moyenne sur la période selon le PCA, soit entre
+0,5% et +1,2%) et, 4/ d’un effet de levier opérationnel puissant de 15% à 25%, selon nous.
Le positif : la baisse de la facture énergétique
Les producteurs de matériaux de construction bénéficieront du recul des prix de l’énergie mais
pas dans les mêmes proportions que la chute violente observée sur les marchés internationaux
(le pétrole, le charbon ou encore le petcoke). Nous tablons sur une baisse de la facture
énergétique de l’ordre de 1% à 2% par rapport à 2015 selon le mix géographique.
La plupart des combustibles utilisés dans la production de ciment/clinker, tels que le charbon ou
encore le petcoke, ont amorcé un reflux. Le petcoke est un résidu des raffineries de pétrole
produit par la distillation sous vide destiné à extraire les hydrocarbures du pétrole brut. Les prix
du gaz présentent une corrélation plus limitée avec ceux du pétrole.
10 février 2016
82
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Tableau 1 : Poids des coûts de l’énergie pour les cimentiers de notre échantillon de valeurs
En %
Coûts d’énergie / total coûts cash
Coûts d’énergie en % du CA
LafargeHolcim
Italcementi
Vicat
CRH
HeidelbergCement
Saint-Gobain
Imerys
13,8
11,0
23,0
18,9
15,4
13,1
12,0
8,9
13,6
11,1
6,3
4,8
11,7
10,2
Sources : Sociétés, estimations Natixis
Le poids de l’énergie varie selon les cimentiers en fonction de leurs mix d’activité (granulats,
béton prêt à l’emploi ou encore de l’asphalte). La production de ciment en particulier présente la
plus grande sensibilité aux coûts de l’énergie à l’inverse des autres métiers. Ceux-ci
s’échelonnent d’environ 4,8% du chiffre d’affaires pour Saint-Gobain (compte tenu de son
exposition aux métiers de la distribution bâtiment) jusqu’à 18,9% pour Italcementi.
Tableau 2 : Répartition par type d’énergie utilisée
En %
Charbon
Petcoke
Combustible Alternative Fuel
Gaz
Fuel
Electricité
Asphalte
Divers
Total
LafargeHolcim
Italcementi
Vicat
CRH
HeidelbergCement
Saint-Gobain
Imerys
27,0
15,5
9,8
7,6
2,8
36,7
21,4
19,9
5,7
9,5
4,0
39,5
24,8
15,4
12,2
7,7
3,0
3,0
2,0
2,0
9,0
17,0
49,0
33,3
6,0
13,5
5,5
1,1
37,9
45,0
10,0
45,0
4,0
45,0
21,0
30,0
0,6
,
100,0
100,0
100,0
85,0
100,0
100,0
100,0
40,0
2,9
Sources : Sociétés, estimations Natixis
Depuis le choc pétrolier des années 70, les sociétés ont mené des stratégies visant à réduire
leur dépendance à l’égard des produits pétroliers et à accroître leur flexibilité en termes de
sources d’énergie utilisées. Les cimentiers disposent aujourd’hui d’usines où ils peuvent
modifier leur mix de combustibles, en fonction des contraintes locales d’approvisionnement.
Ainsi, les cimentiers implantés aux États-Unis utilisent dans cette région plus de charbon qu’en
Europe compte tenu de la production domestique importante. Depuis l’essor du pétrole de
schistes, la disponibilité de grandes quantités de gaz a provoqué l’effondrement des prix. Les
filiales américaines des cimentiers en ont largement profité.
En 2016, les cimentiers essaieront encore d’augmenter la part de l’énergie de substitution en
équipant quelques usines supplémentaires notamment dans les pays émergents où la part de
ces combustibles s’avère relativement faible par rapport à celle dans les pays matures.
L’utilisation de combustibles de substitution (brûlage de déchets : farines animales, pneus
usagés, etc.) constitue un levier important de réduction des coûts. Les sociétés, rémunérées il y
a encore quelques années pour ce type de services doivent désormais faire face à une plus
grande concurrence notamment de la part des incinérateurs. Le niveau d’utilisation des
combustibles de substitution varie beaucoup d’un pays à l’autre.
Si la chute du baril de brent semble constituer une excellente nouvelle pour les séquences
bénéficiaires des sociétés de notre échantillon, il convient, selon nous, de tempérer cet effet
compte tenu des éléments suivants :
 Des couvertures souscrites par les cimentiers. D’une manière générale, la politique de
couverture dépend de la société et des pays dans lesquels ils sont implantés et porte sur
des périodes pouvant aller de 6 à 9 mois.
 Des approvisionnements locaux. Le prix des combustibles locaux sont généralement fixés
par le gouvernement et décorrélés des marchés internationaux. Ils constituent une part non
négligeable de la facture énergétique rarement inférieure à 50% de la facture par pays selon
10 février 2016
83
CROSS EXPERTISE RESEARCH
nous. Dans les pays émergents, le gaz est acheté localement via des contrats long terme
(Nigeria, Algérie ou Egypte) ou encore le charbon (Inde).
 Les groupes ont déjà bénéficié de la baisse des prix du gaz américain. Aussi, ces derniers
ne devraient pas accuser un nouveau recul de la même ampleur.
 Les taxes sur le diesel représentent un montant incompressible. Les cimentiers ne
bénéficieront pas dans les mêmes proportions de la baisse observée sur le baril de Brent.
 Les effets de changes récents devraient aussi avoir un impact sur la facture énergétique. En
particulier, les cimentiers s’approvisionnent sur les marchés internationaux notamment en
dollar alors que le ciment reste vendu en monnaie locale.
Le négatif: une demande morne dans les émergents dans un contexte de surcapacité
Le niveau bas du baril de pétrole devrait entrainer des problématiques structurelles diverses et
pénaliser la demande dans les pays émergents. Au Moyen-Orient, un prix du baril bas aura
pour conséquence une baisse des dépenses publiques et des subventions aux ménages. En
Asie, la baisse du prix de combustibles sur les marchés internationaux s’est déjà largement
répercutée aux matières premières, sans parler des effets du ralentissement économique
chinois. La baisse des dépenses publiques et les subventions de la consommation d’électricité
et de carburants sont aussi au menu.
La principale conséquence directe du manque à gagner de la rente pétrolière en 2016 va se
traduire par une diminution des dépenses publiques et la fin de l’état providence. L’exemple de
l’Algérie et de la Malaisie reste, selon nous, sans appel :
 En Algérie, la loi de finances 2016 prévoit une baisse des dépenses budgétaires de 9%
conséquence du recul attendu des recettes budgétaires à 41 Md€ (-4% par rapport à 2015).
Les hydrocarbures constituent ~50% des ressources de l'Algérie. Ce budget table sur une
croissance de 4,6% et une inflation contenue à 4%. Dans ce cadre, le gouvernement a
annoncé 18 Md€ d’économies en abaissant sensiblement les subventions aux produits de
première nécessité ainsi que du gaz, de l’électricité, d’eau et des carburants.
 En Malaisie, le budget 2016 est annoncé en hausse mais de nombreuses mesures
d’austérité pourraient intervenir d’autant que le gouvernement malaisien s’attend à des
recettes en baisse. Elles proviennent principalement du pétrole (Petronas contribue aux
alentours de 50% aux recettes budgétaires) mais aussi du prix des matières premières
(caoutchouc, huile de palme et étain). Rappelons que les subventions des carburants ont été
supprimées en décembre 2014 mais que le pays continue de subventionner certains
produits de base notamment le riz ou les engrais.
Graphique 1 : Consommation de ciment par type d’ouvrage dans les pays émergents
Non
résidentiel
10%
Travaux
Publics
20%
Résidentiel
70%
Source : Estimations Natixis
10 février 2016
84
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Autant d’éléments à même de se répercuter sur la consommation de ciment dans les pays
émergents, non seulement les programmes infrastructures (demande publique) mais aussi le
pouvoir d’achat des ménages souffrant de la fin de l’état providence (demande privée). Vendu
majoritairement en sac, le ciment est généralement acheté par les familles soucieuses
d’améliorer leur habitation souvent inachevée.
A l’inverse, les pays importateurs de pétrole devraient tirer leur épingle du jeu. D’une part,
les cimentiers bénéficieront d’une baisse de leur facture énergétique et d’autre part ces pays
devraient profiter d’une plus grande latitude budgétaire.
Conséquence de la demande moribonde, la surcapacité devrait, selon nous, continuer
d’alimenter la chronique. Notre modèle offre-demande de ciment montre un déséquilibre
toujours plus important, non seulement dans le bassin méditerranéen mais aussi en Asie. Ces
surcapacités ne sont pas nouvelles mais le contexte du coût du fret bas pose la question de
l’avenir du négoce du ciment au niveau mondial.
Nous estimons à 270 Mt la surcapacité cimentière dans les pays du bassin
méditerranéen dont moins d’un tiers (70 Mt) près des côtes émanant de pays comme la
Turquie, l’Espagne, le Maroc, la Grèce, l’Egypte, l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis.
Graphique 2 : Capacité de production et surcapacité ciment dans les principaux pays du bassin méditerranéen
120
100
39
80
22
40
Total surplus: 212 mt
33
60
74
67
49
20
3
37
30
14
20
16
8
16
2
21
Spain
Italy
UAE
Morocco
Algeria
Production
Surplus
57
0
Turkey
Iran
Egypt
Saudi
Arabia
25
13
9
Iraq
Sources : ICR, sociétés, estimations Natixis
Dans les pays du sud-est Asiatique, la surcapacité cimentière devrait atteindre 220 Mt,
hors surcapacités chinoises à 680 Mt. Ces montants n’incluent pas le surplus de l’ordre de
60 Mt émanant des pays du Moyen-Orient disposant d’un accès direct à l’Asie (l’Arabie
Saoudite, les Emirats Arabes Unis et l’Iran). Les capacités près des côtes émanent non
seulement de la Chine mais aussi de la Thaïlande, de l’Indonésie ou encore de la Malaisie.
Graphique 3 : Capacité de production et surcapacité ciment en Asie hors Chine (en Mt)
3
8
18
8
9
2
4
1
3
Sri Lanka
22
4
24
Myanmar
36
12
Australia
34
Production
Total surplus: 216 mt
10
Bangladesh
57
Pakistan
56
Saudi Arabia
59
South Korea
58
Thailand
22
Philippines
6
Malaysia
10
Japan
73
19
Indonesia
6
Vietnam
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
surplus
Sources : ICR, sociétés, estimations Natixis
10 février 2016
85
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Support Services : prudence sur les Bases-vie
Geoffrey d’Halluin
Les grands groupes de Support Services, Compass (Neutre, objectif de cours 1 200 p) et
Sodexo (top pick sectoriel, Acheter, objectif de cours 103 €), sont exposés au segment des
Bases-vie, qui regroupe les services sur sites offerts aux clients des secteurs pétroliers, du gaz
et des mines. La situation d’un pétrole bas devrait négativement impacter ces clients, qui seront
Johanna Jourdain
+33 1 58 32 34 90
amenés à réduire leurs dépenses, accentuer la maîtrise des coûts, décaler le lancement de
[email protected]
projets d’exploration et réduire ceux dans la production. Par ricochet, les fournisseurs de
prestations de services tels que Compass (restauration collective essentiellement) et
Sodexo (restauration collective et services intégrés / facility management) seront
impactés.
+33 1 58 55 05 36
[email protected]
Compass et Sodexo sont exposés dans les mêmes proportions aux Bases-Vie, à savoir
environ 10% du CA et plus précisément ~5/6% du CA dans le segment Oil & Gas (le reste
en mining). En revanche, Compass devrait être plus sévèrement touché que Sodexo, car le
groupe est plus exposé sur le segment de l’exploration (50% de ses clients) alors que
Sodexo est essentiellement présent dans la production. Compass a ainsi mis en place un
plan de restructuration de sa division Bases-vie en 2015 et 2016 (environ 50 M£ de coûts de
restructuration), entraînant des marges stables pour le groupe sur ces deux années (Natixis
7,4%e). A ce stade, les commentaires de Sodexo suggèrent une forte baisse de l’activité et une
préservation des marges dans ce segment en 2016. Nous sommes plus prudents et anticipons
une baisse de 30 pb des marges du segment Reste du Monde (incluant les Bases Vie) à
4,3%e.
Notons qu’Elior (Acheter, objectif de cours 21 €) devrait, de son côté, bénéficier de la
baisse des coûts du pétrole via la hausse du trafic que cela devrait engendrer. Pour rappel,
Elior réalise environ 30% de son CA dans la restauration de Concessions dont ~35% sur les
Autoroutes.
10 février 2016
86
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Auteurs
Chef Economiste
Patrick Artus
+33 1 58 55 15 00
[email protected]
Responsable de la Recherche Economique
Sylvain Broyer
+49 699 7153 357
[email protected]
Recherche Economique
Johannes Gareis
+49 699 715 3354
[email protected]
Thomas Julien
+1 212 891 6219
[email protected]
Juan Carlos Rodado
+1 212 8725060
[email protected]
Matières premières
Abhishek Desphande
+44 20 32 16 92 23
[email protected]
Investment strategies - Marchés des taux d’intérêt et taux de change
Lyzu Paez Cortez
+33 1 58 55 80 97
[email protected]
Emilie Tetard
+33 1 58 19 98 15
[email protected]
Lee Su Young
+1 212 8915799
[email protected]
Thomas Zlowodzki
+33 1 58 55 86 07
[email protected]
Hong My Nguyen
+33 1 58 55 85 27
[email protected]
Sandra Pereira
+33 1 58 55 98 66
[email protected]
Ivan Pavlovic
+33 1 58 55 82 86
[email protected]
Elie Darwish
+33 1 58 55 84 32
[email protected]
Nelson Ribeirinho
+33 1 58 55 85 29
[email protected]
Stephen Ausseur
+33 1 58 55 05 35
[email protected]
Benoît Peloille
+33 1 58 55 03 07
[email protected]
Nordine Naam
+33 1 58 55 14 95
[email protected]
Responsable de la recherche Crédit
Thibault Cuillière
+33 1 58 55 80 56
[email protected]
Recherche Crédit
Responsable de la Recherche Actions
Stephane Houri
+33 1 58 55 03 65
[email protected]
Recherche Actions
Strategie
Sylvain Goyon
+33 1 58 55 04 62
[email protected]
10 février 2016
87
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Aéronautique - défense
Antoine Boivin Champeaux
+33 1 58 55 33 67
[email protected]
Banques
Alex Koagne
+33 1 58 55 04 39
[email protected]
Steven Gould
+33 1 58 55 72 32
[email protected]
Robert Sage
+44 20 3216 9170
[email protected]
BTP Concessions-Matériaux de construction
Grégoire Thibault
+33 1 58 55 35 45
[email protected]
Sven Edelfelt
+33 1 58 55 29 03
[email protected]
Constructeurs auto - équipementiers automobile
Georges Dieng
+33 1 58 55 05 34
[email protected]
Michael Foundoukidis
+33 1 58 55 04 92
[email protected]
Food HPC
Tegner Pierre
+33 1 58 55 24 34
[email protected]
Média
Jérôme Bodin
+33 1 58 55 06 26
[email protected]
Pavel Govciyan
+33 1 58 55 56 02
[email protected]
Pétrole – Services pétroliers - Tubes
Baptiste Lebacq
+33 1 58 55 29 28
[email protected]
Tourisme / Support Services
Geoffrey D’Halluin
+33 1 58 55 05 36
[email protected]
Johanna Jourdain
+33 1 58 32 34 90
[email protected]
Utilities
Philippe Ourpatian
+33 1 58 55 05 16
[email protected]
10 février 2016
88
CROSS EXPERTISE RESEARCH
Avertissement
Les cours de référence sont basés sur les cours de clôture.
Ce document (pièces jointes comprises) est strictement confidentiel et s’adresse exclusivement à une clientèle de professionnels ou d’investisseurs qualifiés. Il ne peut être divulgué à un tiers sans
l’accord préalable et écrit de Natixis. Si vous receviez ce document et/ou toute pièce jointe par erreur, merci de le(s) détruire et de le signaler immédiatement à l’expéditeur. La distribution, possession ou
la remise de ce document dans ou à partir de certaines juridictions peut être limitée ou interdite par la loi. Il est demandé aux personnes recevant ce document de s’informer sur l’existence de telles
limitations ou interdictions et de s’y conformer. Ni Natixis, ni ses affiliés, directeurs, administrateurs, employés, agents ou conseils, ni toute autre personne ne doit accepter d’être responsable à l’encontre
de toute personne du fait de la distribution, possession ou remise de ce document dans ou à partir de toute juridiction.
Ce document est une analyse financière élaborée conformément aux dispositions réglementaires visant à promouvoir l'indépendance des analyses financières. Il a été préparé par Natixis
dans le cadre de son activité de recherche en investissement et non en relation avec un projet d’offre de valeurs mobilières ou en tant que mandataire de l’émetteur de valeurs mobilières et
indépendamment de tout émetteur de valeurs mobilières mentionné dans ce document. Les placements mentionnés dans ce document peuvent ne pas être adaptés à tous les
investisseurs. Cependant, cette analyse est destinée à être diffusée indifféremment à chaque destinataire et les produits ou services visés ne prennent en compte aucun objectif
d’investissement, situation financière ou besoin spécifique à un destinataire en particulier.
Ce document et toutes les pièces jointes sont communiqués à chaque destinataire à titre d’information uniquement et ne consti tuent pas une recommandation personnalisée d’investissement. Natixis n’a
ni vérifié ni conduit une analyse indépendante des informations figurant dans ce document. Par conséquent, Natixis ne fait aucune déclaration ou garantie ni ne prend aucun engagement envers les
lecteurs de ce document, de quelque manière que ce soit (expresse ou implicite) au titre de la pertinence, de l’exactitude ou de l’exhaustivité des informations qui y figurent ou de la pertinence des
hypothèses auxquelles elle fait référence. En effet, les informations figurant dans ce document ne tiennent pas compte des règles comptables ou fiscales particulières qui s’appliqueraient aux
contreparties, clients ou clients potentiels de Natixis. Natixis ne saurait donc être tenu responsable des éventuelles différences de valorisation entre ses propres données et celles de tiers, ces différences
pouvant notamment résulter de considérations sur l’application de règles comptables, fiscales ou relatives à des modèles de valorisation. De plus, les avis, opinions et toute autre information figurant
dans ce document sont indicatifs et peuvent être modifiés ou retirés par Natixis à tout moment sans préavis.
Les informations contenues dans ce document peuvent inclure des résultats d’analyse issues d’un modèle quantitatif qui représentent des évènements futurs potentiels, qui pourront ou non se réaliser, et
elles ne constituent pas une analyse complète de tous les faits substantiels qui déterminent un produit. Natixis se réserve l e droit de modifier ou de retirer ces informations à tout moment sans préavis.
Plus généralement, Natixis, ses sociétés mères, ses filiales, ses actionnaires de référence ainsi que leurs directeurs, administrateurs, associés, agents, représentants, salariés ou conseils respectifs
rejettent toute responsabilité à l’égard des lecteurs de cette analyse ou de leurs conseils concernant les caractéristiques de ces informations. Les opinions, avis ou prévisions figurant dans ce document
et toutes pièces jointes reflètent, sauf indication contraire, celles de son auteur et ne reflètent pas les opinions de toute autre personne ou de Natixis.
Natixis ne saurait être tenue pour responsable des pertes financières ou d’une quelconque décision prise sur le fondement des informations figurant dans l’analyse et n’assume aucune prestation de
conseil, notamment en matière de services d’investissement.
En tout état de cause, il vous appartient de recueillir les avis internes et externes que vous estimez nécessaires ou souhaitables, y compris de la part de juristes, fiscalistes, comptables, conseillers
financiers, ou tous autres spécialistes, pour vérifier notamment l’adéquation de la transaction qui vous est présentée avec vos objectifs et vos contraintes et pour procéder à une évaluation indépendante
de la transaction afin d’en apprécier les mérites et les facteurs de risque.
Natixis a mis en place des procédures appropriées de séparation des activités visant en particulier à prévenir les conflits d'intérêt entre ses activités de recherche et ses autres activités. Ces "barrières à
l'information" peuvent être détaillées sur demande auprès du Responsable de la conformité. Natixis a mis en place des règles déontologiques visant à interdire aux analystes d'effectuer des transactions
personnelles (hors OPCVM, comptes gérés...). Natixis a mis en place une politique interne relative à la rémunération de l'analyste de nature à préserver son indépendance et à gérer les éventuels conflits
d'intérêts.
Il est à noter que, dans le cadre de ses activités, Natixis peut être amenée à avoir des positions sur les instruments financiers et l’émetteur sur lesquels des recommandations ou opinions peuvent être
données dans le document et pièces jointes communiqués.
En effet, Natixis peut être rémunérée pour la prise ferme, le placement, la mission de conseil, toute autre prestation de ser vice d’investissement ou activité bancaire ou toute autre prestation concernant
les instruments financiers de la société ou des sociétés citée(s) dans ce document.
Dans ce cas, les mentions relatives aux conflits d’intérêts que Natixis et que toutes les entités qui lui sont liées peuvent connaître, vis-à-vis de l’émetteur ou des émetteurs mentionné(s) dans ce
document sont consultables sur le site de la Recherche à cette adresse internet :
https://www.research.natixis.com/GlobalResearchWeb/main/globalresearch/DisclaimersSpecifiques
Natixis est agréée par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) en France en qualité de Banque – prestataire de services d’investissements et soumise à sa supervision.
Natixis est réglementée par l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) pour l’exercice des services d’investissements pour lesquels elle est agréée.
Natixis est agréée par l’ACPR et réglementée par les « Financial Conduct Authority » et « Prudential Regulation Authority » pour ses activités au Royaume-Uni. Les détails concernant la régulation
qu’exercent la Financial Conduct Authority et la Prudential Regulation Authority peuvent être obtenus sur simple demande à la Succursale de Londres.
Natixis est agréée par l’ACPR et régulée par la BaFin (Bundesanstalt für Finanzdienstleistungsaufsicht) pour l’exercice en libre établissement de ses activités en Allemagne.
Natixis est agréée par l’ACPR et régulée par la Banque d’Espagne (Bank of Spain) et la CNMV (Comisión Nacional de Mercado de Valores pour l’exercice en libre établissement de ses activités en
Espagne.
Natixis est agréée par l’ACPR et régulée par la Banque d’Italie et la CONSOB (Commissione Nazionale per le Società e la Borsa) pour l’exercice en libre établissement de ses activités en Italie.
Natixis est agréée par l’ACPR et régulée par la « Dubai Financial Services Authority (DFSA) » pour l’exercice de ses activités au « Dubai International Financial Centre (DIFC) ». Ce document n’est
diffusé qu’aux Clients Professionnels, définis comme tels selon les règles de la DFSA ; à défaut le destinataire doit retourner le document à Natixis. Le destinataire reconnait que le document ainsi que
son contenu n’ont été approuvés par aucun régulateur ou autorité gouvernementale des pays du Conseil de Coopération du Golfe ou du Liban.
Natixis, Négociateur pour compte de tiers et pour compte propre agréé à l’étranger, ne destine la diffusion aux Etats-Unis de cette publication qu’aux « major U.S. institutional investors », définis comme
tels selon les règles de la SEC. Ce document ne peut être distribué à aucune autre personne aux Etats-Unis. Chaque « major U.S. institutional investors » qui reçoit ce document, s’engage par cet acte,
à ne pas en distribuer l’original ni une copie à quiconque. Natixis Securities Americas LLC, Négociateur pour compte de tiers et pour compte propres agréée aux Etats-Unis et membre de la FINRA, est
une filiale de Natixis. Natixis Securities Americas LLC n’est impliquée d’aucune manière dans l’élaboration de cette publication et en conséquence ne reconnait aucune responsabilité quant à son
contenu. Cette publication a été élaborée et vérifiée par les analystes de Natixis, qui ne sont pas associés de Natixis Securities Americas LLC et n’ont pas fait l’objet d’un enregistrement professionnel en
tant qu’analyste auprès de la FINRA et ne sont donc pas soumis aux règles édictées par la FINRA.
Les opinions et avis sur des titres ou émetteurs figurant dans cette analyse reflètent uniquement les opinions et avis de leur(s) auteur(s). Les recommandations émises dans cette analyse n’influencent
en aucune manière, que ce soit directement ou indirectement, la rémunération du ou des auteur(s) de cette analyse.
JE (NOUS), SOUSSIGNE(S), LE(S) AUTEUR(S) DE CETTE ANALYSE, CERTIFIE (CERTIFIONS) PAR LA PRESENTE QUE LES OPINIONS ET AVIS SUR L’ENTREPRISE OU LES ENTREPRISES
ET SES OU LEURS TITRES FIGURANT DANS CETTE ANALYSE REFLETENT, SAUF INDICATION CONTRAIRE, LES OPINIONS ET AVIS DE LEUR(S) AUTEUR(S) ET QUE LES
RECOMMANDATIONS, OPINIONS ET AVIS EMIS DANS CETTE ANALYSE N’INFLUENCENT EN AUCUNE MANIERE, QUE CE SOIT DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT, LA REMUNERATION
DU OU DES AUTEUR(S) DE CETTE ANALYSE.
Les opinions et avis des auteurs peuvent diverger. Ainsi, Natixis, ses filiales et les entités qui lui sont liées, peuvent publier des analyses contradictoires et/ou parvenir à des conclusions différentes à
partir des informations présentées dans ce document. Pour toute demande d’information supplémentaire sur une opération sur un titre ou un instrument financier mentionnée dans ce document, veuillez
contacter votre point de contact chez Natixis Securities Americas LLC par courrier électronique ou voie postale à l’adresse suivante 1251 Avenue of the Americas, New York, NY 10020.
Les valeurs citées peuvent faire l’objet d’avertissements spécifiques. Elles sont accessibles sur le site Natixis à cette adresse :
https://www.research.natixis.com/GlobalResearchWeb/main/globalresearch/DisclaimersSpecifiques
Téléchargement