BIOLOGIE DE LA REPRODUCTION ET DU DEVELOPPEMENT LES INVERTEBRES : OURSINS ème Christian Ghiglion, [email protected], 3 étage du centre de biochimie, 04 92 07 64 62. Oursin : 4 heures de cours et 1 TP, drosophile 4 heures de cours. Bibliographie : « Principes du développement », Lewis Wolpert ; « Biologie du développement », Scott Gilbert. http://www.unice.fr/PATMP/ INTRODUCTION Tous les oursins ont ceci de remarquable qu’ils présentent tous des piquants aux diverses caractéristiques malgré une structure similaire de forme globulaire, à quelques exceptions près, dont les « dollars de sable ». LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 1 PHYLOGENIE Les oursins appartiennent au phylum des échinodermes, il en existe 7000 espèces, toutes marines, réparties en 7 classes. • • • • • Classe des Echinides (oursins, 900 espèces) Classe des Astérides (étoiles des mers) Classe des Holothurides (concombres de mer) Classe des Ophiurides (ophiures) Classe des Crinoïdes (lilas des mers) Echinoderme signifie littéralement « peau hérissée ». Du point de vue évolutif, contrairement à leur aspect à l’état adulte, les échinodermes appartiennent aux deutérostomes, tout comme les vertébrés. Ils sont donc plus proches que les autres systèmes modèles (Arthropodes et Nématodes utilisés en biologie du développement) pour l’étude de l’Homme. On rappelle qu’une des principales caractéristiques évolutive des Deutérostomes consiste en la formation de l’anus à partir du blastopore. La région anale se développe donc logiquement avant la région buccale. Les oursins ont une segmentation holoblastique, totale. La segmentation est radiaire, c'est-à-dire qu’elle aura lieu à partir d’un rayon, ainsi, on aura des plans de clivages soit parallèles, soit perpendiculaires à l’axe primordial. Les Deutérostomes ont une capacité de régulation des blastomères. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 2 ANATOMIE Les oursins sont des animaux benthiques, toujours disposés de la même façon : la face orale tournée vers le sol. Les piquants des oursins sont mobiles, mais ils ne permettent pas le déplacement, contrairement aux pieds ambulacraires, sur lesquels sont fixés des podia. Le test calcaire de l’oursin donne la forme globulaire de l’oursin adulte. Celui-ci est formé de cinq plaques riches en calcium soudées les unes aux autres. Tous les échinodermes présentent à l’état adulte une symétrie radiaire d’ordre 5, dite pentaradiaire. Sur la face orale se trouve la bouche, et sur la face aborale la région anogénitale. En regardant en détail cette première, on observe facilement l’orifice buccal clairement délimité par le test, les piquants et les podia. Les différentes teintes du test permettent de repérer aisément la symétrie pentaradiaire, ainsi que cinq régions ambulacraires où seront présents des orifices permettant aux pieds ambulacraires de passer. Le reste du test constitue les régions interambulacraires, où se trouveront les piquants mobiles. Au niveau de la face aborale, on repère également de façon claire la région ano-génitale, et, plus en détail, des orifices permettant la sortie des gamètes. L’oursin se nourrit d’algues, il dispose donc d’un appareil masticateur nommé « lanterne d’Aristote », consistant en une zone munie de cinq dents ainsi que des muscles rétracteurs permettant de les mettre en mouvement. Sur la dissection ci-contre, on reconnaît les dents calcaires alternées avec les compas, pièces squelettiques articulées faisant office de pince. On remarquera la rigoureuse conservation de la symétrie pentaradiée. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 3 L’OURSIN POUR L’ETUDEE DU DEVELOPPEMENT ANIMAL A AVANTAGES Afin de comprendre les mécanismes du développement, les chercheurs utilisent des espèces bien décrites du monde scientifique, souvent s des modèles dits « inférieurs », permettant une plus grande facilité de compréhension. Il n’existe pour cela aucun individu modèle parfait, mais certains présentent des avantages, tel l’oursin : • • • • • • • • Les oursins sont capables de produire des gamètes en très t 7 grandes quantités. Les femelles femel peuvent produire jusqu’à 10 12 œufs, et les mâles 10 spermatozoïdes. spermatozoïde La fécondation se fait en pleine eau, et le grand nombre de gamètes permet de pallier aux faibles probabilités de rencontre. La fécondation et le développement loppement sont externes. externes. Les différentes étapes sont donc très facilement observables au microscope, et peuvent être effectuées facilement in vitro. Le développement de l’embryon d’oursin est très rapide, on obtient au bout de deux jours une un larve, et est aussi synchrone, signifiant que toutes les larves croitront de manière identique au fil du temps. L’œuf et l’embryon d’oursin sont transparents, ainsi, on peut facilement observer les types cellulaires à l’intérieur du blastocœle. La structure de l’embryon on au stade larvaire est simple, avec un faible nombre de cellules. Les œufs d’oursin ont une taille permettant une manipulation facile par micro injections (ADN, ARNm, morpholinos) grâce à des micropipettes. Les embryons sont manipulables ulables facilement, on peut ainsi effectuer aisément des transplantations. transplantations Le génome de l’oursin a été entièrement séquencé, facilitant les recherches, car on connait désormais les expressions géniques codant pour les protéines. INCONVENIENTS Hélas ! Comme dit précédemment, il n’existe aucun modèle parfait. Voici donc les inconvénients du modèle « oursin » : • • La production de gamètes est saisonnière, par exemple de janvier à juin pour l’oursin de méditerranée. L’analyse génétique « classique » est impraticable, car le temps de génération nération est trop long : il faut plusieurs années afin d’obtenir obtenir un individu apte à la reproduction. Par analyse génétique « classique », on entend l’isolement solement des gènes particuliers ; on n réalise pour cela des cribles génétiques, qui consistent en des mutations sur des gènes uniques, et on observe les éventuelles modifications. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 4 CYCLE DE REPRODUCTION DE L’OURSIN La larve échinopluteus, issue de la fécondation, est capable de nager librement et de se nourrir. Quatre à cinq semaines plus tard, on a obtention d’un juvénile par métamorphose, qui va donner un nouvel oursin mâle ou femelle adulte, benthique. FECONDATION La reproduction est sexuée, avec des individus mâle et femelle. L’observation d’individus entiers ne renseigne pas le genre : il n’y a pas de caractères sexuels secondaires. En revanche, si un oursin possède de nombreux gamètes matures prêts à être expulsés, il y aura en son sein, soit une substance orangée, soit une substance blanche près du pôle aboral. Ces substances seront respectivement des ovules et des spermatozoïdes. On remarque que les œufs sont beaucoup plus gros et denses que les spermatozoïdes, les oursins étant anisogames. LES GAMETES Pour les observer, on dissèque les oursins au niveau de l’équateur. Les gonades se retrouvent également en symétrie pentaradiaire. Ces gamètes seront expulsés grâce à des petits canaux débouchant sur cinq orifices génitaux. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 5 LES SPERMATOZOIDES Les oursins pratiquant l’oogamie : seul le spermatozoïde est mobile. Passons en revue quelques unes de ses caractéristiques : La plus grande partie de sa tête est composé de chromatine condensée. Elle contient également une vésicule, l’acrosome, qui renferme des protéines : principalement des hydrolases et de la bindine. Entre l’acrosome et le noyau, on trouve de l’actine globulaire, qui sera modifiée et pourra polymériser au moment de la fécondation. Le spermatozoïde est entouré d’une seule membrane. La pièce intermédiaire, base de la « tête » du spermatozoïde, contient les mitochondries ainsi qu’un centrosome proximal et distal. Le flagelle est composé de neuf axonèmes, eux-mêmes formés de doublets de microtubules ainsi que des protéines de dynéine interne et externe, permettant aux microtubules de glisser les uns sur les autres. Se trouvent également deux microtubules centraux. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 6 ŒUF L’œuf comporte trois membranes : la membrane la plus interne est la membrane plasmique, sur laquelle est collée l’enveloppe vitelline. Celles-ci forment des microvillosités. Une troisième membrane, la gangue gélatineuse, est invisible au microscope à moins d’utiliser un colorant. Celle-ci reste fine tant que l’œuf se trouve dans l’ovaire, et servira par la suite de flotteur à l’œuf. Sous la membrane plasmique, on trouve une grande quantité de vésicules, les granules corticaux. Ceux-ci auront un rôle important à jouer lors de la fécondation. Mais avant d’être fécondé, l’œuf est polarisé, et on distingue un pôle animal et un pôle végétatif. Ceux-ci sont respectivement définis par la présence d’un canal par lequel seront expulsés les deux globules polaires au cours de la maturation de l’ovocyte, et par le point d’ancrage de l’œuf à l’ovaire. Chez l’oursin méditerranéen, on note la présence d’une bande pigmentée sous-équatoriale, toujours orientée de façon perpendiculaire à l’axe végétatif. La gangue gélatineuse possède une autre fonction que celle de bête et badaud flotteur : elle est capable d’attirer via un mécanisme de chimiotactisme les spermatozoïdes d’oursins de même espèce. Impliqué dans ce mécanisme, on a pu isoler un peptide de 14 acides aminés, la resact, synthétisé par la gangue gélatineuse. Pour pouvoir prouver que la resact joue un rôle dans ce chimiotactisme, on propose l’expérience suivante : on dilue des spermatozoïdes dans de l’eau de mer. Ceuxci ont tendance à tourner spontanément en rond. Si l’on rajoute de la resact, les spermatozoïdes seront attirés vers l’ovocyte. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 7 PROCESSUS DE FECONDATION Lors de la fécondation, l’œuf d’oursin est recouvert par une centaine de spermatozoïdes. Lorsque l’un d’entre va entrer en contact avec la resact, il sera activé par le mécanisme de réaction acrosomale : il y aura exocytose de la vésicule acrosomale contenant des hydrolases, qui vont digérer la gangue gélatineuse. De plus, l’actine G contenue dans le spermatozoïde va polymériser en actine F, entraînant le filament acrosomal. Une étape de reconnaissance a lieu grâce à une autre molécule transmembranaire, la bindine, contenue dans la paroi interne de l’acrosome. Une fois la réaction acrosomale effectuée, les polymères d’actine présentent littéralement les protéines de bindine aux récepteurs se trouvant sur la membrane vitelline. La formation du complexe bindine-récepteur permet la fusion des deux membranes, et la pénétration du noyau dans l’œuf. Lors de la fécondation, plusieurs centaines de spermatozoïdes se trouvent autour de l’œuf. Cependant, la fécondation n’est permise que pour un seul d’entre eux. Il n’y a pas présence de videur à l’entrée de l’œuf, aussi, il existe un mécanisme de protection consistant en une réponse électrique: en cas de fécondation, un flux entrant ou sortant d’ions va bouleverser le potentiel électrochimique. La dépolarisation du potentiel de membrane induite empêchera la fixation des spermatozoïdes surnuméraires sur l’œuf, évitant donc toute polyspermie. La réponse à la fécondation est rapide, et le potentiel de membrane retrouve un niveau normal au bout d’une dizaine de minutes. Il existe un second mécanisme assurant une protection définitive pour lutter contre la polyspermie : la réaction corticale de l’œuf. En cas de fécondation, les granules corticaux vont fusionner avec la membrane plasmique, exocytant des enzymes capables de rompre les liens entre membrane plasmique et vitelline. On créé de cette façon l’espace périvitellin, qui, grâce aux sucres des granules corticaux et le principe d’osmose, se remplira massivement d’eau de mer et créant un espace infranchissable à tout autre spermatozoïde. Parallèlement, des enzymes vont modifier la membrane vitelline, rendant l’enveloppe de fécondation rigide. Celle-ci va rester en place durant la phase de segmentation. Enfin, la couche hyaline, formée de protéines hyalines, apparaîtra et recouvrira la surface de la membrane plasmique, permettre aux blastomères de rester solidaires dans leur aventure. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 8 SEGMENTATION Au stade 16, il y a ensuite formation d’une cavité blastomères inférieurs vont subir une division latitudinale décalée vers le pôle végétatif, donnant 4 macromères et 4 micromères. Les blastomères sup mésomères. Au stade 32, les mésomères vont donner vont subir une division latitudinale asymétrique pour donner naissance aux grands micromères et aux petits micromères. Quand aux macromères, ils Au stade 64, les macromères subissent une division équatoriale pour donner deux assises végétatives veg1 et veg2. A partir du stade 128 cellules, on obtient un embryon appelle blastula, consistant en une b Chaque cellule de l’épithélium obtiendra un cil qui lui permettra de se mouvoir. Par la suite, la moitié animale de la blastula synthétise une enzyme d’éclosion qui permettra la dégradation de l’enveloppe c’est le processus d’éclosion. A la suite de celle Il est intéressant de connaître le devenir des blastomères, il s’agit présomptifs. LSV1 – Semestre 2 ETABLISSEMENT D’UNE CARTE DE TERRITOIRE PRESOMPTIF AVEC DES TRACEURS FLUORESCENTS REPERAGE DE L’ENZYME D’ECLOSION Durant la segmentation, au stade morula, nous sommes en présence d’un épithélium monocouche possédant un blastocœle. Au stade blastula, la taille du blastocœle augmente, et chacune des cellules de l’épithélium va acquérir un cil côté apical qui permettra à l’embryon de se mouvoir. Cet embryon va commencer à tourner sur lui-même à l’intérieur de l’enveloppe de fécondation. Il va ensuite sécréter une enzyme d’éclosion permettant la dégradation de l’enveloppe de fécondation. Ainsi, l’embryon va sortir de son enveloppe durant l’éclosion. Il est intéressant de savoir que l’on peut colorer les embryons par immunomarquage pour pouvoir détecter cette enzyme. A la suite de cette expérience, les cellules la contenant sont tâchées de brun. On repère donc que ce sont uniquement les blastodermes, dans l’ectoderme, qui contiennent cette enzyme et la synthétisent donc. TERRITOIRES PRESOMPTIFS Grâce aux marquages fluorescents, on arrive à dresser une carte des territoires présomptifs : An1, An2 et une partie de Veg1 formeront l’ectoderme, une partie de Veg1 et une partie de Veg2, l’endoderme, et l’autre partie de Veg2 et les micromères donnent le mésoderme En fin de segmentation, peu avant l’éclosion, la blastula contient à peu près 500 cellules agencées en un épithélium monostratifié. Au niveau du pôle animal, les cils des cellules sont très longs, on parle de touffe ciliaire apicale, qui joue un rôle de gouvernail. A l’extérieur de l’épithélium, on retrouve la couche hyaline ainsi que la matrice extracellulaire. Il faut que les cellules composant cet épithélium adhérent les unes aux autres de manière très coordonnée. Ainsi, il y a une jonction cellulaire entre la face apicale et la couche hyaline côté apical, et entre la face basale et la matrice extracellulaire tapissant la paroi du blastocœle. Cet ensemble permet d’obtenir un embryon parfaitement sphérique. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 10 Après l’éclosion, l’embryon est appelé blastula tardive. Il adoptera une forme particulière : les cellules du pôle végétatif vont s’aplatir et s’épaissir, formant la plaque végétative, composée des petits et grands micromères ainsi que des cellules issues de l’assise Veg2. Un embryon de cette forme est significatif d’un début de gastrulation. GASTRULATION La gastrulation est une étape très importante au cours du développement de l’embryon, c’est au cours de celle-ci qu’auront lieu les migrations cellulaires permettant de mettre en place les trois tissus primordiaux. Les différentes étapes de la gastrulation sont : • • • La blastula tardive, où les cellules de la plaque végétative vont s’épaissir et s’aplatir. Certaines vont migrer à l’intérieur du blastocœle pour former les PMC ou cellules du mésenchyme primaire. La gastrula précoce, où les autres cellules de la plaque végétative vont s’invaginer à l’intérieur du blastocœle pour former l’archentéron, tube digestif primitif. La gastrula tardive, où l’archentéron va s’allonger jusqu’à atteindre le pôle animal. INGRESSION DU MESENCHYME PRIMAIRE Au cours du stade blastula tardive, les cellules épithéliales sont initialement de forme cuboïdale, leur face animale en contact avec la matrice extracellulaire, leur face végétative au contact de la couche hyaline. Après réception de certains signaux, les grands micromères, au niveau de la plaque végétative, vont changer de programme génétique, induisant un changement de forme : ils vont s’extirper de l’épithélium. Pour cela, leur cil apical va disparaitre, et ils vont perdre leur affinité pour la couche hyaline en même temps que leur affinité pour la matrice extracellulaire sera multipliée par 100. Ces cellules vont petit à petit délaminer en direction de l’archentéron, pour former les PMC. On parle d’une transition épithélium-mésenchyme. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 11 Remarque : certains cancers sont d’origine épithéliale, certaines cellules cancéreuses se décrochant pour former des métastases. Quand les cellules auront pénétré dans le blastocœle, les cellules non-PMC vont adhérer les unes aux autres pour refermer l’épithélium unicellulaire. MIGRATION DU MESENCHYME PRIMAIRE Au stade blastula avec mésenchyme, les PMC vont émettre des extensions cytoplasmiques, les filopodes, qui vont permettre de vérifier la composition des parois du blastocœle à des fins de reconnaissance de la polarisation embryonnaire. Pour cela, la matrice extracellulaire contient des protéines, dont certaines d’entre elles vont réagir avec les filopodes. Les PMC vont ainsi chercher des protéines avec lesquelles elles auront le plus d’affinité, qu’elles retrouveront dans la région végétative de la blastula où elles migreront. Ces cellules du mésenchyme primaire vont former le squelette larvaire, composé de deux spicules calcaires. Une fois la migration des PMC dans le blastocœle terminée, la plaque végétative sera composée des cellules Veg2, et de petits micromères en son centre. INFLEXION DU POLE VEGETATIF DANS LE BLASTOCOELE D’autres mouvements cellulaires vont avoir lieu : la gastrulation va débuter à cet instant. Elle débute par la constriction apicale des cellules épithéliales, leur confèrent une forme dite « en bouteille ». Ce mécanisme est induit par l’exocytose de chondroitine sulfate, un protéoglycane qui va induire une dilatation de la couche hyaline interne où sont ancrées les cellules, et l’inflexion de celle-ci sur la couche hyaline externe. Ce mouvement est amplifié par les forces de poussée des cellules de la blastula sur le pôle végétatif. La plaque végétative s’invagine donc, formant le blastopore et l’archentéron, et ce sur une longueur correspondant au tiers de l’embryon. On parle de gastrula précoce. ELONGATION DE L’ARCHENTERON ET INDIVIDUALISATION DU MESENCHYME SECONDAIRE L’archentéron, de diamètre initial important, va ensuite devoir s’allonger afin de rejoindre le pôle animal. La première phase de cette élongation consiste en un phénomène d’intercalation cellulaire: les cellules vont se réarranger les unes par rapport aux autres. Après intercalation, on va obtenir un archentéron beaucoup plus long et plus petit de diamètre. Il n’y aura pas intervention de LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 12 division cellulaire. L’archentéron est alors à la moitié de la longueur du blastocœle. Une seconde phase d’élongation fera intervenir des cellules se trouvant au sommet de l’archentéron, les cellules du mésenchyme secondaire (Secondary Mesenchyme Cells ou SMC), provenant des petits micromères et d’une partie des cellules de l’assise cellulaire veg2. Celles-ci vont émettre des filopodes, parfois très longs, en direction du toit du blastocœle. Une fois arrimées, elles vont pratiquer une force de traction par raccourcissement de leur filopodes qui permettra l’allongement de l’endoderme vers le pôle animal. Par la suite, elles se détacheront pour se disperser dans le blastocœle, où elles formeront des organes mésodermiques. Ces cellules vont donc devenir des cellules mésenchymateuses, ainsi, elles seront capables de subir une transition épithélium-mésenchyme et acquérir leur mobilité. PHASE LARVAIRE LARVE PRISME En fin de gastrulation, le remodelage des tissus gastruléens n’est pas terminé, et va conduire l’embryon au stade larvaire prisme. Les SMC joueront en rôle prépondérant lors de cette transition : en effet, leurs filopodes, en plus de participer activement à l’élongation de l’archentéron, auraient, au cours de leur exploration des parois du blastocœle, un rôle de reconnaissance de la face ventrale de l’embryon. Une fois cette information récoltée, les SMC amèneraient alors par le même mécanisme de traction l’extrémité apicale du tissu mésodermique au contact de l’épiderme ventral, aplati, à l’origine de la région orale de la larve, formant plus tard, par contact, la bouche de l’embryon. De leur côté, les PMC vont continuer leur migrations jusqu’à former un anneau autour de l’archentéron, formé de deux chaînes cellulaires, orale et aborale, et deux amas cellulaires de part et d’autre de l’archentéron, les amas cellulaires oraux. Ces cellules vont par la suite fusionner entre elles, formant un syncytium, donc une cellule polynucléée, dans lequel un dépôt de carbonate de calcium permettra la formation de deux spicules triradiés. Petit à petit, la symétrie radiaire de l’embryon est remplacée par une symétrie bilatérale. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 13 LARVE DIPLEURULA Les spicules ont commencé à s’agrandir. A l’origine de la bouche, les cellules épithéliales de la face ventrale formeront la dépression stomodéale ou dipleuruléenne, permettant la fusion avec les cellules apicales de l’archentéron. La limite entre l’ectoderme oral et aboral formera la bandelette ciliée, permettant à la larve de nager et se nourrir (les battements de vils vont attirer vers la bouche des microorganismes comme les diatomées, dont se nourrir la larve). Celle-ci est alors planctonique. L’archentéron formera petit à petit œsophage, estomac, intestin et anus. Les deux spicules se rejoignent au niveau de la face dorsale de la larve. LARVE PLUTEUS Deux jours après la fécondation, nous sommes en présence d’une larve pluteus. Cette larve va continuer à se développer par division cellulaire et croissance. Il y a, par l’allongement des spicules maintenant sa forme, la formation de quatre bras se développant de plus en plus, entourant la bouche. On distinguera alors deux bras oraux et deux bras aboraux ou anaux. Les cellules du mésenchyme secondaire (SMC) dérivent des petits micromères et de l’assise veg2. Ces deux types cellulaires vont contribuer à la formation de deux vésicules cœlomiques, de part et d’autre de l’archentéron. Elles sont très importantes : c’est à partir d’une de ces deux poches qu’il y a formation d’un petit oursin par métamorphose. METAMORPHOSE La transformation ayant lieu lors d’une métamorphose, le développement de l’oursin est donc indirect. La plupart des cellules embryonnaires sont détruites lors de cette métamorphose. Les poches cœlomiques formées dès le stade larvaire dipleurula vont se métamériser en trois parties pour former : • • • Les axocoeles, au niveau antérieur : o de la vésicule gauche bourgeonne en direction de l’épiderme un canal débouchant sur l’extérieur, le canal madréporique. Aussi, une connexion s’effectue avec l’hydrocoele par un canal qui deviendra le canal du sable. Les hydrocoeles, au niveau intermédiaire : o la vésicule gauche sera à l’origine du système ambulacraire de l’oursin adulte. L’épiderme en contact avec elle s’invaginera et ébauchera une poche destinée à l’englober, c’est l’amnios. C’est à partir de cet ensemble que la métamorphose de l’oursin aura lieu. o quant à elle, la vésicule cœlomique du côté droit subit une forte réduction les somatocoeles, au niveau postérieur, vont entourer la poche stomacale pour former le cœlome gastrique. A propos de la symétrie : Jusqu’en fin de la gastrulation, les embryons possèdent une symétrie radiaire. A partir du moment où la gastrula commencera sa transformation en larve prisme, on obtiendra une symétrie bilatérale, les deux axes embryonnaires étant l’axe LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 14 oral-aboral et végétatif-animal. Certains organismes ont un troisième axe, comme chez les humains, qui n’ont pas de symétrie interne. Ici, l’hydrocoele gauche sera important pour le développement de l’oursin, contrairement à l’hydrocoele droit. On peut donc parler d’un axe de symétrie gauche-droit, que l’on peut distinguer avec certains marqueurs. L’hydrocoele gauche va donc permettre la formation d’un juvénile. L’ « amnios » formé correspond au vestibule. En son sein, l’hydrocoele évolue en anneau et bourgeonne en cinq diverticules, prémices de la pentamérisation formant le rudiment. On peut parler de disque imaginal. En dehors de ce vestibule, l'estomac, les cœlomes antérieur et postérieur gauches ainsi que l'ectoderme dorsal du pluteus participent à cette métamorphose. A partir de ce rudiment, au sein même de la larve, il y aura formation du juvénile, oursin miniature garni de quelques piquants et de cinq podia primaires. A la suite de la métamorphose, nous retrouverons une symétrie radiaire pentaradiée. Elle peut être mise en évidence avant la formation du test calcaire via l’observation des 5 plaques calcaires. La cavité amniotique s’ouvre, et les restes du pluteus non utilisé pour la métamorphose sont ingérés par le juvénile. Au fur et à mesure que l’animal est alourdi par son squelette et ses piquants calcaires, l’oursin descend vers les fonds marins. La formation du juvénile prend 5 à 6 semaines. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 15 L’AXE ANIMAL-VEGETATIF Plusieurs critères permettent d’identifier l’axe animal végétatif, par exemple sur un œuf avant la fécondation : • • • • Sur l’œuf, le canal permettant l’expulsion des globules polaires La bande pigmentée se situant sous l’équateur, visible seulement chez Paracentropus lividus, due à un colorant s’accumulant dans des granules corticaux. Le premier plan de division est méridien. Il passe donc par les pôles de l’œuf. Des le stade 16, on peut repérer pôle animal et pôle végétal. A partir des autres stades, il redevient difficile de les identifier, les cellules se divisant de plus en plus. Avant la gastrulation, on sait qu’aura lieu un aplatissement de la plaque végétative. Les chercheurs ont essayé de comprendre des différents rôles de l’œuf, pour cela, ils ont dans un premier temps pris un œuf qu’ils ont pu orienter, pour ensuite en faire des coupes. • une coupe méridienne permet l’obtention de larves pluteus quasi-normales. • Une coupe équatoriale permettra quant à elle l’obtention d’une blastula permanente pour la moitié animale, et une larve pluteus quasi-normale pour la moitié végétative. Cette expérience nous indique que les moitiés animales et végétatives d’un œuf n’ont pas les mêmes propriétés. Ainsi, la partie végétative semble la plus harmonieuse pour la formation d’un embryon. Les chercheurs ont réitéré l’expérience pour des embryons au stade 4. Chaque blastomère séparé est à ce stade capable de donner naissance à des larves pluteus normales. Pour des embryons au stade 8, on a : • séparés de façon méridienne, formation d’embryons normaux • séparés de façon équatoriale, un seul animal sera viable L’axe animal végétatif est donc formé avant la fécondation, démontrant l’existence de la polarité animale/végétative. Au niveau de la moitié végétative, il peut y avoir présence de substances plus importantes qu’au pôle animal pour le développement de l’embryon. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 16 Pour confirmer ces résultats, les chercheurs ont pris des embryons au stade 64, où les différentes assises sont mises en place et actives. Quand on ne conserve que la moitié animale, on obtient des embryons animalisés composés uniquement d’ectoderme. Si l’on rajoute à cette moitié animale l’assise cellulaire veg1, on obtient au bout de 24h un embryon dont l’animalisation sera plus faible, les cellules veg1 participant à la formation de l’endoderme. La moitié animale avec veg2 donnera une larve pluteus quasiment normale. Quant à la greffe de 4 micromères à une moitié animale, il y a obtention d’une larve pluteus normale. On conclut donc que les micromères ont le plus d’activité lors de la formation de larves normales. Les autres cellules ont également un rôle évident, mais plus faible. En comparaison, les cellules veg1 ont un rôle minimal. Ainsi, on suggère qu’il existe un gradient végétatif avec un maximum d’activité au niveau des micromères : au plus on s’éloigne du pôle végétatif, au moins le gradient est fort. Les micromères se comportent alors comme un centre organisateur, c'est-à-dire une zone de l’embryon importante dans la différenciation des autres cellules de l’embryon. POUVOIR INDUCTEURS DES MICROMERES On prend un embryon sur lequel on ôtera les micromères. A partir de ceux-ci, on effectuera une expérience de greffe, et on les installera au pôle animal d’un embryon au même stade. Pour pouvoir distinguer les micromères greffés des micromères endogènes, on colore une des deux groupes avec un traceur fluorescent. Au moment de la gastrulation, l’embryon receveur formera des PMC, l’archentéron, il y aura élongation, et formation des spicules. A partir du pôle animal, un second archentéron se formera, ainsi, l’embryon possédera deux archentéron qui se rejoindront par la suite. Les micromères ont donc la capacité d’induire la formation d’un archentéron, non pas à partir des micromères, mais des cellules de l’embryon receveur, c'est-à-dire des mésomères qui normalement forment de l’ectoderme. Les micromères sont donc bien un centre organisateur. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 17 Les chercheurs ont montré qu’il est possible de modifier le devenir des cellules au cours du développement de l’embryon. On peut montrer avec des marqueurs anticorps que les enzymes d’éclosion ont une certaine répartition. Certains produits chimiques peuvent en déplacer la frontière. • • Quant on rajoute du lithium, la frontière sera déplacée vers le pôle animal. Ainsi, la zone d’expression de l’enzyme d’éclosion sera réduite. Moins de cellules formeront de l’ectoderme. Il y a formation d’un embryon végétalisé. La larve a exogastrulé, signifiant que la gastrulation s’est faite à l’extérieur de l’ectoderme. Si on traite des embryons avec du zinc, il y aura déplacement de la zone vers le pôle végétatif, les embryons seront animalisés. Toutes les cellules appartiennent à l’ectoderme. LSV1 – Semestre 2 – Biologie de la Reproduction et du Développement Animal - Les Oursins - 18