
(2) Classiquement, le monde se découpe en Etats souverains qui se dotent chacun d’un
système juridique. Est encore répandue l’opinion que le droit est purement national, c’est-à-dire
produit par l’Etat et ajusté pour l’Etat. Le Professeur Basedow juge cette doctrine dépassée. Le
phénomène de perméabilité des ordres juridiques autorise à le penser. Dans un monde où les
divergences entre les lois sont conçues comme des obstacles, il se produit une indiscutable
concurrence entre les ordres juridiques, concurrence qui dicte sa part de normes. La dialectique
entre mobilité internationale et législation nationale évolue. C’est la raison pour laquelle la règle
de droit nationale voit son champ d’application territorial étendu aux questions internationales. Il
en résulte un chevauchement des champs d’application des différentes lois nationales. Par voie de
conséquence, il convient de souligner l’importance du droit international privé. En matière civile et
commerciale, des instruments conflictuels conséquents existent aujourd’hui, permettant
d’arbitrer entre les législations nationales. Le constat est plus mitigé s’agissant du droit public qui
semble encore gouverné par l’unilatéralisme. Les règles de conflit sont pourtant devenues
essentielles dans la mondialisation. Par ailleurs, l’émergence d’un droit non-étatique ne peut être
passée sous silence. Elle confirme qu’une conception purement nationale du droit est dépassée.
Les différences entre ordres juridiques s’étant avérées des entraves au commerce international,
une soft law a vu le jour et a reçu une approbation internationale, faisant même parfois l’objet
d’une consécration au sein de la hard law. Le Professeur Basedow met l’accent sur cette non-state
Law, cette lex mercatoria qui s’est accompagnée de la mise en place de l’arbitrage international,
procédure judiciaire privée, bien qu’organisée et surveillée par les Etats.
(3) Il se produit à plusieurs niveaux un mouvement d’institutionnalisation de la
mondialisation. L’éminent conférencier revient d’abord sur l’action des institutions
gouvernementales. Depuis la fin du XIXe siècle, les activités privées ont ainsi été réglementées par
des conventions bilatérales ou multilatérales conclues par les gouvernements, à buts
d’harmonisation ou d’uniformisation. L’instrument du traité est alors privilégié. On en trouve de
nos jours dans tous les domaines : droits de l’Homme, avec la Convention EDH, droit commercial,
avec la CVIM, droit pénal, avec les accords d’extradition, ou encore droit routier, avec la CMR. Il
s’ensuit une véritable internationalisation des sources du droit, largement méconnue des
citoyens. Des inconvénients contemporains à l’utilisation de conventions sont également relevés
par le juriste allemand. Dans le monde multipolaire qui est le nôtre, de véritables négociations et
échanges d’idées permettant d’aboutir à des traités effectivement ratifiés sont plus difficiles à
obtenir que dans l’ancien monde polarisé par les grandes puissances coloniales. Cependant, il
n’est pas dit que ces faiblesses ne soient pas contrebalancées par l’action des institutions
internationales.
(4) Les institutions internationales sont aujourd’hui multiples : Nations-Unies, au sein
desquelles il faut décliner l’OMS ou l’UNESCO par exemple, la CNUDCI, l’institut UNIDROIT ou
encore la Conférence de droit international privé de La Haye. La création de l’OMC en 1994 est
figurative de l’institutionnalisation de la mondialisation. Les Etats adhérents à ces organisations
sont en attente constante de résultats concrets. Les projets d’harmonisation ont ainsi, dans ce
cadre, de sérieuses chances d’aboutir. Il se trouve d’ailleurs, selon le Professeur Basedow, que la
loi de la majorité prime dans ces organisations internationales. Un droit de réserve, de
rétractation ou de révocation unilatérale appartenant aux Etats existe en théorie, mais
l’expérience démontre que cette faculté n’est jamais, ou presque, mise en œuvre, ce qui rend ces
institutions internationales particulièrement propices à l’édification d’un droit uniforme. Allant de
pair avec la multiplication des organisations internationales, des tribunaux internationaux voient le
jour. On pense spontanément à la Cour européenne des droits de l’Homme, tribunal régional, ou
encore à la Cour Pénale Internationale basée à La Haye, au rayonnement mondial.