Manifestations générales et complications ostéo

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Chapitre 5 Manifestations générales et complications ostéo-articulaires
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Chapitre 5 - Manifestations générales et complications ostéo-articulaires
Introduction
Toute manifestation clinique de la drépanocytose peut être considérée comme une complication grave, parfois
mortelle. Les manifestations systémiques apparaissent vers l'âge de 6 mois, quand la synthèse de HbS se substitue à
celle de l’Hémoglobine Fœtale (HbF; Van-Wijgerden, 1983; Galacteros, 2001). Certains patients présentent l’entière
gamme des symptômes caractérisés, dans la forme grave, par des crises douloureuses à répétition, une anémie et des
infections sévères (Bouaré, 2004; Tarer et al., 2006). Les formes hétérozygotes, Sβ thalassémique, SO Arabia et SDPunjab,
fréquentes en Asie, sont cliniquement similaires à la forme homozygote SS (Platt, 1995; Galacteros, 2001). La forme
SC, initialement moins grave, présente des complications dégénératives chroniques handicapantes. Les manifestations
cliniques et les complications répondent à différents mécanismes:
- destruction des érythrocytes et anémie hémolytique (Greenberg et al., 1957; Serjeant et al., 1969);
- ischémie responsable de crises douloureuses intenses, de nécroses focales viscérales (Bouaré, 2004);
- vaso-occlusion source d’infarctus dans différents organes (Dorn-Beineke et al., 2002; Habibi et al., 2004);
- septicémies et ostéomyélites surtout à salmonelles (Vandepitte et al., 1966; Omanga et al., 1989; Bégué et
al., 2001; Dorn-Beineke et al., 2002; Tamouza et al., 2002; Lepage et al., 2004).
Symptomatologie générale
La drépanocytose se caractérise par des crises d'anémie hémolytique, des douleurs polymorphes ostéo-articulaires,
viscérales, aigues et des céphalées (Girot et al., 2003; Geller et al., 2008). Elles sont plus fréquentes après l'anémie
aigue. Elles sont simples ou associées à de la fièvre, à une atteinte viscérale ou ostéo-articulaires. La période
asymptomatique entre deux crises est "l’état basal" (Cabannes et al., 1981).
Syndrome anémique
L’anémie est définie par la réduction de la masse globulaire ou par une concentration en hémoglobine inférieure aux
valeurs normales diminuant la capacité de transport de l’oxygène. Quand l’hémoglobine descend sous le seuil de 7-8
g/dl, une pâleur cutanéo-muqueuse s’installe; l’ajustement physiologique s’accompagne d’une augmentation du débit
cardiaque (Sergeant et al., 1969; Dorn-Beineke et al., 2002).
Le drépanocytaire SS présente souffre d'une anémie chronique hémolytique parfois associée à une microcytose ou à
une α thalassémie. Elle s'aggrave lors des crises et apparaît quand le taux de HbF diminue, s’accompagnant d’une
surcharge du Système Réticulo-Endothélial (SRE) responsable d’une splénomégalie: une anémie aigue par
séquestration massive des globules falciformés par la rate s’observe dans l’enfance (Topley et al., 1977).
Syndrome infectieux
Responsables de déshydratation, d'hypoxie, de fièvre, les infections favorisent l'apparition de crises vaso-occlusives et
de septicémies. Les complications infectieuses chez le nourrisson ou le jeune enfant homozygote, principales causes
de morbidité et de mortalité, sont dues, deux fois sur trois, aux salmonelles (plutôt qu’aux staphylocoques, qui
affectent surtout les enfants non drépanocytaires). L'explication reste hypothétique: sensibilité plus grande à l'infection
aux salmonelles de foyers d'infarctus multiples drépanocytaires? Antagonisme entre drépanocytose et staphylococcie?
(Chippaux et al., 1976).
Il n'existe pas de sensibilité particulière aux infections virales, mycobactériennes ou parasitaires. Le déficit
immunitaire des drépanocytaires explique la spécificité des bactéries tels les pneumocoques et les salmonelles (Bégué
et al., 2001; Tamouza et al., 2002). Les mécanismes de cette sensibilité sont (Pearson, 1977; Lepage et al., 2004):
- l'asplénie fonctionnelle (atrophie);
- une diminution de la capacité d'opsonisation par anomalies des lymphocytes et probablement de la voie
alternée du complément.
Les germes les plus fréquents sont les salmonelles (37%), haemophilus influenzae (16%), staphylococcus aureus
(14%), streptococcus (10%), et les pneumocoques (9%). La prophylaxie antipalustre, les vaccinations anti-typhiques,
anti-Haemophilus et anti-pneumocoques sont préconisées (Guedj, 1990; Diop et al., 1997, Bégué et al., 2001).
Manifestations douloureuses, crises drépanocytaires
Une crise drépanocytaire est la conséquence de phénomènes moléculaires (polymérisation de l’HbS), cellulaires
(falciformation) et vasculaires (adhésion cellulaire; Sydenstriker, 1924; Bouaré, 2004). Une crise, évènement
épisodique imprévu, altère le confort de vie du drépanocytaire. Elle est déclenchée par l'hypoxie, la diminution du pH,
les variations de température (la fièvre, le froid), le stress, l'infection, la déshydratation. Elle peut survenir sans cause
apparente (Baum et al., 1987; Bouaré, 2004). Des phénomènes vaso occlusifs "silencieux", sans expression
douloureuse, sont responsables d’atteintes infra-cliniques à tous niveaux. Les évènements épisodiques aigus ou
"crises" constituent des urgences drépanocytaires (Cabannes et al., 1981). Ces crises douloureuses sont les premiers
motifs de consultation dans quelque 80% des cas (Serjeant et al., 1969):
- au niveau des viscères (Cabannes et al., 1981);
- au niveau des os (œdème par stase artérielle et compression des filets nerveux intramédullaires responsables
de la douleur, exacerbée par l'ischémie, Kabakele, 1974).
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En Afrique, le paludisme est un facteur prépondérant, déclenchant des crises drépanocytaires, surtout dans l’enfance
(Elira-Dokekias 1996), l’immunité antipaludéenne étant très relative ou inexistante chez les sujets homozygotes.
Manifestations abdominales
Elles s'accompagnent de fièvre, d'hyperleucocytose, perturbant le diagnostic différentiel (appendicite, cholécystite,
péritonite aigue…; Diagne et al., 1999). Certaines lésions, indolores hors manifestations aigues ou infectieuses,
nécessitent un dépistage systématique par échographie abdominale (splénomégalie par surcharge du SRE, atrophie de
la rate par sclérose; Walker, 1996).
Crises de séquestration splénique
Cause de mortalité chez le nourrisson, après les crises neurologiques et pulmonaires, elle est observée par "autosplénectomie" sur infarctus, avec augmentation brutale du volume de la rate, douleur de l'hypochondre gauche, anémie
brutale avec choc. Les récidives sont fréquentes et, devant cette rate exposée à de multiples crises de séquestration,
une splénectomie totale préventive peut être indiquée, vers l'âge de 6 ans (Gnassingbe et al., 2007).
Séquestration hépatique
La séquestration hépatique d’une extrême gravité, entraîne une hépatomégalie avec chute de l’hémoglobine, des
anomalies du bilan hépatique suivies d’une diminution brutale de la taille du foie et d’une normalisation de
l’hémoglobine par libération des hématies séquestrées. La présentation est identique à celle d'une crise hépatique avec
douleurs de l’hypocondre droit, fébricule, une hyperleucocytose, une insuffisance hépatique et rénale aigue
d’évolution parfois fatale par hépatite fulminante. D’autres complications hépatobiliaires sont l'abcès, l'infarctus, la
cirrhose par accumulation des dépôts en fer. Un kyste intrahépatique rempli de bile en expansion ("biloma") a été
rapporté comme conséquence d'infarctus hépatique (Nault et al., 2009).
Crises de déglobulisation
La forme homozygote de la drépanocytose génère des complications aigues, dont les fréquentes crises de
déglobulisation. Elles suivent l’aggravation de l’anémie par déshydratation, infection, carences nutritionnelles, par
médicaments chez des sujets présentant un déficit en G6PD (Lewis et al., 1966, Cabannes et al., 1976). Elles relèvent
des urgences médicales; la transfusion de concentrés érythrocytaires s’impose pour ramener le taux d’hémoglobine à
une valeur normale (Elira-Dokekias et al., 2001).
Crises aplastiques
Les anémies hémolytiques chroniques entraînent l’inhibition temporaire de l’érythropoïèse, l’aggravation brutale de
l'anémie. Ces épisodes connus sous le nom de crises aplastiques (pâleur, faiblesse, somnolence parfois) peuvent être
responsables de décompensation cardiaque et de décès. Elles surviennent après une infection mineure, presque
toujours après une infection virale (parvovirus B19). Elles sont plus fréquentes chez les enfants et les adolescents (les
adultes sont protégés par les acquis immunitaires). L'examen de la moelle par biopsie sternale, montre une pauvreté ou
une absence de précurseurs des globules rouges, une érythroblastopénie (Goldstein et al., 1987).
Crises neurologiques aigues
Les manifestations neurologiques sont mineures (céphalées, troubles visuels, vertiges, paresthésies), ou majeures
(hémiplégie, aphasies, convulsions, syndrome méningé, pseudo paralysie d’un membre (Gerald et al., 1980; fig. 5-1).
Elles résultent de micro-thromboses, d’une hémorragie cérébro-méningée ou d’une méningite bactérienne. La
falciformation est responsable d’Accidents Vasculaires Cérébraux aigus (AVC), souvent mortels chez les jeunes
homozygotes, ou grevant leur survie de séquelles invalidantes dramatiques. Elles surviennent surtout chez les SS,
relativement chez les SC, très peu chez les Sβ thalassémies (Powars, 1975; Beauvais, 1996). Eyenga et al. (2001)
décrivent le cas d’un hématome extra dural pariétal spontané, chez un drépanocytaire homozygote de 16 ans, sans
traumatisme préalable. L’hypothèse physiopathologique retenue est un trouble de l’hémostase intercurrent ou
secondaire à la drépanocytose.
Figure 5-1: adolescent SS, avec séquelles neurologiques handicapantes
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Manifestations cardio-vasculaires
Liées à l'anémie chronique, la clinique révèle une tachycardie avec souffle cardiaque fonctionnel et cardiomégalie,
évoluant vers l’insuffisance cardiaque (Uzsoy, 1964). Elles sont causes de  10% des décès chez l’enfant, de 10 à 30%
chez l’adulte. L'ischémie coronarienne, (Baroldi, 1969), doit être recherchée par tomoscintigraphie myocardique, dès
l’enfance, en cas de troubles de rythme syncopal (de Montalembert, 2004). L’hypertension pulmonaire, complication
majeure, est à rechercher par échographie-cardiaque (Pegelow et al., 1997; Billy-Brissac et al., 2009).
Manifestations pulmonaires
Les infections des voies respiratoires représentent 61% des localisations infectieuses contre 24% d’atteintes osseuses.
Les atteintes pulmonaires (syndrome thoracique aigu) sont difficiles à distinguer d’une infection (Barrett-Connor,
1973; Vichinsky et al., 1997). Liées aux micro-infarctus répétés, associées ou non à des infections elles peuvent avoir
un pronostic vital. Les douleurs thoraciques (acute chest syndrome) peuvent évoquer un syndrome infectieux, un
infarctus ou une embolie pulmonaire. Elles sont accompagnées de fièvre, de toux, d'insuffisance respiratoire aigue,
parfois d'épanchement pleural. Les infections à pneumocoque sont fréquentes, par greffe bactérienne sur zones
d'infarctus (Barret-Connor, 1973).
Manifestations oculaires
Elles consistent en anomalies des conjonctives par ictère chronique, dilatations sacculaires, tortueuses des vaisseaux
conjonctivaux et anomalie précoce des vaisseaux rétiniens. Ces vaisseaux de type terminal, sans anastomoses
artérioveineuses expliquent la gravité des atteintes oculaires (fig. 5-2). Leur thrombose est responsable (Goldberg,
1971; Morel, 2001):
- d'une rétinopathie ischémique;
- d'une hémorragie du vitré avec crise aigue de glaucome;
- d'un décollement rétinien;
- d'une cécité brutale par occlusion de l'artère centrale de la rétine.
Figure 5-2: patiente SC, perte de l’œil gauche par rétinopathie ischémique et hémorragie du vitré
Manifestations génito-urinaires
Presque constantes, l’hématurie, l’infection urinaire, l’insuffisance rénale et le syndrome néphrotique proviennent de
la nécrose papillaire. Le priapisme observé dès l’enfance, est fréquent chez l’adolescent. Il se manifeste par une
érection douloureuse prolongée, provoqué par une congestion des corps caverneux, pouvant se solder par une
impuissance. Le pronostic dépend de la rapidité de la prise en charge. Il importe d’en informer les parents et les
garçons drépanocytaires (Bachir et al., 1997; Habibi et al., 2004). La méconnaissance de la maladie et le caractère
tabou de la sexualité contribuent à sous-estimer l’importance de cette complication (Bouaré, 2004).
Ulcères cutanés chroniques
Observés chez les sujets homozygotes et Sβ thalassémique, ils sont souvent localisés à la région malléolaire et sont
difficiles à traiter (fig. 5-3). Rares chez l’enfant, leur fréquence augmente avec l'âge, entre 10 et 20 ans (Adeji et al.,
1987). Leur fréquence varie selon les génotypes et les régions (8-12% aux Antilles, 40% en Jamaïque et en Afrique
Centrale, absente en Arabie Saoudite. Leur pathogénie est imprécise, la stase sanguine péri-malléolaire amorcerait une
déformation locale des globules rouges. L’apparition de l’ulcère, comme la néphropathie terminale et l’hypertension
artérielle pulmonaire, est considérée comme un critère de gravité (Serjeant, 1974; Cackovic et al., 1998).
Figure 5-3: ulcère cutané à localisation malléolaire externe cheville gauche
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Manifestations rénales
Constantes, elles sont dues aux dysfonctionnements tubulaires (hyposthénurie, polyurie). Elles sont caractérisées par
- une perte de fonction de concentration rénale;
- une hématurie;
- des infections urinaires (surtout chez la femme);
- des nécroses papillaires;
- une néphropathie hypertensive sur insuffisance rénale.
Le syndrome néphrotique dû à la nécrose papillaire (falciformation au niveau des vasa recta), l’insuffisance rénale
aigue ou chronique nécessitent une dialyse ou une greffe rénale (Tomson, 1992; Ataga et al., 2001). Le carcinome
papillaire est à évoquer en cas d’hématurie associée à des lombalgies (Raynal et al., 2007).
Manifestations ORL et stomatologiques
Elles consistent en épistaxis, sinusites, vertiges et surdité par thrombose des vaisseaux cochléaires surtout chez les
doubles hérérozygotes SC. Des images radiologiques d’épaississements ou d’ostéosclérose sont observées (ElSabbagh et al., 1989; Ajulo et al., 1993).
Trouble staturo-pondéral
Il consiste en un retard de maturation squelettique, souvent compensé pendant l'adolescence et l'âge adulte
(McCormack et al., 1976). Les patients drépanocytaires se caractérisent par un retard de croissance staturale, une
diminution du poids corporel, du tissu adipeux, de la masse musculaire et de l’indice de masse corporelle dans toutes
les tranches d’âge (Mabiala-Babela, 2005).
Retentissements psychologiques
Si la douleur physique, une des plus intenses qui puissent être décrite, peut résumer le vécu de la drépanocytose, il en
est une autre, psychique, plus diffuse, qui s’étendra à l’ensemble de la vie du patient. Le retentissement psychologique
transgénérationnel familial est accentué par le mode de transmission de la drépanocytose. La découverte et l’annonce
de la maladie chez l’enfant né où à naître, bouleversent profondément les parents qui perdent beaucoup de leurs
repères. Le drépanocytaire est souvent un patient dépendant aux antalgiques ou morphiniques, souvent hospitalisés,
d’où absence de scolarité, sensibles aux stigmatisations par la société, d’où des troubles psychologiques et psychiques.
Ces troubles doivent être évalués et bénéficiés d’une prise en charge spécialisée tout en tenant compte de l’aspect
culturel de chaque patient (Faure et al., 2003; Hason et al.; 2003 ; Benton et al., 2007).
Complications ostéo-articulaires
La circulation intra-osseuse joue un rôle important dans la nécrose et la réparation osseuse (Trueta et al., 1953; Trueta,
1957; Rhinelander et al., 1962, 1968; Laroche, 2002). La vascularisation s'adapte au remaniement osseux par
production de néo-vaisseaux (angiogenèse) ou par augmentation du débit.
Les complications ostéo-articulaires de la drépanocytose sont liées aux propriétés de HbS. Quatre processus
élémentaires génèrent des lésions (Hamburg, 1950; Diggs, 1967; Barret-Connor, 1971; Carayon et al., 1971; Batisse et
al., 1971; Catonné et al., 2004):
- l'hyperactivité médullaire érythroblastique cause d’hyperplasie médullaire et d’épaississement du diploé;
- la thrombo-embolie, responsable des infarctus diaphysaire (ostéonécrose);
- la réparation du squelette traduite par l'ostéosclérose ou l’ostéocondensation réactionnelle;
- la réceptivité de l'os nécrosé à la greffe bactérienne, source d'ostéomyélite aigue, pouvant devenir
chronique.
Les atteintes ostéo-articulaires sont classées en manifestations aigues transitoires ou chroniques (polyarthralgies)
évoluant par crise souvent sans signes radiologiques, mono ou oligo-arthrites aigues avec parfois des signes de
thrombose vasculaire intrasynoviale (Dossou-Dogass, 1986). de Gheldere et al., 2006, rapportent dans leur étude
rétrospective de 325 patients drépanocytaires, 79 patients, présentaient des complications ostéo-articulaires. Les
complications aseptiques ou septiques (infarctus, ostéomyélites aigues ou chroniques, nécrose des épiphyses, arthrites)
sont fréquentes et apparaissent dès l’enfance (Carayon et al., 1971; Cabannes et al., 1981; Doppelt et al., 1990).
Physiopathologie de la nécrose drépanocytaire
L’obstacle à l’écoulement sanguin par occlusion des vaisseaux intra-médullaires est responsable des infarctus intramédullaire, la stase et l’extravasion plasmatique augmentent la pression osseuse. L'évolution de la nécrose
drépanocytaire aigue se fait en deux temps:
- ralentissement circulatoire compliqué de stase ou d'oedème, de plasmostase, de congestion, d'hémorragie
avec hyperpression intra-osseuse;
- foyers nécrotiques (point d'appel de l'infection endogène) par thrombo-embolie capillaire aigue, ou
"sommation" progressive des infarctus responsables de la fibrose.
Syndrome main-pied
Le syndrome main-pied est caractérisé par un œdème inflammatoire et douloureux de la face dorsale des mains et des
pieds. Watson (1956) rapporte 21 cas (17%) sur un groupe de 126 enfants en dessous de 12 ans. Dans 80% des cas, il
constitue avec l’anémie, les premiers motifs des consultations (fig. 5-4; Lambotte-Legrand, 1962).
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Figure 5-4: clinique et radiographie du syndrome main-pied (Habib Sy et al., 2006)
Hyperactivité médullaire érythroblastique, le crâne en "poil de brosse"
La raréfaction avec hyperostose, donne l'occasion d'observer une image curieuse du profil de la calotte crânienne: le
diploé s'épaissit sur toute la voûte, surtout au niveau frontal et pariétal: la table externe disparaît. A la radiographie ces
images de raréfaction donnent un aspect, en "poil de brosse" ou en "forêt d'épingles" (Chippaux et al., 1976). Cette
image radiologique est observée dans les anémies constitutionnelles, spécialement dans la thalassémie majeure, elle
affecterait 6% des drépanocytaires. Cette localisation est observée dès l'enfance à partir de deux ans (fig. 5-5).
Figure 5-5: épaississement de la voûte crânienne, aspect en "poils de brosse" (Batisse et al., 1971)
Elargissement ou obstruction médullaire
La vaso-occlusion s'accompagne d'une hyperactivité médullaire érythroblastique (trouble de l'hématopoïèse) et d'une
augmentation de l'ostéogénèse. Cette reconstruction osseuse explique certains aspects radiologiques d'ostéosclérose,
d'ossification endostale ou périostée (Graham, 1924; Almklov et al., 1950; Tshilombo, 1985; fig. 5-6). Cette
ostéogenèse se traduit par des images d'ostéocondensation souvent homogènes des bassins et des têtes fémorales, par
obstruction médullaire des épiphyses proximales et par augmentation de la dureté de l’os drépanocytaire, rendant
difficile la pose de prothèse de hanches (Malghem et al., 1981; Tshilombo, 1985; Hernigou et al., 2008b).
Infarctus osseux et infection drépanocytaires
L'infarctus osseux, plus fréquent que l’ostéomyélite, survient au cours d’un syndrome drépanocytaire majeur (Bohrer
1970, 1971; Koren et al., 1984). Ces deux entités cliniques (infarctus et ostéomyélite) sont difficiles à distinguer. Elles
sont plus fréquentes en occident qu’en Afrique. La localisation la plus fréquente de l’infarctus ou de l’infection est la
région métaphyso-diaphysaire. L’ostéomyélite présente des images de destructions analogues à celles de l'infarctus
aigu. Trois particularités différencient l'infarctus drépanocytaire de l'ostéomyélite aigue (Carayon et al., 1969; Bohrer,
1970; Ebong, 1980a; Leleu et al., 1987; Mukisi-Mukaza, 1992; fig. 5-7):
- les lésions osseuses apparaissent dans la région métaphysaire, se transformant en pandiaphysite, ce qui tend
à démontrer leur origine vasculaire (Bohrer, 1970; Mukisi-Mukaza, 1992; Mukisi-Mukaza et al., 2003);
- l'atteinte diaphysaire évolue vers la reconstruction "ad integrum", fréquente après un traitement bien conduit
(Tshilombo, 1985; Mukisi Mukaza et al., 2003);
- le séquestre évolue souvent favorablement, se revascularise et réintègre l'os (Carayon et al., 1969; Louis
et al., 1973; Tshilombo, 1985; Mukisi-Mukaza et al., 2003).
Ostéomyélite aigue
Devant une Crise Vaso Occlusive (CVO) d’un membre, dont la durée dépasse une semaine, accompagnée des signes
généraux (fièvre, asthénie), locaux (douleur, œdème, impotence fonctionnelle) et d’une biologie inflammatoire (VS,
CRP élevés), l’infection osseuse doit être évoquée vu sa gravité, et le choix d’une antibiothérapie adaptée. Il ne faut
pas attendre la radiologie pour porter le diagnostic d’ostéomyélite.
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i
A
B
C
Figure 5-6: ostéocondensation (A), obstruction médullaire (B), élargissement médullaire (C)
Le diagnostic bactériologique de l'ostéomyélite repose sur l'hémoculture et la ponction drainage, s'il existe un abcès
sous périosté. L’échographie, la résonance magnétique permettent une bonne localisation et dirigent la ponction
(Mukisi Mukaza et al., 2003). Les images radiologiques de stase du produit de contraste après phlébographie
correspondent aux zones de nécrose osseuse surinfectées. Elles permettent de localiser les zones de prélèvement d'un
germe (Bohrer, 1970, 1971).
Vue tardivement, l’ostéomyélite aigue passe rapidement à la phase subaigue ou chronique, caractérisée par la présence
de séquestres, d’abcédation sous périosté, de fistulisation ou compliquée de fractures. Le traitement est difficile à ce
stade et recours à des méthodes chirurgicales indiquées seulement en présence (Ebong, 1982; Mukisi-Mukaza, 1992;
Catonné, 2002; Mukisi-Mukaza et al., 2003):
- d’un abcès dans les tissus, un abcès sous périosté ou en cas de fistulisation;
- de séquestre sans tendance à la revascularisation, qui semble contrarier toute reconstruction.
Figure 5-7: ostéomyélite du membre supérieur (Andrianne, 2010), et du péroné (Catonné, 2002)
Arthrite septique
Les atteintes articulaires sont classées en manifestations aigues transitoires et chroniques (polyarthralgies évoluant par
crise souvent sans signe radiologique, mono ou oligo-arthrites aigues avec parfois des signes de thrombose vasculaire
intrasynoviale (Dossou-Dogass, 1986). La surinfection à Salmonella frappe l'os, rarement l'articulation (Ebong, 1980a;
Leleu et al., 1987; Hernigou et al., 1989). Les atteintes sont graves, parfois polyarticulaires: genoux, chevilles, coudes,
poignets (Jean-Baptiste et al., 2003). Les arthrites aigues passant à la chronicité s'accompagnent d’un décollement
épiphysaire et d’une destruction ostéo-articulaire, difficile à traiter (Habermann et al., 1974; Ebong, 1980a,b;
Schumacher, 1981; fig. 5-8).
Une arthrite septique est évoquée lors de tout épanchement articulaire. La ponction précise le diagnostique et permet
d'identifier un germe éventuel; outre Salmonella, on peut être confronté à: Escherichia coli, Pseudomonas aeruginosa,
Proteus mirabilis ou au bacille de Koch. L’arthrite septique est rare chez les hétérozygotes et dans les formes associées
(SC, Sβ-thal). La rareté de l'atteinte septique de hanche chez l’adulte doit suggérer une atteinte turberculeuse
(coxalgie) et incite à rechercher le bacille de Koch (Le Bras et al., 1975). L'arthrite chronique de la cheville
s'accompagne souvent d'un ulcère cutané (de Ceulaer et al., 1984).
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Figure 5-8: arthrite de hanche droite avec décollement épiphysaire chez un enfant (Habib Sy et al., 2006)
Fractures pathologiques
Fréquentes au niveau des sites d'infarctus (d'infection), les petits défects corticaux sont sources de fractures
pathologiques (Ebong, 1986a). Bohrer (1971) note une fréquence élevée de ces fractures au niveau des gros os longs
(fémur, humérus et tibia), en dehors des épisodes aigus, après un micro-traumatisme sur un os fragilisé. Bien traitées,
leur évolution est favorable; non traitées, elles entraînent des déformations avec raccourcissement (Bohrer, 1971;
Batisse et al., 1971; Mukisi-Mukaza, 1992).
Atteintes ostéo-articulaires chroniques
La littérature révèle de 50 à 65% d'ostéonécrose des os longs, apparaissant vers l'âge de 5 ans, la tranche d'âge la plus
atteinte étant comprise entre 10 et 30 ans avec, par ordre de fréquence, le fémur, le tibia, l'humérus et le péroné
(Catonné et al., 2002, 2004). La clinique est dominée par la forte douleur, avec impotence fonctionnelle ou pseudoparalysie. On note une subpyrexie, une biologie souvent inflammatoire, suggérant l'appellation d’os drépanocytaire
"enflammé" ou "d'ostéomyélite drépanocytaire" (Leleu et al., 1987).
Reconstruction osseuse
En réponse à la nécrose, une formation d’os nouveau vivant à la surface des trabécules mortes assure la reconstruction
et comble les lacunes du tissu spongieux ostéoclastique. Deux types de réparation sont décrits (Hernigou et al., 1989).
- Une réparation, envahissement de la tête par des cellules mésenchymateuses différenciées en ostéoblastes
(la résorption osseuse, ostéoblastique est moins importante). Cette néo-formation d’origine ostéoblastique
s’arrête progressivement pour former une marge tissulaire fibreuse. Cette séparation entre tissus nécrosés et
réparés est visible à l’IRM sous forme de liseré à concavité supérieure ou sous forme de triangle.
- Une réparation de l’os compact sous-cartilagineux, processus qui peut "ossifier" le cartilage articulaire.
Cette invasion du cartilage par du tissu de réparation et les réactions locales qu’elles suscitent sont la base des
altérations arthrosiques de la hanche. L’action du tissu de réparation modifie les propriétés mécaniques de l’os et
entraîne effondrements et déformations de la tête fémorale. Leur origine est la fracture créée dans une zone de moindre
résistance sur le versant externe de la tête, qui se prolonge sous le cartilage dans l’os nécrosé du fait des contraintes à
la jonction entre le tissu spongieux et la plaque osseuse dense sous-chondrale. Elle aboutit à la dissection connue sous
le nom de "coquille d’oeuf".
Ostéonécrose de la tête fémorale
L’atteinte épiphysaire la plus fréquente est la nécrose aseptique de la tête fémorale, suivie de celle de la tête humérale,
deuxième séquelle après l’ostéomyélite (Mukisi Mukaza, 1992). Le noyau épiphysaire et le cartilage de conjugaison
de la tête fémorale sont très sensibles à l'ischémie vu la précarité de leur vascularisation (Dimeglio et al., 1987; Pous et
al., 1988; Dutoit, 2007). On peut attribuer la nécrose épiphysaire drépanocytaire aux troubles rhéologiques dus aux
globules rouges falciformés (Coutelier, 1966; Chung et al., 1969).
Nécrose de hanche chez l’enfant
L’épiphyse proximale du fémur de l’enfant est une chrondo-épiphyse capable de régénération après nécrose de la tête
à condition qu'elle soit normo centrée dans le cotyle. Cotyle et tête sont intéressés par l’ischémie, seule la partie
fémorale est atteinte chez l’adulte. Le rapport de 2/1 entre les cartilages de croissance et la partie osseuse, chez
l'enfant, n'est plus trouvé à l'adolescence. La partie osseuse plus importante, est plus exposée à la nécrose, ce qui
explique l’évolution différente entre la nécrose chez l’enfant, l'adolescent et l’adulte. La fréquence d'apparition
d'ONTF est élevée entre 12 et 15 ans (Taussig et al., 1976; Hernigou et al.¸1989; Mukisi-Mukaza, 1992; Rouvillain et
al., 2000; Catonné 2002; Mukisi-Mukaza et al., 2003).
Chapitre 5 Manifestations générales et complications ostéo-articulaires
33
La déformation de la tête, le rapport os-cartilage, l’épanchement articulaire et surtout l’incongruence de la tête et du
cotyle sont des facteurs de mauvais pronostic. En l'absence de prise en charge précoce, la nécrose est responsable de
séquelles dysplasiques ou arthrosiques (Hernigou et al., 1989, Mukisi-Mukaza, 1992; Rouvillain et al., 2000; Catonné
2002, Mukisi-Mukaza et al., 2003; fig. 5-9).
Figure 5-9: évolution dysplasique de la nécrose chez l’enfant
Les séquelles dysplasiques intéressent:
- l’épiphyse supérieure (déformation partielle ou totale, absence complète de la croissance céphalique, coxamagna, coxa-plana, coxa-vara ou coxa-valga; Hernigou et al., 1989);
- le fond du cotyle caractérisé par un cartilage en "Y", produit une insuffisante couverture cotyloïdienne
souvent associée à une protrusion acétabulaire ou à une subluxation de la tête (Martinez et al., 1984);
- les dysplasies coxo-fémorales luxantes ou ankylosantes;
- l’épiphyse inférieure avec atteinte du cartilage de conjugaison responsable des déviations axiales du genou.
Nécrose chez l’adulte
L’OstéoNécrose de la Tête Fémorale (ONTF) correspond à la mort par ischémie des cellules médullaires et corticales;
elle peut évoluer de plusieurs manières (Hernigou et al., 1989; Mukisi Mukaza, 1992):
Evolution d’emblée destructive
La nécrose osseuse est suivie d'une fracture sous-chondrale, de séquestration polaire, d'effondrement et de perte de
sphéricité de la tête. L'évolution des nécroses avec perte de sphéricité de la tête se fait rapidement vers l'arthrose en
absence de traitement. Au début de l'atteinte, le cartilage est viable, sa nutrition étant assurée par le liquide synovial.
L'incongruence coxo-fémorale est le facteur péjoratif qui conduit à sa destruction et à l’arthrose. Des formes
d’arthrose protrusives sont observées, conséquences de l’atteinte du cartilage en Y du cotyle (Hernigou et al., 1989,
fig. 5-10).
Evolution sans séquestration ni destruction
La radiographie se caractérise par une ostéocondensation de la trame ou des images scléro-géodiques sans
modification de la sphéricité, ni de la congruence coxo-fémorale.
Evolution vers une dysplasie articulaire
Elles s’accompagnent d’ankyloses difficiles à traiter, quand elles sont établies (fig. 5-11).
Atteintes polyépiphysaires
La drépanocytose est caractérisée par des atteintes polyépiphysaires correspondant à la persistance de l’activité
hématopoïétique importante au niveau des épiphyses (Sebes, 1989; Hernigou et al., 1989, 1991; Mukisi-Mukaza et al.,
2000; Catonné 2002; Jean-Baptiste et al., 2003; Flouzat-Lachaniete et al., 2009). A la naissance l'hématopoïèse est
localisée exclusivement dans la moelle osseuse. Jusque l'âge de 5 ans tous les os ont une activité hématopoïétique, qui
va progressivement se limiter aux os courts et plats (sternum, cotes, vertèbres, os iliaques). Chez le drépanocytaire
cette activité hématopoïétique va persister dans les zones métaphyso-épiphysaires chez l’enfant et dans les épiphyses
des os longs (fémur, humérus, tibia) chez l’adulte (fig. 5-12; Alavi et al., 1974).
Chez le drépanocytaire, en plus des côtes, du rachis vertébral cette activité hématopoïétique persiste au niveau des
diaphyses, dans les zones métaphyso-épiphysaire chez l’enfant, au niveau des épiphyses des os longs chez l’adulte.
Une activité hématopoïétique, importante se traduit par des images d’hyperfixation dites "physiologiques" à la
scintigraphie. En cas d’ischémie par vaso-occlusion par des GR falcifomés, elle explique les manifestations
douloureuses et les atteintes osseuses au niveau des épaules, des coudes, de la cheville (astragale), des genoux, et de la
colonne vertébrale (image en H ou en arête des poisson, fig. 5-13).
Chapitre 5 Manifestations générales et complications ostéo-articulaires
34
Discussion
Les manifestations cliniques et les complications observées dans le Syndrome Majeur Drépanocytaire (SDM) sont
dues à la destruction aigue ou chronique des hématies, aux phénomènes de vaso-occlusion liés à la falciformation, à
l’adhérence accrue des hématies à l’endothélium, et la susceptibilité accrue aux infections bactériennes et virales.
L’anémie et l’ictère sont les symptômes communs de toutes les hémoglobinopathies majeures, elle est due à une
destruction précoce des globules rouges et à l’augmentation de la bilirubine dans le sang. Toutes les formes majeures
de la drépanocytose ne sont pas caractérisées par une anémie. Les formes SC et Sβ0 thalassémique peuvent évoluer
sans anémie. L’anémie peut être aggravée lors d’une crise de déglobulisation, d’épisode de séquestration splénique, en
cas de carence nutritionnelle ou d’un accès palustre dans les régions tropicales, de déficit en G6PD, d’infection
bactérienne ou virale à Parvorirus (Van-Wijgerden, 1983; Galacteros, 2001).
Figure 5-10: devenir possible de l’ONTF non traitée chez l’adulte
Figure 5-11: dysplasie simple hanche gauche, et dysplasie ankylosante bilatérale à droite (390731DF)
Figure 5-12: squelette hématopoïétique
Figure 5-13: atteinte de l’épaule, du genou, du rachis (vertèbre en H)
Chapitre 5 Manifestations générales et complications ostéo-articulaires
35
La forme homozygote SS est seule à causer des morts subites précoces. La forme SC, malgré un début moins grave,
présente des complications dégénératives chroniques et handicapantes (appareil locomoteur, cerveau, œil, reins,). Les
doubles hétérozygotes, Sβ thalassémique, SO Arabia et SDPunjad, formes génétiques fréquentes en Asie, sont cliniquement
similaires à la forme homozygote SS (Platt, 1995; Galacteros, 2001). Une classification génétique est incapable de
rendre compte du polymorphisme clinique observé. Certains patients sont de grands handicapés dès l'enfance,
présentant toute la gamme des symptômes. D'autres sont moins affectés, ou découverts lors de dépistages périodiques
(Powars, 1975; Wajcman et al., 1981; Van-Wijgerden, 1983; Galacteros, 2001). La drépanocytose est une maladie
génétique et chronique ayant un retentissement sur la vie sociale et familiale, qui exige une écoute à tous les niveaux et
une prise en charge psychologique de ces patients (Faure et al., 2003).
Depuis sa découverte, la drépanocytose a intéressé les chimistes, les anthropologues, les pédiatres, les hématologues et
les généticiens. Son intérêt chirurgical est tardif, venant après les descriptions des atteintes osseuses, des complications
abdominales et oculaires. On distingue les formes chirurgicales suivantes (Nosny et al., 1965; Tshilombo, 1974):
- les atteintes ostéo-articulaires aseptiques (ostéonécrose, infarctus osseux, dysplasie et arthrose) ou septiques
(ostéomyélites aigues ou chroniques, arthrites (Vandepitte et al., 1966; Kabakele, 1974);
- les manifestations abdominales (cholécystite aigue, lithiase, les splénomégalies aigues (Walker et al.,1996;
Diagne et al., 1999);
- les manifestations ulcéro-cutanées nécessitant un traitement local et général (Cackovic et al., 1998).
L'amélioration de la durée de vie des patients drépanocytaires, un diagnostic tardif, l’absence de traitement entraînent
des lésions dégénératives à l'âge adulte. La seule prévention possible est un dépistage et un traitement précoce en fin
de croissance (Hernigou et al., 1989; Catonné, 2002). En cas d’ONTF, les indications opératoires seront définies en
fonction de l'état général et de l'âge du patient, du stade de l'atteinte, du handicap clinique et du milieu chirurgical
(Chung et al., 1969; Hernigou et al., 1989; Catonné, 2002). Le coût important, les risques infectieux des arthroplasties
et le jeune âge des patients, nécessitaient une mise au point d'un algorithme de dépistage systématique de la nécrose
des hanches et des autres articulations et un protocole de traitement orthopédique ou chirurgical conservateur (forage
de la tête fémorale ou ostéotomie fémorale; Mukisi-Mukaza et al., 2000, 2005, 2009a; Catonné, 2002).
Conclusion
Les manifestations systémiques de la drépanocytose apparaissent dès l’enfance. Dans sa forme grave, elle est
caractérisée par l’apparition de crises douloureuses à répétition, d’anémie grave et d’infections sévères. Ces
complications sont responsables d’hospitalisations fréquentes, sources d’un absentéisme scolaire important et de
difficultés majeures (problème psychologique) chez les drépanocytaires. La gestion de la crise douloureuse et des
manifestations cliniques est un volet important de la prise en charge. Cette gestion est actuellement codifiée dans les
pays où le diagnostic de la maladie se fait précocement, le malade est pris en charge par des réseaux de lutte contre la
drépanocytose impliquant spécialistes et associations. Leur efficacité réduit les durées d’hospitalisation, améliore le
confort d'une vie plus longue.
Les complications ostéo-articulaires sont fréquentes (30%) dans la drépanocytose, dominées par l’infection
(ostéomyélite et arthrite) surtout dans les pays africains. La prise en charge médicale, adéquate et précoce reste la
meilleure prévention de ces complications infectieuses (Balogun et al., 2010). L’espérance de vie améliorée de ces
patients fait apparaître des complications chroniques telles que l’ostéonécrose de la tête fémorale ou humérale. La
hanche étant une articulation portante, les microfractures des travées osseuses dues aux contraintes mécaniques sur ces
travées nécrosées fragiles sont responsables de fractures sous-chondrales, de l’affaissement de la coque céphalique et
de l’arthrose fréquente chez le patient drépanocytaire (Hernigou et al., 1989; Mukisi-Mukaza et al., 2000; Catonné,
2002).
L’Ostéonécrose de la Tête Fémorale (ONTF) se définit comme la mort du tissu hématopoïétique et graisseux associée
à la mort de tissu trabéculaire. Cette absence de réparation se traduit, sur le plan radio-clinique, par une ostéolyse
évolutive associée ou non à une symptomatologie douloureuse. Cette notion d’évolutivité des lésions reste la notion
capitale de la définition et de la prise en charge thérapeutique de l’ONTF drépanocytaire. Les modifications
radiologiques du squelette osseux observées seraient la traduction des réparations des lésions ischémiques infracliniques. Ces images d'ostéocondensation ou scléro-géodiques sont des stades de guérison cicatricielle de nécrose
médullaire et osseuse (Batisse et al., 1971; Kuntz et al., 1978; Mukisi-Mukaza 1992).
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