L'HISTOIRE :
Quand l’utopie de Thomas More trouve un écho au Paraguay…
Dans un collège de Buenos Aires le 16 juillet 1767, le Père Provincial des Jésuites du Paraguay, Alfonso Fernandez, s'apprête à baptiser deux
nouveaux caciques Guaranis venus avec leur tribu de 7000 hommes. 30 réductions construites à l'initiative d'une cinquantaine de Jésuites
accueillent déjà 150 000 Indiens dans cette région. Le succès et la prospéride ces nouvelles structures vaut aux jésuites en Europe de plus en
plus de critiques et d'inimitiés. Les colons espagnols se plaignent du privilège royal accordé aux Jésuites qui les exemptent d’un impôt trop élevé,
de la concurrence commerciale qui les accule et de la fuite de leur main d’œuvre indienne vers les réductions. L’Evêque de Buenos Aires lui-
même récuse cet ordre qui outrepasse ses fonctions en fondant un état dans lequel lui-même ne peut pénétrer. Il dénonce un système cultivant
selon lui le matérialisme chez les Indiens au détriment de la foi chrétienne. Le roi d'Espagne envoie alors un Visiteur officiel, Don Pedro de Miura
pour vérifier ces accusations. Ce procès va-t-il ressembler aux précédents et se solder par un non-lieu comme le pense le Père Provincial ?
Cette pièce a inspiré le film Mission de Laurent Joffé, palme d'or au festival de Cannes de 1986.
« 115 minutes de pure tension dramatique » Charles Linsmayer pour nachtkritik.de, le 23 avril 2011.
Durée de la pièce : 1h55
Présentée pour la première fois au Théâtre du Nord-Ouest le 22 avril 2011
L’AUTEUR
à Vienne 28 mai 1911,
Fritz HOCHWÄLDER
apprend le métier de son père : tapissier. En 1938, il fuit l'Autriche envahie par les nazis et
émigre illégalement en Suisse. Interdit de travailler dans sa profession, il commence à écrire des pièces. Ses parents meurent en camp de
concentration.
Il s'installe à Zurich après la guerre et se lie d’amitié avec un autre réfugié dramaturge qui l’influencera beaucoup : Georg Kaiser, dont les pièces
exposent une analyse psychologique approfondie et une position moraliste. Il obtient des prix littéraires, dont le prix de Littérature de l'Etat
Autrichien en 1966. La plupart de ses pièces sont jouées au Théâtre de la ville de Vienne.
Composée de drames politiques et sociaux, son œuvre, de facture classique, traite de thèmes toujours brûlants d’actualité : les rapports entre le
pouvoir et la justice, la raison d'État et l'exigence morale. Sur la Terre comme au Ciel (Das heilige Experiment - L'expérience sacrée), écrite en
1942, lui apporte une renommée internationale. Il rédige ensuite L'Accusateur Public en 1948 sur le procès de Fouquier-Tinville pendant la
révolution Française. La violence nazie le choque. Il fait de cette violence le thème dominant de ses pièces, violence sournoise tapie, qui rode
avant de se montrer au grand jour.
Hochwälder puise dans la matière historique pour mettre en évidence l¹impossibilité de concilier utopie et alité, dont le 2siècle a fait plus
d’une fois la tragique expérience. Parmi ses 18 pièces, on peut citer : Donadieu (1953), Le Retour du Chef (1965) ; et un roman Donnerstag publié
en 1995.
Sur la terre comme au ciel inspire en 1986 la trame du film de Roland Joffé Mission avec Robert de Niro et Liam Neeson. L¹auteur décède cette
même année à Zürich.
LE METTEUR EN SCENE
Auteur, metteur en scène et comédien,
Loïc GAUTELIER
a plus d’une corde à son arc. Il fait ses classes auprès de Paul Barge et Claude Mann
au théâtre François Dyrek de Joinville le Pont, au cours Charles Dullin à Paris, puis se forme à la direction d'acteur au Studio Müller à Paris.
Parmi ses nombreuses réalisations, on compte Feu la mère de Madame de Feydeau qu’il joue et met en scène pour le Théâtre Château-Landon à
Paris. On le retrouve Comte de Salus dans la Paix du Ménage de Maupassant. En 2008, il monte L'Ile des Esclaves de Marivaux dans l’une des
prestigieuses serres d’Auteuil.
Créatif et engagé, Loïc a l’œil pour déceler et promouvoir les jeunes talents. Son expérience de comédien, l’enthousiasme qu’il sait partager et sa
grande inventivité lui donne des clefs de la direction d’acteur.
Avec une sensibilité et un regard acéré, il écrit et met en scène Abolitions traitant de l'actuel drame des prisons françaises. Cette pièce rencontre
un vif succès tant auprès du public que des institutions en relation avec les intervenants en prison.
Il dirige 3 comédies de Labiche dont Le Clou aux Maris et Un Monsieur qui prend la Mouche qui traversera la France et sera présentée aux
Archives de Paris en 2014. Il obtient le soutien de la Fondation Jean et Jean Pierre Giraudoux pour le spectacle Supplément au Voyage de Cook.
Il réunit autour de lui une équipe solide, construite au fil de ses différents projets. Il célèbre le centième anniversaire de Fritz Hochwälder en
signant la mise en scène de Sur la Terre comme au Ciel qui n’avait pas été montée en France depuis 1952. Ce spectacle fera notamment l’objet de
l’exposition de Charles Linsmayer sur l’auteur à Zurich en mai 2011.
NOTE D’INTENTION
"La liberté, c'est de pouvoir toute chose sur soi." Montaigne.
L'engagement politique coûta bien souvent la vie à celles et ceux qui pensaient que la cité pouvait s'organiser autrement, ou que le "royaume de
Dieu pouvait être réalisé ici-bas". Il y a quelques années, je lisais L'Utopie de Thomas More. Mes recherches d'expériences sur des sociétés
utopiques m'amenèrent, quelques temps plus tard, à La République des Guaranis, les Jésuites au Pouvoir de Clovis Lugon, Jésuite lui-même
surnommé "le vicaire rouge". Les Jésuites furent souvent proches du pouvoir dans l'Histoire, jusqu'au jour leur expérimentation d'un système
politique original risqua de faire basculer ce pouvoir, pour finalement se retourner contre eux. Ils furent chassés d'Espagne en 1767 (après l’avoir
été du Portugal en 1759 et interdits en France en 1763), année où l'on situe l'action de la pièce. C'est alors que je découvris Sur la Terre comme
au ciel.
Le drame des Jésuites dans cette pièce est celui de la religion en général. Dans le "Notre Père", auquel fait référence le titre de l’adaptation
française par R. Richard Thieberger et Jean Mercure, on peut lire "que votre règne vienne, que votre volonsoit faite sur la Terre comme au
Ciel". L’Eglise qui a pour charge le domaine spirituel n’est pas censée s’étendre dans le domaine temporel. Or, contradiction suprême dans le
Paraguay des XVIIème et XVIIIème, les Jésuites créent des conditions de prospérité sociale et économique inédites dans des réductions, pour
mieux évangéliser des milliers d'Indiens. Les principes religieux président la création d’un système politique semi-démocratique proche d’une
République, protégeant ainsi de l'esclavage des populations fragilisées. Comment inscrire une telle alité dans un système politique tyrannique
et esclavagiste globalisé ? Comment peut-on se dire sujet de la couronne d'Espagne, lorsqu'on organise, même sans le vouloir, les conditions
d'une autonomie à terme ?
Les Jésuites montrèrent leur grande efficacité à travers leurs immenses capacités d'adaptation et d'observation, et en fondant une puissante
machinerie civilisatrice qui participait à l’évolution de l'Humanité toute entière. Mais ils avaient passé les limites. Celles assignées dans une
interprétation implicite par tous les pouvoirs en place : la religion ne doit pas tenter de changer un système politique, mais doit le faire admettre
aux hommes qui sont sous son joug. La libération ne peut venir que de la mort. Conditions de vie meilleures et évolution humaine ne peuvent
être que le fruit du destin individuel et de la volonté de Dieu, dont on ne voulait surtout pas généraliser les lois.
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