NATION
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N°2706
Du Mercredi 5 Décembre
La fédération rwandaise du sec-
teur privé est très bien structu-
rée et l'environnement du Doing
Business est favorable. Il est de-
venu facile de créer une entre-
prise, d'avoir accès au crédit. Ça
crée un boom et incite à la
création d'entreprises.
Le Rwanda est cité en
exemple pour la lutte
contre la corruption.
Quelles sont vos recettes?
Cela n'a pas été facile. Encore
une fois, c'est le résultat de la ri-
gueur et de la discipline. J'ai
coutume de dire que notre se-
cret, c'est la mise en place d'ins-
titutions solides et efficaces di-
rigées par des leaders solides et
efficaces. On a un environne-
ment réglementaire très strict. Il
y a certes le pouvoir judiciaire,
mais en amont, il y a la sensi-
bilisation de la population.
Consciente du fléau, la popula-
tion est la première à dénoncer
tout manquement. Et puis, nous
avons une loi qui punit le cor-
rupteur et le corrompu, celui qui
donne et celui qui reçoit. Ils
sont punis de façon exemplaire.
Est-ce juste de dire que
votre pays puise ses forces
dans la tragédie qu'il a
connue?
Oui, je le confirme. C'est une
tragédie qui a donné des leçons,
nous sommes sortis renforcés
par l'épreuve. Le Rwanda a failli
disparaître. Mais les Rwandais ne
veulent plus se souvenir du pays
qu'ils ont connu par le passé.
C'est pourquoi ils disent '' Ne-
ver again ! '' (Plus jamais ça
!). Ils ne veulent plus entendre
parler du génocide. Ils veulent
définitivement oublier tous ces
événements douloureux. On
combat tous les indices de divi-
sion.
Peut-on parler aujourd'hui
d'un peuple réconcilié?
On peut parler d'un peuple en
voie de réconciliation. C'est un
processus mais je dirai que c'est
une voie de réconciliation qui
avance très vite. Je ne dirai pas
que nous sommes réconciliés à
100% mais les études révèlent
que plus de 80% de la popula-
tion pense qu'elle est réconci-
liée. Nous avons une Commis-
sion Nationale Unité et Réconci-
liation pragmatique et qui a fait
un bon travail. Mais nous avons
aussi une Constitution qui accor-
de une place de choix aux prin-
cipes fondamentaux de l'unité et
de la réconciliation. On fait
beaucoup de choses pour obte-
nir la cohésion. La réconciliation,
c'est une voie qui marche. Le
problème qui reste à régler,
c'est à l'extérieur du Rwanda,
notamment avec la diaspora où
il y a toujours des clivages. Vous
avez relevé le cas de ces compa-
triotes qui manifestent devant
l'Ambassade. Il y a ce problème
parce que les messages de ré-
conciliation ne leur parviennent
pas. Nous allons y mettre un ac-
cent accru. On a compris qu'il
faut travailler collectivement
pour avancer. L'union fait la
force.
Paul Kagamé assure que
l'économie et la politique
vont de pair. Est-ce tou-
jours un binôme gagnant?
C'est correct. Les performances
économiques du Rwanda n'au-
raient pas été possibles sans
fondements politiques solides: la
démocratie, la bonne gouver-
nance, la décentralisation, des
institutions fortes, le dialogue,
etc. Tout cela concourt à instau-
rer la confiance. La population
a d'abord cru dans les institu-
tions. Après, quand il y a la
confiance, on s'épanouit. Donc,
l'économie ne peut pas marcher
si la politique est malade. On y
croit beaucoup. On a beaucoup
investi dans l'éducation civique.
Dans le Doing Business, le Rwan-
da est devenu champion grâce
à la bonne gouvernance.
Quelle place accordez-vous
aux échanges intra-afri-
cains?
Nous y croyons fermement.
C'est inscrit dans le programme
Vision 2020 dont nous avons
déjà parlé. Nous voulons deve-
nir un hub dans la sous-région.
Au sein de la communauté est-
africaine, le Rwanda est entou-
ré de cinq pays, avec 130 mil-
lions d'habitants, une union
douanière et un marché com-
mun. C'est beaucoup plus sti-
mulant pour le ratio écono-
mique et commercial. Le com-
merce intra-états transfronta-
lier serait beaucoup plus ren-
table qu'avec l'Occident. A
l'époque, les échanges com-
merciaux entre notre pays et la
République Démocratique du
Congo étaient fructueux. C'est
pourquoi la situation qui sévit à
l'est de la RDC nous affecte
beaucoup plus qu'on ne le pen-
se. C'est vraiment absurde de
croire que le Rwanda peut être
source de problèmes pour la
RDC alors que c'est nous qui
souffrons de cette insécurité. Le
Rwanda s'inscrit de façon acti-
ve dans une stratégie de l'inté-
gration régionale en adoptant
les meilleurs standards possibles,
en faisant la différence grâce au
développement des infrastruc-
tures. On voit déjà les retom-
bées.
Excellence, malgré les mul-
tiples démentis, les efforts
diplomatiques, les autorités
rwandaises n'arrivent tou-
jours pas à empêcher
l'ONU, la communauté in-
ternationale, les ONG, et
non des moindres, d'attes-
ter que votre pays est le
principal soutien de la ré-
bellion à l'est de la Répu-
blique Démocratique du
Congo.
C'est franchement dommage
que des organisations pensent
que le Rwanda est responsable
de cette situation qui dure de-
puis plus de vingt ans, même de-
puis la colonisation. Mais plus la
situation évolue, les perceptions
aussi changent maintenant. On
commence à réaliser qu'on
s'était trompé et que les mutins
du M23 sont des Congolais. Le
gouvernement congolais per-
siste à dire que c'est le Rwanda
qui les attaque. Depuis la chu-
te de Goma, on commence à
comprendre que c'est un problè-
me congolo-congolais. Ce sont
des Congolais qui étaient dans
l'armée congolaise et qui se
sont rebellés. On avait accusé le
Rwanda de les avoir armés.
Puisque les rebelles du M.23 ont
affaire à une armée très faible,
une armée indisciplinée qui leur
laisse tout leur arsenal, on
constate maintenant que ce
n'est pas le Rwanda qui soutient
la rébellion. Le problème est
très profond. Pour le régler, il
faut toucher aux causes pro-
fondes. Que gagne le Rwanda
en armant les rebelles? Le Rwan-
da est très touché par cette cri-
se. Notre économie en souffre.
Et pourtant, avant la naissance
de cette rébellion, on s'entendait
très bien avec Kinshasa, on tra-
vaillait très bien avec un gouver-
nement élu et légitime. C'est
toujours notre position. Les gens
qui ont rédigé ce rapport de
l'ONU l'ont fait avec mauvaise
foi pour nuire. Le fait que ce soit
un rapport de l'ONU, le fait
que ce soit des experts, ne signi-
fie pas que c'est un rapport
très fiable. On a beaucoup nié
en apportant toutes les évi-
dences. Il y en a qui ont été
convaincus, d'autres non. On es-
père qu'avec le temps, ils chan-
geront d'opinion. Si vous lisez
les résolutions publiées présen-
tement, on ne condamne plus le
Rwanda, on ne sanctionne plus
le Rwanda, on a changé de lan-
gage. Le problème congolais
est la conséquence de la mauvai-
se gouvernance. C'est un pays
vraiment mal géré. C'est pour-
tant un pays qui a des potentia-
lités énormes. C'est pourquoi je
dis qu'il ne suffit pas d'avoir un
grand pays, un pays très riche en
ressources. Quand on n'a pas de
leadership, quand on n'applique
pas la bonne gouvernance, ce
pays va succomber. Pour le cas
de la RDC, il ne faut pas cher-
cher des boucs émissaires.
Pour terminer, quelle est
l'ambition du président
Paul Kagamé pour le Rwan-
da et l'Afrique?
(Il soupire de plaisir). J'aurais
aimé qu'il fût là pour vous ré-
pondre lui-même. C'est une
question qui l'intéresse beau-
coup. Nous avons un président
vraiment panafricain, qui a une
vision pour l'Afrique, qui aime
parler au nom de l'Afrique. Il
rêve de voir son pays, le Rwan-
da, bien intégré dans un conti-
nent stable et fort, qui a de la
poigne, qui n'est pas margina-
lisé. Chaque fois, il s'inquiète de
voir l'Afrique bafouée, rabaissée.
Ça l'énerve. Parfois, il attaque
les chefs d'Etats africains qui ac-
ceptent ça. Le président Kagamé
rêve d'une Afrique décomplexée
et digne. Il dit toujours: '' Aux
problèmes africains, il faut
des solutions africaines ''.
ILS SE COMPTENT par centaines, les
partisans de l’ancien chef de l’Etat ivoi-
rien, Laurent Gbagbo, qui ont trouvé
refuge au Ghana avant ou après le 11
avril 2011. Leur retour au pays n’étant
pas encore à l’ordre du jour, ils vivront
dans ce pays, le déroulement de
l’élection présidentielle et législative du
7 décembre 2012. Des deux ténors qui
s’affrontent, qui supportent-ils? La
question se pose parce que de l’issue
de cette élection, se joue le destin de
certains sous le coup de mandat d’ar-
rêt des autorités ivoiriennes. L’affaire
Katinan toujours pendante devant
les juridictions ghanéennes en est
une illustration. Qui de Dramani et de
Addo constitue une garantie pour eux
? C’est une autre question qui pour-
rait se poser ? Mais pour eux (les pro-
Gbagbo rencontrés à Accra), la ques-
tion ne se pose pas en ces termes. L’en-
jeu se trouve ailleurs à entendre cer-
tains. ‘’C’est la résistance de la dé-
mocratie ghanéenne aux tenta-
tions des démons de la division’’,
analyse un ancien ministre du gouver-
nement Aké N’Gbo. De manière gé-
nérale, même s’il y a un penchant pour
le régime qui les a accueillis, les pro-
Gbagbo disent observer une stricte
neutralité. ‘’Ici nous ne faisons pas
de politique et nous ne parlons pas
de la politique ghanéenne. Le fai-
re, c’est s’ingérer dans une affaire
qui ne nous concerne pas’’, fait ob-
server le président de l’Efym et ex-
conseiller à la présidence, Ervé Siaba
qui se veut ouvert à toute discussion
en dehors de la politique. C’est à jus-
te titre qu’il est en lobbying permanent
pour l’ex-président de la République de
la Fif, Jacques Anouma. Neutralité mais
aussi discrétion. Ils évitent de parler des
sujets qui fâchent lors de leurs conver-
sations en public. ‘’C’est par le canal
de la presse que nous obtenons
aussi les informations sur ce qui se
passe dans tel ou tel camp’’, ajou-
te un autre interlocuteur. Cependant,
on redoute aussi des débordements à
l’issue du scrutin. Une situation qui
contraint un autre groupe d’exilés à
restreindre leur mouvement ces temps-
ci. C’est que à Accra comme à l’inté-
rieur du pays, une opinion est répan-
due, selon laquelle le candidat du NPP
(Akufo-Addo) joue son va-tout et ne
voudra rien céder à son adversaire Ma-
hama du NDC. Les pro-Gbagbo qui
comptent sur la stabilité du Ghana, leur
pays d’accueil, n’osent pas en faire un
commentaire particulier, comptant
sur la maturité des Ghanéens à réus-
sir ces élections à hauts risques. Tou-
tefois, il est prétentieux de se faire une
opinion générale sur leur comporte-
ment, mais ceux que l’on rencontre ne
veulent pas s’ériger en activistes.
LE DÉPUTÉ de Saïoua sera candidat
aux élections régionales dans le Haut-
Sassandra. Alphonse Djédjé Mady a
accédé à la demande formulée, le di-
manche 2 décembre 2012 par les
chefs de cantons, de tribus et de com-
munautés d’Issia et de Nahio. Pendant
deux heures (10h- 12h) à la résiden-
ce du Pr Alphonse Djédjé Mady à
Saïoua, plus de 200 chefs issus de 42
villages du département d’Issia et
ses environs ont formellement deman-
dé au secrétaire général du PDCI
d’être leur candidat pour le Conseil ré-
gional du Haut-Sassandra. Ces leaders
traditionnels ont aussi pris l’engage-
ment de mobiliser leurs collègues de
la région qui regroupe les départe-
ments de Daloa, Issia, Vavoua, Bédia-
la et Zoukougbeu, autour de la can-
didature de Djédjé Mady, le 24 février
2013. Cette demande qui est interve-
nue après celle formulée par les
cadres PDCI de la région, a réjoui Al-
phonse Djédjé Mady. Le député de
Saïoua les a donc engagés à jouer leur
partition pour que leur souhait soit une
réalité au soir du 24 février 2013. Lors
des élections législatives, la commu-
nauté Baoulé de Saïoua avait payé la
caution de 100.000 FCFA afin que
Djédjé Mady puisse se présenter. «
C’est avec beaucoup de plaisir que
j’accepte votre demande », a dit
Djédjé Mady aux chefs traditionnels et
aux chefs des communautés du dé-
partement d’Issia. Des collègues dé-
putés de Djédjé Mady ont été les té-
moins de cette cérémonie, entre
autres, Jean-Paul Soro Souagnon,
député de Gabiadji et Doba, com-
munes et sous-préfectures et San
Pedro sous-préfecture.
Ghana / Duel indécis entre John Mahama
et Akufo-Addo _____
S. Debailly, envoyé spécial à Accra
Voici l’attitude des pro-Gbagbo
Elections régionales / Candidature du secrétaire
général du PDCI dans le Haut-Sassandra
_Olivier Dion
200 chefs traditionnels sollicitent
Alphonse Djédjé Mady
Quel sera le sort des partisans de
Laurent Gbagbo à l’issue du scrutin
au Ghana ?
Alphonse Djédjé Mady a accepté la
demande des leaders traditionnels
d’Issia et de Nahio.
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