Tournée 2007-2008 L’ILE DES ESCLAVES de MARIVAUX mise en scène ERIC MASSE Scénographie ANOUK DELL’AIERA Lumières DAVID DEBRINAY Son MANU RUTKA Costumes MARIE-FREDERIQUE FILLION ANGELIQUE CLAIRAND, JEZABEL D’ALEXIS OU BEATRICE CHATRON, THOMAS POULARD, JEAN-PHILIPPE SALERIO, DOMINIQUE UNTERNEHR, UN CHIEN ET SON MAITRE CHIEN NORBERT MARTINEZ production Compagnie des Lumas, Célestins - Théâtre de Lyon, Théâtre de Villefranche sur Saône Contact Aline Présumey chargée de production 04 72 77 40 40 [email protected] NOTE D’INTENTION L’Ile des esclaves, une pièce naufragée qui dénonce la dérive du pouvoir de l’homme sur l’homme où l’on s’y entre-déchire comme à l’ordinaire. Déjà ébranlés par la tragédie d’un naufrage sur les rives d’une île, deux couples maître/esclave vont être contraints par un habitant de l’île, à une inversion de rôle. Cette dernière expérience s’avérera une mise à nu, un second naufrage pour les participants. Si le cadre de l’île est sous son premier aspect séduisant c’est en réalité un espace clos coupé du monde qui laisse ainsi libre champ à toute dérive… Echanger les vêtements, les identités, les places de dominants et de dominés pendant un temps donné, c’est là le code que le carnaval établit pour le bienfait de tous les membres d’une société. De fait, cette inversion, en donnant la parole et le pouvoir à ceux qui ne les avaient pas, produit une pulsion de vie formidable, un défouloir jubilatoire. Mais qu’est ce qu’un jeu dont les règles sont cachées et perverties ? Ce carnaval devient alors le masque d’une expérience beaucoup plus inquiétante dans laquelle les pulsions les plus violentes peuvent s’exprimer sans fin : perversité du pouvoir, soumission et sadisme. Cette pièce, écrite paradoxalement comme une comédie, traite de la douleur, de la pauvreté et de l’humiliation quotidienne, et cependant cette dimension tragique provoque encore le rire, comme une catharsis nécessaire. Celle-ci est présente dans l’écriture de Marivaux qui alterne des scènes de comedia avec les valets et des scènes empruntées à la tragédie pour les maîtres. Il s’agira alors d’accepter la contradiction de ces êtres, leur lâcheté et de découvrir leur beauté dans le comique souvent grotesque des situations qui fait naître un rire qui les sauve. Entre l’altération que subit la langue des maîtres, lorsqu’ils perdent leur situation, et la manière dont les valets s’en emparent pour mieux la démystifier, on découvre l’outil de pouvoir qu’elle représente. Cette aventure, inventée par Marivaux il y a deux siècles, trouve actuellement une résonance étonnante à la fois dans sa dimension tragique liée à l’enfermement et à la violence carcérale et dans sa dimension comique. Ainsi notre société du divertissement et la télé-réalité s’emparent avec avidité de principes de jeu similaires : voyeurisme, isolement, jeu de rôle, confession publique…. Dans L’Ile des esclaves, Marivaux propose l’expérience de l’altérité, la confrontation de deux sociétés qui vivent selon des modèles idéologiques diamétralement opposés. Les habitants de l’île sont en fait d’anciens esclaves enfuis il y a un siècle de la société à laquelle les couples maître / valet appartiennent toujours. Le théâtre naît alors du choc entre réalité et utopie, entre notre monde et celui du XVIIIème siècle et nous interroge finalement sur les dérives totalitaires qui menacent ceux qui mettent en place de telles expériences réparatrices. Ici c’est le maître de l’ile, accompagné de son chien, qui incarne cette domination. Cette présence animale à ses cotés crée une étrangeté et interroge la dualité entre nature et culture, elle suggère que l’animalité peut refaire surface n’importe quand chez l’homme et transformer ainsi une tentative d’humanisme en barbarie. L’expérience finira d’ailleurs par se retourner contre celui qui la dirigeait. Cette fin, si elle apparaît cruelle, peut cependant être salutaire, car de la sauvagerie des tentatives de renversement, voire des révolutions, sont nées des démocraties. Cette régression est parfois nécessaire pour parvenir à l’autonomie. Eric Massé UNE ILE, DES ESCLAVES Atelier-spectacle et reportage photographique réalisé en milieu carcéral L’île des esclaves, inventée par Marivaux il y a deux siècles, trouve une résonance étonnante dans notre société de surveillance permanente, surveillance et contrainte dans les lieux d’enfermement, surveillance et voyeurisme dans les divertissements de la télé-réalité. Durant sa résidence de re-création aux Théâtre des Célestins, en septembre -octobre 2005, la Compagnie des Lumas a donc proposé à un groupe de détenus des maisons d’arrêt Saint-Paul et Saint-Joseph de Lyon de participer à un atelier de « jeu de rôle théâtral ». Ce travail a été conduit par Eric Massé, et Thomas Poulard, comédien incarnant le maître de l’île. C’est de son point de vue que la pièce de Marivaux a été abordée avec les détenus, la maison d’arrêt étant prise comme une métaphore de l’île, une microsociété avec des règles autonomes. Le temps du stage, les détenus, ont expérimenté un travail choral autour de ce texte et ont ainsi été les meneurs de jeu, les manipulateurs. Après quelques séances, le quatuor des comédiens maîtres/esclaves a intégré le travail. Comme les personnages échouant sur l’île, ils ont du se plier aux règles de cette société ainsi réinventée. Deux représentations ont été données, au sein de la maison d’arrêt, devant un public de détenus et de spectateurs extérieurs. Le photographe Jean-Louis Fernandez a accompagné cette aventure, des premières lectures jusqu’aux représentations, ses photographies sont exposées au sein des théâtres qui accueillent le spectacle. Reflétant le travail effectué en milieu carcéral, elles l'offrent au regard du spectateur avant qu’il ne pénètre dans l’espace de représentation de L’île des esclaves. Ce qui m’intéresse avec les détenus et les artistes de la compagnie, c’est d’inventer un spectacle avec une adresse singulière au public au-delà du cadre de la maison d’arrêt. C’est une étape de notre processus de création dont je n’attends pas de choses quantifiables mais plutôt qu’elle aiguille l’équipe sur des chemins de travail, des sensations. L’essence de ce projet est d’amener une circulation de personnes donc d’émotions et d’idées entre un lieu clos et le lieu ouvert qu’est un théâtre. Eric Massé EXTRAITS DE PRESSE Un ténébreux Marivaux Un berger allemand, muselé, grogne et traverse le brouillard épais. Un maître-chien veille sur la nuit carcérale. Sur le foin de leurs cages grillagées, deux couples se voient obligés d’inverser leurs rapports de force. Les quatre personnages de Marivaux échangent leurs vêtements, leurs noms et leurs statuts sociaux : l’esclave devient le seigneur, la suivante se fait la maîtresse. Jeune metteur en scène, Eric Massé fuit la mièvrerie courante. Servi par des acteurs d’une puissance détonante, il organise un carnaval ténébreux, un jeu de massacre au terme duquel la séduction de l’humanisme vire à la barbarie. Pierre Notte, Epok du 25 novembre au 1er décembre 2005 L’île de toutes les ambiguïtés (…) Passionnante, cette fable philosophique qui ne montre pas seulement un renversement carnavalesque de la société, mais aussi l’utopie d’une redéfinition morale des relations sociales, et où l’on entend des choses du genre de celles-ci : « Tu es devenu libre et heureux, cela doit-il te rendre méchant ? » (Jézabel à Jean). La brutalité du traitement réservé aux maîtres soumis aux pulsions sadiques de valets se défoulant de leurs frustrations (coups, humiliations physiques et morales, et même quasi viol), l’attitude totalement passive des maîtres réifiés, l’ambiguïté et le caractère inquiétant de l’habitant de l’île, avec son chien, ses carottes et ses bâtons, (très bien dans le trouble et l’ambigu, Thomas Poulard), la scénographie avec ses cages de grillage de verre qui évoque un univers carcéral d’une violence archaïque, et le jeu lui-même très violent, très physique des comédiens (excellent le quatuor), tout cela crée une atmosphère tantôt d’une grande cruauté, tantôt d’une drôlerie de défoulement, et accompagne une impitoyable mise à nu morale et physique des personnages. Dans la version violente, tendue et tirée au noir qu’Eric Massé donne de cette comédie, et à moins de croire aveuglément en la puissance cathartique du jeu de rôle, il est difficile au final de déceler quelque idée d’utopie sociale. Après tant de déchirements, la réconciliation finale du quatuor, fût-ce au détriment de Trivelin (tous quatre le font chuter de concert à la fin) laisse pour le moins dubitatif. Un doute que le jeu des acteurs (notamment ceux qui incarnent les maîtres) ne lève pas. Nelly Gabriel Le Figaro Lyon du lundi 10 octobre 2005 Massé en masse Travail en milieu pénitentiaire, théâtre en appartement, reprises de plusieurs de ses mises en scène et nouvelles créations se bousculent sur l’agenda du talentueux Eric Massé, cette saison. A Lyon, il essuie les plâtres de la nouvelle (petite) salle construite aux Célestins, avec la reprise de sa version de l’Ile des esclaves. Une lecture décomplexée et moderne où les protagonistes de l’œuvre de Marivaux se trouvent transformés en candidats d’un jeu de téléréalité du style « Koh Lantah ». Et à Villefranche, il reprend son adaptation rock’n roll des Bonnes de Genet, avant de s’attaquer à la pièce de Cocteau la Voix humaine, œuvre déchirante sur la fin d’une relation amoureuse. Nicolas Blondeau – Lyon Capital hors série, guide 2005/2006 ERIC MASSE Metteur en scène et comédien. Il a été formé au CNR d’art dramatique de Bordeaux et à l’Ecole du CDN de Saint-Etienne. Il a travaillé entre autres sous la direction de Robert Cantarella, Roland Fichet, Daniel Girard, Patrick Guinand, Adel Hakim, Anne Marie Lazarini, Ludovic Lagarde, Lucien Marchal, Madeleine Marion, Geoffrey Carey. - Depuis 1999, il joue dans des créations atypiques (théâtre, théâtre gestuel, théâtre d’intervention, cabaret) mises en scène par Agnès Coisnay, Dusan Jovanovic, Hervé Dartiguelongue (le bal des ames mortes - création 2005), Sophie Le Garroy, Eva Doumbia, Nathalie Veuillet (San Diego - création 2007)… et poursuit un travail expérimental auprès d’Alexandre Del Perugia et du collectif des Bouffons de Luxe (Information de luxe - LQR - création 2006). - En 2000, il crée avec Angélique Clairand la Compagnie des Lumas, et entame Meutries, une trilogie sur les meurtrières au travers de textes contemporains. Dans ces créations, il tente d’inventer des rapports singuliers avec le public, l’intégrant dans ses espaces de jeu (théâtre, appartement, usine, cinéma…). Ses projets iconoclastes mêlent vidéastes, musiciens et chanteurs, auteurs et compositeurs. - En 2001, il met également en scène plusieurs cabarets, collabore à la mise en scène de Richard Brunel au Théâtre du Peuple de Bussang, Il intègre l’Unité Nomade de Formation à la Mise en Scène dirigée par Josyane Horville, puis par Marc Dondey au CNSAD de Paris. Au sein de l’Unité Nomade il travaille au TNS et au festival d’Art Lyrique d’Aix en Provence où il participe à la création de A Summer Night’s Dream d’après Shakespeare / Mozart, de et par Franz Wittenbrink. Il monte L’île des esclaves de Marivaux lors d’un chantier dirigé par Jean-Pierre Vincent et Bernard Chartreux à Paris. A Cracovie, il travaille dans un atelier autour de l’écriture de Tchekhov avec Kristian Lupa (2003). - Entre 2002 et 2004, il met en scène Meurtries…ou les tragédies de cuisine - Les Présidentes de Werner Schwab : Théâtre de la Renaissance, Comédie de Saint-Etienne, Théâtre de la Croix-Rousse - Les Bonnes - Intimité & Reconstitution de Jean Genet : Théâtre de la Renaissance, Comédie de Saint-Etienne, Comédie de Clermont-Ferrand, Théâtre de Villefranche sur Saône - Encouragement(s) de Sophie Lannefranque : Comédie de Saint-Etienne, Théâtre de la Croix-Rousse, Comédie de Clermont-Ferrand, Théâtre de Villefranche sur Saône - En 2004 / 2005, il entame un nouveau cycle de recherche autour de l'enfermement, qui l’amène à travailler dans plusieurs maisons d’arrêt et crée : - Concertina d’après Jane Sautière et Michel X : Subsistances - Lyon, Comédie de Valence - L’île des esclaves de Marivaux. Création : Théâtre de Villefranche sur Saône, Les Célestins - Théâtre de Lyon. Une centaine de date en tournée entre 2005 et 2007 : Comédie de Valence, Théâtre de la Manufacture - Nancy, le Moulin du Roc - Niort, Comédie de Saint-Etienne, Comédie de ClermontFerrand, CDN de Montreuil, théâtre Universitaire de Nantes, … - et débute, avec la Compagnie des Lumas, une résidence triennale au Théâtre de Villefranche sur Saône (direction : Alain Moreau). - En 2006, il met en scène : - La voix humaine l’opéra de Poulenc / Cocteau, au Théâtre de Villefranche sur Saône - Les Moinous d’après l’œuvre de Raymond Federman en co-mise en scène avec Angélique Clairand Création : Comédie de Saint Etienne, Théâtre 71 – Malakoff, Théâtre de Villefranche sur Saône, Les Subsistances - Lyon et Retour au fumier - chantier municipal Federman, Villefranche sur Saône au printemps 2007 - Slaves Island avec le slameur D’ de Kabal, concert-performance à l’Argo’Note – Paris RENSEIGNEMENTS PRATIQUES… Création L’île des esclaves a été créé du 1er au 4 mars 2005 au Théâtre de Villefranche sur Saône Tournée du 8 au 11 mars 2005 à la Comédie de Valence. du 22 au 24 mars 2005 au Dôme Théâtre d’Albertville. du 7 au 20 octobre 2005 aux Célestins - Théâtre de Lyon. du 3 au 13 novembre 2005 à la Manufacture à Nancy. les 24 et 25 novembre 2005 au Moulin du Roc de Niort. du 2 au 13 décembre 2005 à la Comédie de Saint-Etienne. les 4 et 5 avril 2006 au Théâtre, Scène Nationale de Macon. du 11 au 14 avril 2006 à la Comédie de Clermont-Ferrand. les 19 et 20 avril 2006 à la Maison des Arts de Thonon-les-bains. le 24 octobre 2006 à l’Espace Chambon à Cusset du 16 novembre au 15 décembre 2006 au CDN de Montreuil du 19 au 21 décembre 2006 au Théâtre universitaire de Nantes du 16 au 17 avril 2007 au Château Rouge à Annemasse du 26 au 29 avril 2007 au Théâtre Jean Vilar à Montpellier les 3 et 4 décembre 2007 à Transversales, Verdun les 7 et 8 décembre 2007 au Théâtre d'Arras du 11 au 15 décembre 2007 au Nouveau Théâtre de Besançon …. soit déjà plus de 100 représentations