Valdeblore, actuel canton de Saint-Sauveur, dans la vallée de la Vésubie, les deux étant à l’époque
dans l’arrondissement de Nice. Par ailleurs, le 23 octobre 1859, le Comté de Nice est réorganisé en 3
arrondissements (circondario) : Nice, Oneglia, et San Remo. En réponse à Napoléon III, les choses
sont rondement menées. Je n’insiste pas sur tout ce qui prépare la signature du traité à Turin le 24 mars
18601, puis sa ratification et son approbation par les chambres françaises et turinoises.
Ce que dit le traité du 24 mars 1860 , dans son Article 1er. Victor-Emmanuel consent à la
réunion à la France de Nice et de la Savoie, et renonce à ses pouvoirs en faveur de l’empereur des
Français. La précision qui suit est d’importance pour la question qui nous préoccupe aujourd’hui : le
rattachement se fera sans contrainte de la volonté des populations. D’où les deux plébiscites qui s’en
suivront en Savoie et dans l’arrondissement de Nice. Concernant la frontière, dans son Article 3, le
traité dispose qu’ : « une commission mixte déterminera dans un esprit d’équité les frontières des deux
Etats en tenant compte de la configuration des montagnes et de la nécessité de la défense ». Après de
nombreux allers1 et retours et un important travail de géomètre sur le terrain, la convention de
délimitation entre l’Empire français et le Royaume de Piémont-Sardaigne est signée un an plus tard, le
7 mars 1861 à Turin1. Dans son préambule, il est affirmé que cette convention fixe les limites « de
manière précise, détaillée et définitive et dans l’esprit le plus conforme aux intérêts des sujets des
deux souverains ». Nous savons déjà ce qu’il en sera du caractère définitif (pensons à l’agression de
1940), quant à l’intérêt des sujets, une partie d’entre eux s’inscrira en faux contre cette affirmation de
longues décennies durant.
En Savoie, la nouvelle frontière est établie en référence à un principe simple : suivre la limite
d’avant 1860, avec cependant des exceptions : au Petit-Saint-Bernard, la limite est ainsi tracée qu’elle
laisse le petit lac au Piémont ; au col du Grand-Mont-Cenis, la frontière suit la ligne de partage des
eaux. L’auberge de la ramasse reste côté français ; au col du Petit-Mont-Cenis, la frontière suit la ligne
de partage des eaux.
En ce qui concerne l’arrondissement de Nice, la délimitation fait l’objet d’une trentaine de
tronçons qui relient selon les cas des cimes à des torrents, ou des chemins à des pointes
montagneuses. Un Article trois de la convention, conforme à la rédaction du traité, précise que ces
nouvelles limites ne portent atteinte ni au droit de propriété ni aux diverses servitudes, qu’ils
concernent des particuliers, des communes ou des établissements publics et confirme la possibilité
d’importer d’un pays à l’autre les denrées provenant de terres restées de l’autre côté de la frontière
sans aucune taxation ni droit de douane. Cela peut concerner du bois, du beurre, du lait, du fromage ou
de la laine, des oranges, fleurs, ou olives ainsi que les engrais. Il est précisé que l’administration
française sera compétente en matière de coupe de bois pour les parcelles restées en Italie. Une
commission d’agriculteurs est prévue pour régler les problèmes susceptibles d’apparaître. Pour le
pacage, les troupeaux peuvent être envoyés de l’autre côté de la frontière si des propriétés y sont
conservées.
Ce dispositif qui semble avantageux ne durera cependant pas longtemps. Comme le montre
une carte1, les Piémontais conservent donc des territoires sur le versant français, en Tinée, en Vésubie
et surtout en Roya avec les communes de Tende et de la Brigue. S’agit-il ce faisant de respecter les
terres de chasse de Victor-Emmanuel ? Peut-être ! Mais sans doute s’agit-il plutôt d’une précaution
stratégique. Ainsi le Piémont continue à maîtriser le col de Tende des deux côtés. S’agit-il d’un
manque de perspicacité de la part de Napoléon III ou d’une faveur accordée à son homologue pour
favoriser le bon achèvement de la négociation et s’assurer de l’essentiel, c’est-à-dire la réunion
souhaitée de Nice et de la Savoie à la France ? La perspective d’une attitude agressive du Royaume de
Piémont-Sardaigne n’est, il est vrai, pas à l’ordre du jour, les relations entre les deux souverains sont
bonnes.