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Décembre 2009 N° 68
Journal Confédération Paysanne 47
C’était lundi soir 14 décembre à la ferme de
Françoise et Henri Grossia à Tombeboeuf. Une poi-
gnée de paysans a partagé le repas avec une délégation
de responsables agricoles chinois. En visite d’étude en
France, le groupe composé d’ingénieurs agronomes,
d’inspecteurs généraux, de directeurs financier était
accompagné par une journaliste : Jy Zuging, qui avait
séjourné en Lot-et-Garonne dans les années 70.
A cette époque plusieurs familles de Paysans
Travailleurs avaient accueilli, lors des vacances, des
jeunes étudiants chinois en France pour leurs études.
La délégation constituée de 6 hommes et 3 femmes
représentait la province du Sichuan. 90 millions
d’habitants dont 69% de paysans. Disposés en groupes
de discussions autour des 2 interprètes, nous avons
fait découvrir notre gastronomie. Si le fromage de
chèvre fermier a reçu un accueil plutôt mitigé, les
pruneaux, les vins régionaux et particulièrement le
Bordeaux attirèrent leur attention.
L’extrême convivialité de ces instants entrecoupés de
séances de photos très joyeuses, nous a permis un
échange de point de vue informel mais instructif sur le
statut d’agriculteur et le mode de développement
souhaitable pour les territoires.
J’avais, à ma table, la responsable financière en
charge des subventions agricoles ainsi que le directeur
du département céréales et oléagineux de la province
du Sichuan. Je faisais face au sosie de Mao Tse Tong,
large visage, poupon, yeux bridés ! Seule différence
avec le père Mao, il n’était pas coiffé en arrière. Il fut
le seul à ne rien dire de la soirée, impassible comme la
statue du grand Timonier.
Avec l’aide d’une jeune interprète, j’ai expliqué
l’intérêt de protéger et de soutenir une paysannerie au
service de l’approvisionnement des populations et de
la souveraineté alimentaire. Comme ils semblaient
guidés par une vision plutôt industrielle de
l’agriculture, j’ai insisté sur la nécessité de protéger
les terres et les ressources naturelles, ainsi que leur
biodiversité cultivée. Les pressions démographiques
et économiques étant très fortes sur des terres plutôt
rares, je leur ai conseillé de ne pas aller trop vite dans
leur mutation agricole.
A un moment l’une des jeunes femmes déclara qu’elle
nous trouvait très cultivés, je lui ai répondu
J’ai soupé avec Mao !
que nous étions membres d’un syndicat Confédération
Paysanne où la réflexion critique est très développée
nourrie, entre autre, par de fructueux échanges avec le
monde extérieur. Lorsque cette personne se désola de
n’avoir pas de paysans équivalents en Chine, je
décelais dans ses propos la même pointe de
condescendance qu’ont certains administratifs vis-à-
vis de la classe des paysans. Je lui répondit que les
paysans ont l’intelligence de la terre et qu’il faut
prendre le temps de les écouter (commentaire
personnel : la Chine communiste n’a pas résolu la
question de la lutte des classes, leurs paysans sont les
grands perdants de leur « miracle économique ». A
quand la révolution agri culturelle en Chine !)
Quoi qu’il en soit nous avons partagés sur le plan
humain une soirée exceptionnelle comme seule la
Confédération Paysanne peut nous offrir au détour de
nos engagements. Nous avons pu découvrir des
personnes sympathiques, plutôt raffinées et très à
l’écoute.
A l’occasion de leurs visites d’étude entre Toulouse et
Bordeaux, la halte du Lot-et-Garonne restera dans les
mémoires. Un remerciement particulier à Françoise et
Henri Grossia pour l’accueil de cette délégation et
l’organisation des visites locales de terrain.
La délégation termina la soirée en distribuant quelques
cadeaux et par une invitation chaleureuse à découvrir
la province du Sichuan.
J’ai quitté nos amis chinois avec une cravate en soie,
promis juré je la porterai à l’occasion de notre
Assemblée Générale ! Christian CROUZET
Mao
par Andy Warhol
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Effondrement du revenu agricole 2009, l’Appel de Paris
du G22 n’apporte aucun espoir !
Dans un point presse, Bruno Le Maire a
présenté ce jour l’état de la mise en œuvre du plan
d’urgence en faveur de l’agriculture annoncé par le
Président de la République le 27 octobre 2009.
Malgré les interpellations de la Confédération
paysanne, alertée par l’association Solidarité Paysans
qui accompagne les agriculteurs en difficulté sur leur
exploitation, aucune annonce n’a été faite pour
permettre aux agriculteurs les plus fragiles de
bénéficier également du soutien de l’Etat face à une
crise qui les touche comme les autres.
En effet, le cadre européen dans lequel s’inscrit le
plan de soutien exclut de fait les agriculteurs réglant
l’endettement de leur exploitation par voie
judiciaire, alors même que ces procédures permettent
le redressement de l’exploitation et la sauvegarde des
emplois.
C’est pourquoi la Confédération paysanne revendique
que les 100 millions d’euros prévus dans le plan pour
les mesures « d’accompagnement » :
- soient prioritairement réservés aux agriculteurs
en procédures judiciaires (redressement
judiciaire ou procédure de sauvegarde),
- permettent une prise en charge totale des
cotisations sociales personnelles et patronales
2009 et 2010,
- permettent l’accès à un prêt à taux zéro
remboursable à la fin de la procédure judiciaire
pour faire face au versement des dividendes
2009 et 2010.
Au-delà de ce plan, la Confédération paysanne
rappelle que l’agriculture a plus que jamais besoin
d’une véritable politique agricole commune avec des
outils de régulation et de répartition.
Par ailleurs, la Confédération paysanne restera
vigilante à l’accessibilité évoquée des CUMA au plan
de soutien, ce qu’elle demande de longue date.
Plan de soutien à l’agriculture : Les agriculteurs en redressement
judiciaire toujours exclus.
Communiqué national du 08/12/09
CRISE
Comptes provisoires de l'agriculture publiés ce jour : de 12 milliards d'euros en 2008, le revenu de la
"ferme France" tombe à 8 milliards en 2009 soit : - 34% de revenu agricole.
Un producteur de lait moyen (200 000 litres) gagne 700 de revenu par mois.
Jamais depuis la tenue des comptes de l'agriculture une telle chute n'est intervenue.
Jamais à ce point tous les paysans n’ont été frappés par une crise généralisée.
Jamais à ce point, n'est offert aucun espoir !
Les profits des entreprises de transformation et de distribution ne souffrent pas, certains voient même leur
"capitalisation boursière" revenir à un très bon niveau.
Les décideurs peuvent dormir tranquille. Les paysans meurent presque en silence.
Depuis des mois, la Confédération paysanne en action sur le terrain, revendique une prise en compte des
difficultés des paysans.
Les ministres de 22 Etats de l'Union Européenne, réunis le 10 décembre lançaient avec Bruno Le Maire,
"l'Appel de Paris" : il y est écrit qu’il faut "donner aux agriculteurs des moyens pour mieux répondre aux
signaux du marché" Quelle provocation ! Comme si les paysans étaient responsables de la situation dramatique
dans laquelle les plongent les différentes politiques agricoles. Ils répondent au contraire formidablement bien
aux signaux ; tellement bien que les marchés qui flambaient il y
deux ans sont aujourd'hui à un niveau dramatiquement bas.
Quelle erreur d'analyse !
Depuis des semaines, nous demandons que le gouvernement
agisse pour un meilleur partage de la valeur ajoutée tout au
long des filières. Silence total, silence méprisant pour ceux qui
voient leur travail de tous les jours à ce point peu reconnu.
Toujours pas de modification de l'orientation libérale
dévastatrice de l'Union Européenne ; pas de signe aux industries
laitières ni à la grande distribution qui font de jolis profits.
Il est loin le temps des éloges à ceux qui se lèvent tôt pour
travailler.
Juste quelques promesses d'emprunt : un mécanisme qui se refer-
mera sur les plus fragiles qui ne peuvent déjà plus rembourser.
La Confédération paysanne exige que la nouvelle PAC tire les
enseignements de cette situation.
Les ministres européens doivent vraiment tourner le dos à ces
politiques internationales et communautaires qui liquident les
paysans. Communiqué national du 14/12/09
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Plan de soutien « dit » exceptionnel à l’agriculture
Le gouvernement dans sa grande
mansuétude met en place un plan de soutien
exceptionnel à l’agriculture.
Ce plan se répartit en trois catégories :
1° Prêts bancaires
-prêt de reconstitution de fonds de roulement
(trésorerie)
Aide à la reconstitution de la trésorerie par la prise en
charge partielle des intérêts. Taux maximum 3% avec
une prise en charge par l’Etat de 1,5% dans le cas
général et 2% pour les JA. Le plafond est de 30 000
sur une durée de 2 à 5 ans.
-prêt bonifié de consolidation.
Report de paiement des annuités 2010 Taux de 1,5%
cas général, y compris les récents investisseurs et 1%
pour les JA. Le montant maximum est de 30 000sur
une durée de 2 à 5 ans. Incompatible avec le fonds
d’allègement des charges.
La constitution des dossiers est à faire avec
l’établissement de crédit à partir de décembre 2009.
2° Allègement des charges
-fonds d’allègement des charges (FAC) .
Aide aux exploitations endettées, en difficultés. Prise
en charge d’intérêts 2010 de prêts professionnels dans
la double limite de 50% de l’échéance annuelle et du
montant des intérêts de l’année 2010. Concerne les JA
depuis le 27/10/2004, les récents investisseurs, les ex-
ploitations ayant une baisse de l’EBE d’au moins 5%.
-AGRIDIFF
Accompagnement des agriculteurs les plus en diffi-
culté. 2 niveaux de mesure. D’une part établir un pré-
diagnostic permettant d’identifier l’origine des
difficultés et leur niveau, d’autre part établir un plan
de redressement et d’allègement de charges. Les
conditions d’accès sont multiples :
- avoir moins de 55 ans , sauf si successeur
identifié
- endettement supérieur à 75% des fonds
propres hors foncier
- diminution de l’EBE de 20% sur les 3
dernières années
- engagement de rester agriculteur pendant le
plan de redressement
- agriculteur à titre principal depuis 5 ans
- revenu moyen par UT non salariée inférieur
au SMIC net annuel (12 444 en 2009)
Pour la constitution des dossiers, il préférable de
contacter la DDAF à partir de décembre 2009
-prise en charge des cotisations sociales
A voir directement avec la MSA .(aucunes précisions
sur ce dispositif)
3° Autres allègements
-exonération TFNB (taxe foncière non bâtie)
Prise en charge au cas par cas des taxes non payées au
15/10/09
Il faut contacter les services fiscaux. (Aucunes
précisions sur ce dispositif)
-remboursement partiel TIPP et TICGN 2009
(taxe intérieure sur les produits pétroliers et taxe inté-
rieure sur la consommation sur le gaz naturel)
Dispositif qui existe depuis plusieurs années. Seule-
ment 3 533 exploitations sur environ 8 500 ont deman-
dé ce remboursement pour le 2° semestre 2008. Pour
bénéficier de cette mesure, la seule condition est
d’avoir acheté des produits pétroliers dans l’année et
de remplir un formulaire que l’on trouve sur le site
mesdemarches.agriculture.gouv.fr ou à demander à
votre centre des impôts. Le formulaire 2009 n’est pas
encore établi.
Les formulaires sont à adresser à la Trésorerie
Générale — Cellule remboursement TIPP-TICGN
Pour le Lot-et-Garonne: 1 pl Jacobins 47000 AGEN
-remboursement partiel de la taxe carbone
2010. Aucunes précisions sur ce dispositif
Comme vous pouvez le constater ces mesures
ne sont pas nouvelles et non rien
d’exceptionnelles. Pour ce qui concerne le
FAC, AGRIDIFF, la TFNB et la TIPP, je crois
qu’il ne faut pas hésiter à monter des
dossiers car il n’y a rien de dévalorisant à
profiter de ces mesures. Elles sont faites
pour faire fonctionner la solidarité.
Elles ne sont malheureusement pas à la
hauteur des difficultés rencontrées par les
paysans.
Marie-Claude LEROY, paysanne de Gironde
NB : la Conf’ 47 participe au comité de gestion et de
suivi, faites nous remonter toutes les difficultés
rencontrées.
CRISE
La Confédération Paysanne : Prix Nobel d’économie !
Maurice Allais notre seul Prix Nobel d’économie est très en colère contre les responsable de l’OMC : « il faut de toute
urgence délocaliser Pascal Lamy (directeur de l’OMC), un des facteurs majeurs du chômage ! »
Et il plaide pour la création « d’ensemble régionaux plus homogènes unissant plusieurs pays lorsque ceux-ci
présentent de même conditions de revenu ».
Maurice Allais a du lire les propositions syndicale de la Conf’ qui réclame l’instauration d’une souveraineté alimentaire
à l’échelle d’ensembles régionaux. Il est désolant que ce brillant économiste soit délibérément marginalisé !
Source : Le Canard Enchaîné
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ACTU
47 L’ami européen !
José Bové, député européen, vice président de
la commission agricole et de l‘aménagement rural
était le vendredi 4 décembre à Villeneuve-sur-Lot à
la demande de la filière prunicole.
Nous en avons profité pour organiser une
2ème rencontre sur la ferme d’ Emmanuel et
Jacqueline Aze, arboriculteurs, afin d’aborder les
crises fruits et légumes et laitière.
Emmanuel y a présenté son travail axé sur la
qualité et la maîtrise de la commercialisation.
Michèle Roux responsable de la commission Lait
de la Confédération Paysanne d’Aquitaine, a
rappelé l’urgence d’une maîtrise de la production
laitière au niveau européen.
Nous avons trouvé José très à l’écoute, particulièrement
heureux de se trouver avec les militants de sa famille
syndicale. Il nous a conseillé d’être mobilisé et offensif
pour la nouvelle PAC et a insisté sur une économie
relocalisée capable de consolider la base d’un revenu
agricole.
Cette courte rencontre improvisée a permis une prise de
contact avec José dans ses nouvelles fonctions. Et nous
comptons poursuivre les relations avec ses attachés
parlementaires.
Un grand merci à Jacqueline et Emmanuel pour leur
accueil et la réalisation de ce rendez-vous.
Photo : La Feuille
Remerciements à La Feuille pour le crédit de certaines Photos
L’Echo des Campagnes : Directeur de publication: Christian CROUZET ;
Secrétariat de rédaction, Mise en page: Coralie HIARD ;
Confédération Paysanne de Lot-et-Garonne - 46 rue de la Convention - 47300 Villeneuve/Lot -Tél./Fax: 05 53 49 35 95
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ACTU 47
En marge des assises des territoires ruraux
découvrez le dossier du dernier Campagnes
Solidaires « Attention désert médical ».
Le mensuel de la Confédération Paysanne
nous livre encore une réflexion indispensable
à la compréhension du monde qui nous
entoure.
Une raison supplémentaire pour s’abonner.
En ces temps de fête, faites vous ce cadeau
vous ne le regretterez pas !
Pour cela, il suffit d’ envoyer noms et
coordonnées accompagnés d’un chèque de
39 (tarif normal pour un abonnement
annuel) ou de 50(tarif de soutien) à :
Campagnes Solidaires
- 104, rue Robespierre - 93 170 Bagnolet
Si vous n’avez rien à dire, c’est que tout va bien !
Fin novembre le Préfet a organisé les « assises
des territoires ruraux » autour de réunions dans
chaque circonscription du département.
Quelques semaines auparavant la presse avait révélée
le plan d’aménagement du territoire proposé par le
président de la République. En résumé : développer
des grandes métropoles régionales capables de
rivaliser avec les capitales européennes.
En fait, soutenir des pôles d’attraction concentrant
activités économiques et services publics. Et l’on relie
le tout par des réseaux de lignes autoroutières et
ferroviaires à grande vitesse. Les territoires ruraux
étant oubliés dans la communication de l’Elysée, ces
assises faisaient figure d’exercice de rattrapage.
Réunissant élus ruraux, représentants professionnels
et associatifs, le face à face avec l’administration
préfectorale se solda par un décalage évident avec les
attentes légitimes des populations. Chacun s’était
déplacé pour apporter son éclairage sur les thèmes
proposés : développer les activités économiques et
valoriser les atouts des territoires, faciliter la vie
quotidienne des populations, organiser et animer les
territoires. Lorsque le directeur des débats précisa, en
introduction, qu’il était exclu d’aborder les questions
financières et fiscales, chacun compris que ces assises
étaient un simulacre de consultation.
Sans moyen pour les territoires ruraux, l’échange ne
se borna qu’à quelques mesurettes possibles.
Dans un contexte d’abandon de la taxe profession-
nelle, d’un redécoupage administratif (commandé
par des velléités électorales), les élus présents furent
dans l’impossibilité d’aborder les problèmes de fond.
A maintes fois l’animateur interpella l’auditoire replié
dans une stupeur incrédule : « si vous n’avez rien à
dire, c’est que tout va bien ! »
Le gouvernement veut appliquer au territoire une
logique de gestion financière. Les territoires les plus
compétitifs économiquement seront soutenus. Pour les
déshérités on appliquera « une discrimination posi-
tive ». On abandonne la politique de complémentarité
et de solidarité entre territoires, qui a prévalu jusque
là, pour y substituer une compétition destructrice.
Mais que l’on se rassure cette concurrence libre et
non faussée sera corrigée par un discriminant positif.
Et faveur parmi les faveurs, c’est aux perdants de
définir les limites des corrections éventuelles pour les
dégâts occasionnés aux territoires. Autant demander à
celui que l’on va faire mourir de choisir la couleur du
cercueil !
Cette opération de communication gouvernementale
avait pour objectif de persuader du bien fondé de la
réforme et d’évaluer son degré d’acceptation par les
élus chargés de l’appliquer. Opération réussie pour le
plus grand malheur des territoires ruraux.
Christian CROUZET
Sans oublier les autres idées cadeaux, comme :
le Vin de la Conf’, un Duras pour les tables de fêtes (25le carton de 6 bouteilles)
et 2 livres « Voyage autour des blés paysans » (16)
« Variétés paysannes de maïs et tournesol … » (17),
sur des expériences, des
témoignages et des pratiques
pour cultiver la biodiversité.
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