Document 1 : La quête de Pureté peut prendre bien des aspects, mais une dimension incontournable est
d’arriver à être soi-même, à s’émanciper de l’attention que nous prêtons au regard des autres sur nous, aux
apparences superficielles de la réussite sociale.
C'est une absolue perfection, et comme divine, de savoir jouir loyalement de son être.
Nous cherchons d'autres conditions, pour n'entendre l'usage des nôtres, et sortons hors
de nous, pour ne savoir quel il y fait. Si, avons-nous beau monter sur des échasses, car
sur des échasses encore faut-il marcher de nos jambes. Et au plus élevé trône du
monde, si ne sommes assis que sus notre cul. Michel Eyquem de Montaigne (1533-1592)
Essais, tome 3
En thèse générale, c'est notre nature animale qui est la base de notre être, et par
conséquent aussi de notre bonheur. L'essentiel pour le bien-être, c'est donc la santé et
ensuite les moyens nécessaires à notre entretien, et par conséquent une existence libre
de soucis. L'honneur, l'éclat, la grandeur, la gloire, quelque valeur qu'on leur attribue, ne
peuvent entrer en concurrence avec ces biens essentiels ni les remplacer ; bien au
contraire, le cas échéant, on n'hésiterait pas un instant à les échanger contre les autres.
Il sera donc très utile pour notre bonheur, de connaître à temps ce fait si simple que
chacun vit d'abord et effectivement dans sa propre peau et non dans l'opinion des
autres, et qu'alors naturellement notre condition réelle et personnelle, telle qu'elle est
déterminée par la santé, le tempérament, les facultés intellectuelles, le revenu, la femme,
les enfants, la résidence, etc., est cent fois plus importante pour notre bonheur que ce
qu'il plaît aux autres de faire de nous. L'illusion contraire rend malheureux. S'écrier avec
emphase : «L'honneur passe avant la vie», c'est dire en réalité : «La vie et la santé ne
sont rien ; ce que les autres pensent de nous, voilà l'affaire.» tout au plus cette maxime
peut-elle être considérée comme une hyperbole au fond de laquelle se trouve cette
prosaïque vérité que, pour avancer et se maintenir parmi les hommes, l'honneur, c'est-à-
dire leur opinion à notre égard, est souvent d'une utilité indispensable : je reviendrai plus
loin sur ce sujet. Lorsqu'on voit, au contraire, comment presque tout ce que les hommes
poursuivent pendant leur vie entière, au prix d'efforts incessants, de mille dangers et de
mille difficultés, a pour dernier objet de les élever dans l'opinion, car non seulement les
emplois, les titres et les cordons, mais encore la richesse et même la science et les arts
sont, au fond, recherchés principalement dans ce seul but, lorsqu'on voit le résultat
définitif auquel on travaille à arriver est d'obtenir plus de respect de la part des autres,
tout cela ne prouve, hélas ! que la grandeur de la folie humaine. Attacher beaucoup trop
de valeur à l'opinion est une superstition universellement répandue ; qu'elle ait ses
racines dans notre nature même, ou qu'elle ait suivi la naissance des sociétés et de la
civilisation, il est certain qu'elle exerce en tout cas sur toute notre conduite une influence
démesurée et hostile à notre bonheur. Arthur Schopenhauer (1788-1860)
Aphorismes sur la sagesse dans la vie
Document 2 : La quête de pureté oblige à reconsidérer les conditions de la satisfaction et de
l’épanouissement de soi, qui pensées de prime abord sont généralement considérées comme extérieures et
liées aux possessions matérielles. Il faut du temps pour se rendre compte que ces éléments, s’il ne sont pas
mauvais, sont des moyens et non des finalités de l’existence.
- Bonjour, dit le petit prince.
- Bonjour, dit le marchand.
C'était un marchand de pilules perfectionnées qui apaisent la soif. On en avale une par
semaine et l'on n'éprouve plus le besoin de boire.
- Pourquoi vends-tu ça ? dit le petit prince.
- C'est une grosse économie de temps, dit le marchand. Les experts ont fait des calculs.
On épargne cinquante-trois minutes par semaine.
- Et que fait-on de ces cinquante-trois minutes ?
- On en fait ce que l'on veut...
«Moi, se dit le petit prince, si j'avais cinquante-trois minutes à dépenser, je marcherais
tout doucement vers une fontaine...» Saint-Exupéry (1900-1944)
Le petit prince, Ch. 23
Association ALDÉRAN © - Cycle de cours N°1403 100 : “Les sept piliers de la sagesse” - 08/02/2004 - page 41