La réforme du COSIP La commission sélective du COSIP s`est

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La réforme du COSIP
Intervention de Serge Gordey, président de la commission sélective, à
l’occasion du « point d’étape » du CNC, Sunny Side of the docs, 22 juin 2014
La commission sélective du COSIP s’est réunie cinq fois depuis
le début de l’année. Cette commission composée pour chaque
tiers d’auteurs, producteurs et diffuseurs, réunit des personnes
aux parcours très différents. Je crois pouvoir dire que s’est petit
à petit construite parmi nous une intelligence collective efficace.
Nous parvenons assez bien à cerner nos différences et
réussissons très généralement à nous mettre d’accord ou à
bien comprendre ce qui nous divise. Comme vous le savez
peut être, la tâche est lourde : en moyenne 70 projets par
commission mensuelle.
Les avis de la commission sont principalement de trois ordres
- Une fonction sélective de financement
- Une fonction de majoration (autorisation de bonus)
- Qualification des programmes : tel programme est il un
film documentaire ?
La dimension sélective de notre commission
A vrai dire, rien de très original ici. Nous avons à lire des projets
de qualité très inégale. Certains nous tombent des mains ,
certains sont des bijoux, la majeure partie est dans une
honnête moyenne : pas honteux mais pas de quoi susciter un
grand enthousiasme…
C’est vrai de n’importe quelle commission qu’elle ait à examiner
des films à l’économie solide ou des films d’économie précaire.
Ce que nous lisons nous conduire à confirmer que « small »
n’est pas forcément « beautiful ». Il faut en finir avec une
certaine vision de films fauchés et petits et donc forcément
talentueux et maudits . Il y a un vice de raisonnement quand
on laisse penser que par nature, les projets effectués dans des
conditions précaires, seraient créatifs, indépendants, non
formatés, etc. A vrai dire, pour paraphraser Bachelard qui
faisait remarquer que la jeunesse est souvent très vieille tant
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elle est victime de préjugés puisqu’elle n’a pas eu le temps de
penser, de même, la « libre création » sans sanction du réel, y
compris professionnelle, économique, institutionnelle, peut
quelquefois s’avérer peu libre et créative et fort contrainte et
stéréotypée.
Il faut le dire : une économie foireuse s’est installée dont aucun
des acteurs n’est vraiment individuellement responsable, mais
où, par effet de système, la fraude semble le seul horizon
possible… . Les règles se trouvent détournées de leur finalité :
on n’encourage pas la vertu mais la triche. Certes, cette
économie foireuse permet à des films d’exister. Mais ces films
existent mal. Ce qui est certain, c’est qu’il est urgent de
changer la réglementation pour que certains films qui nous sont
présentés cessent d’être bâtis selon des devis et des plans de
financement mensongers. Et il faut veiller à créer des
mécanismes qui rendent ces films faisables dans des
conditions meilleures.
N’empêche qu’un nombre significatif de films nous sont
présentés dont la configuration de production est très fragile
alors même que ce sont de beaux projets. Un nombre
significatif d’entre eux sont reconnus comme tels par la
PROCIREP, la SCAM, les fonds régionaux, les festivals.
Cela n’est pas sans poser des questions sur l’économie
générale de notre secteur. Cela met en jeu la politique culturelle
et l’organisation de la radiodiffusion dans ce pays. Cela pose
des questions sérieuses sur les grandes chaînes qui, dans le
souci légitime d’exposer au mieux le documentaire à un public
large, manquent parfois d’audace.
En tous cas, de notre côté, après des essais et tâtonnements,
nous sommes arrivés à une doctrine de plus en plus ferme : il
convient d’aider au plus près de leurs besoins les projets qui
nous semblent les meilleurs, et éviter la pente plus facile du
saupoudrage. Bien entendu, nous pouvons nous tromper. Que
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l’on me permette cependant de dire, et ce n’est pas une
pirouette, qu’il revient aussi aux producteurs d’éclairer notre
jugement en nous présentant des bons projets cohérents,
clairs, sincères, correctement écrits et exigeants. Ce n’est
honnêtement pas toujours le cas…
La fonction de majoration
Comme vous le savez, la notion d’« emprunt des codes du
reportage et du magazine » n’est pas de la science exacte. Que
l’on pense à la question de l’investigation qui, tout en relevant
partiellement du journalisme, est quelquefois l’occasion de
réalisations remarquables sur le plan formel. Et qui peut nier, à
l’inverse, que certains documentaires ambitieux ne recourent
pas quelquefois à des techniques de reportage ? Notre genre
est hybride et c’est très bien comme cela. En ce qui concerne la
commission, elle peut jouer ici un rôle très positif pour que des
films, considérés d’emblée comme non bonifiables, parce que
relevant selon toutes les apparences des codes du reportage et
du magazine, soient considérés à leur juste valeur. Comme
vous le savez, les producteurs ont la possibilité de faire appel à
la commission sélective s’ils s’estiment injustement traités
lorsqu’il leur est signifié que leurs films ne peuvent prétendre
être bonifiés. Il est de la responsabilité de notre commission de
reconnaître le talent et l’exigence là où ils sont. Aux intéressés
de se saisir de cette possibilité si toutefois une dimension
documentaire ambitieuse est bien là…
Précisions ici que notre commission n’a pour le moment
qu’amorcé la réflexion sur les bonifications pour les films
d’histoire et de science, vu que les critères d’attribution ne sont
pas encore établis.
Sur la qualification des programmes
Il s’est passé une chose très inhabituelle dans la jeune histoire
de la commission. Il est arrivé que nous formulions des avis qui
n’ont pas été suivis par le CNC. Comme vous le savez, c’est
conforme aux règlements mais c’est inhabituel. Que s’est il
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passé ? Il s’est passé que notre commission a estimé, à la suite
d’un débat approfondi que certains des programmes qui étaient
soumis à son examen n’étaient pas des films documentaires. Il
n’est pas si difficile de reconnaître le tien du mien et de savoir
ce qui est du documentaire. Notre commission, malgré sa
diversité ou grâce à elle, s’accorde finalement assez bien,
après des débats sérieux, sur la qualification d’une œuvre.
Avec un sourire, je serais tenté de dire que les programmes en
question étaient selon nous des magazines qui empruntaient…
aux codes du documentaire, mais c’étaient selon nous bel et
bien des magazines ou des reportages. Qui pouvaient
éventuellement être aidés en tant que magazines mais pas
comme des documentaires. Nous n’avons donc pas été suivis.
Nous avons le droit de penser, la présidente a le devoir de
décider… Que signifie ce petit événement ? Il est à notre sens
révélateur. L’esprit de la réforme, et j’en sais quelque chose
pour avoir été l’un des auteurs du rapport « le documentaire en
tous ses états » avec Catherine Lamour, Jacques Perrin et
Carlos Pinsky » qui a inspiré la réforme, est d’encourager
particulièrement les documentaires les plus ambitieux et
créatifs.
Il s’agit donc de préciser le périmètre de l’aide. Ce faisant, nous
mettons évidemment en cause des dérives qui se sont créées
au fil des ans : pour aller vite, on voit le CNC abonder au
financement de programmes qui font l’ordinaire de la télévision
et de ses marques. Ils relèvent certes de l’industrie des
programmes mais pas véritablement de la création d’œuvres
patrimoniales originales procédant d’un point de vue d’auteurs.
On est arrivé au point où le CNC joue un rôle important dans
leur financement. Bien entendu, cette tendance est une
tendance lourde. Des intérêts puissants, l’équilibre économique
de diffuseurs du secteur privé et public est en cause, et de
certains producteurs aussi. Elle ne peut pas être annulée de
manière cavalière par la seule vertu des avis d’une
commission. Elles nécessitent une réflexion renouvelée de tout
notre secteur. Notre commission est en tous cas persuadée
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que faute de traiter ce problème au fond, il nous reviendra
immanquablement à tous dans la figure…
A quelles conditions la commission peut elle jouer un rôle
positif ?
En un mot, la réforme n’est pas aisée à mettre en œuvre. Nous
sommes cependant persuadés, dans notre commission, qu’elle
vaut d’être menée.
- que la commission affirme son rôle dans le soutien aux
tentatives les plus originales, créatives, aventureuses pour
ce qui est des films « artisanaux »
- que ses avis soient bien sollicités par le CNC toutes les
fois qu’il faudra pour éviter des abus et détournements de
règles quant à la définition de films
- que les producteurs se saisissent de la commission toutes
les fois où ils auront le sentiment que leurs films méritent
bonifiés, à l’encontre du jugement de l’administration du
CNC.
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