UNIVERSITE D’ANTANANARIVO FACULTE DES SCIENCES DEPARTEMENT DE BIOCHIMIE FONDAMENTALE ET APPLIQUEE Thèse de Doctorat en Sciences de la vie Option : Biochimie Appliquée aux Sciences Médicales La peste porcine africaine à Madagascar: évaluation de l’existence potentielle de compartiments sauvages et de leurs impacts épidémiologiques Par Julie RAVAOMANANA Soutenue le 03 octobre 2011 RESUME Le virus de la peste porcine africaine ou PPA a été introduit dans le sud-est de Madagascar en 1997 à partir de la côte du sud-est du Mozambique. Il s’est ensuite propagé rapidement dans d’autres régions du pays. Cette maladie épizootique a alors dévasté plus de la moitié de la population de porcs domestiques de Madagascar avec des conséquences économiques graves surtout pour le marché local de viande de porc. La maladie a ensuite évolué vers un statut enzootique, diverses hypothèses ont été avancées pour expliquer ce changement : adaptation des populations résistantes de porc, surtout de race locale ; présence et persistance du virus dans des hôtes sauvages comme la tique molle du genre Ornithodoros. En outre, la présence dans certaines zones de Potamochoerus larvatus, un hôte sauvage du virus, ainsi que le manque de mesures sanitaires fiables rendent difficiles la lutte et le contrôle de la maladie dans le pays. En 2006-2008, des investigations ont été conduites dans trois régions de Madagascar (région de Marovoay, Ambatondrazaka, et région des Hautes Terres vers Arivonimamo et Mahitsy), afin d'évaluer le rôle épidémiologique de la tique molle et du potamochère. Elles doivent permettre d’estimer le risque de transmission du virus de la PPA au porc par ces hôtes sauvages, transmission qui pourrait expliquer la persistance enzootique de la maladie depuis son introduction en 1998. L‘étude conduite a pu confirmer la présence de tiques molles de l’espèce Ornithodoros porcinus à Madagascar retrouvées dans la même porcherie de la zone d'Antananarivo-Mahitsy où elles avaient été collectées pendant la phase épizootique, en 2000. La répartition géographique apparemment restreinte de ces tiques à Madagascar peut être multifactorielle. Il a été également montré que ces tiques sont proches phylogénétiquement des tiques tanzaniennes O. moubata et qu’elles sont étroitement liées à l’espèce O. porcinus domesticus comme précédemment suggéré par Uilenberg en 1963. La détection de l’infection virale, avec un taux de 9,52%, chez les tiques collectées en 2000 et de 6,83% chez celles récoltées en 2007-2008 (alors qu’il n’y a pas eu d’introduction de porcs potentiellement infectés au cours des quatre années précédentes, entre 2003 et 2007) illustre la capacité de persistance à long terme du virus chez les tiques O. porcinus domesticus malgaches. Pour la première fois, il est démontré que les tiques molles O. porcinus domesticus peuvent être un vecteur compétent et/ou un réservoir naturel pour le virus de la PPA à Madagascar. Des infections expérimentales de tiques qui seront étudiées au laboratoire du CIRAD à Montpellier permettront d’approfondir ces résultats. Au cours de notre étude, aucun virus ni anticorps dirigés contre le virus n'ont été détectés respectivement dans les échantillons de rate et de sérum de potamochères analysés. Il a été en conséquence suggéré que le rôle du potamochère dans l’épidémiologie de PPA à Madagascar serait négligeable d’autant qu'il n'existe apparemment aucun contact entre les tiques molles O. porcinus domesticus et le Potamochoerus larvatus. A Madagascar, le risque d'introduction du virus chez le porc domestique par l’intermédiaire du potamochère et des tiques molles est considéré comme faible. Mots clés : Peste porcine africaine, Madagascar, Mahitsy, Ornithodoros porcinus, Ornithodoros porcinus domesticus, Potamochoerus larvatus