Nanotechnologies: l'industrie choisit la sécurité,
Namur fixera la norme
Recherche
Libre cours janvier 2006 3
ventuels phénomènes de toxicité pour pouvoir
les modifier afin de les rendre inoffensives.
… Et pourquoi pas
une norme européenne
Les tests in vitro mis au point par l’équipe de
NANOTOXICO permettront de tester les
nouvelles nanoparticules mises sur le marché.
Ils devraient aboutir à la définition d’une
norme européenne en accord avec la directive
européenne REACH1qui imposera la
connaissance du niveau de toxicité potentiel
des produits chimiques. La difficulté à caté-
goriser les nanoparticules laisse en effet pré-
sager la définition de nouvelles normes de
toxicité pour cette catégorie de substances.
L’équipe NANOTOXICO, en utilisant des
modèles in vitro,répond également à une
autre directive européenne «Cosmétique2»
qui interdit notamment l’utilisation d’ani-
maux pour définir la toxicité des substances
pouvant entrer en contact avec la peau.
Démystifier les nanotechnologies
Originalité du projet: une importance particu-
lière est accordée à la transparence des résul-
tats de la recherche. Atout sciences, l’Unité
de diffusion des sciences des FUNDP parte-
naire du projet, sera chargée de communiquer
au grand public et aux industriels des résul-
tats scientifiques clairs et fiables.
Namur, berceau des nanos,
expert en toxico
Ce n’est pas un hasard si l’Université de
Namur a été choisie par la Région wallonne
pour étudier la toxicité des nanoparticules.
L’histoire des nanotechnologies et plus parti-
culièrement des nanotubes de carbone lui est
fortement liée puisque leur procédé de fabri-
cation a été mis au point par le professeur
namurois János B.Nagy. Une technologie qui
a d’ailleurs donné naissance à la Spin-off
Nanocyl. L’expertise namuroise en études
toxicologiques n’est plus à démontrer non
plus: l’URBC a mis au point de nombreux
tests sur des cellules en culture. C’est
d’ailleurs de cette équipe qu’est née la spin-
off StratiCell, qui offre aux industries phar-
maceutiques et cosmétiques une série des
tests in vitro (Libre cours n°53).
Le projet interdisciplinaire rassemble de
biologistes, des chimistes, des physiciens, des
médecins et des pharmaciens. Cinq millions
d’euros seront investis sur cinq ans par la
Région wallonne. De son côté, l’Université
met également à la disposition de ce projet
l’équivalent de cinq millions en termes de
moyens humains et matériels. Il faut dire que
l’enjeu est de taille: la Région wallonne, de
même que de nombreux industriels wallons,
belges, européens, investissent depuis de
nombreuses années dans les nanotechnologies.
Antoinette Minet
Utilisées dans le domaine médical, les nano-
particules permettent de mieux cibler ce sur
quoi les médicaments doivent agir. Dans le
domaine de l’électronique, elles donnent des
ordinateurs beaucoup plus petits, plus rapides,
moins chers et consommant beaucoup moins
d'électricité. Dans le domaine de la construc-
tion, elles donnent des matériaux plus légers
aux propriétés mécaniques améliorées… Bref,
les nanoparticules promettent de grandes avan-
cées technologiques et pourraient se retrouver
rapidement dans tous les secteurs de la vie
quotidienne.
Sous la direction d'Olivier Toussaint (Unité de
Recherche en Biologie Cellulaire, URBC), une
trentaine de chercheurs regroupés au sein du
pôle d’excellence namurois NANOTOXICO,
mettront au point des modèles de toxicologie
adaptés à trois types de nanoparticules, présen-
tant un intérêt économique en Région wallonne.
Ces particules sont les nanotubes de carbone,
les nanopoudres et les argiles exfoliées.
Invisibles à l’œil nu, ces très petites (= nano)
particules pourraient être mises en contact
avec l’organisme via la peau et les muqueuses,
le système respiratoire, le tube digestif et le
système hépatique, à plus ou moins forte
concentration. Ces modèles serviront ensuite
aux tests de divers autres types de nanoparti-
cules.
Des tests…
L’équipe de recherche a cinq ans pour mettre
au point une série de modèles pour tester, sur
des cellules en culture (tissus artificiels), les
effets des nanoparticules sur l’organisme. Ces
modèles seront ensuite utilisés pour tester de
nombreux types de nanoparticules en déve-
loppement dans l’industrie. Ces modèles
seront comparés aux tests réalisés in vivo,sur
des animaux, pour vérifier leur pertinence.
Chimistes et physiciens sont également mis à
contribution pour caractériser les nanoparti-
cules, principalement en termes de dimen-
sions. Il est en effet indispensable d’identifier
correctement et de déterminer l’origine d’é-
Les nanomatériaux sont porteurs de nombreux espoirs, non seulement dans la lutte contre le cancer, mais aussi
dans de nombreuses applications de la vie quotidienne. Par principe de précaution face à ce bond technologique,
l’industrie a choisi de privilégier la sécurité en matière d’exposition des travailleurs et du public aux nanoparticu-
les. Dans ce cadre, la Direction générale des technologies, de la recherche et de l'énergie de la Région wallonne
confie à l’Université namuroise la mise au point de modèles toxicologiques adaptés aux caractéristiques de trois
types de nanoparticules produites en Région wallonne. Ce projet d'une durée de cinq ans devrait déboucher sur
la mise au point de modèles de tests de toxicité et sur la définition d’une nouvelle norme européenne en accord
avec les directives européennes «REACH
1
» et «Cosmétique
2
».
Objectif: Étude toxicologique de trois types
de nanoparticules: nanotubes de carbone,
nanopoudres, argiles exfoliées
Coordinateur: Olivier Toussaint
Laboratoires impliqués: Unité de Recherche
en Biologie Cellulaire, URBC (Olivier
Toussaint), Laboratoire d'Analyses par
Réactions Nucléaires, LARN (Stéphane Lucas),
Laboratoire de Chimie et d’Électrochimie des
Surfaces, LCES (Joseph Delhalle),
Département de pharmacie (Bernard
Masereel), Atout sciences (André Hardy,
Département de mathématique)
Financement: 10 millions d’euros
Durée du projet: 5 ans
Nanotoxico en bref
1 REACH est l'acronyme d'une directive «Registration, Evaluation
and Authorization of CHemicals» adoptée par le Conseil européen
et qui sera proposée au Parlement européen en 2006. REACH
stipule que les producteurs d'une substance chimique devront
transmettre à une agence centrale un dossier d'enregistrement
pour les substances chimiques produites à plus d'une tonne par an.
Le dossier devra contenir des données de sécurité sur le produit.
2 La directive européenne 2003/15/CE du Parlement européen vise
à assurer l'innocuité des produits cosmétiques et interdit également
l'expérimentation de ces produits sur les animaux.