Orchestre symphonique de l’Aube – saison 2016/2017 – livret 8
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Orchestre symphonique de l’Aube – saison 2016/2017 – livret 8
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Toccata et fugue en ré mineur BWV 565
de Jean-Sébastien Bach
(Eisenach le 31 mars 1685 – Leipzig le 28 juillet 1750)
Orchestration de Léopold Stokowski
(Londres le 18 avril 1882 – Nether Wallop le 13 septembre 1977)
Date de composition : Entre 1700 et 1708 dans la version originale pour orgue de Jean-Sébastien
Bach. 1952 pour l’arrangement de Léopold Stokowski.
Durée de l’œuvre : 10 minutes environ
L’œuvre : Jean-Sébastien Bach écrit un grand nombre de toccatas et fugues
tout comme il compte un nombre incalculable de préludes et fugues à son
catalogue. Parmi toutes ces œuvres, l’une d’entre elles est devenue l’un des
«tubes» les plus connus et utilisés de l’histoire de la musique dite classique
puisque qu’elle est reprise une bonne trentaine de fois au cinéma mais
également à la télévision pour la publicité ou dans les séries, par différents
chanteurs et groupes, dans le jeu vidéo et même dans certains parcs
d’attractions…
La Toccata et fugue en mineur BWV 565, dont la paternité reste contestée, est une œuvre assez
courte dont le style ne correspond pas forcément avec les œuvres postérieures et particulièrement
celles datant de la période de maturité du compositeur. On y sent une influence de musiciens antérieurs
tels que Buxtehude que Bach admirait beaucoup.
Au début des années 1950, Léopold Stokowski, réputé pour ses orchestrations très libres
d’interprétation, reprend cette œuvre déjà universellement connue pour en faire une version orchestrale
monumentale que joue l’Orchestre Symphonique de l’Aube pour ce concert.
Il est parfaitement évident que cette version, pour être acceptée, ne doit en aucun cas faire référence à
la version originale de l’œuvre et encore moins à l’esthétique de l’époque. On sent dans cette version,
une volonté de théâtraliser l’œuvre avec des effets et codes orchestraux parfaitement modernes.
Structure de l’œuvre : Deux parties principales sans interruption.
1. Toccata
2. Fugue
Instrumentation : 4 flûtes, 3 hautbois, 1 cor anglais, 3 clarinettes, 1 clarinette basse, 3 bassons, 1
contrebasson, 6 cors, 3 trompettes, 4 trombones, 1 tuba, timbales, Célesta, 2 harpes, violons 1 et 2,
altos, violoncelles et contrebasses.
Le compositeur : à Eisenach, en plein cœur de l’Allemagne, quelque part entre Francfort et
Leipzig, Jean-Sébastien Bach est le plus jeune d’une famille de huit enfants. La famille Bach est une
famille de musiciens depuis le 15
e
siècle. Tout jeune encore, le jeune Jean-Sébastien est initié au
violon par son père. Celui-ci meurt en 1695, un an après sa femme. Le jeune garçon est élevé par son
frère Johan-Christoph qui lui enseigne l’orgue. Après des études générales, il rentre à Lunebourg il
se passionne pour le latin et la théologie. Il apprend quelques rudiments de français, langue de
l’aristocratie européenne à l’époque. Il va à Hambourg il rencontre les meilleurs artistes de son
temps.
Nommé successivement comme organiste à Armstadt en 1703 puis à Mulhausen en 1707, il
émerveillera par sa virtuosité musicale. Cette même année il épouse, à l'âge de vingt-deux ans, sa
cousine éloignée Maria Barbara Bach dont il aura sept enfants. Il accède au poste de maître de chapelle
à la cour du duc de Saxe-Weimar, puis à celui de directeur des concerts du duc.
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De 1714 à 1723 il occupe à nouveau les fonctions de maître de chapelle mais cette fois à la cour du
prince d’Analt-Goeten. A son retour l'attend une triste nouvelle : le décès de sa femme. Dix-huit mois
plus tard, il se remarie avec la cantatrice Anna Magdaléna Wulken avec laquelle il aura encore
quatorze enfants. En 1723 Bach sollicite la succession de Kuhnau comme Cantor à St Thomas de
Leipzig ce qui est un titre très honorifique et dirige également le collégium Musicum, société musicale
fondée par Telemann, musicien officiel de la cour de Saxe.
En 1774, il rencontre Frédéric II et improvise une fugue à quatre voix, sur un thème proposé par le
royal flûtiste.
Malgré quelques portraits à l'huile, la physionomie du grand musicien reste énigmatique. Toute sa vie
il travaillera dans des conditions pénibles, éprouvé par la perte de onze de ses enfants et sera atteint de
cécité les trois dernières années de son existence. D'une extrême simplicité et d'une grande modestie il
affirmera : «j'ai travaillé avec application, quiconque s'appliquera aussi bien que moi en fera autant»
«Travailler pour Dieu», telle est sa devise de chrétien, de mystique, et dans toutes ses œuvres nous
retrouvons non seulement le constructeur de génie mais aussi le poète et le croyant.
Il meurt victime d'une crise d'apoplexie en 1750 âgé de soixante-cinq ans.
La musique de Jean Sébastien Bach est le témoignage d’une synthèse fondamentale dans l’époque
baroque : de la tradition germanique et des influences italiennes et françaises, ainsi que de l’ensemble
des procédés musicaux de la composition polyphonique. Si Bach est le maître incontesté du
contrepoint et de la fugue, il n’en reste pas moins un fascinant mélodiste.
Jean-Sébastien Bach s’illustrera dans tous les genres musicaux excepté l’opéra mais composera
cependant un certain nombre d’oratorios tels que l’Oratorio de Noël, les passions… Parmi son œuvre
monumentale, on trouve des chorales, préludes, fugues, concertos, quatuors, suites, sonates, cantates,
messes…
L’arrangeur : à Londres, Léopold Stokowski, Antoni Stanisław Bolesławowicz de son vrai nom,
est d’origine polonaise par son père et irlandaise par sa mère. D’abord organiste il commence une
carrière phénoménale de chef d’orchestre aux Etats-Unis en 1908 pour la poursuivre jusqu’à sa mort à
l’âge de 95 ans.
Outre sa carrière de chef d’orchestre, il était réputé pour ses arrangements parfois très libres comme
celui de la Toccata et fugue en mineur BWV 565 de Jean Sébastien Bach ou bien encore des
Tableaux d’une exposition de Moussorgski.
Il fut également arrangeur pour Walt Disney dans le dessin animé musical Fantasia (1940) dont il
prend lui-même la direction de l’Orchestre de Philadelphie.
Une toccata : Le mot toccata vient de l’italien toccare qui veut dire toucher. La toccata sert à l’origine
à l’organiste ou au claveciniste à tester l’instrument dont il va jouer. La toccata, généralement
puissante et virtuose, devient ensuite une pièce à part entière tout en gardant ce caractère de
démonstration comme on peut l’entendre dans l’œuvre de Bach.
Une fugue : Le mot fugue vient de l’italien fuga qui veut dire fuite. Une fugue est une composition
contrapuntique (le contrepoint est l’art de superposer des mélodies ou phrases musicales) qui possède
une construction règlementée. Elle est composée généralement de trois parties principales.
1. La première partie nommée exposition est celle qui caractérise principalement la fugue avec une
série d’entrées en imitations bien spécifiques. La première entrée expose une phrase musicale
appelée Sujet. Quand la phrase est terminée, une deuxième voix fait entendre ce même sujet,
appelé cette fois Réponse, mais transposé (même mélodie mais en commençant par une autre note)
à la dominante (5
e
degré de la gamme). Pendant que la deuxième voix joue la réponse, la première
joue le contre-sujet. A stade, nous avons une exposition de fugue à deux voix. Si le compositeur
décide d’écrire une fugue à 3 voix, il fait suivre une troisième entrée avec à nouveau le sujet,
pendant que la deuxième voix joue le contre-sujet transposé (parfois appelé contre-réponse). Enfin
si le compositeur cide une quatrième voix, le processus se poursuit avec à nouveau une réponse
et un contre-sujet.
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Exemple avec une fugue type à 4 voix :
VOIX 2 V
(ou dominante)
puis remplissage
VOIX 1 I
(ou tonique)
puis remplissage
etc…
VOIX 4 V
(ou dominante)
VOIX 3 I
(ou tonique)
Si le morceau s’arrête à ce stade ou bien s’enchaine à une autre musique, on parle alors de fugato (le
fugato peut être aussi une série d’entrées en imitations sans respecter les enchaînements harmoniques
comme par exemple un canon).
2. La deuxième partie est appelée développement comme dans la forme sonate et utilise les sujets et
contre-sujets ainsi que des extraits de ces thèmes (par exemple la tête ou la queue) pour des
variations et de multiples transformations. Entre ces moments de jeux sur les thèmes, le
compositeur propose des moments plus libres. Ainsi que des redites intégrales du sujet dans
différentes tonalités dont plus particulièrement les tons voisins (tonalités proches, avec une
altération à la clé en plus ou en moins ou les tonalités relatives).
3. La troisième partie conclut la fugue. On y trouve fréquemment des strettes c’est à dire des entrées
resserrées du sujet, de longues pédales, c’est à dire des notes tenues dans le grave sur la dominante
ou la tonique, parfois des épisodes de style toccata. La fugue revient à la tonique et passe parfois à
la sous-dominante (4
e
degré de la tonalité) avant de conclure. La conclusion se fait avec une
cadence parfaite (V-I) ou parfois plagale (IV-I).
La Toccata et fugue en Ré mineur BWV 565 dans la version de Stokowski :
Léopold Stokowski réalise dans cet arrangement pour orchestre symphonique un très intéressant travail
d’orchestration en s’éloignant de l’orgue et en repensant totalement les timbres. Il serait intéressant de
faire un entier parallèle entre l’œuvre pour orgue et celle pour orchestre, phrase par phrase mais
n’est pas l’objet de cette présentation.
La toccata
La toccata prend comme il se doit un air de récitatif assez libre avec un certain nombre de petites
parties alternant des phrases très contrastées. Tantôt des gammes ou des motifs de notes conjointes
rapides, broderies et autres ornementations, des arpèges brisés…, tantôt des accords monumentaux ou
des enchaînements d’accords relativement simples mais puissants, tantôt des arabesques cristallines,
tantôt des sons dans le registre très grave tantôt dans l’aigu. C’est sur ces contrastes que l’arrangeur va
surtout s’appuyer pour réaliser son orchestration.
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Afin de mieux suivre le déroulement de cette toccata d’aspect très libre d’écriture, on peut couper la
partition en quatre parties :
Partie 1 : La première note jouée est un La, dominante de la tonalité de l’œuvre (la dominante
est la 5
e
note de la gamme ou de la tonalité d’un morceau. On parle alors de degré). Cette note
est brodée par un mordant (voir symbole sur la partition), c’est à dire qu’on joue
immédiatement la note inférieure (ou supérieure dans d’autre morceaux) pour revenir à la note.
Une descente rapide va jusqu’à la sensible pour terminer sur la tonique (1
re
note ou degré su
ton). Ce sont les cordes sans les contrebasses qui introduisent cette phrase à la nuance
fortississimo (Extrait N°1, à l’orgue puis à l’orchestre). Aussitôt, la même phrase est reprise
dans une version plus simple et aux bois (Extrait N°2, à l’orgue puis à l’orchestre). Enfin,
une troisième phrase reprend la première aux cordes mais cette fois dans le registre grave et
avec les contrebasses (Extrait N°3, à l’orgue puis à l’orchestre). On observe que l’orgue joue
principalement sur les hauteurs de sons en allant simplement de plus en plus grave avec
l’intervention du pédalier tandis que l’orchestre change de timbre à chaque phrase tout en
gardant un mouvement vers le grave. Enfin, un accord monumental va se construire sur une
pédale de tonique (Ré) des contrebasses divisées (Extrait N°4, à l’orgue puis à l’orchestre,
enchaînement depuis le début jusqu’à cet accord). Cet accord de 7
e
diminuée sur pédale de
tonique (Ré) sonne à nos oreilles modernes comme un accord dissonant et associé à un effet
diabolique fut et est très utilisé dans ce caractère dans beaucoup de musique de films,
télévision, dessins animés etc… L’accord de 7
e
diminuée se résout sur un accord de tonique
avec un retard de la tierce qui forme une dissonance caractéristique de cette formule cadentielle
très utilisée.
Partie 2 : (Extrait N°5) Dans l’orchestration de Stokowski, cette partie est jouée sur une
pédale de tonique et dominante (Ré et La) d’abord puis seulement sur tonique. La mélodie,
phrase de notes rapides en formules brodées est répétée deux fois aux bois en allant vers l’aigu,
de la tonique à la dominante puis les cordes prennent le relais avec une formule plus brisée et
descendante, partant de la sous-dominante (Sol) pour arriver à la tonique de l’accord de 7
e
diminuée sur pédale. L’accord est cette fois suivit d’une phrase fuyante de violons et altos pour
conclure sur l’accord de tonique (Ré mineur).
Partie 3 : (Extrait N°6 à l’orgue pour le début puis à l’orchestre). Phrase de hautbois et
brodée par les violons sur des notes tenues dans le grave (pédales) de tonique et dominante (Ré
et La). Contraste entre des arabesques de flûtes, harpe et célesta, des accords dominés par les
cuivres sur un mouvement descendants de la tonique à la dominante. Les enchaînements se
répètent plusieurs fois. La partie se conclut par une séquence qu’on peut associer aux accords
de 7
e
diminué précédent mais dans une version très variée qui se construit et va vers l’aigu dans
une ambiance mystérieuse dans la version pour orchestre (Extrait N°7).
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