Contributions à la phénoménologie de la perception
- Présentation, commentaire -
l'aide de ces concepts sans acquérir à leur sujet une ferme
assurance, analogue à celle qui résulte de l'impression
reçue des objets donnés aux sens, qui assigne à tout doute
raisonnable l'objectif d'une sphère ultime de vérification.
Si l'on a pu en fournir une, on est ainsi parvenu à la même
évidence par laquelle la proposition 2 + 2 = 4 est vraie,
tout autant que la proposition suivante : cette table est
rouge, bien qu'on ne puisse les percevoir toutes deux par
les sens de la même manière qu'on perçoit la table et le
rouge, et pas davantage le « et », le « égal », ou les
« quatre » ; bien que dans ce cas l'intuition — comme si
je me rendais la proposition évidente grâce à une machine
à calculer — joue un tout autre rôle que dans la
proposition : la table est rouge, on doit avoir le courage de
l'affirmer. On ne doit plus se laisser entraîner dans une
discussion à ce sujet, mais continuer à vérifier sans
prévention jusqu'à quel point les objets —dans le cas
présent, les nombres — sont dotés d'une « existence »
propre, nullement comparable à l'existence sensible, dans
quelle mesure ils sont représentés de manière spécifique,
etc.
Et ce que l'on continue d'établir de la sorte doit être
amené à la même clarté que celle du fait fondamental que
deux plus deux égale quatre. Et ce fait fondamental doit
même être encore plus profondément fondé par des
recherches ultérieures. Il ne doit pas être rendu plus
évident qu'il ne l'est à l'entendement naturel de l'homme,
mais il doit être protégé des fausses interprétations et des
compréhensions erronées.
On doit s'engager dans la recherche sans présupposés,
sans laisser se restreindre d'emblée la liberté du regard
par des « évidences immédiates » dont la validité n'est
jamais examinée. Le cosmos ne se laisse pas partout
réduire ou contraindre à l'aridité. Il n'est tout simplement
pas vrai que tout étant doive être de nature psychique ou
physique, comme l'affirme le positivisme.
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Noésis n° 6 « Les idéaux de la philosophie »