Mauvaise Nouvelle - Exodus, Gods and Kings
surement de se mettre à dos athées ou croyants.
La dimension épique vient alors créer une illusion de sensationnel dans ce film qui souffre parfois de confusion et
de longueurs inutiles.
Mais même là, Ridley manque de créativité en pompant allégrement dans ses anciennes productions à grand
spectacles afin de nous servir un produit fini où l’œil alerte aura l’impression de naviguer entre Gladiator, Kingdom
of Heaven et Robin des Bois.
On est parfois plus proche d’une charge de Mamelouks que de celle de l’armée des Deux Terres.
Les deux personnages principaux, Moïse et Ramsès, ne sont pas épargnés par le passage dans le broyeur de
Ridley Scott.
Le premier présente des réactions inconstantes et violentes qui ne collent pas vraiment à ce que devrait être ce
guide faisant sortir son peuple d’Égypte de manière pacifique. Une scène est le révélateur du traitement
personnage.
Juste après que les rumeurs de l’ascendance juive de Moïse sont parvenues aux oreilles de Ramsès, ce dernier
convoque Moïse pour lui demander de se justifier.
Celui-ci évoque des allégations ridicules et infondées. Ramsès admet avoir du mal à y croire lui-même, mais
convoque comme même Bithia pour lui demander de s’expliquer.
Bithia nie à son tour avoir trouvé Moïse dérivant sur le Nil, et de nouveau Ramsès admet croire Bithia.
Pourtant, il convoque à son tour Myriam, employée comme servante au palais, pour répondre à l’accusation d’être
la sœur de Moïse. Celle-ci nie pour sauver son frère.
Ramsès la menace de lui couper la main si elle continue à nier, mais Myriam réitère sa réponse. Ramsès s’apprête
alors à exécuter sa menace quand Moïse rentre dans un accès de fureur injustifiée, stoppe la lame de son cousin
et lui hurle dessus qu’il est bien le frère de Myriam alors que juste avant –et après d’ailleurs- il était convaincu
d’être un prince d’Égypte.
À partir de ce moment, Moïse semble s’acheter une conscience morale et rejeter sa condition de prince égyptien
pour devenir autre chose. Plus vraiment égyptien, mais jamais vraiment hébreu.
De même, aucune explication n’est avancée pour justifier que Moïse, ne croyant ni aux prophéties ni à Dieu,
abandonne sur un coup de tête sa famille et sa vie après l’épisode du Buisson Ardent pour retourner en Égypte,
endossant au passage le costume de Messie et de sauveur du peuple hébreu.
On a comme la désagréable impression que Ridley se prend pour le Maitre du Jeu d’une partie de Donjons Et
Dragons où il ne justifie pas ses décisions par "C’est magique", mais par "C’est biblique".
Le personnage de Ramsès n’est malheureusement pas plus épargné par le film.
L’interprétation faite par Joel Edgerton transforme l’un des plus grands dirigeants de l’Égypte Ancienne en un
homme indécis, fade et sans envergure, régnant par la terreur et plongeant l’Égypte dans la décadence.
À préciser également pour la culture générale que les temples de Abou Simbel ont été construits par Ramsès II et
non par son père Séthi Ier. Par conséquent, toute la scène mortuaire au début du film est historiquement fausse.
Que Dieu bénisse l’Amérique et sa vision de l’histoire !
Finissons malgré tout par quelques aspects positifs du film.
Le traitement des dix Plaies est purement et simplement phénoménal de maitrise technique et de trouvailles pour
représenter ces fléaux.
Par exemple, dans les productions précédentes, Moïse plongeait son bâton dans le Nil qui se transformait alors en
sang et infestait la faune du Delta.
Ici, c’est une horde de crocodiles du Nil géant qui attaque plusieurs bateaux, décime leur équipage dont le sang va
se répandre sur le Nil et l’infester.
Dommage que plus d’actes de bravoure cinématographique ne soient pas plus présents dans le film.
Enfin, un mot sur la 3D.
Elle est bien maitrisée, mais présente deux niveaux de qualité indéniable.
En intérieur ou dans des espaces à courtes profondeurs de champ, la 3D prend tout son sens et reflète
parfaitement bien la troisième dimension de la scène filmée.
Par contre, dès qu’on se retrouve dans des espaces ouverts, avec des panoramas sans aucun élément de repère,
la 3D devient inutile et n’apporte aucune plus-value au film.
En conclusion, Exodus, Gods and Kings est une production dont le fond n’égale pas la forme.
Le film présente une esthétique et un travail artistique très soigné, mais traite son sujet par-dessus la jambe sans
cohérence pour son propos, sans respect pour son support de base et en usant de symboles sans se préoccuper
de leur place dans l’histoire de l’Égypte.
Le film n’est pas complètement une catastrophe, et ne devrait pas déclencher de trop grandes réactions