Jean-Joseph BOILLOT – « Chine-Inde-Afrique : le basculement du monde à l’horizon 2030 ? » Page 2
Il faut ouvrir les fenêtres du monde tel qu’il est, et non pas tel que nous voudrions qu’il soit. Cela doit nous remplir
d’énergie et d’optimisme, étant entendu qu’un effort de volonté est à fournir. Le monde n’est pas une chose anonyme qui
change toute seule ; son changement dépend de la façon dont chacun d’entre nous agit, jour après jour. Laissons-nous
interpeller par la culture chinoise. Pour elle, la crise n’est pas synonyme de « je ne peux plus rien faire », mais s’exprime par
deux idéogrammes qui signifient l’un : « risque », et l’autre : « opportunité ». Des risques, il y en a toujours. Il ne tient qu’à
moi qu’ils se transforment en opportunités, en solutions positives ou en solutions négatives.
Quel est ce monde de demain ? 2030-2050, est-ce si loin ? 2030-2050 est notre monde ici aujourd’hui. 15 à 20 ans,
c’est l’échelle de temps pour qu’un projet d’entreprise naisse, mûrisse, se développe, se concrétise.
LES THÈSES DU LIVRE « CHINDIAFRIQUE »
Première thèse : « la crise » plonge ses racines dans le refus du basculement du monde, refus de prendre en compte
les bouleversements du monde intervenus dans les années 70. Depuis le premier choc pétrolier de 1973, la situation de crise
est devenue « normale » et perdure alors qu’elle devrait se borner à un temps limité.
Deuxième thèse : le XXIe siècle ne sera pas le siècle de l’Asie, comme on le prétend souvent. Les USA ont toutes les
chances de rester number one, malgré les publications annonçant leur déclin et en raison de leur capacité à absorber le
meilleur du reste du monde. Trois mondes émergent, la Chine, l’Inde et l’Afrique.
La liste des grandes puissances globales (c’est à dire intégrant de nombreux critères en plus du PIB), publiée récemment aux
USA se présente ainsi : 1) USA ; 2) Allemagne ; 3) Chine (au troisième rang, même si son PIB arrive en tête !) ; 4) Russie ; 5)
Inde (en raison de sa capacité à ne pas être influencée par les autres, même si l’on y mange avec ses doigts et si l’on ne s’y
habille pas en costume/cravate !)…
L’Afrique n’y apparaît pas, certes ; ce n’est pas une puissance globale et l’Afrique n’est pas un pays, mais il existe bien un
monde africain et il occupe une place grandissante.
Le XXIe siècle est marqué par le glissement de « Chindiafrique » et nous le percevons mal. Le monde ne tourne pas comme
nous le pensons. Un exemple nous en est donné par les commentaires publiés dans cet espace géographique, sur les
assassinats survenus au journal Charlie Hebdo. La teneur des propos, même s’ils déplorent la violence, est sensiblement
différente de ce que nous lisons dans la presse occidentale.
Troisième thèse : ce que nous avons vu ces 30 dernières années n’est rien par rapport au basculement du monde
prévisible ces 20 prochaines années. Depuis 1974, on refuse de voir les évolutions en cours. Au FMI, par exemple, les USA et
les puissances européennes dominent toujours.
Quatrième thèse : faut-il donc avoir peur, se préparer à la guerre ?
Non, car le basculement du monde peut être une bonne nouvelle et peut apporter du bonheur, y compris sur le plan
économique. Il faut abandonner l’idée d’un jeu à somme nulle, où l’essor de la Chine, de l’Afrique se ferait au détriment de la
puissance occidentale. Un jeu à somme positive, où chacun trouve son compte est possible, même s’il n’est pas inscrit dans
les faits. Le prospectiviste n’a pas pour visée de décrire le futur, tel qu’il sera (personne ne le sait !), mais d’analyser,
d’observer les tendances lourdes de manière à en tirer les conséquences et évoluer dans le bon sens. La solution est dans la
fécondation du monde qui vient. Et ce monde, si on valorise ses atouts, peut apporter du bonheur, pour nos enfants et nous-
mêmes.
LES ARGUMENTS HISTORIQUES, GÉOGRAPHIQUES, DÉMOGRAPHIQUES…
1. Perspective historique : La renaissance
Les courbes ci-contre disent la vision du monde qui prévaut en
« Chindiafrique » et que nous n’avons pas en tête. Selon les données
reconstituées, on remarque que la population africaine a toujours été l’une
des plus importantes du monde. Au début du premier millénaire, l’Inde
représente 20% de la population mondiale, Inde et Afrique réunies 35%. La
Chine est également un géant démographique et l’ensemble « Chindiafrique »
atteint 60 à 70% de la population totale. De plus les liens existant entre l’Inde
et la Chine remontent à des époques lointaines. La route de la soie passait par
l’Inde et si nous connaissons bien Marco Polo, il n’était pas le seul globe-