Whirlpool ou l`incompréhension économique et sociale

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Publié le 19 mai 2017
Whirlpool ou l’incompréhension
économique et sociale
Alors que leur nom fait la une des médias, il est des localités et des entreprises qui se passeraient
volontiers de la publicité que leur offrent les campagnes présidentielles. La liste est longue, voire
trop longue… On se souvient très bien de Hayange et de Grandange, des lieux où des candidats
présidents ont trébuché sur des promesses intenables et donc non tenues.
L’histoire va-t-elle se renouveler à Amiens ? L’irruption quelque peu opportuniste des politiques sur
le terrain du dialogue social a de quoi surprendre, alors que ce sont ceux-là mêmes qui ont pour
responsabilité de favoriser son bon déroulement.
Whirlpool, un cas de concurrence intra-européenne
C’est à Amiens qu’est localisée l’usine de fabrication de produits électroménagers appartenant au
groupe international Whirlpool qui fait l’objet d’un projet de transfert de son activité en Pologne,
avec comme conséquence pour les salariés du site la mise en place d’un PSE (Plan de Sauvegarde
de l’Emploi).
Il n’est pas inutile de rappeler qu’il n’y a pas si longtemps, une situation sociale similaire
concernant l’entreprise Goodyear, elle aussi implantée à Amiens, avait conduit à des manifestations
qui, pour certaines d’entre elles, furent assez violentes et donc médiatisées. Le tribunal politicomédiatique ne s’est pas intéressé à l’entreprise ni à ses enjeux, et la voix de la direction locale n’a
même pas été entendue. Dans ce contexte, elle n’était probablement plus audible, car coupable sans
instruction ni procès.
Pour autant, il convient de s’intéresser à l’entreprise Whirlpool : c’est une entreprise américaine
centenaire, qui emploie 93 000 salariés dans le monde et réalise un chiffre d’affaires consolidé de
21 milliards de dollars US. Le siège mondial est basé à Benton Harbor, dans l’État du Michigan,
aux États-Unis1.
Que peut bien penser de toute cette affaire l’équipe de direction de cette entreprise ? Certes,
l’interférence des politiques dans la vie des entreprises n’est pas une exclusivité française. Pour
autant, cette affaire aura probablement un impact négatif sur l’image de la France outre-Atlantique.
L’usine d’Amiens est la seule usine située en France parmi 13 sites industriels de Whirlpool en
Europe. Il est probable que la direction a souhaité regrouper les opérations sur un nombre limité de
sites, et que la décision de transférer en Pologne les productions actuellement réalisées à Amiens a
été prise après une étude complète prenant en compte les aspects sociaux, techniques, logistiques et
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- Informations disponibles sur le site internet de l’entreprise Whirlpool.
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économiques. La France et la Pologne sont toutes les deux membres de l’Union Européenne ;
cependant la Pologne n’est pas membre de la zone Euro et, ceci combiné à des niveaux de salaires
et de charges sociales inférieurs, il est très probable que le facteur coût du travail a été important
dans la prise de décision. De fait, cette situation est différente d’autres cas de fermetures d’usines en
France ou en Europe, qui sont réalisées au profit du développement de l’activité dans des pays
situés hors de l’Union Européenne. On est donc dans une sorte de concurrence intra-européenne,
entre pays de l’Union Européenne pour être précis, ce qui n’est probablement pas dans l’esprit
initial de la «construction européenne».
Que faire ?
Alors que faire ? La vraie question qui se pose est de savoir comment rendre l’investissement
attractif en France, mais pas seulement. Car il faut que le contexte économique et social soit
favorable dans la durée, quand l’entreprise se développe, mais également quand des difficultés se
présentent. Faire des promesses d’aides à l’installation, faire valoir la qualité de vie en France et le
savoir-faire de ses habitants… les idées ne manquent pas pour attirer des entreprises. Mais est-on
réellement capable de maintenir ces efforts dans la durée, d’apporter de la stabilité réglementaire et
fiscale, de favoriser les ré-investissements qui vont garantir la pérennité des investissements initiaux
et donc le maintien à long terme des emplois ? Ce n’est pas en vilipendant les entreprises qui sont
en difficulté que l’on donnera envie d’investir en France.
Vouloir bien faire en s’intéressant trop tard à la vie des entreprises conduit immanquablement à mal
faire.
Alexandre Germain
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