riches et certains pays asiatiques, attractifs, et des zones moins attractives comme l'Afrique, l'Amérique latine
ou le Moyen-Orient. Le même phénomène se rencontre à l'intérieur des pays, entre des régions insérés dans la
mondialisation et d'autres qui en sont exclues, entraînant une augmentation des inégalités (voir Des lieux et des
liens, de Pierre Veltz). Ce phénomène, particulièrement marqué en Inde et en Chine, se retrouve dans tous les
pays qui participent à la mondialisation.
La question des inégalités entre nations, et donc entre territoire, occupe les chapitres 4 à 7 (p. 61-121), soit près
de la moitié de l'ouvrage. Après une présentation générale (chap. 4), l'analyse se porte plus précisément sur
différentes aires géographiques et économiques : Asie, pays riches, Afrique (l'Amérique latine n'est pas traitée,
et c'est regrettable). C'est ici que Pierre-Noël Giraud développe l'essentiel de sa thèse de la mondialisation
comme fragmentation.
Reprenant les thèses ricardiennes relatives au libre-échange, l'auteur rappelle que celles-ci se placent dans un
cadre dynamique : si le principe des avantages comparatifs montre bien que, à un moment donné (en statique)
l'ouverture commerciale est profitable à tous, David Ricardo insistait surtout sur les gains sur la croissance (en
dynamique), l'ouverture des économies stimulant la concurrence et, par là, la croissance ((Rappelons que
Ricardo y voyait un moyen de repousser autant que possible l'état stationnaire, c'est-à-dire le moment où
l'économie arriverait à une croissance par habitant nulle, horizon logique d'un monde fini.)). Cela implique
alors de prendre en compte les imperfections de marché et les « frottements », le temps et les rythmes
nécessaires aux économies pour s'ajuster à l'ouverture. Afin d'y parvenir, Pierre-Noël Giraud propose de
reprendre un cadre analytique qu'il avait déjà développé dans un précédent ouvrage, « l'inégalité du monde » (p.
67-77). Tout part d'une distinction, sur un territoire économique donné, d'individus compétitif, produisant des
biens échangeables internationalement et, de ce fait, mis en concurrence par les firmes « nomades », et
d'individus protégés, mis en compétition, entre eux uniquement, par les firmes « sédentaires » dans les
frontières du territoire en question. De la composition de la population et des relations entre ces éléments
dépendra sa richesse d'un territoire ainsi que les inégalités internes qui y ont cours. Si les compétitifs sont
nombreux, obtiennent un revenu important sur les marchés internationaux et le dépensent prioritairement dans
la production des sédentaires, le territoire s'enrichit et les inégalités se réduisent. Si ces conditions ne sont pas
remplies, alors l'économie est moins riche et les inégalités s'accroissent. Ce sont ces trois variables – le nombre
de compétitifs, leurs revenus déterminés par leur prix relatifs, et leur préférence pour la production des
protégés1 – qu'ils faut étudier concrètement dans les différentes situations. L'avantage de ce modèle, nous dit
Pierre-Noël Giraud, c'est qu'il ne donne pas une solution prédéfinie : « tout est a priori possible : une
augmentation de la richesse avec augmentation ou réduction des inégalités, une réduction de la richesse avec
augmentation ou réduction des inégalités » (p. 75).
Les trois chapitres qui suivent se concentrent donc chacun sur des zones économiques particulières. Le chapitre
5, consacré à l'Asie, s'intéresse essentiellement aux deux grands pays « émergeant » de cette région du monde,
l'Inde ou la Chine, et illustre parfaitement la pertinence du modèle précédemment développé. Ces deux pays ont
1 On donne ici une traduction littéraire du modèle développé dans l'ouvrage, lequel s'exprime à l'aide de quelques équations et
notations mathématiques très simple. Certains lecteurs pourront être rebuté par cette présentation : soulignons toutefois que, d'une
part, l'auteur donne toute les clefs utiles à la compréhension de son schéma théorique, d'autre part que cela eut constituer, pour le
novice, une très bonne introduction au raisonnement économique modélisé, dont on trouve ici une illustration de la pertinence.