Une longue recherche
Rien de très révolutionnaire à première vue. Sauf que la mise au point d’un produit de
contraste compatible avec les vaisseaux sanguins d’un mort a nécessité une longue recherche.
La doctoresse Grabherr a poursuivi à Lausanne les travaux qu’elle avait commencé à Berne.
Par ailleurs, la construction d’une pompe adéquate, dont le prototype donne aujourd’hui
satisfaction, a elle aussi nécessité beaucoup d’ingéniosité.
«Nous restaurons les conditions de la vie en recréant la circulation sanguine», résume la
doctoresse. À quoi cela sert-il? «Cela permet de déceler les lésions non seulement au niveau
du système vasculaire, mais aussi dans les tissus. C’est très précieux dans les cas
d’hémorragie, où l’autopsie ne permet pas de voir exactement où se situe la source du
saignement, alors que c’est le plus important.» Et de prendre l’exemple d’une lésion due à un
coup de couteau.
Le professeur Patrice Mangin, patron du CURML: «Si la victime est vivante, le chirurgien qui
l’opère parviendra facilement à voir d’où vient l’hémorragie. Mais après un décès, quand la
pression dans les vaisseaux a disparu, notre système permet de retrouver le trajet de la lame.
Aux endroits de l’hémorragie, le produit de contraste sort du système circulatoire et donne
une tache blanche sur l’écran. En quelque sorte, nous refaisons saigner la personne décédée.
Cela peut être déterminant devant la justice.»
En trois dimensions
Le traitement informatique des données issues du CT scan permet des manipulations quasi
infinies. «Nous obtenons par exemple des reconstructions en 3D autorisant des observations
impossibles à faire en autopsie traditionnelle, explique la doctoreresse Grabherr. Le système a
une telle souplesse que nous pouvons pratiquement réaliser des dissections sur écran. De plus,
toutes ces données étant mémorisées, la possibilité reste toujours ouverte de procéder à de
nouvelles analyses de ces données.»
A la différence du simple examen au scanner, cette angiographie post mortem n’est pas
effectuée systématiquement. Elle est réservée aux cas où la mort résulte d’un problème
cardio-vasculaire.
Large reconnaissance
Le scanner du CURML est un modèle identique à ceux utilisés pour les vivants. Sauf que les
examens des défunts ne nécessitent pas les précautions usuelles pour ce qui est des rayons X
sur le sujet. Alexandre Dominguez: «Nous pouvons pousser très loin pour obtenir la meilleure
résolution possible. La seule limite, c’est la résistance du matériel.»
«Nous sommes les premiers au monde parvenus à une telle efficacité, ce qui nous vaut une
reconnaissance internationale», se réjouit le professeur Mangin.