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N°05 # ÉTÉ 2015 N°05 # ÉTÉ 2015
PLACE DU MARCHÉ
PLACE DU MARCHÉ
LE DOSSIER THÉMATIQUE
Obligation de revitalisation
instituée par la loi du 17 janvier
2002, réaffirmée à travers la loi du
18 janvier 2005 de programmation
pour la cohésion sociale.
• Sont concernées les entreprises
de plus de 1 000 salariés ou
appartenant à un groupe de plus
de 1 000 salariés qui procèdent à
un plan de sauvegarde de l’emploi
• Montant de la contribution
financière entre 2 et 4 fois la valeur
du SMIC par emploi supprimé
• Une convention est négociée et
signée entre l’État, représenté par
le Préfet, et l’entreprise. Elle fixe
le montant de l’engagement
financier de l’entreprise, le nombre
d’emplois à créer, le périmètre
géographique d’application de la
convention, sa durée (maximum
36 mois) et, enfin, les actions de
revitalisation à mettre en œuvre.
Passage obligé pour les grandes entreprises contraintes
de licencier, les plans de revitalisation visent à amortir
les conséquences économiques des plans sociaux.
Depuis quelques années, les acteurs de l’ESS proposent
de les appréhender au-delà de la création brute d’emploi.
Petit tour de France inspirant.
LE RÉSEAU FRANCE ACTIVE
Un levier
de revitalisation
Q
uand une grande entreprise engage
un plan de sauvegarde de l’emploi,
c’est tout sauf une bonne nou-
velle. Encadrée par la loi, elle doit alors faire
preuve de responsabilité. C’est ce qu’a fait Air
France, à la suite de plans de départs volon-
taires, notamment sur les bassins d’emplois
d’Orly et de Roissy. «Nous voulions maintenir
un équilibre d’emplois sur ces territoires et mon-
trer que malgré les plans de départs, l’entreprise
a la capacité, par ailleurs, de développer de l’ac-
tivité», souligne Yves Le Petitcorps, le direc-
teur général de la Sodesi, la fi liale d’Air France
qui gère les conventions de revitalisation.
À cette fi n, la compagnie aérienne s’appuie
sur les réseaux locaux de soutien à la créa-
tion d’emplois, et parmi eux les Fonds ter-
ritoriaux franciliens de France Active. Forte
d’une longue tradition de formation et
d’embauche des jeunes, elle a notamment
contribué au lancement du programme
Cap’Jeunes en Essonne, dans le Val-de-
Marne, et désormais dans le Val d’Oise
(où France Active est représenté respecti-
vement par Essonne Active, Val-de-Marne
Active pour l’Initiative et Initiactive 95). «À
travers Cap’Jeunes, les fonds de revitalisation
permettent de renforcer la crédibilité du jeune
créateur auprès des banques et donc d’asseoir
le succès du projet », constate le directeur
général de la Sodesi.
Très implanté en Gironde au travers de sa
fi liale LaSer Cofi noga, le groupe LaSer s’est
lui aussi investi dans la convention de revi-
talisation signée en 2013 avec l’État. Cette
convention visait à la création de 265 em-
plois d’ici juin 2015, à travers le soutien aux
très petites entreprises et aux structures de
l’économie sociale et solidaire. Le Fond ter-
ritorial Aquitaine Active a été mandaté pour
créer 50 de ces emplois. «Un choix motivé
par des liens historiques avec Aquitaine Active,
LaSer Cofi noga étant l’un de ses membres fon-
dateurs» explique Benoist Aulanier, Délégué
à la Responsabilité Sociale et Environnemen-
tale du groupe LaSer, en charge du suivi de
la revitalisation. Fin 2014, 82TPE et 18en-
treprises solidaires avaient été soutenues et
l’objectif de 50emplois largement dépassé
par Aquitaine Active.
L’utilisation des fonds de revitalisation
comme outil de développement de l’ESS
fait ainsi son chemin, le secteur représen-
tant un fort potentiel d’emplois ancrés
dans les territoires et non délocalisables.
«Nous avons mis un peu de temps à défi nir
notre o re car les entreprises et l’État avaient
l’habitude de travailler ensemble de façon tra-
ditionnelle, avec le tissu local existant et sur
une logique de retour à l’emploi, témoigne
Denis Dementhon, directeur général de
France Active. Nous nous concentrions donc
sur notre activité de création d’entreprises.
Puis, progressivement, nous avons commencé
à proposer d’orienter les fonds vers des struc-
tures de l’ESS. Aujourd’hui, nous travaillons sur
ce double axe : création de TPE et développe-
ment des entreprises solidaires».
Un positionnement particulièrement abouti
dans la région toulousaine, où la Direccte
a impulsé la création d’un fonds de revita-
lisation mutualisé, auquel six entreprises
contribuent. Il est piloté par trois fi nanceurs
locaux : Initiatives pour une Economie
Solidaire, Réseau Entreprendre et Midi-
Pyrénées Actives. «1 million d’euros y sont
engagés, destinés à fi nancer des projets ambi-
tieux en terme d’emplois et plus spécifi que-
ment des projets de l’ESS, explique Jean-Eric
Florin, directeur de Midi-Pyrénées Actives.
De nouveaux champs d’action s’ouvrent par
rapport aux plans de revitalisation précédents
qui fi nançaient essentiellement des créateurs
de TPE en situation de précarité». Fin 2014,
26 projets avaient déjà été retenus parmi
lesquels une entreprise de travail tempo-
raire d’insertion, une société coopérative
dans le secteur de la télémédecine ou
encore une société de transport pour per-
sonnes à mobilité réduite.
Outre le gain en cohérence et en e cacité,
la mutualisation des fonds et la coopération
entre acteurs locaux rendent davantage
visibles les projets de l’ESS et sensibilisent
les dirigeants des entreprises contributrices.
«Ils ne font pas toujours le lien entre ESS et
BETTY MATHIEU
Responsable du service « Mutations Économiques »
de la Direccte IDF – Unité Territoriale de l’Essonne
Quel est le rôle de la Direccte dans la mise
en œuvre des plans de revitalisation (PRE) ?
La Direccte assure la mise en œuvre et le pilotage des
conventions de revitalisation. Elle assujettit l’entreprise, défi nit
avec elle le montant de sa contribution, les actions à mettre
en œuvre et le choix des opérateurs et en assure le suivi.
Elle veille à créer une synergie et à permettre un partage des
compétences et des moyens entre acteurs ayant une bonne
connaissance du territoire.
Quelle collaboration avez-vous mis en place avec
Essonne Active ?
La Direccte a sollicité Essonne Active sur la première convention
Air France avec un budget consacré à l’abondement de son
fonds de garantie. Les aides apportées aux entreprises ont
généré un e et levier sur les emprunts bancaires et créé
une dynamique territoriale. Les résultats ont été très positifs,
avec 232 emplois créés pour un objectif de 90. Sur la convention
en cours, Air France abonde le programme Cap’Jeunes.
Essonne Active a également été sollicitée sur un plan de
revitalisation pour accompagner des structures de l’ESS avec un
objectif de création de 33 emplois, 372 emplois ont été créés.
Quel est l’intérêt d’orienter une partie des fonds
de revitalisation vers l’ESS ?
L’ESS est un secteur en développement, fortement pourvoyeur
d’emplois non délocalisables, notamment dans les services.
Il répond donc à l’objectif de création d’emplois à fort ancrage
territorial pour compenser les e ets des restructurations,
notamment industrielles. Par ailleurs, il a encore di cilement
accès au fi nancement bancaire et n’a pas toujours les moyens
d’élaborer de véritables stratégies de développement. Si un
secteur a besoin d’être soutenu, c’est donc bien celui-là.
3 QUESTIONS À
Si on parle de
revitalisation
économique,
alors l’ESS
a des réponses
à apporter.”
«Dans quasiment
tous les territoires
aujourd’hui, une convention
de revitalisation a
été mise en œuvre.»
Source : Guide méthodologique 2013 - DARES
150
Source : Guide méthodologique « L’accompagnement de la mise en œuvre des conventions de
revitalisation », DARES, février 2013
conventions
de revitalisation
«Nous travaillons sur un double axe:
création de TPE et
développement des
entreprises solidaires.»
Denis Dementhon, Directeur général de France Active
sont signées chaque année portant sur 100 millions d’euros
d’intervention financière des entreprises, en moyenne annuelle.
Plus de
emploi, solidité économique ou innovation. Dia-
loguer avec eux lors des comités d’engagement
permet de déconstruire les représentations de
part et d’autre», explique Jean-Eric Florin. Et
de conclure : «Si on parle de revitalisation éco-
nomique, alors l’ESS a des réponses à apporter.
Il y a dix ans, ce discours n’était pas aussi pré-
sent du côté des pouvoirs publics. Aujourd’hui,
la prise de conscience est réelle». Pour preuve,
l’expérience toulousaine est déjà en train
d’essaimer dans d’autres régions.
Ainsi, le 10 juin, c’est en présence du
Ministre de l’économie sociale et solidaire,
du Préfet de région et de 5 autres réseaux
co-signataires que le représentant de France
Active en Pays de la Loire (Fondes) a signé
un fonds mutualisé de revitalisation pour la
création d’entreprises et le développement
de l’ESS.
Ou comment penser di éremment le déve-
loppement économique local et transfor-
mer une menace en opportunité.
REPÈRES