Newsletter - Schellenberg Wittmer

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a v o c a ts
o c tobr e 2 0 1 4
Newsletter
Auteurs:
Martin Lanz
Philippe Borens
Banking & finance
La LSFin prévoit un nouvel ensemble de règles pour les
prospectus d’émission et de cotation
Avec la loi fédérale sur les services financiers (LSFin), le Conseil fédéral entend introduire en Suisse
un régime concernant les prospectus d’émission et de cotation comparable à celui prévu par la Directive de l’UE sur le prospectus. Les prospectus devront être approuvés par un organe de contrôle agréé
par la FINMA avant leur publication. En outre, une feuille d’information de base pour l’investisseur
devra être établie. Cette Newsletter succède aux Newsletters du mois d’août (aperçu de la LSFin et
LEFin) et du mois de septembre 2014 (régulation des gestionnaires de fortune suisses et des conseillers en placement).
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L A R EG L E M E N TAT I O N D U M A R C H E P R I M AI R E
S U I S S E D E S CA P I TA U X D A N S L E D R O I T AC T U E L
Le droit du marché primaire suisse des capitaux - c’est-àdire les dispositions sur l’émission et l’admission au
négoce de titres - diffère en de nombreux points fondamentaux de normes internationales comme celles en
vigueur aux États-Unis ou dans l’UE. L’obligation de
publier un prospectus pour l’émission d’instruments
financiers n’est pas uniforme: alors qu’une telle obligation
s’applique expressément pour les actions, obligations et
parts de placements collectifs, elle ne s’applique en
revanche pas aux instruments dérivés. Des dispositions
spécifiques, basées sur la réglementation de la SIX Swiss
Exchange (SIX), s’appliquent pour la cotation des valeurs
mobilières. Si une obligation de publier un prospectus
existe, les exigences relatives au contenu du prospectus
varient en fonction de l’instrument financier (uniquement
les données de base pour les actions et obligations, mais
des informations détaillées pour les parts de placements
collectifs de capitaux). Par ailleurs, contrairement à
d’autres juridictions, les prospectus d’émission ne sont
examinés et autorisés par aucune autorité, pourvu qu’ils
ne fassent pas l’objet d’une cotation à la SIX. De plus, le
droit suisse ne contient pas de règles uniformes et détaillées régissant les dérogations à l’obligation de publier un
prospectus pour les placements sans prospectus.
Les dispositions relatives aux prospectus sont actuellement dispersées dans de nombreux actes. Elles peuvent
être trouvées, pour les actions et les obligations, dans le
droit des obligations (CO) et, pour les parts de placements
collectifs de capitaux et les produits structurés, dans loi
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octobre 2014
fédérale sur les placements collectifs de capitaux (LPCC).
En plus des dispositions légales, les directives émises par
l’Association suisse des banquiers sur les notes émises par
des émetteurs étrangers doivent être respectées. Si les
titres sont cotés, les dispositions du règlement de cotation
de la SIX et des règlements supplémentaires concernés
s’appliquent. Dans la pratique, les exigences de contenu
des prospectus de cotation sont, sur une base volontaire,
également importantes pour les prospectus d’émission.
L’ O B L IGAT I O N D E P U B L IE R U N P R O S P EC T U S
S E L O N L A L S FI N
2.1Principe
Il n’y a pas d’obligation de publier un prospectus pour une
offre publique de titres destinée uniquement à des clients
professionnels ou à moins de 150 clients privés. Sont également libérés de l’obligation de publier un prospectus les
souscriptions ou dénominations de plus de CHF 100’000.
Les émissions ne dépassant pas un montant de CHF
100’000, dans une période de douze mois, sont également
exemptées. Des exemptions sont également prévues pour
des opérations spécifiques, telles que l’échange de titres
dans le cadre d’une fusion, la distribution de dividendes en
actions ou l’attribution d’actions aux salariés (si des informations écrites concernant l’offre sont disponibles), ainsi
que pour les obligations de caisse et les titres à court
terme. Concernant les titres de créance, en particulier, les
dérogations à l’obligation de publier un prospectus devront
être ajustée au regard de l’interdiction d’accepter des
dépôts du public, en vertu de la loi sur les banques (prochainement en vertu de la LSFin).
>>
Le Conseil fédéral peut également décider d’un assouplissement de l’obligation de publier un prospectus pour les
petites et moyennes entreprises qui ne sont pas assujetties à une révision régulière, ainsi que pour les sociétés à
faible capitalisation.
L’avant-projet de loi sur les services financiers (LSFin),
présenté en juin 2014, soumet ce régime à de nouveaux
critères qui s’inspirent fortement de la Directive sur les
prospectus de l’UE (directive 2003/71/CE).
2
Comme le droit actuel, la LSFin prévoit l’obligation de
publier un prospectus pour une offre publique de valeurs
mobilières ainsi que pour l’admission au négoce. Les
aspects suivants sont à noter :
Une offre publique est une communication au public
concernant l’achat ou la souscription de titres et qui
comprend suffisamment d’informations sur les conditions de l’offre et sur les titres eux-mêmes; le niveau
de spécification requis justifiant une obligation de
prospectus ne sera en conséquence pas nécessairement atteint par chaque publicité; la formulation de la
loi laisse ouverte les points suivants : (i) savoir s’il faut
appliquer des critères quantitatifs et/ou qualitatifs
pour déterminer s’il y a une communication au public
et (ii) le degré de spécification de la communication
afin de considérer qu’il y a une offre publique;
>>
En sus des actions et obligations, l’obligation de
publier un prospectus concerne désormais également
des titres tels que les dérivés et les produits structurés (concernant ces derniers, il suffit actuellement de
créer un "prospectus simplifié" conforme à la LPCC,
mais qui ressemble plutôt un Term Sheet);
>>
L’obligation de publier un prospectus pour les placements collectifs de capitaux sera également réglée
dans la LSFin, conformément aux dispositions actuelles
de la LPCC. En revanche, ces prospectus, devant être
soumis à la FINMA, ne seront pas examinés par le nouvel organe de contrôle (voir ci-dessous la section 2.4).
>>
L’admission au négoce se rapporte désormais à une
plate-forme de négoce, et non plus seulement à une
bourse de valeurs mobilières au sens strict du terme;
et
>>
Une obligation de publier un prospectus existe aussi
pour la revente de titres dans le cadre d’une offre
publique (secondary offering); des dérogations s’appliquent aux prestataires de services financiers assujettis à supervision, aussi longtemps qu’un prospectus
valable existe.
2 . 2 Ex e mpt i ons e t a ll è g e m e nts
Contrairement au droit en vigueur, la LSFin prévoit des dispositions détaillées sur les exemptions à l’obligation de
publier un prospectus.
La question de savoir qui est responsable de la création du
prospectus n’est pas réglée de manière adéquate. Selon le
rapport explicatif de la LSFin, cela doit être la personne
qui offre des titres, (respectivement celui qui requiert l’admission au négoce) qui, en réalité, n’est bien souvent pas
l’émetteur lui-même mais les banques impliquées. Cette
définition est trop vague, en particulier au regard de la
menace de nouvelles sanctions pénales en cas de non-respect des règles relatives au prospectus.
"Le devoir de publier un prospectus
selon la LSFin concerne désormais
également les produits dérivés et
les produits structurés."
2 . 3 Cont e nu e t stru c tur e du prosp e c tus
La LSFin ne contient que des dispositions de base sur les
exigences de contenu du prospectus. Cependant, en comparaison avec la règlementation actuelle, des indications
doivent être données sur la situation commerciale, les
perspectives et les risques principaux. Il est désormais
expressément admissible de se référer à d’autres documents (incorporation by reference), faculté que reconnaît
déjà le règlement de cotation de la SIX. Pour le surplus, le
Conseil fédéral précisera ce qui doit l’être par le biais d’une
ordonnance.
Les prospectus doivent être rédigés dans une langue officielle ou en anglais. Tous les prospectus doivent contenir
"sous une forme intelligible un résumé des informations
principales", et ceci dans un format uniforme.
Le prospectus peut être composé d’un seul document ou
de documents distincts, notamment dans le cadre de programmes d’émission d’obligations, de produits dérivés et
structurés (un prospectus de base avec les conditions
finales dans un document séparé).
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octobre 2014
2 . 4 Contr ô l e e t publ i c at i on du prosp e c tus
Selon la LSFin, le prospectus doit être publié "à l’avance",
c’est-à-dire au plus tard à la date du début de l’offre
publique ou de l’admission des valeurs mobilières au
négoce. Il s’agit d’un changement fondamental de la pratique actuelle, car les prospectus sont actuellement disponibles uniquement à la fin du placement, à tout le moins
pour les obligations.
En outre, l’avant-projet exige que, avant la publication du
prospectus, son intégralité, sa cohérence et sa clarté
soient contrôlées par un organe de contrôle agréé par la
FINMA. L’organe de contrôle a 10 jours pour procéder au
contrôle et à l’approbation (20 jours pour les nouveaux
émetteurs), à compter du dépôt, respectivement de la rectification du prospectus. Pour les titres de créance, le
Conseil fédéral peut supprimer l’examen préalable, mais
cet allègement ne se rapporte, selon le texte de l’avantprojet, qu’à l’examen du prospectus et non au fait que le
prospectus doit être présenté au plus tard au début de
l’offre public. Pourvu de l’approbation par l’organe de
contrôle, le prospectus reste valable pendant une durée de
douze mois.
Si de nouvelles circonstances pouvant avoir une incidence
sur l’évaluation des titres apparaissent avant la fin de la
période d’offre ou le début du négoce, elles doivent être
mentionnées dans un addendum, également soumis à
autorisation et à publication. Les investisseurs qui ont
souscrit des titres avant la publication de l’addendum
peuvent révoquer leur consentement, dans les deux jours
suivant la publication, dans la mesure où les nouvelles circonstances sont apparues avant la clôture des souscriptions et de la livraison des titres et sont susceptibles d’influencer la décision d’investissement.
La LSFin offre diverses possibilités pour la publication du
prospectus, soit une publication imprimée, soit une publication sous forme électronique. Une version imprimée doit
cependant toujours être fournie. L’organe de contrôle doit
publier une liste des prospectus approuvés dans laquelle
ceux-ci doivent figurer pour une durée de douze mois.
"L’intégralité, la cohérence et la
clarté du prospectus doivent être
contrôlées par un organe de contrôle
avant leur publication."
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FE U I L L E D ’ I N F O R M AT I O N D E B A S E P O U R L E S
I N S T R U M E N T S FI N A N CIE R S
De manière similaire à l’obligation de la LPCC d’établir un
document contenant les "informations essentielles pour
l’investisseur", une feuille d’information de base doit être
créée chaque fois que des instruments financiers sont
offerts à des clients privés. L’obligation n’existe donc contrairement à l’obligation de publier un prospectus – pas
uniquement pour les valeurs mobilières.
La nécessité d’une feuille d’information de base est expliquée par le fait que les produits financiers sont souvent
complexes et difficiles à comprendre, et par le fait que les
clients privés, lorsqu’ils investissent, tendent à consulter
les fiches d’informations résumées plutôt que le prospec-
tus. Selon le rapport explicatif de la LSFin, par le biais de la
feuille d’information de base, les clients privés recevront
les informations nécessaires leur permettant d’agir
comme des investisseurs "responsables" et "autonomes".
Contrairement à l’obligation de publier un prospectus, la
LSFin ne prévoit ni d’exception qui dépende du type d’offre,
ni d’allègement pour les instruments financiers des sociétés qui ne sont pas soumises à un audit complet ou qui ont
une faible capitalisation.
L’offre d’actions ne nécessite pas qu’une feuille d’information de base soit établie car il pourrait être supposé que les
caractéristiques de base de ce type d’investissement sont
connues des clients privés. De façon surprenante, ce postulat ne s’applique pas aux obligations classiques, bien que
celles-ci ne soient pas plus complexes et plus difficiles à
comprendre que les actions.
Selon le rapport explicatif, la personne qui doit établir la
feuille d’information de base est le producteur (probablement de l’instrument financier) puisque c’est lui qui est "le
plus familier avec le produit". Cette formulation très
ouverte n’est pas satisfaisante, si l’on considère les sanctions pénales en cas de non-respect des dispositions
concernant la feuille d’information de base. Celle-ci doit
être remise au "point of sale". Contrairement au prospectus, elle n’a pas à être revue par l’organe de contrôle.
La feuille d’information de base doit être facile à comprendre, rédigée dans une langue officielle (et non en
anglais), contenir la description des caractéristiques de
l’instrument financier proposé ainsi que le profil de
risques/rendements. La feuille d’information de base doit
être périodiquement revue et corrigée. Elle doit être
publiée sous forme imprimée ou électronique.
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M I S E A J O U R D E S D O N N EE S
La LSFin prévoit, en s’inspirant du règlement de cotation
de la SIX, une mise à jour des données dans les cas de
changements des droits attachés aux valeurs mobilières et
se réfère aux dispositions sur la publication des prospectus. Les dispositions semblent s’appliquer également à
des valeurs mobilières non cotées, même si, à l’origine, un
prospectus n’était pas requis, donc aussi à des cercles restreints de personnes et donc à des situations facilement
gérables, pour lesquelles les exigences supplémentaires
de publication ne sont guère appropriées.
5 R E S P O N S A B I L I T É CIVI L E E T D R O I T P É N A L
5 . 1 R e spons a b i l i té c i v i l e
La LSFin adopte pour l’essentiel la règlementation existante issue du CO concernant la responsabilité liée au
prospectus. Si le prospectus contient des informations
inexactes, trompeuses ou si elles ne respectent pas les exigences légales, toute personne ayant participé à l’établissement du document est responsable. La responsabilité
englobe également la feuille d’information de base, bien
que celle-ci, de par sa nature, n’ait qu’une valeur informative limitée. Une présomption de culpabilité est introduite,
ce qui signifie que c’est à la personne présumée responsable de démontrer qu’aucune faute ne lui est imputable.
5 . 2 L e s s a n c t i ons pén a l e s
Une autre nouveauté par rapport à la législation en vigueur
est l’introduction de dispositions pénales très vastes. Ainsi,
une peine privative de liberté pouvant atteindre trois ans
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octobre 2014
est prévue pour qui, intentionnellement, inscrit de fausses
informations dans le prospectus ou dans la feuille d’information de base, tait des faits essentiels, omet de produire
un prospectus ou une feuille d’information de base, ou
encore omet de les publier dans les délais prescrits.
dard qui n’est pas inférieur à celui des prospectus de cotation, est d’ores et déjà en grande partie respecté. En outre,
l’exigence de contrôle provoquera, sans aucun doute, un
ralentissement et une augmentation des coûts du processus d’émission.
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Enfin, les sanctions pénales pour violation de l’obligation
de publier un prospectus ou d’émettre une feuille d’information de base semblent disproportionnées. Elles s’appliquent même si aucun investisseur n’a subi de dommage
et ne prévoient aucun critère quant à la pertinence de l’information manquante ou incorrecte, respectivement quant
au retard de publication.
P E R S P EC T IVE S
Il est bienvenu que les exigences de contenu des prospectus d’émission soient harmonisées, et que des exigences
pour des informations plus probantes pour les investisseurs
soient introduites. En plus, la clarification juridique des
dérogations à l’obligation de publier un prospectus représente un progrès par rapport à la situation juridique actuelle.
La question demeure de savoir si l’exigence de contrôle
améliorera la qualité des prospectus. En effet, pour les
prospectus d’émission dans le secteur non coté, un stan-
La consultation sur les projets LSFin et LEFin se terminera
le 17 octobre 2014.
Contacts
Le contenu de cette Newsletter ne peut pas être assimilé à un avis ou conseil juridique ou fiscal. Si vous souhaitez obtenir
un avis sur votre situation particulière, votre personne de contact habituelle auprès de Schellenberg Wittmer SA ou l’un
des avocats suivants répondra volontiers à vos questions:
Jean-Yves De Both
Martin Lanz
Associé
[email protected]
Associé
[email protected]
Erol Baruh
Philippe Borens
Senior Associate
[email protected]
Associé, Schellenberg Wittmer Pte Ltd,
Singapore
[email protected]
Schellenberg Wittmer SA
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F +41 22 707 8001
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