La liberté est-elle une donnée ou une conquête ? Corrigé (plan détaillé) Introduction 1. La liberté est une donnée certaine qui s’atteste dans la conscience A. La conscience du libre arbitre On peut poser la liberté comme une donnée qui s’atteste dans la conscience que nous en avons. Nous avons en effet une connaissance immédiate d’un pouvoir inné : celui du libre arbitre. Le libre arbitre désigne la capacité de la volonté à se résoudre, en toute conscience, à une action plutôt qu’une autre. La liberté apparaît ainsi comme une donnée innée dont la connaissance est elle-même immédiatement donnée. On peut même avec Descartes, dans les Méditations métaphysiques, penser cette donnée comme don divin : l’infinité du pouvoir de la volonté est analogue à celle de la volonté divine. B. La liberté comme fait social et juridique Cette certitude psychologique de la liberté se vérifie, de fait, dans le fonctionnement des sociétés. En effet, le fait que les crimes et les délits soient jugés et éventuellement punis indique un jugement sur la responsabilité des accusés. Or la responsabilité présuppose la liberté d’agir. On ne peut en effet déclarer un homme véritablement responsable d’une action que s’il était libre de commettre ou de ne pas commettre cette action. Autrement dit, la prise en considération, de fait, de la responsabilité humaine est une donnée sociale immédiate qui implique la liberté comme une donnée préalable. 2. L’illusion toujours possible de la liberté : seule la libération, comme conquête de la liberté, est envisageable A. Déterminisme et illusion du libre arbitre Il s’agit ici de remettre en question la certitude psychologique de la liberté en mettant en évidence les déterminismes plus ou moins conscients qui agissent sur la volonté. C’est ainsi que, pour Spinoza (Éthique), les hommes se trompent en ce qu’ils se croient libres : la liberté du libre arbitre est une croyance qui provient de l’ignorance des causes par lesquelles nous sommes déterminés dans nos actes. Autrement dit, la conscience de la liberté peut apparaître comme une donnée illusoire : ce qui est donné, de façon non explicite, c’est l’ensemble des déterminismes qui pèsent sur l’existence humaine. B. La connaissance du déterminisme comme condition de possibilité de conquête de la liberté © Hatier 2002-2003 La remise en cause de cette certitude psychologique ne signifie par pour autant qu’il faille abandonner l’idée de liberté. Au contraire, on peut comprendre la mise en évidence du déterminisme subi par l’homme comme un travail préalable nécessaire à sa libération. Autrement dit, on peut comprendre la sociologie et les sciences humaines en général comme un effort critique afin d’assurer à l’homme une liberté qui soit autre chose qu’une illusion. C’est dire que la liberté apparaît ici comme la fin d’une conquête. Cette conquête réside dans le processus de libération, et implique une lutte de la raison pour reprendre le terrain conquis par les préjugés, l’ignorance et l’idéologie. 3. La liberté est à la fois donnée et ordonnée A. La liberté comme donnée déduite du fait de la raison Si l’on veut assurer la possibilité de cette conquête, il importe de prouver la possibilité même d’une liberté qui échappe au déterminisme. Autrement dit, la question est de savoir si l’on peut dépasser la simple preuve psychologique de la liberté pour véritablement fonder sa certitude. On peut répondre par l’affirmative à cette question en mettant en évidence, avec Kant (Critique de la raison pratique), la certitude de la liberté transcendantale. La conscience de la loi morale, comme fait de la raison même, implique en effet cette liberté transcendantale. En d’autres termes, la liberté est une donnée certaine de la nature humaine que l’on peut prouver indirectement à partir de la conscience morale : si la raison dit « tu dois », elle dit nécessairement en même temps « tu peux ». B. L’autonomie comme conquête Cette certitude de la liberté apparaît parallèlement comme une exigence : en effet, la liberté transcendantale est une donnée qui ne se donne qu’à travers l’impératif du devoir. C’est pourquoi la liberté est toujours une conquête : elle est « ordonnée » par la raison comme « autonomie », c’est-à-dire comme capacité à agir uniquement en fonction de l’impératif catégorique. Et si la possibilité de cette autonomie est certaine, dans les faits, sa réalisation est une conquête jamais assurée. La liberté comme autonomie est une conquête de l’homme sur lui-même, afin qu’il se montre à la hauteur de l’exigence qu’il porte en lui-même. Conclusion Ouvertures Lectures –Descartes, Méditations métaphysiques (méditation IV), Flammarion, coll. « GF ». –Spinoza, Éthique, Flammarion, coll. « GF ». –Kant, Critique de la raison pratique, PUF, coll. « Quadrige ». © Hatier 2002-2003