Formation Interuniversitaire de Physique 2006—2007 I) Atome `a

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Formation Interuniversitaire de Physique
2006—2007
Module L2 : Mécanique Quantique
Examen
Jean-Michel Raimond, Adrien Mahé, Sylvain Nascimbene
Ce problème examine quelques aspects de l’électrodynamique quantique en cavité. Un atome à deux niveaux est
couplé à un seul mode du champ électromagnétique, soutenu par une cavité résonnante de haute finesse. L’atome
est équivalent à un spin 1/2 et le mode du champ à un oscillateur harmonique unidimensionnel. On réalise ainsi
un des systèmes les plus simples et néanmoins les plus riches de l’optique quantique.
Ce problème se compose de deux parties. La première est relative à la manipulation d’un atome à deux niveaux
par un champ résonnant classique et traite de la méthode spectroscopique des franges de Ramsey. La deuxième
porte sur l’interaction de cet atome avec un mode du champ quantifié dans la cavité.
La seconde partie est, dans une large part, indépendante de la première. On pourra si nécessaire admettre les
résultats donnés dans l’énoncé. Les notes de cours et de TD sont autorisées.
On rappelle l’expression des matrices de Pauli :
0 1
0 −i
1 0
σx =
σy =
σz =
,
(1)
1 0
i 0
0 1
et de l’état |+θ,ϕ correspondant à un vecteur de Bloch pointant dans la direction définie par les angles polaires
θ et ϕ :
|+θ,ϕ = cos(θ/2) |+ + sin(θ/2)eiϕ |− .
(2)
I) Atome à deux niveaux et interférométrie de Ramsey
On considère deux niveaux non dégénérés d’un atome, |e et |g (on suppose que les autres niveaux atomiques
ne jouent aucun rôle). Le niveau |e est le niveau supérieur d’une transition vers |g à la fréquence angulaire
ω0 . On prendra l’origine des énergies à mi-chemin entre celles de |e et de |g. On assimilera ce système à deux
niveaux à un spin 1/2, placé dans un champ magnétique fictif le long d’un axe Oz (|e étant l’état |+ et |g
l’état |−). On pourra donc représenter un état arbitraire de l’atome par un vecteur (vecteur de Bloch) sur la
sphère de Bloch (|e correspondant au pôle nord et |g au pôle sud) et utiliser les matrices de Pauli σx , σy et
σz pour décrire les opérateurs atomiques.
1) Donner l’expression du hamiltonien H0 de l’atome en termes de la matrice de Pauli σz . Quelle est la forme
générique des états situés sur l’équateur de la sphère de Bloch ? Donner l’évolution libre des niveaux |e et |g
en fonction du temps t.
2) L’atome possède un moment dipolaire électrique représenté par l’opérateur d = d0 (σ+ + σ−), où d0 est un
vecteur réel décrivant la polarisation de la transition. On rappelle que σ± = (σx ± iσy )/2. Donner l’expression
matricielle de d dans la base {|e , |g}. Calculer la valeur moyenne de l’opérateur dipolaire dans un état atomique
arbitraire, en fonction des angles polaires θ et ϕ décrivant le vecteur de Bloch associé. Pour quels états cette
valeur moyenne est-elle de norme maximale ?
3) L’atome
à deux niveaux
interagit avec un champ électrique classique, à la fréquence ω0 lui aussi : E =
iE0 αe−iω0 t − α∗ eiω0 t , où E0 est une amplitude vectorielle réelle et |α| = 1. L’interaction entre l’atome et le
champ se fait par le hamiltonien Hi = −d · E. On justifiera rapidement cette forme de Hi . Ecrire l’équation de
Schrödinger régissant l’évolution de l’état atomique, |ψ(t).
4) On passe en représentation d’interaction par rapport à H0 . Pour cela, on pose ψ̃(t) = U0† |ψ(t), avec
U0 = exp(−iH0 t/h̄). Ecrire l’équation de Schrödinger vérifiée par ψ̃(t) . Montrer qu’elle décrit l’évolution sous
l’action d’un hamiltonien H̃i = d̃ · E, avec d̃ = d0 [σ̃+ (t) + σ̃− (t)]. Donner l’expression des opérateurs σ̃± (t) en
fonction de σ± (on pourra utiliser leur représentation matricielle et celle de U0 dans la base {|e , |g}).
5) Montrer que, dans l’expression complète de H̃i , deux termes sont rapidement oscillants et deux termes stationnaires. Justifier que les termes oscillants sont négligeables qu’on peut finalement écrire H̃i = −i(h̄Ωr /2)(σ+ α −
1
σ− α∗). Donner l’expression de Ωr . On pose enfin α = e−iφ . A quelle quantité physique correspond φ ? Montrer
que H̃i = h̄Ωr σu /2, où σu est l’opérateur de Pauli dans une direction u que l’on précisera.
6) En déduire que l’opérateur d’évolution U (t) décrivant l’action de H̃i pendant un temps t correspond, pour
le vecteur de Bloch, à une rotation d’un angle Θ = Ωr t autour de u. Donner l’expression matricielle de U
dans la base {|e , |g}. L’atome est initialement dans |e. Donner son état final après une application du champ
électrique correspondant à Θ = π/2, π et 2π (‘impulsions’ π/2, π et 2π). Commenter le dernier cas.
7) On soumet l’atome, initialement dans |e, à une impulsion de champ brève et intense au voisinage de t = 0, de
phase φ = 0, correspondant à Θ = π/2. Autour de t = T , on soumet l’atome à une nouvelle impulsion Θ = π/2
de phase ϕ. Donner l’état atomique final (on reste en représentation d’interaction par rapport à H0 de telle
manière que les niveaux atomiques n’évoluent pas en dehors des impulsions de champ). Calculer la probabilité
Pe de trouver finalement l’atome dans |e. Montrer qu’elle varie sinusoı̈dalement en fonction de ϕ. Peut-on
interpréter ces ‘franges’ en termes d’interférences quantiques ? Ce schéma est nommé méthode de Ramsey. Les
interférences de Ramsey fournissent une sonde très sensible des perturbations subies par le système atomique
entre les deux impulsions résonantes.
8) Entre les instants t1 et t2 tels que 0 < t1 < t2 < T , dans l’intervalle de temps entre les deux impulsions, une
perturbation externe change légèrement la fréquence de la transition atomique, qui devient ω0 = ω0 +δ. Comment
évolue l’état atomique, en représentation d’interaction par rapport à H0 pendant cet intervalle de temps ? En
déduire la nouvelle expression de Pe . Montrer que les franges de Ramsey sont déphasées de Φ = −δ(t2 − t1 ).
1.0
Transfer
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
Fig. 1 – Franges de Ramsey
9) La figure 1 présente un signal de Ramsey Pe (φ) obtenu sur une transition entre niveaux de Rydberg circulaires.
On donne ω0 /2π = 51.1 GHz, T = 400μs. Pour chaque point, on infère Pe de la détection de N atomes. Les
barres d’erreur correspondent aux incertitudes statistiques. Donner, d’après la figure, un ordre de grandeur de
N . On cherche a déterminer une petite phase additionnelle dΦ. Quelle est qualitativement la valeur optimale
de φ ? Quelle est alors la plus petite variation dΦ de Φ mesurable en détectant N atomes ? A quelle variation
de la fréquence atomique correspond-elle si t2 − t1 ≈ T ? Commentez.
10) Le contraste des franges de la figure 1 est différent de l’unité. Des champs parasites provoquent, d’un atome
à l’autre, une dispersion de la phase Φ autour de sa valeur moyenne. On suppose donc que Φ varie d’un atome
à l’autre comme une variable aléatoire uniformément distribuée entre −ΔΦ/2 et ΔΦ/2. Calculer Pe dans ces
conditions. D’après la figure, donner un ordre de grandeur de ΔΦ. Que se passerait-il si ΔΦ = 2π ?
2
II) Interaction atome-cavité : mesure sans absorption d’un photon
unique.
L’atome à deux niveaux interagit maintenant avec un mode du champ quantifié soutenu par une cavité
résonnante. On rappelle que ce mode est formellement équivalent à un oscillateur harmonique unidimensionnel
de fréquence ω. On notera a et a† les opérateurs d’annihilation et de création associés.
1) Rappeler l’expression du hamiltonien du mode, Hc , en fonction de a et a† . Quelles sont ses énergies propres ?
On notera |n l’état à n photons. On s’intéresse pour cette question aux niveaux du système atome-champ sans
couplage. Quels sont les états propres de H0 + Hc ? Sont-ils des états intriqués atome-champ ? Donner leurs
énergies. On posera Δ = ω0 − ω et on supposera dans toute la suite 0 < Δ ω0 . Représenter graphiquement
la position de ces niveaux non couplés.
2) On considère maintenant le couplage entre le dipôle atomique et le champ quantifié. L’opérateur champ
électrique s’écrit E = iE0 (a − a† ), où E0 est une amplitude vectorielle réelle. Ecrire le hamiltonien d’interaction atome-champ Hi . Montrer qu’il fait intervenir quatre termes opératoriels et les interpréter physiquement. Montrer que deux d’entre eux ont une influence négligeable si ω ≈ ω0 . En déduire qu’on peut écrire
Hi = −ih̄(Ω0 /2)(aσ+ − a† σ− ).
3) Montrer que Hi ne couple que les niveaux |e, n et |g, n + 1. En déduire que la diagonalisation du hamiltonien
total H = Ha +Hc +Hi se ramène à la diagonalisation séparée de hamiltoniens 2×2. On notera Hn la restriction
de H au sous-espace√{|e, n , |g, n + 1}. On pose Hn = h̄ω(n + 1)11 + Vn . Donner l’expression matricielle de Vn
(on notera Ωn = Ω0 n + 1). On associe à l’espace {|e, n , |g, n + 1} un spin 1/2 (|e, n étant assimilé à |+).
Donner l’expression de Vn en termes des matrices de Pauli associées à ce spin.
4) Donner les énergies propres de Hn . Ses états propres sont appelés ‘états habillés’ (on notera |+, n l’état de
plus grande énegie, |−, n celui de moindre énergie). Montrer que :
θn
θn
θn
θn
|e, n + i sin
|g, n + 1 ; |−, n = sin
|e, n − i cos
|g, n + 1 ,
(3)
2
2
2
2
où θn est défini par tan θn = Ωn /Δ. S’agit-il d’états intriqués atome-champ ? Quels sont les résultats dans le cas
Δ = 0 ? Représenter dans ce cas graphiquement la position des quelques premiers niveaux habillés (on suppose
Ωn ω0 ). Quel est le niveau fondamental ?
|+, n = cos
5) L’atome entre dans le niveau |e dans la cavité résonnante (Δ = 0) contenant exactement |n photons. Donner
l’expression de l’état |Ψ(t) du système à l’instant t dans la base {|e, n , |g, n + 1}. En déduire la probabilité
Pe|n (t) de trouver l’atome dans l’état |e. Montrer qu’elle oscille entre zéro et un à la fréquence Ωn .
6) On se place maintenant et jusqu’à la fin du problème dans le cas Ω0 Δ ω0 . Montrer que les états
habillés |±, n sont pratiquement identiques, à des phases près, aux états |e, n et |g, n + 1. En déduire que le
nombre de photons ne change pas et que l’interaction atome-champ résulte simplement dans un déplacement
de l’énergie des niveaux |e, n et |g, n. Donner ce déplacement au premier ordre non nul en Ω0 /Δ.
7) En déduire que la pulsation de la transition atomique est déplacée, quand la cavité est dans l’état |n,
d’une quantité s0 (2n + 1). Donner la valeur de la pulsation s0 en fonction de Ω0 et Δ. On place l’interaction
atome-cavité, durant un temps ti , entre les deux impulsions de champ classique d’un interféromètre de Ramsey.
Montrer que les franges de Ramsey sont déphasées par l’interaction atome-champ d’une quantité Φ que l’on
précisera. On réalise s0 ti = π/2. Représenter les franges pour une cavité vide et une cavité contenant un photon.
8) Comment choisir la phase φ de l’interféromètre de Ramsey pour que l’état atomique final soit corrélé sans
ambigüité au nombre de photons (0 ou 1) dans la cavité (|e correspondant à |1 et |g à |0) ? La détection
de l’atome dans un niveau ou l’autre réalise alors une mesure du nombre de photons dans la√cavité. Quelle est
la propriété remarquable de cette mesure ? La cavité est initialement dans l’état (|0 + |1)/ 2. On envoie une
série d’atomes dans le dispositif. Que peut-on s’attendre à observer ?
9) On couple à la cavité une source classique résonnante à t = 0. Elle crée, après un temps t, un état cohérent
d’amplitude α = vt. Donner le nombre moyen de photons en fonction du temps. A quel instant t1 aura-t-on un
photon en moyenne ? Pendant le couplage cavité-source, on réalise de façon répétée la mesure sans absorption
du nombre de photons par un atome. L’intervalle de temps τ entre deux mesures est beaucoup plus court que
t1 . Quelle est la probabilité de trouver 1 photon dans la première mesure ? Si on trouve zéro photon, quelle est
la probabilité d’en trouver un dans la deuxième mesure ? Que va-t-on observer finalement ? Au bout de combien
de temps en moyenne finira-t-on par détecter un photon ? Commenter.
10) La figure 2 présente une série de détections atomiques. Un atome dans |g correspond a un trait vertical
vers le bas, un atome dans |e a un trait vers le haut. Commenter cette figure.
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Fig. 2 – Séquence de détection du champ dans la cavité. D’après Kuhr et al, quant-phys/0612031
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