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En triant les lettres, coupures de presse et
autres documents du fonds, antérieurs au TNP,
certains aspects de la personnalité et de
l’œuvre de Jean Vilar prennent un relief inat-
tendu en ce début de carrière, sans doute
moins bien exploré.
A côté des activités de la Compagnie des Sept
et des spectacles qui ont fait date comme
Orage, Don Juan et Meurtre dans la cathédrale,
en marge des premiers festivals d’Avignon et
des rôles au cinéma, d’autres préoccupations
liées au répertoire, aux auteurs, à l’enseigne-
ment et à la recherche d’un lieu de travail sont
déjà d’actualité et irriguent une œuvre nais-
sante.
Par exemple, on connaît sa lettre de candida-
ture spontanée à la direction du théâtre de
l’Odéon adressée à Jeanne Laurent en avril
1950. Mais sait-on que dès 1943, il sollicite le
Studio des Champs-Elysées pour y créer un
spectacle et que les « Autorités d’Occupation »
semblent lui préférer un autre candidat ?
Fin 1945, des discussions s’engagent avec le
Théâtre Edouard VII en vue de créer un centre
théâtral pas seulement destiné à la représenta-
tion de spectacles. Un projet suffisamment
avancé pour que la presse s’en fasse l’écho et
annonce même le premier spectacle : La Petite
ville de Thornton Wilder... En plus exotique et
suite à une demande d’information, le cahier
des charges du concours lancé pour la direction
de deux saisons 1949/50 et 1950/51 du théâtre
municipal de Casablanca. Cette même année
1949 voit l’ébauche d’un projet de saison théâ-
trale à Addis Abeba mais il faut y renoncer, le
mariage de la petite fille de l’Empereur a vidé
les caisses de la municipalité !
L’enseignement, par ailleurs, apparaît comme
un souci récurrent de Vilar. Dès le lancement de
la Compagnie des Sept, des cours de théâtre
sont prévus, ils se poursuivront dans des condi-
tions souvent difficiles et aléatoires comme en
témoignent les lettres des élèves, les annonces
dans la presse et les courriers des différents
lieux sollicités pour les abriter. Des notes
manuscrites postérieures à 1945 évoquent un
programme complet d’enseignement, entre
cours d’interprétation, pratique sportive et cul-
ture générale où il est question des rapports
avec les «intelligences » de ce temps : Paulhan,
Sartre, Camus, Malraux, Gide etc… Ces notes
ont probablement été rédigées au moment de la
création de l’EPJD (Education par le jeu drama-
tique) par J M Conty en 1946. Celui-ci a en effet
sollicité les personnalités théâtrales de
l’époque (Vilar, Barrault et d’autres) à participer
à la création de cette association.
C’est cependant la relation aux auteurs et la
recherche de textes qui laissent les traces les
plus significatives dans les archives de cette
période. Si Vilar ne fait que jouer dans une
pièce de Sartre Le Diable et le Bon Dieu, on
Le fonds Jean Vilar : chronique de l’inventaire...