OGM, DEFENSE ET ANATHEME
Entre foi et défiance, craintes et espoirs alimentaires ou médicaux, les OGM
sèment le trouble dans l'opinion publique et divisent les scientifiques.
Depuis les derniers scandales alimentaires -vache folle et poulet à la dioxine-, l'opinion
publique se montre de plus en plus inquiète et méfiante, soucieuse de produits sains et
sécurisés. Et gourmande de vérité, donc d'une information complète. A défaut, pour l'instant,
de nourrir la planète, les OGM (organismes génétiquement modifiés) alimentent à leur tour
des controverses passionnées. C'est qu'on les trouve à la croisée d'enjeux multiples et
considérables : scientifiques, sanitaires, environnementaux, économiques et financiers.
Culture, expérimentation, commercialisation des OGM divisent les opinions, mais partagent
aussi les milieux autorisés.
En France, la polémique a déclenché une âpre bataille. En quoi consiste le débat ? S'il n'est
pas neuf (l'agriculture use de la sélection génétique depuis près de deux cents ans), il porte
aujourd'hui sur l'introduction dans une espèce d'un ou deux gènes provenant d'un fragment
d'ADN construit in vitro. Cette transgénèse inquiète, mais compte aussi bon nombre de
thuriféraires. Pour certains, chercheurs ou sociologues, le développement accéléré de ces
technosciences dépasse les capacités d'évaluation de leurs impacts, qui exigent du temps.
« Dans le grand public, cette peur relève surtout d'une méconnaissance de ce qu'est un
OGM et d'une médiatisation exagérée des risques qui y sont attachés », estime en revanche
Alain Périquet, professeur de physiologie animale à l'université Paul-Sabatier de Toulouse et
également expert à l'Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments). Il se
déclare « favorable aux générations d'OGM agrobiologiques, nutritionnels et surtout
thérapeutiques. Mais les recherches doivent s'accompagner de protocoles d'évaluation
simultanés ».
Au cas par cas
Une évaluation de risques qui concerne tout nouvel aliment, OGM ou non, destiné à la mise
sur le marché. Réalisé par différents comités scientifiques, l'examen de chaque dossier tient
compte du caractère unique du produit proposé. Professeur de biologie moléculaire à
l'Université de Montpellier 2, expert à la commission du Génie biomoléculaire et aussi à
l'Afssa, Francine Casse insiste sur l'importance « de cet examen au cas par cas. Il n'existe
pas deux OGM identiques et chaque évaluation en tient compte. Cela n'a pas de sens de
dire que les OGM sont bons ou dangereux en eux-mêmes ».
Trois grands types de risques font donc l'objet d'expertise. La toxicité, d'abord. On examine
les nouvelles protéines dont dispose une plante modifiée génétiquement. Les essais se font
in vitro, et sur rats et poulets. « Bien sûr, si des protéines de maïs s'avèrent toxiques pour
l'animal de laboratoire, on les interdit à la consommation animale et humaine », confirme
Francine Casse. Au tour de l'allergénicité, à présent. Les protéines issues de la modification
passent au crible d'un portrait-robot auquel elles ne doivent pas ressembler, sous peine de
condamnation. Les analyses exigées pour la mise sur le marché sont très rigoureuses.
« Mais la garantie pas absolue, tempère Francine Casse, car on ne maîtrise pas les
prédispositions humaines à l'allergie, qu'on considère de plus en plus déterminantes. »
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