Tout d'abord, la taille de ce patrimoine a fortement augmenté (+ 70 %), malgré la crise financière,
passant de 2 600 à 5 755 milliards de 2000 à 2014, alors que le revenu disponible des ménages
n'augmentait que de 46 %. En second lieu, la composition du patrimoine s'est transformée : la part
des actifs financiers s'est accrue et celle des actifs monétaires a chuté (de 31,3 % à 30 %). Les
dépôts bancaires (monnaie scripturale) étaient la composante la plus importante du patrimoine des
ménages en 2000. Quatorze ans plus tard, les contrats d'assurance-vie - le placement financier
préféré des ménages - supplantent leurs avoirs monétaires avec une part de 38 %.
Des agrégats monétaires de plus en plus larges
Ces transformations reflètent les nouveaux comportements financiers des ménages. Ils cherchent à
réduire la part de leur richesse détenue sous forme d'encaisses monétaires non ou faiblement
rémunérées, pour se porter vers des actifs financiers liquides et rémunérés, telles les parts
d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM, fonds commun de placement et
sicav) ou d'assurance-vie.
Ces nouveaux comportements de placement constituent un défi pour les banques centrales. Leur
préoccupation principale est de guider au mieux les évolutions monétaires en fonction de leurs
objectifs, dont le principal est la stabilité des prix. Dans ce but, les banques centrales construisent
des agrégats monétaires qui sont des indicateurs statistiques censés mesurer le pouvoir d'achat des
agents économiques. La définition de ces agrégats suppose que soit tracée une frontière entre les
différents actifs monétaires et financiers, afin de déterminer ceux qui représentent une capacité de
dépense à court terme des agents économiques. Or, en atténuant les différences entre les catégories
d'actifs liquides, la multiplication des innovations financières tend à rendre plus floues ces frontières
(voir encadré ci-dessous).
Les banques au coeur de la finance moderne
Les banques jouent un rôle majeur dans ces transformations qui se caractérisent par une montée en
puissance de la finance de marché. Les banques françaises et européennes, qualifiées de "banques
universelles", sont présentes à la fois sur l'activité bancaire traditionnelle, qui consiste à faire des
crédits et à gérer des dépôts, et sur les opérations de marché. A côté de l'intermédiation bancaire
traditionnelle, s'est en effet développée une "intermédiation de marché", qui domine aujourd'hui
l'activité des banques universelles.
Ainsi, le poids relatif des crédits et des dépôts dans le bilan consolidé des banques a fortement
baissé : de 1980 à 2010, la part des crédits à la clientèle est passée de 84 % à 38 %, tandis que la
part des dépôts a chuté de 73 % à 34 % (voir graphique page 27). Mais, dans le même temps, les
banques ont élargi la gamme de leurs opérations sur les marchés de titres. En effet, celles-ci
participent de plus en plus au financement de l'économie par l'achat de titres, qu'il s'agisse de titres à
court terme inclus dans l'agrégat monétaire m3 (voir encadré page 26), ou de valeurs mobilières.
Ainsi, à l'actif des banques, la part des titres a été multipliée par plus de sept, passant de 5 % à 37 %
de 1980 à 2010. Parallèlement, les banques ont émis une proportion croissante des dettes sous
forme de titres, de sorte que, au passif, la part des dépôts bancaires, qui constitue la monnaie
scripturale, était devenue en 2010 moins importante que la dette sous forme de titres (42 %), dont
une partie - les certificats de dépôts - figure dans l'agrégat monétaire M3.
Les nouvelles modalités de la création monétaire
Les modalités de la création monétaire se sont donc diversifiées : désormais, les banques créent de
la monnaie non seulement à l'occasion de leurs opérations de crédit (intermédiation traditionnelle),
mais également en contrepartie de leurs opérations de financement par achats des titres émis par
l'Etat et les entreprises (intermédiation de marché). Le crédit bancaire n'est plus qu'une des
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