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Glanes I 2
Mais ces mons_tres | hélas! | ne t'épouvantent guères. |
La voyelle blanche se prononce en creux, légèrement en dessous de la ligne
mélodique, et la voyelle qui suit propulse l'autre syntagme.
Ne jamais dire : ces montres (z) hélas!
Mais l'on dira : ces monstres (z) affreux
● Et ne la crois-tu pas assez infortunée
Délicat problème des liaisons. Si l'on n'en prononce aucune, l'oreille perçoit
l'hiatus a-a. Mais, si l'on prononce deux - pas (z) assez (z) infortunée - l'esprit bute sur
la diction comme sur l'orthographe d'un mot, et l'attention se détourne du signifié.
Muet à mes soupirs…
S'il y a liaison, l’on entend Muette à mes soupirs. L'esprit du public s'égare sur
une fausse piste.
On me dit une mère.
Pas de liaison. Mère n'est pas l'objet du verbe dire.
En structure profonde : On me dit (que je suis) une mère.
Il y a donc ellipse. Donc césure. Théorie des traces de Chomsky
On me dit | une mère.
● Mon arc | mes javelots | mon char | tout m'importune.
Racine
Depuis que je vous vois | j'abandonne la chasse.
Pradon
Surdité de Victor Hugo. Il préfère le vers de Pradon à celui de Racine !
● L'arrangement des mots est aux pensées et aux paroles ce que l'arc et la corde
sont à la flèche. Aussi est-ce un sentiment constant parmi les doctes qu'elle est une
vertu merveilleuse, je ne dis pas seulement pour plaire, mais pour faire impression sur
les esprits. Premièrement, parce qu'il n'est guère possible qu'une chose aille au coeur,
quand elle commence par choquer l'oreille, qui en est comme le vestibule et l'entrée. En
second lieu, par ce que nous sommes naturellement touchés de l'harmonie. Autrement
les instruments de musique, qui n'ont pas la force d'exprimer les paroles, ne feraient pas
sur nous des effets si surprenant et si divers.
Quintilien, v.f. Gedoyn, De l'orateur, IX, IV.
● Je repense à ce prétendu spécialiste du baroque qui veut reconstituer
artificiellement une prononciation ancienne - démarche analogue à celle de Viollet-le-Duc
à qui nous devons de hideuses constructions néo-gothiques. Pourquoi ne met-il pas en
scène une pièce de Racine avec des tragédiens québécois? Ce serait là une tentative
humaine, vivante, émouvante et fraternelle, au lieu d'une archéologie contestable, d'une
restauration douteuse comme celle d'Arthur Evans à Cnossos.
● Le verbe dans l'espace redevient chair vibrante, palpitante. Car il s'agit bien de
représenter en lançant des syntagmes dans l'espace le corps vivant d'un personnage.
● Le temps fait partie intégrante de la vie. Il n'y a pas d'évolution sans temporalité.
La prononciation a changé, ainsi que l'orthographe, tandis que la parole au théâtre est
toujours immédiate, vivante, fugitive. Le présent y est toujours présent, le futur toujours