maq 1 13/04/04 I 15:16 Page 145 M A G E Les signes précoces d'ischémie cérébrale au scanner ● T. Moulin, L. Tatu, F. Vuillier* OBSERVATION ☛ Femme de 54 ans. ☛ Survenue soudaine d’un hémidéficit sensitivo-moteur gauche complet, associé à une déviation de la tête et des yeux à droite (Score NIH 20). ☛ Un scanner cérébral est pratiqué à la deuxième heure (figures 1 et 2). Figure 1. Figure 2. * Service de neurologie, CHU Besançon. La Lettre du Neurologue - n° 3 - vol. II - juin 1998 145 maq 1 13/04/04 I 15:16 M Page 146 A G E RÉSULTATS Dans le cas de cette patiente, le scanner cérébral initial a été pratiqué très précocement (2 heures après le début de la symptomatologie). Il permet d'objectiver : - une hyperdensité spontanée de l’artère cérébrale moyenne droite (figure 3, flèche) ; - un aspect gommé du noyau lentiforme dont les limites sont repérables mais dont la substance est difficilement différentiable de la substance blanche avoisinante (figure 4, flèches) ; - une perte de définition entre la substance grise et la substance blanche de l’insula (figure 4, flèche vide) ; - une modification du contraste du manteau cortical avec perte de la différenciation entre substance blanche et substance grise. Les limites antérieures et postérieures de cette atténuation de contraste étant bien visibles (figure 4, flèches courbées) ; - un effet de masse sur la corne frontale du ventricule droit (figure 4). Le scanner cérébral de contrôle permet de confirmer l’existence d’un infarctus hémorragique intéressant le territoire superficiel et profond de l’artère cérébrale moyenne droite (figure 5). Figure 4. Figure 3. 146 Figure 5. La Lettre du Neurologue - n° 3 - vol. II - juin 1998 maq 1 13/04/04 15:16 Page 147 COMMENTAIRES Le scanner sans injection de produit de contraste représente l’examen clé de la prise en charge initiale de l’infarctus cérébral. Son rôle est triple : éliminer une hémorragie cérébrale (hyperdensité intraparenchymateuse spontanée), éliminer un processus expansif intracrânien se présentant cliniquement comme un infarctus cérébral (5 à 15 % des cas) (1) et rechercher des signes précoces d’ischémie cérébrale (2). Les signes précoces d’ischémie cérébrale sont d’individualisation récente et se répartissent en deux groupes : les signes intravasculaires et les signes parenchymateux (2). Les signes intravasculaires consistent en la visualisation d’une hyperdensité intra-artérielle en rapport avec la visualiation directe du caillot à l’intérieur de l’artère. Cette hyperdensité spontanée est définie comme une augmentation du contraste au sein de l’artère qui doit être non seulement plus dense que le tissu avoisinant mais aussi plus dense que l’artère controlatérale. Cette anomalie est le plus souvent observée sur l’artère cérébrale moyenne (ACM) mais elle peut être théoriquement vue sur chacune des artères du polygone de Willis. Les signes parenchymateux sont représentés par une atténuation du contraste et un effet de masse. Dans les conditions physiologiques, la substance blanche apparaît plus hypodense que la substance grise du liseré cortical et des noyaux gris centraux. L’atténuation de contraste se définit comme une perte du contraste existant entre la substance blanche et la substance grise. Trois signes sont ainsi décrits : - l’effacement du noyau lentiforme qui apparaît comme gommé. Ce signe témoigne d’une ischémie affectant le territoire des artères perforantes de l’ACM ; - l’effacement du ruban insulaire correspond à une perte de définition entre la substance grise et la substance blanche de l’insu- la. Le territoire de vascularisation des branches de division corticale de l’ACM est ici en cause ; - l’effacement des sillons corticaux est défini par une modification du contraste du manteau cortical aboutissant à la perte de différenciation entre substance grise et substance blanche. Ce signe doit être recherché notamment au-dessus de la région operculaire pour l’ischémie du territoire de l’ACM, à proximité de la faux du cerveau pour l’ischémie du territoire de l’artère cérébrale antérieure, dans la région occipitale basse pour l’ischémie du territoire de l’artère cérébrale postérieure. L’effet de masse (“brain swelling”) peut s’observer sur des structures anatomiques telles que le système ventriculaire, les scissures ou, de façon plus subtile, les sillons corticaux. Les signes précoces d’ischémie cérébrale doivent être systématiquement recherchés sur le scanner initial d’un patient pris en charge pour un accident vasculaire cérébral. Ils constituent des témoins précoces d’une ischémie en voie de constitution. De par leur sensibilité, leur spécificité et leur valeur prédictive, ils représentent des marqueurs prédictifs de l’extension ultérieure de l’infarctus. Une meilleure évaluation de l’infarctus est ainsi possible dès la prise en charge du patient permettant d’adapter les thérapeutiques. ■ R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. Misdiagnoses in 1250 consecutive patients admitted to an Acute Stroke Unit. The members of the Lille stroke program. Cerebrovasc Dis 1997 ; 7 : 284-8. 2. Moulin T., Cattin F., Crépin-Leblond T. et coll. Early CT signs in acute middle cerebral artery inaction : Predictive value for subsequent infarct locations and outcome. Neurology 1996 ; 47 : 366-75. ANNONCEURS BIOGEN (Avonex), p. 114 CASSENNE (Bourse), p. 143 ; CASSENNE (Sabril), p. 110 LAFON (Modiodal), p. 129 LOGEAIS (Vasobral), p. 138 NOVARTIS PHARMA (Institutionnelle), p. 119 PARKE DAVIS (Cognex), p. 166-7 ; PARKE DAVIS (Neurontin), p. 168 SCHERING (Bêtaféron), p. 113 SERVIER (Trivastal), p. 144 SMITHKLINE BEECHAM (Requip), p. 120 SOLVAY PHARMA (Serc), p. 160 Imprimé en France - Point 44 - 93100 Montreuil - Dépôt légal 2e trimestre 1998. © février 1997 - Edimark SA. Les articles publiés dans La Lettre du Neurologue le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays. La Lettre du Neurologue - n° 3 - vol. II - juin 1998 147